18/11/2022
ARRÊT N°2022/486
N° RG 20/00881 – N° Portalis DBVI-V-B7E-NQI2
MD/PG
Décision déférée du 10 Février 2020 –
Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULOUSE ( 18/01186)
Jean-Pierre FLAMMAN
Section Encadrement
[B] [I]
C/
Mutualité MUTUALITE FRANCAISE HAUTE GARONNE
INFIRMATION
GrosseS délivréeS
le 18/11/2022
à
Me Véronique L’HOTE
Me Stéphane LEPLAIDEUR
CCC
le 18/11/2022
à
Me Véronique L’HOTE
Me Stéphane LEPLAIDEUR
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
4eme Chambre Section 1
***
ARRÊT DU DIX HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX
***
APPELANTE
Madame [B] [I]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Véronique L’HOTE de la SCP CABINET SABATTE ET ASSOCIEES, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIMEE
MUTUALITE FRANCAISE HAUTE GARONNE
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Stéphane LEPLAIDEUR de la SELARL CAPSTAN SUD OUEST, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 Septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. DARIES, Conseillère, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
S. BLUMÉ, présidente
M. DARIES, conseillère
N. BERGOUNIOU, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
Greffier, lors des débats : C. DELVER
lors du prononcé : A.RAVEANE
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
– signé par S. BLUME, présidente, et par A.RAVEANE, greffière de chambre
FAITS ET PROCÉDURE:
Mme [B] [I] a été embauchée le 14 novembre 1984 par l’union départementale des sociétés mutualistes de la Haute Garonne, devenue la mutualité française de Haute Garonne, en qualité de chirurgien-dentiste suivant contrat de travail à durée indéterminée régi par la convention collective nationale des cabinets dentaires.
Mme [I] a été convoquée, par lettre recommandée avec avis de réception en date du 15 septembre 2017, à un entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire fixé au 06 octobre.
Le 17 octobre 2017, Mme [I] s’est vue notifier une mise à pied disciplinaire de 2 jours, qu’elle a contestée et dont elle a demandé l’annulation par courrier du 27 octobre 2017.
Mme [I] a saisi le conseil de prud’hommes de Toulouse le 23 juillet 2018 pour contester sa mise à pied disciplinaire et demander le versement de diverses sommes.
Le conseil de prud’hommes de Toulouse, section encadrement, par jugement du 10 février 2020, a :
-débouté Madame [I] [B] de l’intégralité de ses demandes,
-condamné Madame [I] [B] aux entiers dépens.
– débouté les parties de leur demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration du 11 mars 2020, Mme [I] a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 12 février 2020, dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas contestées.
PRÉTENTIONS DES PARTIES:
Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 02 août 2022, Mme [B] [I] demande à la cour de :
-infirmer le jugement en ce qu’il a débouté Mme [I] de sa demande tendant à obtenir l’annulation de la mise à pied disciplinaire notifiée à son encontre et des rappels de salaire outre des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,
-statuant à nouveau,
-annuler la mise à pied disciplinaire du 17 octobre 2017,
-en conséquence, condamner la mutualité française de la Haute-Garonne à verser à Mme [I]:
*rappels de salaire : 1 654,55 euros,
*dommages et intérêts au titre du préjudice subi : 20 000 euros,
*article 700 du code de procédure civile : 3 000 euros,
-débouter la mutualité française de la Haute Garonne de l’intégralité de ses demandes et la condamner aux entiers dépens.
Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 7 septembre 2020, la mutualité française de Haute Garonne demande à la cour de :
-confirmer le jugement de première instance en toutes ses dispositions,
-déclarer irrecevables ou infondées les demandes de Mme [I],
-débouter Mme [I] de l’ensemble de ses demandes,
-condamner Mme [I] au paiement de la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens.
La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance en date du 2 septembre 2022
Il est fait renvoi aux écritures pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
MOTIVATION:
Sur la mise à pied disciplinaire:
L’article L1333-1 du code du travail dispose qu’en cas de litige relatif à une sanction disciplinaire, le conseil de prud’hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L’employeur fournit les éléments qu’il a retenus pour prendre la sanction.
Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié, le conseil forme sa propre conviction, après avoir ordonné, si besoin est, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
Le juge peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.
La mise à pied disciplinaire constitue une sanction qui a pour objet d’interdire au salarié de venir travailler pendant une durée déterminée avec pour conséquence une perte de salaire.
La lettre de mise à pied disciplinaire est ainsi rédigée:
‘ En date du 27 août 2017, vous nous avez adressé un premier courrier décrivant votre ancienne assistante dentaire, Madame [W], comme « droguée, perverse et manipulatrice » ainsi « qu’impropre à la fonction ». Je vous ai alors rappelée à l’ordre par courriel du 29 août 2017, quant aux expressions orales, a fortiori écrites, que vous utilisiez à l’égard des personnes avec lesquelles vous êtes amenée à travailler. Mais par courrier du 6 septembre 2017, vous réitérez en portant de graves accusations à son encontre, en l’accablant notamment de « faux, usages de faux, usurpation d’identité, exercice illégal de l’art dentaire ».
Lors de l’entretien du 6 octobre 2017, nous vous avons indiqué qu’en tant que chirurgien-dentiste, supérieur hiérarchique de vos assistantes dentaires, vous vous deviez d’adopter à leur égard un comportement professionnel, que vous deviez les respecter et vous adresser à elles de manière cordiale, et bien évidemment, le cas échéant, nous signaler leurs manquements éventuels sur le plan professionnel. D’ailleurs, si vous l’aviez fait en bonne et due forme concernant Madame [Y], nous aurions rapidement mis fin à sa période d’essai.
Au lieu de cela, vous ne nous avez apporté que des impressions relatives à son état de santé : le 20 juin 2017, vous nous indiquiez que « cette personne, malgré une motivation importante et suite à de nombreuses absences et incohérences, me paraît présenter une instabilité certaine et par conséquent, elle ne me paraît pas fiable pour occuper le poste ».
Le 21 juillet 2017, vous nous écriviez : « je m’inquiète d’une pathologie neurologique qui rend difficile sa vigilance au travail » alors que nous avions pris le soin, en date du 18 juillet 2017, de faire revoir, Madame [W] par le médecin du travail qui n’avait rien décelé, concernant son état de santé, d’incompatible avec l’exercice de sa fonction d’assistante dentaire.
Comme vous nous l’avons rappelé, maintes fois, lors de l’entretien: quant bien même pouviez-vous avoir raison sur le fond, quant à la nécessité de mettre un terme à la période d’essai de Mme [W], vous ne nous avez pas apporté les arguments objectifs et factuels concernant l’exécution de son travail qui nous auraient permis de prendre une telle décision plus tôt que ce que nous l’avons fait. Vous avez tout au contraire porté à l’encontre de votre assistante des jugements de valeur et des accusations péremptoires sous une forme faisant peu de cas du respect qui est dû à toute personne humaine.
En outre, vos expériences précédentes avec vos assistantes dentaires ne nous ont pas aidés à rejoindre votre avis sur le cas de Madame [W], puisque vous aviez évincé précédemment Madame [M] à laquelle vous reprochiez sa lenteur dans la prise en charge des dossiers informatisés, mais également son attitude et ses réflexions’, et enfin, Madame [S] qui, le 3 octobre 2016, durant son arrêt maladie, nous a écrit qu’après 12 ans de travail auprès de vous à subir « une série de méchancetés verbales », elle se sentait « épuisée physiquement et psychologiquement » et qu’il lui était « impossible de revenir travailler avec le Docteur [I] ».
Concernant votre Directrice, Madame [P], nous vous avons reproché le fait d’avoir à plusieurs reprises contesté la façon dont elle gérait les dossiers de vos assistantes dentaires respectives. Or, les décisions qu’elle a prises l’ont été en accord avec moi-même [le Directeur général de la Mutualité], dans le respect du droit du travail et des valeurs mutualistes et au regard des informations que nous aviez communiquées.
De plus, vous n’avez pas daigné vous présenter à l’entretien du 8 septembre 2017, qui vous avait été fixé par votre directrice par courrier du 26 juillet 2017, que vous n’auriez reçu, selon vos dires, que le 24 août 2017.
Et, malgré mon courriel du 29 août 2017, vous rappelant l’importance de cet entretien, vous vous êtes contentée, le 5 septembre 2017, de faire passer, par courrier interne reçu le 8 septembre 2017, un mot indiquant à votre directrice que vous ne pourriez pas vous présenter à cet entretien puisque vous aviez un rendez-vous positionné depuis 2 mois avec un patient venant de loin.
Lors de l’entretien, vous nous avez exposé la situation particulière de ce patient qui à vos yeux justifiait de ne pas vous présenter à l’entretien.
Pour autant, vous n’avez pas pris la peine de téléphoner à votre directrice pour l’informer de votre absence et l’avez mise devant le fait accompli.
De surcroît, au mépris de votre obligation élémentaire de respect et de subordination, et ce malgré mon injonction par courriel du 8 septembre 2017, vous n’avez pas contacté votre directrice pour fixer un nouvel entretien suite à votre non-présentation fautive à celui du 8 septembre 2017. Nous ne pouvons que condamner une telle attitude.
Enfin, vous continuez à ne pas respecter les procédures administratives en vigueur dans l’entreprise, alors que vous les connaissez et qu’elles vous ont été rappelées à plusieurs reprises.
Le 19 septembre 2017 après-midi, par exemple, vous êtes partie en congés payés jusqu’au 22 septembre, sans validation préalable de vos dates de congés par votre directrice.
De la même manière, alors que vous vous devez de saisir vos dates de congés payés sur le logiciel de gestion de temps, Horoquartz, vous n’avez procédé à aucune saisie.
Pour finir, de votre propre initiative, sans information ou accord préalable de votre hiérarchie, vous êtes venue travailler un vendredi après-midi en dehors de vos horaires habituels.
Vous avez ainsi travaillé le vendredi 8 septembre 2017 après-midi alors que vous n’aviez été autorisée à travailler que le vendredi précédent, en vous précisant le caractère exceptionnel de cette autorisation en dehors de vos horaires contractuels .
Aussi dans le contexte évoqué ci-dessus et constatant que vous n’avez nullement tenu compte de nos différents rappels à l’ordre, notamment dans la nécessité d’améliorer vos relations professionnelles avec votre supérieur hiérarchique, nous vous infligeons une sanction de mise à pied disciplinaire de 2 jours soit du 16 au 17 novembre 2017 pour les motifs suivants:
. Vous n’avez pas répondu à ma demande de prendre contact avec votre directrice afin de convenir d’un nouvel entretien, suite à votre non présentation à l’entretien du 8 septembre 2017 auquel vous aviez été précédemment invitée par votre directrice,
. Vous êtes partie en congés payés le 19 septembre 2017 après-midi sans autorisation préalable de votre directrice,
. Vous êtes venue travailler le vendredi 8 septembre 2017 après-midi sans autorisation de votre hiérarchie, en dehors de vos horaires contractuels.
Nous espérons vivement ne plus avoir à vous reprocher vos relations dégradées avec votre hiérarchie ainsi que votre non respect des procédures administratives.
Dans le cas contraire ou pour tout autre comportement non conforme à vos obligations contractuelles, nous pourrions être amenés à remettre en cause votre maintien dans l’entreprise’.
La lettre de mise à pied fait référence en premier lieu à un comportement antérieur inadapté et répété reproché à Mme [I] dans l’appréciation du travail et de la personnalité des assistantes dentaires en période d’essai dont elle a sollicité qu’il soit fin à celle-ci.
Sur l’assistanat, Mme [I] réplique que la relation de travail s’est bien déroulée pendant plus de 30 ans, que début 2017, elle a rencontré des difficultés avec une nouvelle assistante dentaire recrutée par l’employeur, Mme [M] dont le contrat, suite à son alerte, a été rompu par la Mutualité, comme ensuite celui de Mme [W], avant de la convoquer à un entretien le 08 septembre 2017. Elle précise qu’elle a déposé plainte contre Mme [W] pour avoir établi de fausses ordonnances à son nom.
En tout état de cause, aucune sanction n’a été prise à l’encontre de Mme [I] concernant son comportement concernant les assistantes dentaires.
La Mutualité dans un courrier du 15 février 2018 répond au Conseil de l’appelante que l’attitude de Mme [I] ne motive pas la sanction disciplinaire. Cela est confirmé par une note en délibéré sollicitée reçue le 27 octobre 2022, par laquelle le Conseil de la Mutualité rappelle les trois griefs motivant la sanction disciplinaire et indique que le comportement irrespectueux de Mme [I] à l’égard de ses assistantes ne motive pas la sanction disciplinaire mais explique le contexte dans lequel la décision a été prise, notamment les raisons de la demande d’entretien du 08 septembre 2017 et de l’importance d’en fixer un nouveau.
Si le comportement de Mme [I] à l’égard des assistantes peut expliquer le motif de la convocation à entretien du 08 septembre 2017, il ne peut être pris en considération comme ayant un caractère déterminant dans l’appréciation de la mise à pied fondée sur trois griefs précis:
– ne pas avoir répondu à la demande du Directeur de prendre contact avec Madame [P] pour convenir d’un nouvel entretien, suite à l’entretien du 8 septembre 2017, auquel [B] [I] n’a pu assister,
– d’être partie en congés payés du 19 septembre 2017 après-midi jusqu’au 22 septembre 2017 sans autorisation préalable,
– d’être venue travailler, le vendredi 8 septembre 2017 après-midi, sans autorisation, en dehors de ses horaires contractuels.
– Sur l’entretien du 8 septembre 2017 :
Mme [I] fait valoir que l’entretien prévu au 8 septembre 2017 n’était pas un entretien préalable à sanction disciplinaire mais informel tel qu’il ressort du courrier de Mme [P], directrice, daté du 26 juillet 2017:
« Je vous propose de nous rencontrer à la rentrée pour faire un point sur l’assistanat suite au départ de Mme [Z]. D’autre part un problème de caisse subsiste depuis plusieurs mois. Je souhaite que nous abordions également ce sujet. En conséquence je vous donne rendez-vous dans mon bureau à Basso cambo le 08 septembre 2017 à 09 heures. J’espère que vous avez passé de bonnes vacances et vous souhaite une bonne reprise ».
Mme [I] réplique qu’elle a par lettre du 5 septembre 2017 adressée à Mme [P] dès la rentrée de congé de celle-ci, qu’elle ne pourra assister à cet entretien au vu de son planning et notamment d’un rendez-vous fixé depuis deux mois avec un patient venant de loin. Elle propose que l’entretien soit prévu un jour où elle ne travaille pas car elle a beaucoup de rendez-vous.
Par courrier du 12 septembre 2017, elle rappelle souhaiter un rendez-vous hors des heures de consultation et par courriel du 14 septembre 2017, adressé à M. [J], directeur général, elle fait part de trois tentatives d’appel téléphonique et avoir laissé un message sur le téléphone portable à Mme [P] pour convenir d’un rendez-vous mais sans succès.
Mme [I] précise qu’elle n’est présente que trois jours par semaine, à savoir le mardi, jeudi et vendredi matin et qu’entre le vendredi 8 septembre, date fixée pour l’entretien initial de travail et le vendredi 15 septembre, date à laquelle elle a reçu la lettre de convocation à un entretien préalable, elle n’était présente au cabinet que le mardi 12 septembre et le jeudi 14 septembre, au cours desquels elle a relancé la Direction pour la tenue du rendez-vous sollicité. Elle soutient qu’elle est restée à disposition de l’employeur pour tout entretien.
La Mutualité objecte que le courrier du 05 septembre a été reçu le 08 septembre et que Mme [I] ne démontre pas:
. son indisponibilité à cette date, ce d’autant qu’elle n’a pas répondu au courriel du 24 août de Mme [P] lui rappelant le rendez-vous et lui demandant « de vous organiser en conséquence pour être présente ce jour-là »,
. que le courrier du 12 septembre a été adressé à Mme [P] ou qu’elle a téléphoné le 14 septembre à celle-ci.
Elle verse le courrier du 08 septembre 2017 du directeur général, lequel considére que sa non présentation constitue un acte d’insubordination administrative, que le rendez-vous pris il y a plus de deux mois atteste du caractère non urgent de celui-ci et que l’intéressée disposait d’un temps suffisant pour le déplacer et qu’en cas d’impossibilité absolue de se rendre à l’entretien, elle aurait dû l’en informer par téléphone.
Sur ce:
Mme [I] produit une copie de la feuille de son agenda du vendredi 08 septembre portant plusieurs rendez-vous en matinée ( dont le nom est rayé) dont un à 09 heures, heure de l’entretien prévu avec en marge ‘ urgence cf stomate).
S’il peut être reproché à l’appelante de ne pas avoir répondu à la directrice dès le 24 août qu’elle était indisponible pour cause d’un rendez-vous pris il y a deux mois, il ne peut lui être fait grief de ne pas avoir annulé le rendez-vous nécessaire du patient, lequel n’a pas à être impacté par des considérations administratives, alors qu’aucune urgence n’était démontrée dans la convocation (des entretiens et divers échanges avaient d’ailleurs eu lieu précédemment sur l’assistanat) et que l’employeur connaît les plages d’activité et donc d’inactivité et de disponibilité de Mme [I].
Il sera néanmoins retenu que Mme [I] a manqué de diligences pour faire part de son indisponibilité au regard du courrier adressé le 12 septembre et des tentatives d’appel téléphonique du 14 septembre.
– Sur les congés payés du 19 au 22 septembre 2017 :
Mme [I] souligne que ce motif a été ajouté postérieurement à la convocation préalable à l’entretien préalable fixé au 15 septembre 2017 et ne conteste pas que, dans un contexte de travail difficile où il fallait former une nouvelle assistante, elle a omis de saisir ses congés sur le logiciel Horo Quartz mis en place par l’employeur, suffisamment à l’avance pour un traitement de validation par la hiérarchie.
Elle explique qu’avant de partir en congé et ayant eu des difficultés techniques dans l’utilisation du logiciel, elle a sollicité Mme [K], directrice des ressources humaines, pour qu’elle réalise la saisie de ses congés. Mme [P] était informée tel qu’il ressort de son courriel du 19 septembre et pouvait valider les congés en utilisant le logiciel, aucun rendez-vous n’ayant été fixé sur la période, ou les refuser. Mais pendant le déroulement de ses congés, elle a demandé à Mme [K] de les retirer du système informatique sans explication pour la mettre en défaut administratif.
La Mutualité répond que le 19 septembre au matin, le Docteur [I] a appelé Mme [K] pour qu’elle saisisse ses congés débutant le soir-même, ce qu’elle faisait pensant que la supérieure avait donné son accord . Elle l’a dit à Mme [P] qui lui a précisé ne pas les avoir validés. Mme [K] les a alors supprimé du logiciel en attente de validation, tel qu’il ressort des échanges de courriels entre l’appelante et Mme [K] des 27 et 30 octobre 2017.
L’employeur conclut qu’en posant des jours de congés le jour même de son départ, l’intéressée n’entendait pas obtenir d’accord préalable de sa direction.
Sur ce:
Il est constant que Mme [I] a tardivement sollicité de partir en congés et est partie sans autorisation effective.
Par courriel du 19 septembre 2017, Mme [P] lui a écrit ‘ être informée ce jour que vous partez en congés cette après-midi jusqu’à la fin de la semaine. Sauf erreur de ma part je ne pense pas avoir validé votre absence. Je vous remercie de me faire une copie du document stipulant ‘l’accord de la direction’ vous autorisant à quitter votre poste’ .
Les termes de ce courriel sont ambigus, sans refus exprès des congés et il n’est pas démontré que Mme [I] ait agi avec malice. Par ailleurs, il n’est pas fait état de difficultés précédentes concernant les congés.
Aussi le grief ne sera pas retenu.
– Sur le travail le vendredi 8 septembre 2017 après-mid:
Mme [I] le dénie et se réfère à la copie de son carnet de rendez-vous de ce jour.
La Mutualité se fonde sur une plainte de l’assistante d’avoir dépassé son horaire habituel et travaillé l’après-midi, sans que le docteur [I] ait été autorisée à travailler au-delà de 14 heures.
L’intimée n’apporte aucun élément (témoignage, bulletin de salaire de l’assistante) pour corroborer le grief alors que la preuve lui incombe.
Au vu des développements précédents et du seul défaut de diligence de Mme [I] concernant l’entretien initialement fixé au 08 septembre 2017, la cour considère que la mise à pied disciplinaire prononcée par l’employeur est disproportionnée. Elle est annulée.
Sur les demandes financières:
Mme [I] réclame un rappel de salaire de 1654,55 euros ( selon calcul en pièce 34) et 20000,00 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice subi, pour s’être vue reprocher des faits portant atteinte à son professionnalisme et à son éthique et infliger une mise à pied disciplinaire injustifiée.
La Mutualité conclut au débouté. Elle objecte que le Docteur [I] n’est pas rémunérée à l’heure mais au chiffre d’affaires qu’il lui appartient de chiffrer et qu’elle estime avoir perdu au titre de sa mise à pied. Le préjudice allégué n’est pas justifié.
Sur ce:
L’employeur n’apportant pas d’élément suffisamment circonstancié pour contrecarrer le calcul de l’appelante, il lui sera octroyé le montant sollicité.
S’agissant du préjudice moral subi du fait de la sanction disproportionnée, il lui sera alloué 1500,00 euros de dommages et intérêts.
Sur les demandes annexes:
La Mutualité française Haute-Garonne, partie perdante, sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel.
La condamnation de Mme [I] par le conseil de prud’hommes aux dépens est infirmée.
Mme [I] est en droit de réclamer l’indemnisation des frais non compris dans les dépens exposés à l’occasion de la procédure. La Mutualité sera condamnée à lui verser une somme de 2000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Elle sera déboutée de sa demande à ce titre.
PAR CES MOTIFS:
La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Statuant sur les chefs infirmés et y ajoutant:
Annule la mise à pied disciplinaire prononcée le 17 octobre 2017,
Condamne Mutualité française Haute-Garonne à payer à Madame [B] [I] :
1654,55 euros de rappel de salaire,
1500,00 euros de dommages et intérêts,
Condamne la Mutualité française Haute-Garonne à verser à Madame [I] une somme de 2000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Déboute la Mutualité française Haute-Garonne de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Condamne la Mutualité française Haute-Garonne aux dépens de première instance et d’appel
Le présent arrêt a été signé par S.BLUMÉ, présidente et par A.RAVEANE, greffière.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE
A.RAVEANE S.BLUMÉ
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