COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
11e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 15 SEPTEMBRE 2022
N° RG 21/01434 – N° Portalis DBV3-V-B7F-UP7S
AFFAIRE :
[D] [G]
C/
S.A. SOLOCAL
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 08 Avril 2021 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BOULOGNE BILLANCOURT
N° Section : E
N° RG : F18/01607
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU
Me Jérôme WATRELOT de la SELAFA CHASSANY WATRELOT ET ASSOCIES
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE QUINZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur [D] [G]
né le 21 Septembre 1981 à [Localité 6] ([Localité 6])
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentant : Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619 – Représentant : Me Vincent RENAUD, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A720
APPELANT
****************
S.A. SOLOCAL
N° SIRET : 444 212 955
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Jérôme WATRELOT de la SELAFA CHASSANY WATRELOT ET ASSOCIES, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0100, substitué par Me Aliéonor DEVOLDER, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
L’affaire a été débattue à l’audience publique du 08 Juin 2022, Madame Hélène PRUDHOMME, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Hélène PRUDHOMME, Président,
Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,
Madame Marie-Christine PLANTIN, Magistrat honoraire,
qui en ont délibéré,
Greffier lors des débats : Madame Sophie RIVIERE
Le 20 août 2007, M. [D] [G] était embauché par la société Pages Jaunes en qualité de télévendeur, par contrat à durée indéterminée. Il était promu conseiller communication digitale spécialiste en 2014.
Le contrat de travail était régi par la convention collective nationale des cadres techniciens et employés de la publicité française.
Le 3 avril 2018, la société Pages Jaunes devenue Solocal convoquait M. [G] par courrier à un entretien préalable en vue de son licenciement. L’entretien se déroulait le 12 avril 2018. Le 25 avril 2018, elle lui notifiait son licenciement pour faute grave, lui reprochant de n’avoir pas respecté les règles de vente déterminées par l’entreprise pour trois contrats avec des clients.
Le 10 octobre 2018, M. [G] a saisi la formation de référé du conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt afin d’obtenir un rappel d’indemnité de préavis et l’annulation de la retenue opérée de manière illicite par son employeur. Par ordonnance du 23 novembre 2018, le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt a condamné la SA Pages Jaunes devenue Solocal à verser à M. [G] les sommes suivantes :
– 14 524,70 euros au titre du paiement de l’indemnité de préavis
– 1 452,47 au titre des congés payés afférents
– 386,61 euros au titre des intérêts de retard
– 1 000 euros à titre de provision sur dommages et intérêts
– 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile
– outre la remise des documents sociaux corrigés sous astreinte de 10 euros par jour de retard et par document à compter du 8ème jour suivant le prononcé de la décision.
Le 11 décembre 2018, la société Pages Jaunes devenue Solocal formait appel de cette ordonnance.
Le 27 décembre 2018, M. [G] saisissait le conseil des prud’hommes de Boulogne-Billancourt afin d’obtenir le versement d’indemnités compensatrices de préavis et de sommes retenues sur son salaire au titre des commissions versées pour trois contrats de vente litigieux.
Par arrêt du 12 septembre 2019, la cour d’appel de Versailles a :
– infirmé l’ordonnance sauf en ce qu’il a donné acte à la société Solocal du paiement de la somme de 217,59 euros à M. [G] au titre des intérêts portant sur l’indemnité compensatrice de préavis et en ce qu’il a condamné la SA Solocal à payer à M. [G] la somme de 1’000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile
statuant à nouveau
– dit n’y avoir lieu à référé sur la demande au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, sur la demande au titre des intérêts de retard dus sur cette indemnité et sur la demande au titre des dommages et intérêts
– condamné la SA Solocal à payer à M. [G] les somme de 18’045,40 euros bruts à titre de rappel de salaire et 1’804,54 euros bruts de congés payés afférents et celle de 9’283,99 euros à titre de rappel de salaire et 928,40 euros de congés payés afférents
y ajoutant
– condamné la SA Solocal à payer à M. [G] les intérêts de retard aux taux légal à compter du 17/10/2018 sur les créances contractuelles et à compter de de l’arrêt sur les créances indemnitaires
– ordonné la remise à M. [G] par la société d’un certificat de travail, d’un solde de tout compte, d’une attestation Pôle emploi et d’un bulletin de salaire récapitulatif conformes à l’arrêt
– débouté M. [G] du sa demande d’astreinte
– rejeté les demandes présentées par les parties en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile
– condamné la SA Solocal au paiement des entiers dépens.
Vu le jugement du 8 avril 2021 rendu en formation paritaire par le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt qui a’:
– Fixé le salaire de M. [G] à 5’273,92 euros brut mensuel
– Dit que le licenciement pour faute grave de M. [G] est justifié
– Débouté M. [G] de l’ensemble de ses demandes
– Ordonné à M. [G] de rembourser à la société Solocal venant aux droits de la société Pages Jaunes la somme de 979,22 euros correspondants aux intérêts de retard sur la retenue sur salaire ;
– Ordonné à M. [G] de rembourser à la société Solocal venant aux droits de la société Pages Jaunes les sommes versées en exécution de l’arrêt de la cour d’appel de Versailles en date du 12 septembre 20/19, soit’:
– 18’045,40 euros bruts au titre de rappel de salaire et 1’804,54 euros bruts au titre des congés payés afférents et,
– 9’283,99 euros nets au titre de rappel de salaire et 928,40 euros nets au titre des congés payés afférents.
– Ordonné à M. [G] de rembourser à la société Solocal venant aux droits de la société Pages Jaunes les commissions perçues indûment pour un montant de 22’683,12 euros
– Ordonné à M. [G] de communiquer dans le cadre de la présente instance, l’ensemble des revenus perçus depuis son licenciement
– Condamné M. [G] à verser à la société Solocal venant aux droits de la société Pages Jaunes la somme de 50 euros au titre de 1’Article 700 du code de procédure civile
– Laissé les dépens de la présente instance a la charge de M. [G].
Vu l’appel interjeté par M. [G] le 12 mai 2021
Vu l’ordonnance du 24 juin 2021 du premier président de la cour d’appel de Versailles qui a débouté M. [G] de sa demande de suspension de l’exécution provisoire relative à cette décision
Vu les conclusions de l’appelant, M. [D] [G], notifiées le 5 mai 2022 et soutenues à l’audience par son avocat auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, et par lesquelles il est demandé à la cour d’appel de :
– Juger que la demande de M. [G] est recevable et bien fondée,
– Juger que le salaire mensuel brut de référence de M. [G] s’élève à 9’216,25 euros.
– Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt le 8 avril 2021 en ce qu’il a :
– Dit que le licenciement pour faute grave de M. [G] est justifié.
– Débouté M. [G] de l’ensemble de ses demandes.
– Fixé le salaire de M. [G] à 5’273,92 euros brut mensuel.
– Ordonné à M. [G] de rembourser à la société Solocal (venant aux droits de la société Pages Jaunes) la somme de 979,22 euros correspondants aux intérêts de retard sur la retenue sur salaire,
– Ordonné à M. [G] de rembourser à la société Solocal (venant aux droits de la société Pages Jaunes) les sommes versées en exécution de l’arrêt de la cour d’appel de Versailles en date du 12 septembre 2019, soit :
– 18’045,40 euros bruts au titre de rappel de salaire et 1’804,54 euros bruts au titre des congés payés afférents,
– 9’283,99 euros nets au titre de rappel de salaire et 928,40 euros nets au titre des congés payés afférents.
– Ordonné à M. [G] de rembourser à la société Solocal (venant aux droits de la société Pages Jaunes) les commissions perçues indûment pour un montant de 22’683,12 euros,
– Ordonné à M. [G] de communiquer dans le cadre de la présente instance, l’ensemble des revenus perçus depuis son licenciement,
– Condamné M. [G] à verser à la société Solocal (venant aux droits de la société Pages Jaunes) la somme de 50 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Laissé les dépens de la présente instance à la charge de M. [G].
Et statuant à nouveau,
A titre principal,
– Juger que le licenciement de M. [G] est nul.
En conséquence,
– Ordonner la réintégration de M. [G] au sein de la société Solocal (venant aux droits de la société Pages Jaunes), sous astreinte de 1’000 euros par jour de retard à compter du prononcé du jugement à intervenir,
– Condamner la société Solocal (venant aux droits de la société Pages Jaunes) à verser à M. [G] l’ensemble des salaires et de la part variable depuis la rupture de son contrat de travail jusqu’à sa pleine réintégration dans l’entreprise sur la base d’une rémunération mensuelle brute s’élevant à 9’216,25 euros.
– Condamner la société Solocal (venant aux droits de la société Pages Jaunes) à verser à M. [G] l’indemnité compensatrice de congés payés afférents à l’indemnité d’éviction (hormis pour la période salariée au sein de la société Brocelia).
Subsidiairement, dans l’hypothèse où la réintégration de M. [G] serait matériellement impossible,
– Condamner la société Solocal (venant aux droits de la société Pages Jaunes) à verser à M. [G] la somme de 113’481,36 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul,
– Condamner la société Solocal (venant aux droits de la société Pages Jaunes) à verser à M. [G] l’indemnité compensatrice de congés payés afférents à l’indemnité d’éviction (hormis pour la période salariée au sein de la société Brocelia).
A titre subsidiaire,
– Juger que le licenciement de M. [G] ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse.
En conséquence,
– Condamner la société Solocal (venant aux droits de la société Pages Jaunes) à verser à M. [G] la somme de 150’000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse.
– Condamner la société Solocal (venant aux droits de la société Pages Jaunes) à verser à M. [G] la somme de 34’699,19 euros à titre d’indemnité de licenciement.
En tout état de cause,
– Débouter la société Solocal (venant aux droits de la société Pages Jaunes) de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– Condamner la société Solocal (venant aux droits de la société Pages Jaunes) à rembourser à M. [G] les sommes retenues sur son solde de tout compte et son indemnité compensatrice de préavis à savoir 19’587,64 euros bruts et 9’283,99 euros nets ainsi que les congés payés afférents,
– Condamner la société Solocal (venant aux droits de la société Pages Jaunes) à rembourser à M. [G] la somme de 26 928,68 euros nets qu’il a versée au titre de l’exécution provisoire attachée au jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt du 8 avril 2021,
– Condamner la société Solocal (venant aux droits de la société Pages Jaunes) à verser à M. [G] la somme de 78’137,49 euros à titre de dommages-intérêts pour privation du bénéfice des mesures d’accompagnement prévues par le plan de sauvegarde de l’emploi.
– Condamner la société Solocal (venant aux droits de la société Pages Jaunes) à verser à M. [G] la somme de 5’000 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture brutale et vexatoire.
– Condamner la société Solocal (venant aux droits de la société Pages Jaunes) à verser à M. [G] la somme de 2’000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive de verser l’indemnité compensatrice de préavis.
– Condamner la société Solocal (venant aux droits de la société Pages Jaunes) à verser à M. [G] la somme de 5’000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
– Ordonner le remboursement des allocations chômage dans la limite de 6 mois de salaire.
– Condamner la société Solocal (venant aux droits de la société Pages Jaunes) aux intérêts au taux légal à compter de la saisine du Conseil,
– Condamner la société Solocal (venant aux droits de la société Pages Jaunes) aux entiers dépens.
Vu les écritures de l’intimée, la société Solocal, notifiées le 4 mai 2022 et développées à l’audience par son avocat auxquelles il est aussi renvoyé pour plus ample exposé, et par lesquelles il est demandé à la cour d’appel de’:
– Juger la société Solocal recevable et bien fondée en ses écritures ;
En conséquence :
A titre principal,
– Confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt le 8 avril 2021 en toutes ses dispositions,
– Débouter M. [G] de l’intégralité de ses demandes,
– Condamner M. [G] à verser à la société Solocal la somme de 3’000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
– Condamner M. [G] aux entiers dépens.
A titre subsidiaire, si par extraordinaire, la cour d’appel de Versailles décidait d’infirmer la décision rendue par le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt en date du 8 avril 2021, il lui sera demandé de :
– Limiter le montant des rappels de salaires dus en cas de réintégration en déduisant la somme de 150’584,32 euros et les éventuels autres revenus de remplacement et salaires perçus par M. [G] depuis son licenciement non connus au jours des présentes conclusions,
– Limiter le montant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 15’821,76 euros (3 mois de salaire),
– Limiter le montant de l’indemnité conventionnelle de licenciement à la somme de 19’161,90 euros bruts,
Vu l’ordonnance de clôture du 9 mai 2022.
SUR CE,
Par lettre du 25 avril 2018, la SA Solocal a licencié de M. [G] pour faute grave, lui reprochant : «’après interrogation et enquête menée en interne, au mois de mars 2018, que vous avez commis les faits suivants : vous n’avez pas appliqué les règles de vente et vous avez conclu des contrats avec des clients ne respectant pas les règles de vente édictées par l’entreprise.
Le client Home Expert :
Vous avez conclu avec ce client un contrat d’un montant de 124.522,40 euros TTC au mois de décembre 2017. Cette signature faisait suite à un premier rendez-vous lors duquel le client
a accepté une première proposition portant sur des prestations à 19.000 euros. Vous avez réussi, avec l’aide de votre responsable des ventes terrain, M. [I] [F] et votre DVR, M. [E] [U], qui a accepté d’accorder une remise exceptionnelles de 10%, de conclure un contrat portant sur près de 7 fois le montant initial, alors même que le client avait invoqué un manque de trésorerie pour expliquer le montant de sa première commande. II s’avère que vous n’avez pas respecté les instructions de vente et n’avez effectué aucun des contrôles obligatoires pour une commande d’un tel montant. Vous n’avez pas non plus respecté les règles de paiement, dont notamment un acompte pourtant obligatoire de 15% du montant de la commande.
Après plus de 10 ans passés dans l’entreprise, vous ne pouvez pas ignorer l’existence et le contenu des instructions de vente. Vous avez donc délibérément omis d’effectuer les contrôles obligatoires qui permettent de minimiser les risques d’impayés et d’annulation des commandes. Nous notons également que le contrat a été conclu durant un «’crazy week’», ce qui vous permettait d’augmenter substantiellement votre rémunération variable puisque la vente «’valait double’» dans votre chiffre d’affaires réalisé. En acceptant de conclure une vente dont les conditions financières ne sont pas celles imposées par l’entreprise, vous aviez nécessairement conscience que celles-ci allaient être remises en cause par la direction financière. Aussi, en acceptant de conclure une telle vente, vous saviez qu’il existait un risque d’annulation confinant à la certitude ‘ puisque selon les propres dires du client, les conditions financières exceptionnelles que vous lui avez accordées conditionnaient sa signature du contrat. Malgré tout, vous avez conclu le contrat et mis en production la commande de ce client. Il a donc bénéficié de parutions totalement gratuites pour lui, car aucun règlement n’est intervenu. La commande et le contrat ont fait l’objet d’une annulation par le service client en date du 6 mars 2018 occasionnant un manque à gagner pour l’entreprise. De plus, lorsque le service client a souhaité travailler sur le dossier de ce client au début du mois de mars pour pouvoir enregistrer l’annulation, il s’est aperçu que vous avez bloqué le compte en restant logué dessus, rendant toute opération de vérification et d’annulation impossible durant ce temps.
En concluant ce contrat en dehors des conditions de vente normales, vous avez fait prendre à l’entreprise un risque financier et judiciaire important. En effet, en accordant des conditions de paiement privilégiées non autorisées, vous ne respectez pas le jeu de la concurrence loyale et exposez l’entreprise à des sanctions pécuniaires voire pénales.
A la même époque, lors du crazy week de décembre 2017, vous avez également conclu un contrat avec un professionnel de l’hôtellerie déjà client pour un autre de ses établissements (établissement Hôtel Segala Plein Ciel). Pour cela, vous avez demandé à votre RVT, M. [F], de vous faire attribuer le compte en question. Vous concluez une vente pour un montant de 53.942,40 euros TTC, sans procéder à aucune des vérifications obligatoires et en accordant, une fois encore, des conditions de paiement exceptionnelles incompatibles avec nos conditions de vente. Lorsque la Direction Financière a tenté d’informer le client de ce qu’un acompte minimal était obligatoirement perçu à la commande, son courrier recommandé lui est revenu avec la mention «’destinataire inconnu à l’adresse’». Votre client n’existe pas. Ainsi, sans l’appel d’un acompte auprès de ce client «’fantôme’», vous auriez vous et votre RVT, perçu des commissions sur une commande fictive, la Société n’existant pas, commissions doublées du fait que la commande avait été passée, comme par hasard sur la période de crazy week, ce qu’encore une fois vous ne pouviez ignorer. Votre absence totale de vérifications et de constitution d’un dossier pour une commande conclue hâtivement et en dehors des règles de paiement durant le crazy week constitue un manquement grave et volontaire de votre part.
Enfin, en mai 2017, vous avez conclu un contrat avec une personne se présentant comme le gérant de l’entreprise la Quincaillerie [S]. vous auriez été abordé par lui sans un restaurant alors que vous étiez en rendez-vous client avec le restaurateur. La personne s’étant déclarée très intéressée par les produits Pages Jaunes, vous avez effectué un rendez-vous dans un restaurant avec lui, avec votre RVT, M. [F]. Lors de ce rendez-vous, vous avez obtenu la signature d’une commande d’un montant de 47.000 euros environ. Ceci contrevient aux règles de conclusion des contrats qui prévoient une conclusion au siège social de l’entreprise cliente ou toute autre adresse officielle du client. Pire encore, pour pouvoir enregistrer cette commande vous avez, avec votre responsable, demandé la réouverture du numéro EPJ de cette entreprise. En effet, l’entreprise ayant fait l’objet d’une radiation du RCS, l’EPJ était inactive. Vous n’avez pas obtenu un K-bis récent du client qui seul permet une création d’EPJ, et avez, la aussi, accordé des conditions de paiement non conformes aux règles de paiement en vigueur.
Plusieurs mois après, en date du 13 février 2018, nous avons appris que le véritable gérant de la Quincaillerie [S] a porté plainte pour usurpation d’identité. En effet, son entreprise étant fermée ‘ en cohérence avec l’EPJ inactive’, il n’avait aucune raison de conclure un contrat portant sur de la publicité pour son entreprise.
Si vous pouviez avoir été victime d’un usurpateur, nous ne pouvons que souligner que si vous aviez respecté les règles de vente, cela ne serait pas arrivé. En effet la conclusion au siège, les vérifications préalables sérieuses, la production d’un K-bis de moins de 3 mois et les conditions de paiement normales auraient permis d’éviter cette situation. Toutefois, nous doutons fortement d’un tel déroulement de faits car il est évident que les seules personnes ayant un intérêt à cette usurpation d’identité êtes vous-même et votre RVT et en aucun cas la personne qui a prétendu être le gérant de la Quincaillerie [S]. En effet, elle a obtenu une parution gratuite pendant quelques mois et donc une visibilité et publicité qui a été faite au profit d’une entreprise qui n’existe pas. Dès lors, seul le commercial qui a conclu la vente et a obtenu une rémunération de ce fait est le bénéficiaire de la man’uvre du faux gérant. Nous ne pouvons qu’émettre de sérieux doutes quant à votre véritable rôle dans cette vente et partant votre loyauté’».
Pour contester son licenciement et le dire nul, M. [G] soulève tout d’abord l’existence d’un avertissement le 9 mars 2018 empêchant une seconde sanction pour les mêmes faits puis la prescription des faits reprochés. Enfin, il affirme qu’aucune faute n’est avérée de sorte que son licenciement ayant été prononcé pendant une période d’arrêt de travail, il est nul.
Sur la règle non bis in idem
Le salarié invoque un avertissement qui lui a été notifié le 9 mars 2018 à la suite de sa convocation à un entretien le 7 mars pour le 8 mars. La SA Solocal indique que le courriel du 9 mars 2018 ne constitue pas un avertissement mais un simple rappel à l’ordre de respecter la procédure mise en place au titre des règles de paiement applicables au sein de la société.
Ainsi, le 9 mars 2018, l’employeur écrivait au salarié, après l’avoir entendu en entretien «’suite à notre entretien de ce jour sur les deux dossiers, Hôtel Ségala Pein ciel, annulation comptable pour 49’362,20 euros TTC et Home expert annulation comptable pour 124’522,40 euros TTC, ces deux clients n’étaient pas dans les règles de paiement et malgré l’intervention de la DFC pour les remettre dans la norme des règles de paiement, ces 2 clients n’ont pas réglé l’acompte de 15% TTC demandé. Je te précise que tous les clients à plus de 8’000 euros doivent nous régler un acompte minimum de 15% TTC à la souscription de leur commande, puis le solde en échéances mensuelles du même montant au plus tard 60 jours avant la date de fin de parution la plus lointaine. Je te demande comme à tous les vendeurs de l’agence de respecter ces règles de paiement or dérogation écrite de ma part. Cdlt’» (pièce B3 du salarié).
Aux termes de l’article L. 1331-1 du code du travail, constitue une sanction toute mesure autre que des observations verbales prises par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération.
Ainsi, la qualification de sanction supporte deux conditions cumulatives, mais suffisantes, quelle que soit par ailleurs l’appellation donnée par l’employeur à la mesure prise :
– l’existence d’un agissement considéré comme fautif
– la volonté de l’employeur de sanctionner cet agissement.
Il résulte du courriel ci-dessus reproduit in extenso que l’employeur se bornait à indiquer au salarié la procédure à suivre en matière de règles de souscription des contrats commerciaux, se bornant à les rappeler ou même à les préciser, sans contenir aucunement de terme envisageant une sanction. Cette lettre ne peut s’analyser en une mesure disciplinaire empêchant la poursuite des faits décrits ultérieurement.
Sur la prescription des faits reprochés
Le salarié indique que l’employeur connaissait les faits mentionnés comme fautifs dans la lettre de licenciement plus de deux mois avant l’engagement de la procédure puisque, s’agissant des clients Home expert et Hôtel Ségala, il en avait été informé dès le mois de janvier 2018 et précisément le 23/01/2018. En ce qui concerne le dossier Quincaillerie [S], le salarié affirme que la société était informée des faits reprochés dès le mois de juillet 2017, suite à des échanges de courriels entre le responsable des ventes terrain, M. [I] [F] et Mme [K] en mai 2017 (pièces C15-1 du salarié), après que M. [S], gérant de la Quincaillerie [S], avait informé la société que son entreprise était fermée de sorte qu’il ne pouvait avoir signé le bon de commande en 2017.
La société le conteste et indique que c’est en février 2018 qu’elle a dû annuler les ventes Home expert et Hôtel Ségala, après avoir eu des suspicions le 23/01/2018 et qu’elle a découvert les faits relatifs à la Quincaillerie [S] le 13 février 2018, à la suite de la demande de la police judiciaire dans le cadre d’une enquête menée suite à la plainte de M. [S], ex-gérant de la Quincaillerie [S] (pièce 17) et du mail de M. [G] en réponse de sorte qu’elle a diligenté une enquête interne dont elle a eu le résultat en mars 2018 ; aussi, la convocation de M. [G] à l’entretien préalable du 3 avril 2018 a été réalisée dans le délai des deux mois imparti. Elle conclut que le fait n’est pas prescrit.
La cour ne trouve pas dans les pièces versées l’existence d’une enquête interne réalisée en mars 2018 par l’employeur concernant les dossiers Home expert et Hôtel Ségala, les mails produits en pièces B1 et B3 du salarié vantés par la SA Solocal n’en faisant pas état, pas plus que les mails produits par l’employeur concernant la tentative massive de fraude sur les 238 plombiers suspects (pièces 19) dont M. [G] n’est pas suspecté d’en être l’auteur ou le complice ; en revanche, dès le 23 janvier 2018 (pièce B1 du salarié), Mme [T] mentionnait 3 dossiers, Hôtel Ségala, Home expert et AB Renov. Si le dernier dossier n’est pas mentionné dans la lettre de licenciement, il ressort de ce mail que la société mettait en cause, pour les deux premiers, à cette date, l’absence de règlement de l’acompte de 15%, ventes effectuées par [D] [G] ; ainsi, si dès janvier 2018, la SA Solocal avait connaissance de l’anomalie de procédure de règlement, réclamait par mail du 30 janvier 2018 à M. [G] des explications (pièces B5 à B7 du salarié) et au regard de sa réponse, elle lui en imputait la responsabilité et le lui écrivait le 9 mars 2018.
Sur le troisième dossier, c’est le 22 mai 2017 que «’le fichier marché de l’entreprise a téléphoné au client qui dit avoir cessé son activité’» alors que le responsable des ventes terrain, M. [F], écrivait le 22 mai 2017 à la gestionnaire portefeuille, avec M. [G] en copie, «’on vient de le signer, je t’envoie la validation si tu veux, c’est le même Siret. Le client me dit qu’il est actif’» ; ainsi, et au regard de ces propos rassurants, la commande était validée le 31/05/2017 (pièce C16) par la société ; néanmoins, dès le 25 juillet 2017, le gérant de la Quincaillerie [S] informait la SA Solocal qu’il ne pouvait être le signataire du bon de commande, sa société ayant été dissoute le 31/12/2015 (pièce C16) et en réaction, la société Solocal mentionnait «’demande d’annulation du booster contact suite dde du responsable qu’on annule les booster contact de ce client suite au fait qu’il soit en faute de paiement’» ; aussi, si la SA Solocal avait connaissance d’une anomalie, aucune autre démarche n’était entreprise par l’employeur sur ce compte client, et la société a attendu la demande des services de police enquêteurs du 29 janvier 2018 pour réclamer à M. [G] des explications sur ce dossier, explications que ce dernier a données le 13 février 2018. Aussi, en lançant sa procédure disciplinaire à son encontre le 3 avril 2018, il ne peut être soutenu que ces faits étaient prescrits. De la sorte, l’employeur pouvait retenir les contrats litigieux reprochés pour les mêmes conditions, Hôtel Ségala et Home expert, de sorte qu’ils ne sont pas prescrits.
Sur le licenciement pour faute grave
Selon l’article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles’; si un doute subsiste, il profite au salarié.
Ainsi l’administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, l’employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.
S’agissant d’une faute grave reprochée privative du droit aux indemnités de rupture qu’il appartient à l’employeur de démontrer, elle correspond à un fait ou un ensemble de faits qui, imputables au salarié, constituent une violation des obligations du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.
La SA Solocal reproche à M. [G] d’avoir omis de respecter les conditions de vente des contrats et délibérément omis d’effectuer les contrôles obligatoires qui permettent de minimiser les risques d’impayés et d’annulation des commandes.
En ce qui concerne le contrat Home Expert, la SA Solocal reproche dans ses conclusions à M. [G] d’avoir, avec l’aide de ses responsables, MM. [F] et [U], accordé une remise exceptionnelle de 10% à ce client et d’avoir conclu un contrat portant sur près de 7 fois le montant initial alors que le client avait invoqué un manque de trésorerie pour expliquer le montant de sa première commande ;
En ce qui concerne le contrat Hôtel Ségala, la SA Solocal indique que le salarié n’a procédé à aucune des vérifications obligatoires et a accordé des conditions de paiement exceptionnelles incompatibles avec les conditions de vente. Elle lui reproche pour ces deux contrats de n’avoir pas exigé l’acompte obligatoire de 15% du montant de la commande.
En ce qui concerne le contrat Quincaillerie [S], la SA Solocal reproche enfin à M. [G] d’avoir en mai 2017 contrevenu aux règles de conclusion des contrats qui prévoient une signature au siège social de l’entreprise cliente ou à toute autre adresse officielle du client alors qu’il a signé, avec une personne se présentant comme le gérant de l’entreprise Quincaillerie [S], après avoir été abordé par lui dans un restaurant y étant en rendez-vous client avec le restaurateur.
Pour ce qui est des règles de vente et de paiement du contrat Home Expert, M. [G] indique qu’il a appliqué les règles qui avaient été portées à sa connaissance par l’employeur pour ce client ancien, que ses supérieurs hiérarchiques l’ont autorisé à conclure le contrat et le service client a validé les bons de commande ; d’ailleurs, la SA Solocal reconnaît dans ses écritures qu’aucune remise n’a été finalement appliquée et elle limite la faute de M. [G] à avoir «’formulé au client une telle proposition’» ; aussi, aucune faute disciplinaire ne peut être reprochée au salarié qui a accompli son travail sous le contrôle et avec l’accord de ses supérieurs et l’acceptation du service client.
Pour ce qui est des règles de vente et de paiement du contrat Hôtel Ségala, la SA Solocal reproche à M. [G] d’avoir accepté une commande d’un client qui s’est révélé être «’fantôme’» ce qui lui a permis de percevoir des commissions doublées puisque le contrat fallacieux avait été conclu durant une «’crazy week’», sans avoir vérifié l’existence d’un établissement effectif en obtenant un extrait Kbis et sans avoir réclamé le versement d’un acompte du 15 % du montant de la commande ; aussi, après que le client avait effectué quelques règlements, le contrat avait été annulé le 22 février 2018 et il restait à cette entreprise de verser la somme de 4’073,20 euros, qui a fait l’objet d’une mise en demeure de payer cette somme en août 2018. M. [G] conteste que le contrat ait été conclu avec un client «’fantôme’» et la cour constate que le bon de commande est souscrit par l’Hôtel Ségala Plein Ciel à [Localité 5], la pièce 30 versée par l’employeur, dans l’état de reproduction dans laquelle elle est soumise à l’examen de la cour, ne permet pas de constater qu’il soit mentionné «’destinataire inconnu à l’adresse’» comme prétendu de sorte que le grief du client fantôme entraînant une commande fictive n’est pas rapporté ; enfin, et en tout état de cause, la commande a été validée par le supérieur hiérarchique du salarié et le service client ; enfin, le courrier adressé à M. [G] par l’employeur le 9 mars 2018 mentionnant «’je te précise’» démontre que la SA Solocal n’avait pas indiqué préalablement les obligations de versement de 15 % indemnité contrat à titre d’acompte à la commande à son salarié auparavant, ceci n’étant pas un rappel de règles mais la mention d’une règle à appliquer dorénavant ; aussi, aucune faute disciplinaire ne peut être reprochée au salarié de la sorte.
Pour ce qui est des règles de vente et de paiement du contrat Quincaillerie [S], si M. [G] reconnaît le processus qui l’a amené à faire souscrire à celui qu’il croyait être le gérant de la Quincaillerie [S] en mai 2017 un contrat de prestation de service dans un restaurant, il n’est pas démontré par la SA Solocal que les règles internes de vente et les conditions générales de prestations de services applicables en 2017-2018, dont le salarié avait normalement connaissance, lui interdisait, en sa qualité de commercial, de conclure en dehors du siège social de l’entreprise ou du domicile du client ; il n’est pas plus démontré que M. [G] ait fait ouvrir un numéro EPJ (dont elle expose qu’il s’agit du référencement client dans les bases de la société) sans fournir de Kbis récent alors qu’il n’est pas démontré que les services lui en aient réclamé un, le salarié affirmant dans ses écritures que cette formalité a été accomplie par son supérieur M. [F] sans que l’employeur ne justifie du contraire, les pièces versées par la SA Solocal concernant le contrat (pièce 23) ne démontrant pas qu’il a accordé un «’dégressif multi-emplacements’» puisqu’il est mentionné 0 euro à cette rubrique, la cour ne pouvant tirer aucune information utile de la pièce 29 et les autres pièces produites ne concernent pas ce contrat, en dehors des mails et pièces mentionnés supra ; aussi, il n’apparaît pas que la SA Solocal puisse justifier de l’accomplissement d’une faute disciplinaire par M. [G] dans la réalisation de ce contrat commercial.
M. [G] reproche alors à la SA Solocal d’avoir prononcé son licenciement alors qu’il était en arrêt maladie, au titre d’un accident du travail pour «’entorse de la cheville gauche’» suivant le certificat médical produit ; si les arrêts de travail versés par le salarié sont surchargés de sorte que la cour ne peut en retenir les dates, la SA Solocal reconnaît que M. [G] a été victime d’un accident du travail le 22 mars 2018 et qu’il a été placé en arrêt maladie jusqu’à la notification du licenciement ; en conséquence, le licenciement prononcé est nul en application des dispositions de l’article L. 1226-9 du code du travail .
Au titre de la réintégration : le salarié la réclame et sollicite le paiement de son salaire entre le 25 avril 2018 et sa réintégration effective ; la SA Solocal ne prétend pas à l’existence d’un empêchement à cette procédure de réintégration de sorte qu’il convient de l’ordonner, de dire que M. [G] doit être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent et de condamner la SA Solocal à lui régler l’ensemble de ses salaires mensuels, sous déduction des revenus de substitution perçus par M. [G] durant la période d’éviction comme justement demandé par l’employeur. Il n’y a pas lieu de soumettre cette obligation de faire à une astreinte, à défaut d’allégations le justifiant.
Compte tenu des pièces versées aux débats, la cour retient que M. [G] bénéficiait d’un salaire mensuel moyen de 5 273,92 euros comprenant la part variable, le jugement du conseil de prud’hommes étant confirmé de ce chef, de sorte qu’il convient de condamner la SA Solocal à lui verser cette somme mensuelle du 25/04/2018 jusqu’à sa réintégration effective, outre les congés payés afférents ; compte tenu des revenus perçus par M. [G] au titre des indemnités journalières de sécurité sociale, des allocations Pôle emploi, des salaires et de ses revenus en qualité d’auto-entrepreneur, la cour fixe à la somme de 150 584,32 euros le montant de ses ressources arrêtées au mois d’octobre 2021, le salarié ne communiquant pas à la cour ses ressources à compter de cette date ; il convient de lui ordonner de produire à la SA Solocal ses déclarations fiscales pour la période ultérieure à octobre 2021, afin de déduction de ses revenus de substitution jusqu’à sa réintégration.
Le salarié demande en outre des dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par les conditions particulièrement vexatoires et brutales de la rupture ; il expose qu’étant un salarié extrêmement scrupuleux et professionnel, et malgré ses 11 années d’ancienneté, il s’est vu brutalement et injustement accusé par la société de fraudeur, d’appartenir à un vaste réseau d’escroquerie impliquant des artisans, son employeur usurpant son identité par l’utilisation de son adresse électronique pour adresser des courriels à ses clients et retenant, lors du versement du solde de tout compte, des sommes ayant le caractère de salaire. Il réclame à ce titre la somme de 5’000 euros en réparation de son préjudice ; cependant, les affirmations du salarié concernant les accusations portées par l’employeur à son encontre ne sont corroborées par aucune pièce probante de sorte qu’il convient de le débouter de cette demande.
Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive, le salarié réclame la condamnation de l’employeur à lui verser 2’000 euros, rappelant que le licenciement a été prononcé pour faute grave, qu’il n’a pas bénéficié de l’indemnité de préavis contrairement aux dispositions de la convention collective de la publicité qui la prévoit, même en cas de licenciement pour faute grave, et il expose qu’il a dû attendre sa saisine du conseil de prud’hommes en référé pour obtenir son règlement (octobre 2018) ; cependant, M. [G] ne justifie nullement de l’existence d’un préjudice, le règlement de l’indemnité étant intervenu et les intérêts légaux étant destinés à compenser le retard pris dans le règlement des sommes dues de sorte qu’il convient de le débouter de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive.
Sur la demande de dommages et intérêts pour privation du bénéfice des mesures d’accompagnement prévues au plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) : M. [G] réclame à ce titre la somme de 78’137,49 euros ; néanmoins, le salarié ne peut solliciter l’application de ces mesures alors que la cour fait droit à sa demande de nullité du licenciement et ordonne sa réintégration. Il convient de le débouter de cette demande.
Sur la demande de remboursement des commissions : M. [G] indique que la SA Solocal avait sollicité en première instance l’annulation de la décision rendue par la cour d’appel par arrêt du 12/09/2019 en référé qui l’avait condamné à rembourser à l’employeur les commissions qu’il avait reçues pour un montant de 26’928,68 euros de sorte que cette demande étant injustifiée et totalement infondée, il convient de la condamner à lui reverser cette somme qu’il avait réglée en juillet 2021 au titre de l’exécution provisoire. M. [G] verse pour en justifier un chèque de banque Société Générale du 01/07/2021 d’un montant de 35’500 euros adressé par son avocat à l’avocat de l’employeur, sans autre explication ni détail des sommes ainsi réglées. Aussi, il convient de limiter à la somme réclamée par le salarié la demande de restitution présentée.
Pour les 3 contrats litigieux, l’employeur a retenu en mai, juin et octobre 2018 des commissions d’un montant total de 18’045,40 euros et 1’542,24 euros soit 19 587,64 euros effectuées sur son solde de tout compte ; la SA Solocal l’explique au motif que les trois contrats ayant été annulés, les commissions n’étaient pas dues de sorte qu’il était justifié que M. [G] restitue les sommes précédemment versées à ces titres. M. [G] conteste les annulations indiquées en disant que l’employeur n’en justifie pas. Cependant, il ne résulte pas du solde de tout compte versé aux débats en pièce A5 du salarié les prélèvement reprochés par le salarié pour les montants indiqués par lui de sorte qu’il ne ressort pas des pièces et des explications des parties la preuve des prélèvements effectués ; ainsi, la cour déboute M. [G] de cette demande non justifiée.
Enfin, le salarié réclame la restitution de la somme de 9’283,99 euros nets représentant un rappel de salaire prélevée lors du règlement de l’indemnité de préavis du 30/10/2018 ; de même, cette affirmation n’étant pas justifiée et explicitée de façon claire, la cour ne peut faire droit à cette demande ; il n’y a pas lieu de condamner la SA Solocal à restituer ces sommes.
Sur les intérêts
Les intérêts au taux légal portant sur les condamnations de nature salariale seront dus à compter de la réception de la convocation de l’employeur devant le bureau de conciliation. S’agissant des créances de nature indemnitaire, les intérêts au taux légal seront dus à compter de la décision les ayant prononcées’;
Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens
Compte tenu de la solution du litige, la décision entreprise sera confirmée de ces deux chefs et par application de l’article 696 du code de procédure civile, les dépens d’appel seront mis à la charge de la SA Solocal’;
La demande formée par M. [G] au titre des frais irrépétibles en cause d’appel sera accueillie, à hauteur de 3 000 euros.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
statuant publiquement et contradictoirement
Infirme le jugement entrepris’;
Et statuant à nouveau
Dit nul le licenciement de M. [D] [G]
Ordonne la réintégration de M. [G] au sein de la SA Solocal dans son emploi ou dans un emploi équivalent et condamne la SA Solocal à lui verser l’ensemble de ses salaires et la part variable depuis la rupture du contrat du 25 avril 2018 jusqu’à sa pleine réintégration dans l’entreprise sur la base d’un salaire mensuel brut de 5 273,92 euros outre les congés payés afférents,
Dit n’y avoir lieu à astreinte
Dit que la SA Solocal devra déduire de cette rémunération les revenus de substitution perçus par M. [G] d’avril 2018 jusqu’à octobre 2021 et ordonne à M. [G] de communiquer à la SA Solocal ses avis d’imposition 2021 et 2022 afin que la SA Solocal déduise les revenus de substitution postérieurs à octobre 2021 non communiqués par M. [G] à la cour
Condamne la SA Solocal à restituer à M. [G] la somme totale de 26 928,68 euros
Dit que les sommes à caractère salarial produiront intérêts au taux légal à compter de la convocation de l’employeur en conciliation et celles à caractère indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt’;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraire
Condamne la SA Solocal aux dépens de première instance et d’appel’;
Condamne la SA Solocal à payer à M. [G] la somme de 3’000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
Signé par Mme Hélène PRUDHOMME, président, et Mme’Sophie RIVIÈRE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIERLe PRÉSIDENT