17 mai 2022 Cour d’appel de Montpellier RG n° 19/06970

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17 mai 2022 Cour d’appel de Montpellier RG n° 19/06970

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

Chambre commerciale

ARRET DU 17 MAI 2022

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 19/06970 – N° Portalis DBVK-V-B7D-OL4A

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 04 SEPTEMBRE 2019

TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER

N° RG 2017005206

APPELANTE :

Madame [N] [K] veuve [H]

née le [Date naissance 3] 1959 à [Localité 16]

de nationalité Française

[Adresse 12]

[Localité 9]

Représentée par Me Emily APOLLIS, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Gilles ARGELLIES de la SCP GILLES ARGELLIES, EMILY APOLLIS – AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

Représntée par Me Jean-Paul CLERC, avocat au barreau de TOULOUSE, avocat plaidant

INTIMES :

Maître [R] [T] agissant ès qualité de mandataire de l’indivision [K]-[H] désigné à cette fonction par ordonnance du 14 janvier 2016.

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 8]

Représenté par Me Vanessa MENDEZ, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Delphine SOUBRA ADDE de la SCP GRAPPIN – ADDE – SOUBRA, avocat au barreau de MONTPELLIER

Monsieur [S] [H]

né le [Date naissance 5] 1967 à [Localité 18]

de nationalité Française

[Adresse 7]

[Localité 14]

Représenté par Me Geoffrey DEL CUERPO, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Gilles BERTRAND de la SCP ROZE, SALLELES, PUECH, GERIGNY, DELL’OVA, BERTRAND, AUSSEDAT, SMALLWOOD, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

Représenté par Me Guillaume BOYER, avocat au barreau de TOULOUSE, avocat plaidant

Monsieur [L] [H]

né le [Date naissance 2] 1970 à [Localité 17]

de nationalité Française

[Adresse 13]

[Localité 10]

Représenté par Me Geoffrey DEL CUERPO, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Gilles BERTRAND de la SCP ROZE, SALLELES, PUECH, GERIGNY, DELL’OVA, BERTRAND, AUSSEDAT, SMALLWOOD, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

Représenté par Me Guillaume BOYER, avocat au barreau de TOULOUSE, avocat plaidant

SARL PRESTIGE NETTOYAGE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es-qualité au dit siège social

[Adresse 13]

[Localité 10]

Représenté par Me Geoffrey DEL CUERPO, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Gilles BERTRAND de la SCP ROZE, SALLELES, PUECH, GERIGNY, DELL’OVA, BERTRAND, AUSSEDAT, SMALLWOOD, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

Représenté par Me Guillaume BOYER, avocat au barreau de TOULOUSE, avocat plaidant

Ordonnance de clôture du 15 Février 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 08 MARS 2022, en audience publique, Madame Anne-Claire BOURDON, Conseiller ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre

Mme Anne-Claire BOURDON, Conseiller

Mme Marianne ROCHETTE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Audrey VALERO

ARRET :

– Contradictoire

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre, et par Madame Audrey VALERO, Greffière.

*

**

FAITS et PROCÉDURE – MOYENS et PRÉTENTIONS DES PARTIES:

[Y] [H] a eu deux enfants, [S] et [L], de son mariage avec [P] [Z] (décédée le [Date décès 11] 2003).

La SARL Prestige nettoyage, ayant son siège social à [Localité 15] (depuis le 3 décembre 2009), a été immatriculée le 21 octobre 2008 ; il en est l’associé unique depuis le 8 juin 2009.

Par procès-verbal d’assemblée en date du 3 décembre 2009, [N] [K] a été désignée en qualité de gérante.

Le 31 juillet 2010, [Y] [H] et [N] [K] se sont mariés sous le régime de la séparation des biens s’étant respectivement consentis une donation au dernier vivant par acte authentique du 23 septembre 2010. Celui-ci est décédé le [Date décès 4] 2012, laissant pour héritiers, son épouse et ses deux fils.

Le 17 avril 2013, Mme [K] a opté pour le quart en pleine propriété et les trois-quarts en usufruit des biens dépendants de la succession, la déclaration de succession étant établie le 14 juin 2013.

Saisi par acte d’huissier en date du 14 janvier 2014, le président du tribunal de grande instance de Toulouse a, par ordonnance de référé en date du 12 mars 2014, confié une mesure d’expertise à M. [M] afin d’évaluer les éléments de la succession de M. [H] et notamment la valorisation des parts de la société Prestige nettoyage.

Une plainte en date du 19 mai 2014 a été déposée par [S] et [L] [H] pour usurpation d’identité par Mme [K] de la signature de son époux décédé le [Date décès 6] 2009 (procès-verbal d’assemblée) et le 30 septembre 2009 (mise à jour des statuts).

Par acte d’huissier en date du 29 septembre 2014, MM. [H] ont saisi le président du tribunal de commerce de Toulouse, statuant en référé, afin d’obtenir notamment la révocation judiciaire de Mme [K] de ses fonctions de gérante ; cette procédure a fait l’objet d’un retrait du rôle le 30 octobre 2014.

Saisi par acte d’huissier en date du 21 octobre 2015 délivré par MM. [H], le président du tribunal de commerce de Toulouse a, par ordonnnace de référé en date du 14 janvier 2016, désigné :

-la SCP Caviglioni-Baron-[T], prise en la personne de M. [T], en qualité de mandataire représentant de l’indivision constituée entre Mme [K] et MM. [H], ladite indivision portant exclusivement sur la nue-propriété des parts sociales de la société Prestige Nettoyage et

-M. [J] en qualité de mandataire ad hoc de la société Prestige nettoyage, aux fins de convoquer une assemblée générale et de délibérer sur un certain nombres de points, dont la révocation de Mme [K], et la nomination d’un nouveau gérant, et ce jusqu’au 30 juin 2016.

M. [J], en qualité de mandataire ad hoc de la société Prestige nettoyage, a convoqué une assemblée générale le 25 mars 2016, en présence de tous les associés, à l’issue de laquelle les comptes pour les exercices 2013 et 2014 et la rémunération du gérant ont été approuvés, Mme [K] a été révoquée, [L] [H] a été nommé gérant et le transfert du siège social, situé au domicile de Mme [K], a été décidé (délai de deux mois).

Par lettre recommandé avec avis de réception en date du 7 avril 2016, Mme [K] a contesté les conditions de sa révocation et a mis en demeure la société Prestige nettoyage d’avoir à lui régler sous huit jours la somme de 70000 euros.

Par lettre recommandé avec avis de réception en date du 14 avril 2016, [L] [H], en qualité de gérant, a mis en demeure Mme [K], de se conformer aux résolutions votées le 25 mars 2016, ne pouvant accéder au siège social, aux pièces comptables de l’exercice clos 2015, aux pièces comptables du premier trimestre 2016 (‘ ).

Le 29 avril 2016, Mme [K] a déposé plainte contre [L] [H] au motif que celui-ci se rendrait à son domicile, siège social de la société, et lui aurait dérobé divers objets.

Par actes d’huissier des 8 et 13 mars 2017, Mme [K] a assigné la société Prestige nettoyage, ainsi que [L] et [S] [H], en indemnisation pour révocation sans juste motif, ayant attrait en la cause par acte d’huissier du 28 mai 2018 M. [T] ès qualités, devant le tribunal de commerce de Montpellier, qui, par un jugement du 4 septembre 2019, a :

‘- dit et jugé que la révocation de Mme [K] de son mandat de gérante de la SARL Prestige nettoyage prononcée lors de l’assemblée générale du 25 mars 2016 est intervenue dans le respect des règles de forme, pour juste motif et n’a pas été faite dans l’intention de nuire,

– en conséquence, débouté Mme [K] de l’ensemble de ses demandes et l’a condamnée à payer à MM [L] et [S] [H] et à la SARL Prestige nettoyage la somme globale de 3 000 euros pour résistance abusive,

– débouté MM [L] et [S] [H] de leur demande de restitution de l’ordinateur et de la machine à café,

– condamné Mme [K] à régler à MM [L] et [S] [H] et à la SARL Prestige nettoyage la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné Mme [K] aux entiers dépens de l’instance (…)’.

Mme [K] a régulièrement relevé appel, le 22 octobre 2019, de ce jugement.

Elle demande à la cour, en l’état de ses conclusions déposées et notifiées le 3 août 2020 via le RPVA, de :

‘- infirmer le jugement (…),

– rejeter toutes conclusions contraires comme mal fondées,

– dire et juger que sa révocation de ses fonctions de gérante de la société Prestige nettoyage a été votée sans juste motif et que sa révocation de ses fonctions de gérante de la société Prestige nettoyage a été faite dans l’intention de lui nuire,

– en conséquence, condamner in solidum la société Prestige nettoyage, MM [L] et [S] [H] et M. [T] ès qualités au paiement de la somme de :

– 70 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la révocation sans juste motif imposée (…), outre intérêts de retard à compter du 9 avril 2016, date de réception de la mise en demeure du 7 avril 2016,

– 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi en raison des circonstances entourant la révocation,

– 3 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens’.

Au soutien de son appel, elle fait essentiellement valoir que :

– sa révocation a été votée sans qu’il ait été justifié de l’existence d’un quelconque motif, juste ou pas,

– elle a procédé à la convocation des assemblées générales, qui n’ont pu avoir lieu compte tenu de l’obstruction des intimés,

– la comptabilité et la préparation de ces assemblées étaient confiées à un cabinet comptable,

– la société Prestige nettoyage dégageait des résultats bénéficiaires lorsqu’elle était gérante, travaillant en outre elle-même sur les chantiers,

– la société n’a plus la moindre activité depuis son départ, les assemblées générales ne sont plus convoquées et des détournements ont lieu sur ses comptes bancaires,

– MM. [H] n’apportent pas la preuve de ce qu’elle aurait commis un faux dans le procès-verbal la désignant en qualité de gérante,

– le simple fait de lui avoir délivré quitus pour les exercices 2013 et 2014 prive la révocation de justes motifs,

-M. [T] représentait la succession lors des assemblées générales et doit en répondre,

– cette révocation l’a privée de toute rémunération alors qu’elle n’a pas droit aux allocations-chômage,

– sa révocation a été vexatoire, ayant subi une sanction injustifiée, motivée par l’intention de MM. [H] de lui nuire personnellement, dans le contexte du règlement litigieux de la succession de [Y] [H],

– MM. [H] n’apportent pas la preuve d’une intention de nuire de sa part dans le cadre d’un empêchement du gérant d’accéder au siège de la société, qui constituait son domicile.

Formant appel incident, [L] et [S] [H] et la société Prestige nettoyage sollicitent de voir, aux termes de leurs conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 15 mai 2020 :

‘ vu les articles 1240 du code civil et L223-25 du code de commerce,

– A titre principal, dire et juger que les demandes indemnitaires formées par Mme [K] à leur encontre et à celle de la SARL Prestige nettoyage ne sont pas recevables, et qu’elles ne peuvent être dirigées qu’à l’encontre de M. [T], ès qualités,

– condamner Mme [K] à restituer l’ordinateur et la machine à café appartenant à la SARL Prestige nettoyage, et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir,

– se réserver la compétence pour liquider ladite astreinte,

– débouter en conséquence Mme [K] de l’ensemble de ses demandes,

– A titre subsidiaire, dire et juger que la révocation de Mme [K] de ses fonctions de gérante de la SARL Prestige nettoyage a été valablement votée, pour de justes motifs,

– débouter en conséquence Mme [K] de l’ensemble de ses demandes,

– A titre infiniment subsidiaire, dire et juger que les demandes indemnitaires formées par Mme [K] à l’encontre de MM [L] et [S] [H] et de la SARL Prestige nettoyage sont exorbitantes et que son préjudice n’est pas justifié,

– débouter en conséquence Mme [K] de l’ensemble de ses demandes,

– rejeter la demande de condamnation solidaire faite à l’encontre de MM [L] et [S] [H],

– En tout état de cause, condamner Mme [K] à leur payer la somme de 10000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, outre 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Ils exposent en substance que :

– les demandes de dommages et intérêts formées à l’encontre de MM [H] sont irrecevables, puisque ces derniers n’ont pas pris part au vote relatif à la révocation de Mme [K], seul M. [T] l’ayant fait,

-au demeurant, la révocation est l’expression de la volonté de la société et Mme [K] ne démontre pas une faute de leur part, détachable de leur qualité d’associé,

-rien n’oblige les associés à indiquer dans le procès-verbal les motifs de la révocation,

-la révocation de Mme [K] a été faite pour juste motif ; puisqu’un mandataire ad hoc a été désigné pour convoquer une assemblée, notamment quant à sa révocation, prouvant la mésentente grave entre les associés, une plainte avait été déposée pour faux concernant le procès-verbal procédant à sa désignation, les opérations d’expertise montraient un détournement (versement d’une rémunération à leur père au titre de l’exercice 2013, soit après son décès) et en outre, elle a refusé de restituer des éléments comptables de la société,

– lors de l’assemblée générale, la discussion a été ouverte sur les questions à l’ordre du jour (après un échange ayant eu lieu le matin) et Mme [K] a choisi de ne pas prendre la parole,

– Mme [K] a elle-même mis en péril la viabilité de la société, n’ayant pas cherché à compenser la perte de deux clients principaux et ayant dénigré la société vis-à-vis de ses clients et de ses propres salariés,

-Mme [K] ne rapporte pas la preuve d’un préjudice économique et moral justifiant l’octroi de dommages et intérêts, ayant refusé un contrat de travail en contrat à durée indéterminée après sa révocation,

-Mme [K] a engagé la présente procédure de façon abusive et sans fondement juridique, justifiant l’octroi de dommages et intérêts.

M. [T], en qualité de mandataire successoral judiciaire de l’indivision [K]-[H], sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par le biais du RPVA le 15 mai 2020 :

‘- vu l’article 1240 du code civil,

– A titre principal, confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a débouté Mme [K] de l’ensemble de ses prétentions,

– A titre subsidiaire, si la cour venait à infirmer le jugement, considérant que la révocation serait dépourvue de justes motifs ou qu’elle serait intervenue dans des conditions brutales et vexatoires,

– dire et juger que la condamnation à d’éventuels dommages et intérêts ne peut intervenir qu’à l’encontre de la SARL Prestige nettoyage,

– En tout état de cause, condamner toute partie succombante aux entiers dépens de première instance et d’appel, outre la somme globale de 3600 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance et de la procédure d’appel.’

Il expose en substance que Mme [K] n’établit pas de faute personnelle imputable à l’un des associés justifiant l’octroi de dommages et intérêts et une telle condamnation ne pourrait intervenir qu’à l’encontre de la société, lui-même n’ayant eu pour mission que ‘d’être la voix de l’indivision dans le cadre des assemblées générales’, les droits dans cette indivision étant d’un quart pour Madame [K] et de trois-quarts pour MM. [H].

Il est renvoyé, pour l’exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

C’est en l’état que l’instruction a été clôturée par ordonnance du 15 février 2022.

MOTIFS DE LA DECISION :

1- Selon l’article 223-25 du code de commerce, le gérant d’une société à responsabilité limitée peut être révoqué par décision des associés, adoptée par plusieurs de ceux-ci représentant plus de la moitié des parts sociales, à moins que les statuts prévoient une majorité plus forte. Si la révocation est décidée sans juste motif, elle peut donner lieu à des dommages et intérêts.

Les statuts de la société Prestige nettoyage ne dérogent pas à ces dispositions tandis que l’article 13 de ceux-ci prévoit que lorsque des parts sociales sont grevées d’usufruit, le droit de vote appartient au nu-propriétaire pour toutes les décisions collectives autres que celles relatives à l’affectation des résultats sociaux.

L’indemnisation d’une révocation non justifiée du gérant est due par la société, qui, par le biais d’une assemblée générale de ses associés, la prononce, de sorte que la demande en ce sens de Mme [K] à l’encontre de la société Prestige nettoyage est parfaitement recevable tandis que cette même demande à l’encontre des associés et du mandataire successoral, représentant l’indivision, requiert également la démonstration d’une faute personnelle sans, pour autant, conditionner sa recevabilité.

Le gérant révoqué doit avoir eu connaissance des motifs de révocation et avoir pu présenter ses observations avant le vote.

Mme [K] est informée depuis la réunion de l’assemblée générale de la société en date du 13 juin 2014, destinée à statuer sur l’exercice clos au 31 décembre 2013 qui a été ajournée, de la volonté des deux autres associés de mettre à l’ordre du jour sa révocation du mandat de gérance compte tenu de la plainte déposée à son encontre le 19 mai 2014 pour usurpation d’identité dans le cadre de la signature du procès-verbal d’assemblée la désignant en qualité de gérante et de la mise à jour des statuts, qui a donné lieu aux saisines du président du tribunal de commerce de Toulouse par actes d’huissier en date du 29 septembre 2014 et du 21 octobre 2015.

Dans le cadre de ces instances en référé, Mme [K], représentée par un conseil, a pu faire valoir sa position, contestant l’existence de toute cause légitime de révocation au titre, notamment, de la prétendue usurpation d’identité, d’une supposée rémunération excessive et de l’absence de tenue des assemblées générales dans le cadre d’une mésentente des associés.

Le rapport d’expertise en date du 4 septembre 2015, établi dans le cadre de l’instance relative à la succession de [Y] [H], qui oppose les trois associés, expose que les documents comptables de la société Prestige nettoyage comportent pour l’exercice 2013 une rémunération de 35 500 euros au profit de ce dernier malgré son décès et que la valeur de la société peut être fixée à hauteur de 48 000 euros alors qu’elle a été déclarée dans la déclaration de succession établie par Mme [K] à hauteur de 14 000 euros.

Mme [K] a été destinataire de l’ordre du jour de l’assemblée générale en date du 25 mars 2016, relative à l’approbation des comptes des exercices clos au 31 décembre 2013 et 2014, et visant notamment sa révocation ainsi que des différents documents afférents à celle-ci. Le procès-verbal de cette assemblée générale, convoquée par M. [J], en sa qualité de mandataire ad hoc, indique qu’avant l’ouverture du scrutin sur les résolutions figurant à l’ordre du jour, ‘la discussion a été ouverte’ et que le scrutin n’a eu lieu qu’après que ‘ personne ne demande la parole’, Mme [K] ayant, manifestement, choisi de ne pas s’exprimer à ce stade de la réunion (alors qu’elle l’a fait concernant le changement de siège social). Il expose encore que la révocation, prenant effet à l’issue de l’assemblée, Mme [K] a été invitée à restituer cinq jours plus tard (et non immédiatement) les moyens de paiement et clés du véhicule de la société.

Un courrier en date du 7 avril 2016 émanant du conseil de Mme [K], confirme que les associés ont été réunis le matin même de cette assemblée dans l’étude du mandataire ad hoc et ont évoqué les différents griefs reprochés à celle-ci en sa qualité de gérante, à savoir, notamment, l’absence de convocation des assemblées générales, la mésentente des associés, une absence de compétence pour diriger la société à défaut de toutes qualifications, la fausse signature sur le procès-verbal d’assemblée la désignant et la perte de deux clients importants.

Le quitus donné à la gestion de Mme [K] pour les exercices 2013 et 2014 lors de l’assemblée générale du 25 mars 2016 ne contredit pas les griefs motivant la révocation relatifs à l’absence, avérée, de convocations des assemblées générales et à une mésentente des associés, ayant nécessité la désignation d’un mandataire ad hoc, suffisants en eux-mêmes en ce qu’ils caractérisent une situation de perte de confiance et de dégradation des relations, susceptibles de compromettre l’intérêt social.

Il en résulte que Madame [K] était parfaitement informée des motifs de sa révocation et a pu s’en expliquer, même si le procès-verbal d’assemblée générale ne les mentionne pas, de sorte que cette révocation, fondée sur de justes motifs, n’était pas fautive et les circonstances l’ayant entourée lors du déroulement de ladite assemblée générale n’étaient pas vexatoires.

En conséquence, les demandes d’indemnisation formées par Mme [K] à l’encontre de la société Prestige nettoyage, de MM [H] et de M. [T] ès qualités ne pourront prospérer.

2- MM. [H] ne démontrant pas, à l’appui de pièces justificatives, d’une part, que les actifs de la société Prestige nettoyage comprennent ‘l’ordinateur et la machine à café’, qu’ils réclament, et d’autre part, qu’ils auraient été conservés par Mme [K], leur demande de restitution sous astreinte sera rejetée.

Le jugement sera ainsi confirmé en ces dispositions.

3- L’appréciation inexacte qu’une partie fait de ses droits ne constituant pas, en soi, une faute caractérisant un abus du droit d’agir en justice, en l’absence de justification d’un quelconque préjudice, la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive, formée par MM. [H] et la société Prestige nettoyage, sera rejetée et le jugement réformé de ce chef.

4- Mme [K], qui succombe en son appel, devra supporter les dépens de l’instance et verser, en application de l’article 700 du code de procédure civile, à MM. [H] et la société Prestige nettoyage la somme de 3 000 euros et à M. [T], ès qualités, celle de 2 000 euros.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement du tribunal de commerce de Montpellier en date du 4 septembre 2019, sauf en ce qu’il a condamné Mme [K] à payer à MM. [H] et à la société Prestige nettoyage la somme de 3 000 euros pour résistance abusive,

Y ajoutant,

Rejette la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive formée par [S] [H], [L] [H] et la société Prestige nettoyage,

Condamne [N] [K] veuve [H] à payer à [S] [H], [L] [H] et la SARL Prestige nettoyage la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [N] [K] veuve [H] à payer à M. [T], en qualité de mandataire successoral, représentant l’indivision [K]-[H] portant sur la nue-propriété des parts sociales de la sociétré Prestige nettoyage, la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [K] veuve [H] aux dépens d’appel.

le greffier, le président,

 


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