12 juillet 2022 Cour d’appel de Nancy RG n° 21/02930

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12 juillet 2022 Cour d’appel de Nancy RG n° 21/02930

COUR D’APPEL

DE NANCY

2ème chambre civile

RG n° N° RG 21/02930 – N° Portalis DBVR-V-B7F-E4L2

du 12 JUILLET 2022

O R D O N N A N C E

n° /2022

Nous, Fabienne GIRARDOT, Conseillère , faisant fonction de Conseiller de la mise en état de la deuxième chambre civile à la Cour d’Appel de NANCY, assistée de Monsieur Ali ADJAL, Greffier,

Vu l’affaire en instance d’appel inscrite au répertoire général sous le numéro N° RG 21/02930 – N° Portalis DBVR-V-B7F-E4L2 ;

APPELANTE / DEMANDEUR A L’INCIDENT :

Madame [F] [C] [N] [E] divorcée [U]

[Adresse 1]

[Localité 4]

assistée de Me Xavier LIGNOT de la SCP SCP CABINET LIGNOT, avocat au barreau de la MEUSE

INTIMES / DEFENDEUR A L’INCIDENT :

Monsieur [J] [U]

né le [Date naissance 2] 1947 à [Localité 7]

[Adresse 5]

[Localité 4]

assisté de Me François CAHEN, avocat au barreau de NANCY

S.A. CIC EST, prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités au dit siège

[Adresse 3]), immatriculée au inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés de STRASBOURG sous le numéro de 754 800 712 ,

représentée par Me Carine BOUREL de la SELARL LÉGICONSEIL AVOCATS, avocat au barreau de la MEUSE.

Avons, après avoir entendu à l’audience de cabinet du 20 juin 2022 les avocats des parties en leurs plaidoiries, mis l’affaire en délibéré pour l’ordonnance être rendue le 12 juillet 2022.

Et ce jour, 12 juillet 2022, avons rendu l’ordonnance suivante :

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Copies exécutoires délivrées le :

Copies certifiées conformes délivrées le :

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EXPOSE DU LITIGE

Par acte notarié en date du 12 février 2009, la société civile immobilière du Hangar (ci- après SCI du Hangar) a été constituée entre M. [R] [Z] [U] et Mme [F] [E] divorcée [U].

Par acte sous seing privé du 16 avril 2009, la SCI du Hangar a souscrit un prêt d’un montant de 100 000 euros auprès de la banque CIC EST.

Compte tenu de la liquidation judiciaire de la SCI du Hangar prononcée par jugement du 12 février 2016, la banque CIC EST a déclaré ses créances au passif, pour un montant de 89 671,33 euros, qui ont fait l’objet d’une admission à la procédure collective. Un certificat d’irrecouvrabilité partielle de la créance a été transmis le 11 février 2020.

La banque CIC EST a entendu agir sur le fondement de l’article 1858 du code civil à l’encontre de Mme [F] [E] divorcée [U], associée de la SCI, qui a appelé en la cause M. [J] [U], son ex-mari, faisant valoir que ce dernier aurait imité sa signature lors de la souscription du prêt, et a sollicité à titre principal sa mise hors de cause, au besoin en ordonnant une vérification d’écriture au cas où les éléments seraient insuffisants pour statuer au fond.

Suivant jugement en date du 18 novembre 2021, le tribunal judiciaire de Bar le Duc a :

– déclaré la SA Banque CIC EST recevable en son action,

– dit que les écritures et signatures figurant sur les deux documents apparaissent semblables et émanent de la même personne, soit Mme [F] [E] divorcée [U],

– condamné Mme [F] [E] divorcée [U] à verser à la SA Banque CIC EST la somme de 14 396,76 euros en sa qualité d’ associé de la SCI du Hangar et ce, avec intérêt légal à compter de sa mise en demeure, soit à compter du 18 février 2020,

– rejeté la demande de Mme [F] [E] divorcée [U] tendant à voir condamner M. [J] [U] à la garantir de toute condamnation pécuniaire,

– accordé à Mme [F] [E] divorcée [U] un échéancier d’une durée de 24 mois pour s’acquitter sans frais de la créance principale, en 23 échéances de 560 euros, la dernière étant du solde des sommes dues,

– condamné Mme [F] [E] divorcée [U] aux dépens,

– débouté Mme [F] [E] divorcée [U] de sa demande quant aux dépens,

– condamné Mme [F] [E] divorcée [U] à payer à la SA Banque CIC EST la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’ article 700 du code de procédure civile,

– débouté la SA Banque CIC EST de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour le surplus,

– débouté Mme [F] [E] divorcée [U] de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– dit que le présent jugement est de droit exécutoire par provision.

Par déclaration reçue le 15 décembre 2021, Mme [F] [E] divorcée [U] a interjeté appel dudit jugement tendant à son infirmation en toutes ses dispositions.

Par conclusions d’incident transmises le 15 mars 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé de ses prétentions et moyens, Mme [F] [E] divorcée [U] demande au conseiller de la mise en état, sur le fondement des dispositions des articles 73,74 et 771 et suivants du code de procédure civile :

– de déclarer l’exception de procédure qu’elle a formulée recevable et bien fondée,

En conséquence,

– d’ordonner un sursis à statuer de l’affaire enrôlée devant la deuxième chambre de la cour d’appel de Nancy sous le RG 21/02930 dans l’attente d’une décision pénale devenue définitive suite à sa plainte pénale en date du 14 décembre 2021 (référencée PV n°2021/001755),

– de laisser les dépens d’incident à sa charge et réserver les frais irrépétibles.

Mme [F] [E] divorcée [U] fait valoir en substance :

– que le tribunal a procédé à une vérification d’écriture sur pièce pour conclure qu’elle avait apposé sa signature sur le contrat de prêt en ces termes : ‘ au vu de la vérification des écritures issue de la comparaison de l’acte de prêt contracté le 16 avril 2009 revêtant l’écriture et la signature contestées de Mme [F] [E] divorcée [U] (….) et l’attestation rédigée et signée par Mme [F] [E] divorcée [U] en date du 3 septembre 2020 (…), il apparaît que les écritures et signatures figurant sur les deux documents apparaissent semblables et émaner de la même personne, soit Mme [F] [E] divorcée [U] ‘ ;

– que pourtant, elle a déposé une plainte au commissariat de police de [Localité 6] le 14 décembre 2021, complétée le 15 décembre 2021, puis a saisi les services du parquet de Bar le Duc par courrier du 22 décembre 2021, reçu le 23 décembre 2021, pour faux, usage de faux et usurpation d’identité, faisant état de ce que son ex-mari, M. [J] [U], a imité sa signature sur l’offre de prêt litigieuse ; que cet événement nouveau est susceptible d’influer sur la procédure en cours.

Par conclusions transmises les 15 avril 2022 et 2 juin 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la SA Banque CIC EST demande au conseiller de la mise en état sur le fondement des articles 73, 74 et 771 et suivants du code de procédure civile :

– de déclarer la demande de Mme [F] [E] divorcée [U] recevable mais mal fondée,

En conséquence,

– de débouter Mme [F] [E] divorcée [U] de sa demande de sursis à statuer,

– de condamner Mme [F] [E] divorcée [U] à lui verser la somme de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– de condamner Mme [F] [E] divorcée [U] aux entiers frais et dépens de l’incident.

La SA Banque CIC EST fait valoir en substance :

– que Mme [F] [E] divorcée [U] est mise en cause en sa qualité d’associée de la SCI du Hangar, de sorte qu’elle doit répondre indéfiniment des dettes sociales envers les tiers, à proportion de sa part dans le capital social à la date de l’exigibilité ou au jour de la cessation des paiements, conformément à l’article 1857 du code civil, dans la mesure où M. [R] [U] a signé le prêt litigieux en sa qualité de gérant de la SCI du Hangar ; qu’au regard des dispositions des statuts régissant les rapports entre associés quant à la souscription d’emprunts, le gérant avait tout pouvoir pour signer seul ce prêt ayant pour objet l’acquisition de l’immeuble sis à [Adresse 8] ;

– que la plainte pénale n’a pas d’incidence sur la procédure en cours.

Par conclusions transmises le 11 juin 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé de ses prétentions et moyens, M. [J] [U] demande au conseiller de la mise en état sur le fondement des articles 73,74 et 771 et suivants du code civil :

– de déclarer Mme [F] [E] divorcée [U] recevable mais mal fondée en son

incident,

En conséquence,

– de débouter Mme [F] [E] divorcée [U] de sa demande de sursis à statuer,

– de condamner Mme [F] [E] divorcée [U] à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel,

– de condamner Mme [F] [E] divorcée [U] aux entiers dépens de l’incident.

Au soutien de ses demandes, M. [J] [U] fait valoir en substance :

– que les premiers juges se sont livrés à une parfaite analyse tant des faits que des règles juridiques applicables, au regard de l’argumentation développée par la banque CIC EST ;

– qu’il y a lieu de constater que Mme [E] n’a pas déposé de plainte dès son assignation du 17 juillet 2020 ; que la règle selon laquelle le criminel tient le civil en l’état n’a plus vocation à s’appliquer ; que le dépôt de plainte n’a donc aucune incidence sur la procédure au fond eu égard à la motivation juridique parfaitement exacte du jugement dont appel.

L’incident appelé à l’audience du 25 avril 2022, ayant fait l’objet d’un renvoi à l’audience du 9 mai 2022 puis du 20 juin 2022, a été mis en délibéré au 12 juillet 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

L’article 4 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de la loi n°2007-291 du 5 mars 2007, n’impose à la juridiction civile de surseoir à statuer, en cas de mise en mouvement de l’action publique, que lorsqu’elle est saisie de l’action civile en réparation du dommage causé par l’infraction ; que, dans les autres cas, quelle que soit la nature de l’action civile engagée, et même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d’exercer, directement ou indirectement, une influence sur la solution du procès civil, elle apprécie, dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, s’il y a lieu de prononcer un sursis à statuer.

En l’espèce, il y a lieu de constater que Mme [F] [E] divorcée [U] ne justifie pas de la mise en mouvement de l’action publique par le dépôt d’une plainte entre les mains du procureur de la République.

Aussi, le sursis à statuer ne saurait s’imposer au conseiller de la mise en état.

Selon l’article 378 du code de procédure civile, la décision de sursis à statuer qui suspend le cours de l’instance pour le temps ou jusqu’à la survenance de l’événement qu’elle détermine, peut être accordée dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice lorsque la solution de la plainte déposée est de nature à avoir une incidence directe sur la solution du litige.

En l’espèce, le litige porte à titre principal sur la mise hors de cause de Mme [F] [E] divorcée [U] qui dénie sa signature sur l’offre de prêt consentie à la SCI Hangar dont elle est associée.

En effet, Mme [F] [E] divorcée [U] a été assignée par la banque CIC EST devant le tribunal judiciaire de Bar le Duc en sa qualité d’associée de la SCI Hangar en liquidation judiciaire, sur le fondement de l’article 1858 du code civil, en paiement des sommes exigibles au titre d’un prêt consenti à la SCI Hangar, composée de M. [R] [U] et de Mme [F] [E] divorcée [U].

Or, l’acte de prêt consenti à la SCI Hangar comporte deux signatures :

– celle attribuée à Mme [F] [E] divorcée [U] (précédée de la mention ‘ pour la société SCI du Hangar ‘),

– celle de M. [R] [U] (précédée de la mention ‘ gérant ‘).

Aussi, il y a lieu de constater que si Mme [F] [E] divorcée [U] a déposé plainte contre son ex-mari, M. [J] [U], pour avoir imité sa signature sur l’acte de prêt litigieux, en revanche, il n’est pas justifié ni allégué que M. [R] [U], en sa qualité de gérant, dénie sa signature portée sur cet acte de prêt.

Aussi, l’objet de la plainte ayant pour but de savoir si M. [J] [U] peut être poursuivi pour faux, usage de faux et usurpation d’identité au titre de la signature de l’acte de prêt au nom de Mme [F] [E] divorcée [U], n’a pas d’incidence directe sur la signature du prêt litigieux par M. [R] [U], gérant de la SCI, qui engage la société dans les rapports avec les tiers pour les actes entrant dans l’objet social, aux termes des statuts.

Par suite, l’objet de la plainte n’a pas d’incidence directe sur la demande principale de Mme [F] [E] divorcée [U] tendant à être mise hors de cause dans le cadre de l’appel du jugement déféré.

S’agissant de la demande subsidiaire de Mme [F] [E] divorcée [U] tendant à être garantie de toute condamnation prononcée à son encontre par M. [J] [U], la procédure de vérification d’écriture devant la juridiction civile a pour but d’établir si la signature portée sur l’acte de prêt litigieux est attribuée à Mme [F] [E] divorcée [U].

Pour autant, la plainte déposée par Mme [F] [E] divorcée [U] est également de nature à établir si la signature figurant sous le nom de Mme [F] [E] divorcée [U] n’est pas la sienne, en ce qu’elle aurait été imitée par M. [J] [U], son ex-mari.

Aussi, il en résulte que la solution de la plainte déposée par Mme [F] [E] divorcée [U] est de nature à avoir une incidence directe sur sa demande en garantie dirigée à l’encontre de M. [J] [U].

Dans ces conditions, il est de l’intérêt d’une bonne administration de la justice de surseoir à statuer dans l’attente de l’issue de la plainte pénale déposée par Mme [F] [E] divorcée [U] à l’encontre de M. [J] [U] le 14 décembre 2021.

Cette décision suspend le cours de l’instance sans dessaisir la cour d’appel.

La SA Banque CIC EST et M. [J] [U] seront déboutés de leurs demandes au titre des frais irrépétibles. Les frais irrépétibles de Mme [F] [E] divorcée [U] seront réservés, à sa demande.

Les dépens d’incident seront laissés à la charge de Mme [F] [E] divorcée [U].

PAR CES MOTIFS

Nous, conseiller de la mise en état, statuant par ordonnance contradictoire prononcée par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

ORDONNONS qu’il soit sursis à statuer sur les demandes des parties dans l’attente de l’issue de la plainte pénale déposée par Mme [F] [E] divorcée [U] à l’encontre de M. [J] [U] le 14 décembre 2021,

DÉBOUTONS la SA Banque CIC EST et M. [J] [U] de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

RÉSERVONS les frais irrépétibles de Mme [F] [E] divorcée [U],

RENVOYONS l’affaire à la mise en état du 7 septembre 2022,

Laissons les dépens d’incident à la charge de Mme [F] [E] divorcée [U].

Et avons signé la présente ordonnance ainsi que le greffier.

LE GREFFIER,LA CONSEILLERE

Minute en six pages.

 


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