11 mai 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 21/02255

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11 mai 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 21/02255

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/02255 –

N° Portalis DBVH-V-B7F-ICMW

ET -AB

TRIBUNAL DE PROXIMITE D’UZES

23 mars 2021

RG :11-20-483

[B]

C/

S.A. CRÉDIT AGRICOLE CONSUMER FINANCE

Grosse délivrée

le 11/05/2023

à Me Agnès BARRE

à Me Isabelle VIGNON

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

1ère chambre

ARRÊT DU 11 MAI 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de proximité d’UZES en date du 23 Mars 2021, N°11-20-483

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Elisabeth TOULOUSE, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre

Mme Elisabeth TOULOUSE, Conseillère

Mme Séverine LEGER, Conseillère

GREFFIER :

Mme Nadège RODRIGUES, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l’audience publique du 20 Mars 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 11 Mai 2023.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

APPELANTE :

Madame [P] [B] veuve [N]

née le [Date naissance 2] 1975 à [Localité 5] ([Localité 5])

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représentée par Me Agnès BARRE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d’AVIGNON

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/009589 du 27/10/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Nîmes)

INTIMÉE :

S.A. CRÉDIT AGRICOLE CONSUMER FINANCE

Immatriculé au RCS de EVRY, pris en la personne de son représentant légal en exercice

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Isabelle VIGNON de l’AARPI BONIJOL-CARAIL-VIGNON, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Renaud ROCHE de la SELARL LEVY ROCHE SARDA, Plaidant, avocat au barreau de LYON

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre, le 11 Mai 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Suivant contrat de crédit à la consommation du 1er octobre 2018, la SA CA Consumer Finance a prêté à M. [R] [N] et Mme [P] [B] épouse [N] une somme de 17 000 euros, au taux de 4,29%.

Le 20 juillet 2020 le prêteur a entendu se prévaloir de la clause déchéance du terme présentée au contrat vis à vis de M. [R] [N] et Mme [P] [B] épouse [N], avec mise en demeure d’avoir à régler les sommes impayées ainsi que capital dû restant augmenté des intérêts et pénalités de retard.

Sur requête du prêteur, une ordonnance d’injonction de payer du 15 septembre 2020 a été rendue par le juge du tribunal de proximité d’Uzès condamnant M. [R] et Mme [P] [N] au paiement de 12 256,34 euros, outre 51,48 euros de frais d’injonction de payer.

Par requête remise au greffe le 3 novembre 2020, M.[R] [N] et Mme [P] [B] épouse [N] ont contesté la décision.

L’affaire a été appelée à l’audience du 19 janvier 2021 et renvoyée à l’audience du 16 février 2021 sur demande des défendeurs.

A cette date, la SA CA Consumer Finance a réitéré les termes de sa demande.

Bien que régulièrement convoqués par LRAR revenu signé , M.[R] [N] et Mme [P] [B] épouse [N] n’ont pas comparu et ne se sont pas d’avantage fait représenter.

Par jugement réputé contradictoire du 23 mars 2021, le tribunal de proximité d’Uzès a :

‘ déclaré recevable l’opposition formée par M. [R] [N] et Mme [P] [B];

‘ mis à néant l’ordonnance d’injonction de payer rendue le 15 septembre 2020 ;

Et, statuant à nouveau ;

‘ déclaré recevable l’action engagée par la SA CA Consumer Finance contre M. [R] [N] et Mme [P] [B] ;

En conséquence ;

‘ prononcé la déchéance pour la SA CA Consumer Finance de son droit aux intérêts contractuels pour le contrat de prêt du 1er octobre 2018 conclu avec M. [R] [N] et Mme [P] [B] ;

‘ condamné solidairement M. [R] [N] et Mme [P] [B] à payer à Sofinco la somme de 12 612,57 euros ;

‘ écarté l’application des dispositions relatives au taux d’intérêt légal et à l’application du taux légal majoré ;

‘ dit que la somme de 12 612,57 euros ne produira pas d’intérêts et ne pourra pas faire l’objet d’un intérêt au taux légal majoré ;

‘ débouté Sofinco de sa demande au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

‘ condamné in solidum M. [R] [N] et Mme [P] [B] aux dépens ;

‘ rejeté le surplus des demandes ;

‘ rappelé l’exécution provisoire de la présente décision

Par déclaration du 9 juin 2021, Mme [P] [E] veuve a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions d’incident déposées par la voie électronique le 17 juillet 2022, la SA CA Consumer Finance demande au conseiller de la mise en état à titre principal, de prononcer la nullité de la déclaration d’appel et à titre subsidiaire, de dire et juger que la cour d’appel n’est saisie d’aucune demande en l’absence d’effet dévolutif.

Par ordonnance du 17 novembre 2022, le conseiller de la mise en état de la cour d’appel de Nîmes a :

‘ déclaré le conseiller de la mise en état incompétent pour statuer sur l’absence d’effet d’évolutif de l’appel ;

‘ débouté la SA CA Consumer Finance de sa demande de nullité de la déclaration d’appel;

‘ condamné la SA CA Consumer Finance à supporter la charge des dépens de l’incident et la déboute de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile;

‘ condamné la SA CA Consumer Finance à payer à Mme [N] la somme de 850 euros au titre des frais irrépétibles de l’incident

Par ordonnance du 12 décembre 2022, la procédure a été clôturée le 6 mars 2023 et l’affaire fixée à l’audience du 20 mars 2023.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET DES MOYENS

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 5 mai 2022, Mme [B] veuve [N], appelante, demande à la cour de :

– réformer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions ,

– déclarer recevable les demandes de Mme [P] [N] ,

A titre principal ,

– juger que le prêt de 17 000 euros n°81607532121 ne lui est pas opposable car elle n’y a pas consenti ,

– juger que le montant du prêt ajouté aux crédits déjà souscrits auprès de l’établissement était excessif par rapport au train de vie du couple ,

– juger que la SA Consumer Finance a manqué à son devoir de vérification de la solvabilité de l’emprunteur ,

– juger qu’elle a manqué à son devoir d’information et de conseil ,

– juger que par son concours excessif et inconsidéré elle a commis une faute en privant l’emprunteur de rembourser le prêt ,

Subsidiairement ,

– juger qu’elle a causé un préjudice à la défenderesse qui sera réparé par le versement de dommages et intérêts ,

– condamner la SA Consumer à lui payer la somme de 12 612, 57 euros au titre de dommages et intérêts qui se compensera avec la somme demandée au titre du remboursement du prêt ,

– condamner la SA Consumer à payer la somme de 15 000 euros au titre de la réparation de son préjudice moral, son époux s’étant suicidé le 23 avril 2021 du fait de son impossibilité à rembourser les crédits en cours, dont de nombreux crédits souscrits auprès de la SA Consumer Finance et sa filiale SEDEF ,

– condamner la SA Consumer à payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Elle fait valoir en substance que le contrat de prêt n’est pas valable et qu’elle n’y a pas consenti et que la banque ne peut faire application de l’article 220 du code civil évoqué par la banque au regard du montant manifestement excessif du prêt litigieux eu égard au train de vie du couple.

Elle estime ainsi que l’intimée est défaillante dans ses devoirs d’information et de conseil notamment en ne vérifiant pas la solvabilité de l’emprunteur, ce qui fonde pleinement sa demande de dommages-intérêts sur le fondement de l’article 1231-1 du code civil en réparation de la perte de chance de ne pas contracter.

Les conséquences dramatiques de la disparition de son époux en lien avec la faute de la banque justifie également des dommages-intérêts au titre d’un préjudice moral.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 21 juillet 2022, la SA Consumer Finance, intimée, demande à la cour de :

A titre principal :

– juger que la cour d’appel de Nîmes n’est saisie d’aucune demande en l’absence d’effet dévolutif ;

A titre subsidiaire :

– confirmer le jugement du tribunal de proximité d’Uzès du 23 mars 2021 en toutes ses dispositions ,

y ajoutant :

– débouter Mme [N] de toutes ses demandes ;

– condamner Mme [N] à payer à la société CA Consumer Finance au paiement de la somme de 750 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ,

– condamner Mme [N] aux entiers dépens de l’appel

Elle soutient essentiellement qu’en application des articles 562 alinéa 1 et 901 du code de procédure civile, l’appelante n’a pas valablement saisie la cour, faute de mentionner les chefs du jugement expressément critiqués dans sa déclaration d’appel.

Elle prétend également que l’appelante n’a pas attrait toutes les parties à la cause, en l’occurence les héritiers de M. [R] [N], nécessitant le rejet de ses prétentions au regard de l’article 312-55 du code de la consommation et du principe de l’article 6 de la CEDH.

Elle considère au fond que l’article 220 du code civil peut trouver application, les époux étant mariés lors de la souscription du prêt et l’imitation des signatures n’ayant pas de conséquences.

Elle fait valoir enfin que la somme empruntée était modeste au regard des capacités financières des époux, qu’il était donc souscrit pour les besoins de la vie courante du ménage et que contrairement aux dires de l’appelante, il n’appartient pas à la banque de vérifier la véracité des informations fournies par les emprunteurs.

Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

1-Sur l’absence d’effet dévolutif et ses conséquences

La SA Consumer Finance se fonde sur les articles 562 et 901 du code de procédure civile dans leur version en vigueur au 1er septembre 2017 et fait valoir qu’à la lecture de la déclaration d’appel Mme [B] veuve [N] a omis de mentionner expressément les chefs de jugement critiqués ; qu’il est impossible pour elle intimée, de connaître la base de contestation de l’intéressée et que dès lors l’effet dévolutif ne peut opérer, la cour ne pouvant statuer que dans la limite de sa saisine.

En vertu de l’article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s’opérant pour le tout que lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.

Seul l’acte d’appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement.

Il en résulte que lorsque la déclaration d’appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l’effet dévolutif n’opère pas.

Par ailleurs, la déclaration d’appel affectée d’une irrégularité en ce qu’elle ne mentionne pas les chefs du jugement attaqués, peut être régularisée par une nouvelle déclaration d’appel, dans le délai imparti à l’appelant pour conclure au fond conformément à l’article 910-4 alinéa 1 du code de procédure civile et les seules conclusions ultérieures fussent-elles prises dans le délai d’appelant ne régularise pas cette irrégularité.

Il a été jugé que ces règles encadrant les conditions d’exercice du droit d’appel dans les procédures dans lesquelles l’appelant est représenté par un professionnel du droit, qui résultent clairement des textes applicables, présentent un caractère prévisible. Elles poursuivent un but légitime au sens de l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, en l’occurrence une bonne administration de la justice en assurant la sécurité juridique de la procédure d’appel, et ne portent pas une atteinte disproportionnée à l’accès au juge d’appel, un rapport raisonnable de proportionnalité existant entre les moyens employés et le but visé, étant rappelé la faculté offerte à l’appelant de régulariser le vice de forme affectant sa déclaration d’appel.

En l’espèce, l’appelante demande au titre de sa déclaration d’appel la réformation du jugement déféré « en (ce) qu’il condamne Mme [N] née [B] à rembourser la somme de 12 612,57 euros » et développe, ensuite ses prétentions et moyens :  » A titre principal Juger que le prêt n’est pas opposable à Madame [N] née [B] à défaut d’y avoir consenti en application de l’article 1128 du Code civil. Son époux a imité sa signature au terme du contrat de prêt et a laissé une lettre sans ambiguïté avant de se donner la mort le 23 avril 2021 du fait des nombreux crédits qu’il avait souscrit en imitant la signature de son épouse et qu’il ne pouvait rembourser. Madame [N] née [B] a porté plainte pour X pour usurpation d’identité, faux et usage de faux. Juger qu’en application de l’article 1415 du Code civil, Monsieur [N] ne pouvait engager son épouse à rembourser le prêt qu’elle n’a pas accepté. A Titre subsidiaire Juger que la Banque qui n’a pas vérifié la solvabilité de l’emprunteur, a également manqué à son devoir de Conseil. Compte tenu des nombreux contrats de prêts souscrits auprès de la SNC SEDEF et de SA CONSUMER FINANCE dont elle est une filiale, elle n’aurait pas dû accepter de prêter la somme de 17.000 € qui n’a pas pu être remboursée. Celui-ci se résout en versement de dommages et intérêts en application de l’article 1231-1 du Code civil afin de réparer la perte de chance de ne pas avoir contracté. Madame [N] née [B] sollicite le versement de la somme de 12.612, 57 € à titre de dommages et intérêts qui représente le capital non remboursé et ce, aux fins de compensation. Juger que la SA CONSUMER FINANCE sera condamnée à réparer le préjudice moral causé à l’appelante par le versement de la somme de 15.000 € puisque son époux s’est suicidé en raison des nombreux contrats de prêts qu’il ne pouvait plus rembourser A titre très subsidiaire, Prononcer le sursis à statuer dans l’attente de l’instruction de la plainte pénale contre X pour usurpation d’identité, faux et usage de faux du 25 mai 2021 En tout état de cause, La condamner à payer la somme de 3000 € en application de l’article 700 du CPC . »

Il en ressort expressément que l’appelante n’a entendu interjeter qu’un appel partiel, la formulation de ses prétentions et moyens, ne peut être regardée comme emportant expressément la critique de l’intégralité des chefs du jugement.

Il est constant que Mme [B] veuve [N] n’a pas procédé, dans le délai pour conclure au fond, à une nouvelle déclaration d’appel régularisant le vice de forme qui ne peut être régularisé par des conclusions au fond prises dans le délai requis énonçant les chefs critiqués du jugement manquants, dès lors que seul l’acte d’appel emporte dévolution des chefs critiqués du jugement conformément à l’article 910-4, alinéa 1, du code de procédure civile.

Par conséquent, l’effet dévolutif n’a opéré au cas d’espèce que partiellement sur les dispositions du jugement déféré portant sur la condamnation de Mme [B] veuve [N] à la somme de 12 612,57 euros et ceux qui en dépendent. Cette disposition ne peut par ailleurs s’entendre qu’en ce que cette somme est due à la SA Consumer finance.

2-Sur la recevabilité des demandes de Mme [N]

Mme [N] demande à titre principal, que le contrat de prêt objet de sa condamnation en première instance lui soit déclaré inopposable ce qui ne concerne que la demande formée à son encontre personnellement et non les héritiers de M.[N]. Cette demande qui entre dans le champ de son appel est parfaitement recevable.

A titre subsidiaire, Mme [N] demande que la responsabilité de la banque soit engagée pour manquement à ses obligations contractuelles à l’égard de l’emprunteur. Si cette demande subsidiaire peut intéresser les héritiers de M.[N], elle n’en concerne pas moins Mme [N] elle même, à supposer qu’elle soit considérée comme co-emprunteur.

3-Sur l’inopposabilité du contrat de prêt à Mme [N]

Aux termes des dispositions de l’article 220 du code civil, chacun des époux a pouvoir pour passer seul les contrats qui ont pour objet l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants : toute dette ainsi contractée par l’un oblige 1’autre solidairement. La solidarité n’a pas lieu, néanmoins, pour des dépenses manifestement excessives eu égard au train de vie du ménage, à l’utilité ou à ou à l’inutilité de l’opération, à la bonne ou mauvaise foi du tiers contractant. Elle n’a pas lieu non plus s’ils n’ont été conclus du consentement des deux époux, pour les achats à tempérament ni pour les emprunts a moins que ces derniers ne portent sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante et que le montant cumulé de ces sommes, en cas de pluralité d’emprunts, ne soit pas manifestement excessif eu égard au train de vie du ménage.

Il résulte de telles dispositions qu’un emprunt contracté par un seul des époux, sans le consentement de l’autre, n’emporte la solidarité qu’à la condition qu’il soit satisfait à la double exigence qu’il ait eu un caractère ménager et porte sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante.

Il appartient au créancier qui entend bénéficier de la solidarité et à l’établissement de crédit d’établir que le prêt avait pour objet l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants.

Mme [N] demande à la cour de déclarer que le contrat lui est inopposable dés lors qu’elle n’y a pas consenti comme en atteste son défunt mari dans la lettre qu’il a laissée.

La SA Consumer finance soutient que quoiqu’il en soit, elle est en droit d’invoquer l’application de l’article 220 du Code civil, dés lors que le prêt souscrit était une dette ménagère engageant solidairement les deux époux, au regard du caractère modeste du montant du prêt pour un revenu mensuel déclaré compatible avec son remboursement.

Or, non seulement il résulte de la lettre de M.[N] avant son passage à l’acte tragique que son épouse n’a pas consenti au crédit en cause, faute d’avoir signé ce contrat, ce dernier reconnaissant l’avoir fait à sa place et ayant fait l’objet d’une enquête pénale pour usurpation d’identité et faux et usage de faux en autre, mais il n’est pas établi surtout, que ce crédit ait servi aux besoins de la vie courante du couple.

En effet, la destination des fonds prêtés n’était pas mentionnée dans l’acte de prêt et n’est pas connue, et son montant permet à la cour de considérer qu’il n’avait pas pour objet de pourvoir aux dépenses de la vie courante, alors surtout que lors de la souscription du prêt, il a été déclaré des revenus mensuels de 2600 pour M [N] et 1200 pour Mme [N] outre 598 euros de prestations sociales, permettant de pourvoir aux besoins de la vie courante, même en tenant compte d’un train de vie élevé.

Il sera ajouté que le montant des emprunts cumulés entre 2017 et 2018 s’élève à plus de 9 prêts, ce qui permet de constater que le prêt en litige a été précédé ou suivi de nombreux autres prêts pour un total dépassant 79 000 euros et surtout permet d’en déduire qu’il avait un autre but que l’entretien du ménage.

Enfin, l’absence de visibilité des emprunts contractés par M.[N] au FICP permet de constater que ces prêts ont tous été souscrits dans un laps de temps extrêmement court, ce qui vient confirmer qu’ils n’avaient pas vocation à pourvoir aux besoins du ménage et aux charges de la vie courante.

Ainsi au vu de ces éléments, il sera jugé que Mme [N] qui n’a pas signé l’acte de prêt du litigieux qui est un faux à son égard comme le reconnaît son époux dans sa lettre, lui est inopposable et ne saurait l’engager comme co-emprunteur.

L’intimée ne peut dès lors lui demander le paiement du solde du prêt en application de cet engagement et sera donc déboutée de sa demande de condamnation à ce titre.

Par voie de conséquence, la décision de première instance sera infirmée en ce qu’elle a condamné Mme [N] solidairement à payer à la SA Cosumer Finance la somme de 12 612,57 euros.

4- Sur les demandes accessoires

S’agissant des dépenses de première instance la décision sera infirmée en ce qu’elle a condamné Mme [N] solidairement à supporter la charge des dépens. Certes, Mme [N] n’a pas critiqué le chef de jugement qui la condamne aux dépens de première instance mais ce chef de jugement dépend du chef de condamnation et sa mise hors de cause en appel a pour conséquence également la réformation de sa condamnation aux dépens.

La SA Consumer finance sera déboutée de sa demande de condamnation solidaire aux dépens à son encontre.

Partie perdante en appel, elle supportera la charge des dépens d’appel.

Enfin, s’agissant des demandes au titre des frais irrépétibles Mme [B] veuve [N] bénéficie de l’aide juridictionnelle totale et ne motive pas en quoi elle a été amenée à débourser des frais et honoraires non compris dans les dépens dépassant le montant de l’aide juridictionnelle de sorte qu’elle sera déboutée de sa demande, de même que l’intimée qui succombe.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Déclare que l’effet dévolutif a opéré partiellement sur les dispositions du jugement déféré portant sur la condamnation de Mme [B] veuve [N] à la somme de 12 612,57 euros et ceux qui en dépendent ;

Déclare recevable Mme [P] [N] au titre de sa demande principale ;

Infirme le jugement déféré en ce qu’il a condamné Mme [N] solidairement à payer à la SA Consumer Finance la somme de 12 612,57 euros et aux dépens de l’instance ;

Statuant à nouveau et y ajoutant ,

Déboute la SA Consumer Finance de sa demande de condamnation solidaire au paiement du solde du prêt en application de son engagement de co-emprunteur ;

Déboute la SA Consumer Finance de sa demande de condamnation solidaire au paiement des dépens de première instance ;

Condamne la SA Consumer finance à supporter les dépens d’appel ;

Déboute les parties de leurs demandes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

 


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