REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 6
ARRET DU 01 JUIN 2022
(n° ,11pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/07518 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CB4HJ
Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Février 2020 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL RG n° 16/10612
APPELANTS
Monsieur [M], [X] [H]
né le 17 Janvier 1964 à LEOPOLDVILLE – Congo
5 rue Julie-Victoire Daubie
94450 LIMEIL-BREVANNES
Madame [N] [Y] épouse [H]
née le 14 Septembre 1969 à KINSHASA – CONGO
5 rue Julie-Victoire Daubie
94450 LIMEIL-BREVANNES
Représentée par Me Sophia BINET, avocat au barreau de PARIS, toque : D0014
INTIMEE
S.A. CREDIT FONCIER DE FRANCE
19 rue des Capucines
75001 Paris
N° SIRET : 542 02 9 8 48
Représentée par Me Béatrice LEOPOLD COUTURIER de la SELARL PUGET LEOPOLD – COUTURIER, avocat au barreau de PARIS, toque : R029
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 04 Avril 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Pascale SAPPEY-GUESDON, faisant fonction de Président
Mme Pascale LIEGEOIS, Conseillère
Mme Florence BUTIN,Conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Mme [Z] dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Anaïs DECEBAL
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par ,Pascale SAPPEY-GUESDON, faisant fonction de Président et par Anaïs DECEBAL, Greffière, présent lors de la mise à disposition.
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FAITS PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Suivant offre de prêt émise le 29 mars 2013 et acceptée le 15 avril 2013, la société CREDIT FONCIER DE FRANCE a consenti à monsieur [D], [M], [X] [H] et madame [N] [Y] son épouse, deux prêts destinés à financer l’acquisition d’un bien immobilier en état futur d’achèvement à vocation de résidence principale’:
‘ un prêt relais – n°6746248 – d’un montant de 106’800 euros et d’une durée de 24 mois, remboursable à terme, au taux nominal fixe de 3,95 % l’an, avec un taux effectif global de 4,76 % l’an et un taux de période mensuel de 0,40 % ;
‘ un prêt dénommé ‘PAS LIBERTE’- n°6746247 – d’un montant de 128’200 euros, d’une durée de 144 mois hors période de préfinancement de 36 mois maximum, au taux nominal fixe de 3,10 % l’an, remboursable moyennant des mensualités constantes de 1’158,49 euros (assurance comprise), avec un taux effectif global de 4,46 % l’an et un taux de période mensuel de 0,41 %. Le prêt a été réitéré par acte authentique le 22 mai 2013.
Le prêt relais n°6746248 étant arrivé à terme échu le 5 juin 2016, la société CREDIT FONCIER DE FRANCE a alors réclamé le paiement de la somme de 113’232,31 euros.
Puis par lettres recommandées avec demande d’accusé de réception séparées, datées du 6 juin 2016, la banque à mis en demeure monsieur et madame [H] de lui régler dans le délai d’un mois, les sommes de 117’741,75 euros correspondant au solde du prêt relais, et de 2’556,02 euros au titre du prêt ‘PAS LIBERTE’.
Pour sûreté et conservation de ses créances, évaluées à 150’000 euros chacune, la société CREDIT FONCIER DE FRANCE a été autorisée à’inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur le bien sis 4 avenue Anatole France à Choisy Le Roi, objet du prêt relais, suivant ordonnance du juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Créteil en date du 17 novembre 2016.
Puis la société CREDIT FONCIER DE FRANCE sera autorisée :
‘ suivant ordonnance du juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Créteil en date du 17 octobre 2018, à saisir à titre conservatoire entre les mains de la MACIF, couvrant l’assurance habitation des débiteurs, toutes sommes que ces derniers pourraient détenir en règlement du sinistre incendie intervenu le 10 janvier 2018 sur leur bien situé au 4 avenue Anatole France à Choisy Le Roi ;
‘ suivant ordonnance du juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Créteil en date du 8 novembre 2018, à inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur le bien acquis en l’état futur d’achèvement, objet du prêt ‘PAS LIBERTE’, situé rue des Herbages de Sèze à Limeil Brévannes,
Par acte d’huissier en date du 13 avril 2017, la société CREDIT FONCIER DE FRANCE a fait assigner monsieur et madame [H] devant le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Créteil statuant en matière de saisie immobilière aux fins de voir ordonner la vente forcée du bien immobilier leur appartenant, situé à Limeil-Brévannes.
Le 27 mars 2017, monsieur et madame [H] ont saisi la Commission de surendettement des particuliers du Val-de-Marne, laquelle a déclaré leur demande recevable le 15 mai 2017 et a adopté un plan conventionnel de redressement provisoire le 30 août 2017, accepté par la société CREDIT FONCIER DE FRANCE le 14 septembre 2017.
Par jugement du 7 septembre 2017, le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Créteil a ordonné la suspension de la procédure de saisie immobilière, dans la limite de deux ans, jusqu’à l’adoption définitive d’un plan conventionnel de redressement ou l’homologation par le juge des mesures recommandées par la Commission de surendettement. Suite au désaccord d’un des créanciers sur le plan conventionnel de redressement, monsieur et madame [H] ont finalement bénéficié de mesures imposées par la Commission de surendettement des particuliers le 16 mars 2018, homologuées par jugement du tribunal d’instance de Villejuif en date du 10 mai 2019, exécutoires à compter du 15 juin 2019. Ces mesures prévoient notamment le règlement à la société CREDIT FONCIER DE FRANCE de l’intégralité du solde du prêt ‘PAS LIBERTE’ n°6746247, et du prêt relais n°6746248, à l’issue d’un moratoire de 24 mois, à taux zéro.
Par jugement contradictoire en date du 4 février 2020, le tribunal judiciaire de Créteil a condamné solidairement monsieur et madame [H] à payer à la société CREDIT FONCIER DE FRANCE la somme de 119’334,76 euros suivant décompte arrêté au 15 octobre 2016, avec les intérêts au taux de 3,95 % à compter du 16 octobre 2016, a précisé que cette condamnation était prononcée sans préjudice des éventuelles dispositions plus favorables qui pourront être mises en place dans l’intérêt de monsieur et madame [H], par la Commission de surendettement des particuliers du Val-de-Marne, a dit n’y avoir lieu à capitalisation des intérêts par application des dispositions de l’article L. 312-23 du code de la consommation, et a débouté monsieur et madame [H] de leurs demandes de délai de paiement présentées sur le fondement de l’article 1343-5 du code civil.
*****
Par déclaration reçue au greffe de la cour le 17 juin 2020 monsieur et madame [H] ont interjeté appel de ce jugement. À l’issue de la procédure d’appel clôturée le 8 février 2022 les moyens et prétentions des parties s’exposent de la manière suivante.
Par uniques conclusions communiquées par voie électronique le 15 septembre 2020 les appelants
demandent à la cour de’bien vouloir :
‘Infirmer le jugement rendu en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a débouté la société CREDIT FONCIER DE FRANCE de ses demandes de condamnation aux dépens et aux frais irrépétibles’;
Et, statuant à nouveau,
Condamner la société CREDIT FONCIER DE FRANCE à des dommages et intérêts à hauteur de 119’334,76 euros (à parfaire)’;
Opérer la compensation avec les éventuelles condamnations qui seraient prononcées à l’encontre de M. [D] [H] et Mme [N] [Y], épouse [H]’;
Prendre acte que la Commission de surendettement du Val-de-Marne a ordonné des mesures recommandées qui prévoient un moratoire d’une durée de 24 mois, comprenant ainsi la suspension de l’exigibilité de la créance de la société CREDIT FONCIER DE FRANCE et des intérêts y afférents’;
Débouter la société CREDIT FONCIER DE FRANCE de l’ensemble de ses demandes ;
A titre subsidiaire’:
Accorder à M. [D] [H] et Mme [N] [Y], épouse [H], un report du paiement des sommes dues à la société CREDIT FONCIER DE FRANCE à l’issue d’un délai de 24 mois’;
Arrêter le cours de l’intérêt légal pendant le délai de grâce’;
A titre infiniment subsidiaire, dans l’hypothèse où la Cour considèrerait que les appelants ne seraient pas fondés à solliciter un report du paiement des sommes dues à la société CREDIT FONCIER DE FRANCE’:
Echelonner les condamnations qui viendraient à être prononcées à l’encontre de M. [D] [H] et Mme [N] [Y], épouse [H], sur un délai de 24 mois’;
En tout état de cause’:
Débouter la société CREDIT FONCIER DE FRANCE de l’ensemble de ses demandes’;
Condamner la société CREDIT FONCIER DE FRANCE aux dépens, dont distraction au profit de Maître Sophia BINET, en application de l’article 699 du code de procédure civile’;
Condamner la société CREDIT FONCIER DE FRANCE à payer à M. [D] [H] et Mme [N] [Y], épouse [H], une somme de 3’000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.’
Par uniques conclusions communiquées par voie électronique le 14 décembre 2020, l’intimé, la société CREDIT FONCIER DE FRANCE,
demande à la cour de’bien vouloir :
‘Déclarer M. [D] [H] et Mme [N] [Y], épouse [H], mal fondés en toutes leurs demandes, et les en débouter’;
Confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions’;
Condamner M. [D] [H] et Mme [N] [Y], épouse [H], à payer à la société CREDIT FONCIER DE FRANCE la somme de 3’000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile’;
Condamner M. [D] [H] et Mme [N] [Y], épouse [H], aux entiers dépens.’
Par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions précitées.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la mise en oeuvre de la responsabilité de la banque
Monsieur et madame [H] comme en première instance soutiennent que la banque a failli à son devoir de mise en garde, qu’elle doit à raison des capacités financières de l’emprunteur et des risques de l’endettement né de l’octroi des prêts.
La société CREDIT FONCIER DE FRANCE a agi avec une légèreté blâmable en octroyant aux appelants un prêt personnel amortissable en même temps qu’un prêt relais à une échéance rendant impossible la vente du bien immobilier, et ce alors que la société CREDIT FONCIER DE FRANCE, partenaire de l’opération immobilière, n’ignorait pas que le prêt avait pour objet de financer la future acquisition de la résidence principale de monsieur et madame [H], en cours de construction.
À aucun moment la société CREDIT FONCIER DE FRANCE ne prouve qu’elle aurait respecté son devoir de mise en garde sur le risque d’endettement né de l’octroi du prêt, ni sur le fait qu’il existait en l’espèce un très grand risque pour que le bien ne soit pas vendu au jour de l’exigibilité du prêt relais, ce alors qu’il n’est pas contesté que monsieur et madame [H] ont la qualité d’emprunteurs non avertis.
1- Selon les appelants, en relevant que le montant du capital prêté par le biais du prêt relais s’élève à 106’800 euros et que le bien immobilier de monsieur et madame [H] était estimé à 178’000 euros de sorte que ce prêt ne représente que 60 % du montant du prix du bien immobilier, et que les emprunteurs qui disposaient donc d’une marge de 40 %, soit 71’200 euros, avaient donc les capacités financières d’assumer le remboursement du prêt relais et également d’affecter le montant de cette marge restante au remboursement du prêt ‘PAS LIBERTE’, le premier juge n’a pas pris en considération que le prêt ‘PAS LIBERTE’ s’élevait à 180 % du ‘reste’ du prix de vente du bien immobilier appartenant à monsieur et madame [H], d’où une marge significativement négative de – 80 %.
Pour déterminer si le prêt consenti faisait courir un risque d’endettement excessif pour monsieur et madame [H], la société CREDIT FONCIER DE FRANCE aurait dû se fonder sur l’état de leurs charges et de leurs ressources au moment de l’octroi du prêt. S’il n’est pas contesté que le prêt souscrit ne faisait pas courir un risque d’endettement excessif à monsieur et madame [H] au cours de la période de préfinancement de 36 mois, il présentait pour les emprunteurs un risque d’endettement excessif, de 35,09 %, relativement à la période d’amortissement de 144 mois.
La société CREDIT FONCIER DE FRANCE pour solliciter la confirmation du jugement oppose qu’en matière de prêt relais, il y a lieu de constater le risque d’endettement excessif eu égard à la valeur du bien, en attente de revente, et à la situation patrimoniale de l’emprunteur, la nature du prêt relais ne présentant pas de complexité suffisante pour justifier, à elle seule, l’existence d’un devoir de mise en garde.
En l’espèce l’évaluation du bien à vendre était de 180’000 euros, et le prix de vente devait permettre de solder non seulement le prêt relais mais également et pour partie le prêt ‘PAS LIBERTE’.
Lors du montage du prêt en janvier 2013, le prêt relais a par sécurité été limité à 106’800 euros, soit 60 % de la valeur du bien. En conséquence, l’échéance retenue dans le montant du prêt relais est en adéquation avec la valeur du bien sur le marché, et au demeurant conforme aux valorisations produites en 2018 par monsieur et madame [H].
S’agissant plus particulièrement du prêt PAS LIBERTE la banque intimée soutient l’absence d’endettement excessif. Ce prêt, de 128’000 euros, stipulait une période de différé d’amortissement de 36 mois, soit une durée supérieure de celle du prêt relais, de 24 mois. Au terme du prévisionnel du prêt relais, le prix de vente aurait remboursé le prêt relais et les charges de prêt de monsieur et madame [H] n’auraient été constituées que des échéances du prêt ‘PAS LIBERTE’, soit 1’067,25 euros + 91,24 euros d’assurance. De plus, les charges afférentes au bien situé à Choisy Le Roi auraient disparu, et ce prêt ‘PAS LIBERTE’ fonctionnait en différé d’amortissement de 36 mois, n’étant entré en amortissement qu’à compter du 5 juin 2018. Aussi, le ratio charges / ressources s’établit à’:
23,80 % pour les 24 premiers mois, 12,65 % entre le 24e et le 36e mois, 33,79 % au-delà du 36e mois. En outre, une marge de 60 % a été prise sur le montant du prêt relais par apport à la valeur vénale du bien en janvier 2013, et si la vente était intervenue avant juin 2015, monsieur et madame [H] pouvaient espérer recevoir un disponible qui aurait notamment pu être affecté au remboursement anticipé partiel stipulé sans indemnité du prêt ‘PAS LIBERTE’, ce qui réduisait d’autant leur taux d’endettement.
La société CREDIT FONCIER DE FRANCE ajoute que l’endettement actuel de monsieur et madame [H] est le résultat cumulé d’une absence délibérée de volonté de vendre dans les délais leur bien à Choisy Le Roi, d’un endettement constitué postérieurement aux prêts immobiliers et contracté au travers de crédits à la consommation, et désormais la sinistralité du bien adossé au prêt relais.
Le tribunal, contrairement à ce que soutiennent les appelants, a exactement analysé la situation. Le crédit n’est pas excessif, notamment au vu des renseignements figurant dans la demande de prêt (pièce 19 de la banque), et tel qu’il est explicité de manière circonstanciée dans le jugement, par des motifs qu’il y a lieu d’adopter.
Il convient de relever que si les emprunteurs se prévalent d’un taux d’endettement qui serait à partir de la 36e semaine de 35,09 % pour la période d’amortissement de 144 mois, ce qui selon eux est ‘nettement supérieur aux 33 % généralement admis’, monsieur et madame [H] admettent qu’aucun risque d’endettement excessif n’était encouru au cours de la période du différé d’amortissement. Or le prêt doit être considéré dans sa globalité, et dès lors le ‘dépassement’ dont ils se plaignent n’est pas significatif.
2- Monsieur et madame [H] considérent aussi que la société CREDIT FONCIER DE FRANCE engage sa responsabilité en ce qu’elle avait une parfaite connaissance du projet immobilier, étant banque partenaire, tel qu’il était indiqué sur la plaquette d’information publicitaire que la société CONSTRUCTA PROMOTION a remis à monsieur et madame [H]. Contrairement à ce qu’a jugé le tribunal, il doit être reconnu à ce document une valeur contractuelle dès lors que la qualité de banque partenaire du projet de la société CREDIT FONCIER DE FRANCE a déterminé monsieur et madame [H] à solliciter un prêt auprès de cet établissement de crédit plutôt qu’un autre. Par ailleurs, il était prévu une fin de travaux et remise de bien pour le mois de mars 2015, soit deux mois seulement avant l’échéance de remboursement du prêt relais, ce que ne pouvait ignorer la société CREDIT FONCIER DE FRANCE. La banque a engagé sa responsabilité en fixant la fin du prêt relais à une date, le 24 mai 2015, qui ne permettait pas à monsieur et madame [H], en deux mois seulement, de mettre en vente leur bien et donc de s’acquitter de leur dette.
La société CREDIT FONCIER DE FRANCE répond que les circonstances de l’absence de vente du bien de Choisy Le Roi sont à mettre à la charge de monsieur et madame [H], qui ont délibérément attendu d’être installés à Limeil-Brévannes pour mettre en vente leur bien de Choisy Le Roi, et n’ont entrepris aucune démarche préalable pour vendre ce bien dans les délais du prêt, soit 24 mois. Ce n’est qu’en mai 2015, échéance à laquelle monsieur et madame [H] auraient dû procéder effectivement à la vente du bien, qu’ils ont donné mandat de vente.
En réplique à ces observations monsieur et madame [H] écrivent qu’ils ont multiplié les démarches pour mettre en vente leur bien immobilier, et ce dès le mois de novembre 2012, et disent en justifier, par leur pièce n°20. Au total, le bien a fait l’objet de onze estimations, auprès de trois agences immobilières différentes, entre 2012 et 2018, et afin que le bien soit vendu, ils n’ont pas hésité à revoir à la baisse le prix de vente de leur bien et à réaliser des travaux d’amélioration, en mars 2015.
Il doit être fait observer que pour autant, dans le courrier adressé au Médiateur daté du 15 septembre 2016 les emprunteurs écrivaient : ‘Je fais appel à vous aujourd’hui car depuis plus d’un an, notre appartement ne se vend pas malgré un prix très en dessous du marché et de nombreuses visites’ ‘ cf. leur pièce 4, ce qui confirme que leurs démarches en vue de vente n’ont véritablement été entreprises qu’au milieu de l’année 2015.
En outre monsieur et madame [H] reprochent à la banque d’avoir au moment de l’octroi du prêt relais, pour en déterminer les conditions, surévalué le bien à vendre, estimé à 178 000 euros, alors que le bien a été évalué en dernier lieu, le 18 avril 2018, à un prix compris entre 130 000 et 135 000 euros.
Cet argument n’est pas recevable dans la mesure où monsieur et madame [H] eux-mêmes, produisent en pièce 20 une estimation émanant de l’agence LAFORET, datée du 5 novembre 2012, évaluant leur bien dans une fourchette de 175 000 à 185 000 euros, puis une autre, établie par un autre agent immobilier le 7 novembre 2012, arrivant au même résultat (180 000 à 185 000 euros), ce qui correspond d’ailleurs à l’estimation que le CREDIT FONCIER DE FRANCE a dûment sollicité de SEREXIM évaluant le bien, visité le 14 janvier 2013, à 178 000 euros.
Il sera fait observer que le premier mandat de vente dont justifient monsieur et madame [H] est du 26 mai 2015 et que le prix retenu, de 174 000 euros rémunération du mandataire incluse, est significativement supérieur au prix de 155 000 euros net vendeur ressortant de l’évaluation qu’ils avaient recueillie trois mois auparavant. Ils sont donc particulièrement malvenus à reprocher à la banque d’avoir procédé à leur détriment à une surévaluation du bien à vendre lors de l’octroi du prêt relais, grief au demeurant infondé, pour lui imputer l’entière responsabilité de l’échec de leurs propres démarches, tardives et inadéquates.
Il doit être rappelé que la banque a accordé à monsieur et madame [H] une prolongation d’un an du prêt relais, ce dont ces derniers ne semblent pas se satisfaire, écrivant que la banque en a elle-même bénéficié en percevant les intérêts sur cette période supplémentaire.
Enfin les appelants ne sont pas davantage fondés à se plaindre de ce qu’à aucun moment l’offre de prêt ne mentionne que la vente du bien est indispensable pour que le solde du prêt relais soit ajouté au montant du prêt amortissable, ceci étant pourtant bien ce qui caractérise un ‘prêt relais’ de manière assez notoire pour qu’un emprunteur fût il profane en soit convaincu.
Dans ces conditions et au vu de ces éléments, monsieur et madame [H] ne sont pas fondés à soutenir que la société CREDIT FONCIER DE FRANCE a engagé sa responsabilité pour ne pas les avoir mis en garde dans l’octroi de ces prêts, dont le prêt relais, leur faisant perdre une chance de ne pas s’engager dans les conditions d’un endettement excédant leurs capacités financières.
3- Monsieur et madame [H] allèguent encore que la société CREDIT FONCIER DE FRANCE a engagé sa responsabilité en ce que de manière fautive elle s’est opposée à tout aménagement des modalités de remboursement des prêts. Le premier juge a dénaturé leur demande, en énonçant que ces derniers ‘ne sauraient par ailleurs faire grief à la banque de n’avoir pas donné suite à leur demande de refinancement du prêt relais’ rappelant qu’ ‘un établissement financier n’est ‘aucunement obligé d’accorder à un emprunteur le crédit qu’il demande’. En réalité monsieur et madame [H] avaient proposé à la société CREDIT FONCIER DE FRANCE de revoir le plan de financement, de transformer le prêt relais en prêt amortissable, de retirer le bien de la vente pour le mettre en location quelques temps afin de réduire les mensualités du prêt amortissable alors mis en place, de réduire les mensualités du prêt complémentaire, ou de procéder à toute autre modification des modalités de remboursement de nature à leur permettre un remboursement effectif des sommes dues à terme. Il s’agissait simplement de changer la nature de l’un des prêts conclus. Par son refus la société CREDIT FONCIER DE FRANCE a contribué à l’aggravation de la dette de monsieur et madame [H], alors qu’une solution amiable leur aurait permis de rembourser les sommes dues.
La société CREDIT FONCIER DE FRANCE répond que monsieur et madame [H] ont sollicité la société CREDIT FONCIER DE FRANCE en 2015 et 2016 sur la possibilité de louer le bien situé à Choisy Le Roi plutôt que de le vendre, ce qui a été refusé notamment en raison de l’existence d’impayés à partir d’août 2015, et du fait qu’aucune mensualité n’a plus été honorée depuis mars 2016. En outre monsieur et madame [H] ne peuvent prétendre sans se contredire que le montant du prêt relais aurait pu être amorti en s’intégrant au prêt ‘PAS LIBERTE’, ce qui leur aurait permis de rembourser les sommes dues, et par ailleurs faire grief à la société CREDIT FONCIER DE FRANCE de ne pas les avoir alertés sur le risque d’endettement excessif.
Le premier juge a fait une exacte application de la règle de droit et le complément d’explication que monsieur et madame [H] jugent utile de fournir ne peuvent faire échec au principe rappelé par le tribunal selon lequel la banque est libre d’accorder ou non son concours.
En résumé, c’est donc à bon droit que le tribunal jugeant constant que monsieur et madame [H] étaient des emprunteurs non avertis lors de l’octroi des prêts litigieux a retenu s’agissant ensuite de l’existence d’un risque d’endettement, d’une part que les prêts litigieux étaient parfaitement adaptés leurs capacités financières et d’autre part, que monsieur et madame [H] disposaient des compétences suffisantes pour appréhender et comprendre la portée et les risques du prêt relais souscrit, dont les risques liés à la difficulté de revente du bien étaient nécessairement connus d’un emprunteur non averti.
4- Enfin, monsieur et madame [H] estiment que la banque a engagé sa responsabilité pour avoir refusé la mainlevée de l’inscription hypothécaire entraînant ainsi l’échec de la vente du bien à laquelle ceux-ci devaient procéder, afin de rembourser leur dette à son égard. En l’espèce, la société CREDIT FONCIER DE FRANCE a déposé le 7 décembre 2016 une inscription d’hypothèque judiciaire provisoire sur le bien de Choisy Le Roi pour un montant de 150’000 euros, et le notaire chargé de réitérer la vente suite au compromis signé le 24 mars 2017 pour un montant de 135’000 euros, a reçu un refus de la société CREDIT FONCIER DE FRANCE pour la levée de l’inscription hypothécaire, aux motifs que celle-ci était d’un montant supérieur au prix de vente. Le futur acquéreur a alors renoncé à poursuivre l’acquisition du bien. Or, il apparaît que selon décompte arrêté au 15 octobre 2016, la créance de la banque s’élevait à la somme de 119’334,76 euros, outre les intérêts de 3,95 % à compter du 16 octobre 2016 qui se seraient élevés à une somme d’environ 2’100 euros, ainsi la vente du bien au prix de 135’000 euros aurait donc largement permis à la société CREDIT FONCIER DE FRANCE d’être désintéressée. Cette dernière soutient qu’elle aurait sollicité du notaire le détail des sommes à déduire et venant minorer le solde disponible à lui revenir, mais ce fait ne démontre en rien qu’elle a fait le nécessaire pour donner mainlevée de son inscription d’hypothèque. La société CREDIT FONCIER DE FRANCE aurait dû entreprendre les démarches nécessaires en vue de la rédaction d’un acte sous forme authentique levant l’hypothèque que la banque détenait sur le bien de Choisy le Roi, restant passive la banque a refusé la mainlevée de l’hypothèque. En conséquence, la responsabilité de la société CREDIT FONCIER DE FRANCE peut être retenue compte tenu du blocage dont celle-ci est à l’origine, et qui a empêché la réalisation de la vente et causé un préjudice à monsieur et madame [H], ce comportement ayant faire perdre une chance à ces derniers de vendre le bien en 2017 et de s’acquitter de leur dette.
La société CREDIT FONCIER DE FRANCE fait valoir que l’inscription d’hypothèque de la société CREDIT FONCIER DE FRANCE n’était pas le motif de l’absence de réalisation de la vente, dans la mesure où cette inscription est antérieure à l’offre de vente, et que la société CREDIT FONCIER DE FRANCE n’a jamais formalisé de refus de mainlevée de cette hypothèque.
Le tribunal qui contrairement à ce que soutiennent monsieur et madame [H] a parfaitement compris quelle était leur demande, a exactement retenu qu’ils ont été parfaitement informés, dès les 13 et 14 décembre 2016, de l’inscription d’hypothèque prise sur leur bien. Surtout, c’est à bon droit que le premier juge a indiqué qu’aucun texte n’oblige la banque à informer le notaire ou l’acquéreur d’un bien, de l’existence d’une inscription d’hypothèque, même prise quelques jours avant la vente. Celle-ci étant prévue pour le 24 mars 2017, monsieur et madame [H] quiétaient en situation de le faire, auraient dû en informer le notaire et l’acquéreur.
En outre, il ne ressort pas des pièces produites, que la banque ait formalisé un refus exprès à la mainlevée d’hypothèque, et contrairement à ce que soutiennent les appelants, il ne lui incombait pas de procéder à d’autres formalités que celles accomplies auprès du notaire alors en charge du dossier de vente, et dont elle justifie.
La banque n’a commis aucune faute et le jugement déféré doit être approuvé sur ce point.
Sur la suspension de l’exigibilité de la créance de la société CREDIT FONCIER DE FRANCE
Monsieur et madame [H] exposent qu’ils se sont vus accorder des mesures imposées par la Commission de surendettement du Val-de-Marne, qui prévoit un moratoire d’une durée de 24 mois, comprenant ainsi la suspension de l’exigibilité de la créance de la société CREDIT FONCIER DE FRANCE, et des intérêts y afférant. Cependant des créanciers, dont la société CREDIT FONCIER DE FRANCE, ont contesté ces mesures devant le tribunal d’instance de Villejuif, et à ce jour, les mesures recommandées par la Commission de surendettement ne sont pas entérinées, et il existe un risque qu’elles ne le soient pas, au regard des contestations des créanciers.
La société CREDIT FONCIER DE FRANCE fait valoir que nonobstant la procédure de surendettement dont bénéficient monsieur et madame [H], elle est bien fondée à solliciter leur condamnation afin d’obtenir un titre exécutoire à leur encontre, et ainsi convertir son hypothèque provisoire en hypothèque définitive, cette procédure qui n’entre pas dans le champ d’application de l’article L. 331-3-2 ancien du code de la consommation, n’a pas à être suspendue.
C’est a bon droit que le tribunal a jugé que l’existence d’une éventuelle procédure de surendettement n’empêche pas le créancier d’obtenir un titre dont l’exécution sera suspendue pendant la mise en ‘uvre des mesures de redressement adoptées, et dans ces conditions la société CREDIT FONCIER DE FRANCE peut valablement poursuivre monsieur et madame [H], en vue de l’obtention d’un titre exécutoire, ces derniers n’ayant d’ailleurs aucunement contesté le quantum réclamé, à l’exception de la capitalisation des intérêts’demandée par l’établissement prêteur.
Sur les délais de paiement
Monsieur et madame [H] font valoir qu’ils sont dans une situation financière compromise, comme l’indique leur assistante sociale et comme l’a reconnu la Commission de surendettement qui en toute hypothèse ne leur permet pas d’honorer les sommes réclamées par la société CREDIT FONCIER DE FRANCE, notamment en raison de l’impossibilité de remettre en vente l’appartement de Choisy Le Roi du fait du sinistre qui est intervenu et des opérations d’expertise en cours. Il est donc demandé à la cour de prononcer un report du paiement des sommes dues à la société CREDIT FONCIER DE FRANCE à l’issue d’un délai de 24 mois, conformément à l’article 1343-5 du code civil, et d’arrêter le cours de l’intérêt légal pendant le délai de grâce, et à défaut, un échelonnement des condamnations qui viendraient à être prononcées à leur encontre, sur un délai de 24 mois.
La banque intimée estime que cette demande n’a plus d’objet compte tenu du jugement rendu par le tribunal d’instance de Villejuif le 10 mai 2019 statuant sur la contestation des mesures imposées par la Commission de surendettement, fixant un plan d’apurement de 24 mois avec la possibilité de la saisir de nouveau en cas de signification des ressources de monsieur et madame [H] et de la composition de leur patrimoine immobilier. La société CREDIT FONCIER DE FRANCE étant intégrée dans ce plan, la demande de délai ne saurait prospérer, étant cependant rappelé que celle-ci est en droit d’obtenir un titre exécutoire à l’encontre de monsieur et madame [H] sans pour autant pouvoir l’exécuter durant l’exécution du plan de surendettement.
C’est là aussi à bon droit que le tribunal pour rejeter cette demande, a jugé que monsieur et madame [H] sont dans une situation financière qui les font relever des dispositions spéciales régissant le surendettement et non pas des dispositions ouvrant droit à allocation des simples délais ne dépassant pas 24 mois.
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Sur les dépens et les frais irrépétibles
Monsieur et madame [H] qui échouent dans leurs demandes, supporteront la charge des dépens et ne peuvent prétendre à aucune somme sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Aucune considération d’équité ne conduit à faire droit à la demande de la banque intimée formulée sur ce même fondement.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Et y ajoutant,
DÉBOUTE chacune des parties de sa demande d’indemnité procédurale fondée sur les dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;
CONDAMNE monsieur [D] [H] et madame [N] [Y] épouse [H] aux entiers dépens d’appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,