1 février 2024 Cour d’appel d’Amiens RG n° 22/05085

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1 février 2024 Cour d’appel d’Amiens RG n° 22/05085

ARRET

[S]

C/

S.E.L.A.R.L. BALLY MJ

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF EST

copie exécutoire

le 01 février 2024

à

Me WACQUET

Me CAMIER

SELARL BAILLY- MJ

CPW/MR

COUR D’APPEL D’AMIENS

5EME CHAMBRE PRUD’HOMALE

ARRET DU 01 FEVRIER 2024

*************************************************************

N° RG 22/05085 – N° Portalis DBV4-V-B7G-ITM3

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE D’AMIENS DU 17 NOVEMBRE 2022 (référence dossier N° RG 21/00075)

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

Monsieur [T] [S]

né le 06 Septembre 1966 à [Localité 7] (Turquie)

de nationalité Turque

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté, concluant par Me Christophe WACQUET de la SELARL WACQUET ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d’AMIENS

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2023/14 du 05/01/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de AMIENS)

ET :

INTIMEES

S.E.L.A.R.L. BALLY MJ ès qualités de liquidateur de la SAS BATI.IR

[Adresse 3]

[Localité 6]

non constituée

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF EST

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée, concluant par Me Hélène CAMIER de la SELARL LEXAVOUE AMIENS-DOUAI, avocat au barreau d’AMIENS substituée par Me Alexis DAVID, avocat au barreau d’AMIENS

DEBATS :

A l’audience publique du 07 décembre 2023, devant Mme Caroline PACHTER-WALD, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, l’affaire a été appelée.

Mme Caroline PACHTER-WALD indique que l’arrêt sera prononcé le 01 février 2024 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Malika RABHI

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Caroline PACHTER-WALD en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :

Mme Caroline PACHTER-WALD, présidente de chambre,

Mme Corinne BOULOGNE, présidente de chambre,

Mme Eva GIUDICELLI, conseillère,

qui en a délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 01 février 2024, l’arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Caroline PACHTER-WALD, Présidente de Chambre et Mme Malika RABHI, Greffière.

*

* *

DECISION :

Ne s’estimant pas rempli de ses droits au titre de l’exécution d’un contrat à durée indéterminée à effet du 2 mai 2019, M. [S], qui prétend avoir été embauché en qualité d’aide maçon par la société Bat.ir (la société) dont le siège social initialement situé à Roye a été transféré à Pantin le 1er octobre 2020, la société étant depuis lors inscrite au RCS de Bobigny, a saisi le conseil de prud’hommes d’Amiens le 8 mars 2021 de diverses demandes en paiement et de remise de documents.

Par décision du 20 mai 2021, le bureau de conciliation et d’orientation a ordonné à la société de produire des documents relatifs à la prise en charge par Pro-BTP de la garantie des arrêts de travail de M. [S], et de lui transmettre ses bulletins de paie depuis septembre 2020.

Par jugement du 2 juin 2021, le tribunal de commerce de Bobigny a placé la société Bat.ir en liquidation judiciaire, avec déclaration de cessation de paiement au 7 mai 2021. La SELARL Bailly MJ a été désignée en qualité de liquidateur judiciaire.

Par jugement du 17 novembre 2022, la juridiction prud’homale a :

dit que les parties étaient liées par une relation de travail ;

pris acte que la société n’avait pas fourni les pièces requises par la décision du bureau de conciliation et d’orientation rendue le 20 mai 2021 ;

liquidé l’astreinte prononcée le 20 mai 2021;

ordonné au liquidateur judiciaire, ès qualités, de remettre à M. [S] les bulletins de paie de septembre 2020, et ce sans astreinte ;

inscrit au passif de la liquidation judiciaire de la société, la créance suivante au profit de M. [S] :

– 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour la liquidation de l’astreinte prononcée le 20 mai 2021,

– 1 980,82 euros au titre du maintien de salaire des trois premiers mois de maladie outre 198,08 euros au titre des congés payés afférents,

– 2 498, 56 euros au titre de congés payé restant dus,

– 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour rétention d’indemnité de prévoyance, défaut de déclaration à la médecine du travail, perte de chance d’être licencié pour inaptitude professionnelle et privation d’indemnités journalières depuis le 2 septembre 2021,

– 500 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de mutuelle ;

constaté que la décision du 20 mai 2021 qui avait prononcé une astreinte, laquelle était exécutoire depuis le 13 juin 2021, était bien antérieure à la liquidation judiciaire de la société défenderesse ;

dit que la liquidation de l’astreinte ne s’analysait pas en des dommages et intérêts liés à l’exécution du contrat ou l’inexécution du contrat ;

débouté M. [S] de sa demande de résiliation judiciaire, de ses demandes indemnitaires afférentes et de sa demande de remise de documents de fin de contrat ;

dit n’y avoir lieu à faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

dit que seules les dispositions de l’article R.1454-28 du code du travail relatif à l’exécution provisoire de droit recevraient application, précisant que le salaire mensuel moyen calculé sur la moyenne des trois derniers mois était d’une valeur brute de 1 539,45 euros brut ;

débouté les parties de toute autre demande ;

donné acte à l’AGS-CGEA Ile de France Est de son intervention ;

rappelé que l’AGS-CGEA Ile de France Est ne pourrait avancer au titre du régime des créances salariales que le montant des condamnations énoncées dans la limite des plafonds applicables et conformément aux dispositions des articles L.3253-1 et suivants du code du travail et L.622-17 et L.625-9 du code de commerce à l’exclusion de la créance au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

dit que la garantie de la délégation Unedic AGS-CGEA Ile de France Est était due dans le cadre de l’exécution du contrat de travail ;

rappelé qu’en vertu des dispositions de l’article L.622-28 du code de commerce, le jugement d’ouverture de la procédure collective arrêtait le cours des intérêts légaux et conventionnels, ainsi que de tous intérêts de retard et majorations ;

laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens.

Par dernière conclusions notifiées par la voie électronique le 15 juin 2023, M. [S], qui est régulièrement appelant de ce jugement, demande à la cour d’infirmer partiellement la décision entreprise, de déclarer ses demandes recevables et bien fondées, de débouter l’intimée de son appel incident, et :

I – Au titre de la résiliation judiciaire, infirmant le jugement entrepris, de :

– prononcer la résiliation judiciaire avec effet au plus tard à la date de la liquidation en constatant que le salarié ne pouvait plus être à disposition de son employeur alors que ce dernier avait cessé toute activité avec la société Batir.ir, et avait transféré ses activités à Batiken dès septembre 2020 ;

– fixer les sommes suivantes au passif de la liquidation judiciaire de la société Bat.ir :

3 042,50 euros au titre du préavis : 2 mois (CCN) outre 304,25 euros au titre des congés payés sur préavis ;

930,07 euros au titre de l’indemnité de licenciement (base 3 derniers mois avant maladie), ancienneté 2 ans et 5 mois ;

5 324,37 euros au titre des dommages et intérêts pour rupture imputable à l’employeur (entreprise de moins de 11 salariés – plafond 3,5 mois) ;

– ordonner au mandataire liquidateur de lui remettre dans les 8 jours de la décision à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, une attestation Pôle emploi, un certificat de travail et un reçu pour solde de tout compte, en conformité avec la décision rendue ainsi que les bulletins de paie depuis septembre 2019 ;

II – Au titre de la liquidation de l’astreinte :

– constater que l’employeur n’a pas produit aux débats les pièces requises par la décision du 20 mai 2021 dans les délais fixés et prononcer en conséquence la liquidation de l’astreinte à la somme fixée de 100 euros par jour de retard à partir du 15ème jour suivant l’ordonnance, par ailleurs régulièrement signifiée par huissier, soit du 4 juin 2021 jusqu’au jour de la décision à intervenir ;

– fixer en conséquence sa créance sur la liquidation à la somme de 12 600 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la liquidation de l’astreinte, et dire que cette créance, s’analysant en des dommages et intérêts liés à l’inexécution du contrat, sera prise en charge par le CGEA ;

– rappeler que la créance liée à l’astreinte tire son origine dans la décision qui l’a prononcée et non celle qui la liquide soit de l’ordonnance du 20 mai 2021 antérieure à la liquidation ;

III – condamner le mandataire judiciaire à transmettre les bulletins de paie de septembre 2020 à ce jour sous astreinte de 500 euros par jour de retard, compte tenu de l’absence de production en dépit de l’astreinte précédemment prononcée ;

IV – Au titre des sommes restant dues au salarié :

– confirmer le jugement en ce qu’il a fixé sa créance au paiement des sommes dues au titre du maintien de salaire, soit 1 980,82 euros pour les 3 premiers mois de maladie professionnelle, outre les congés payés afférents 198,08 euros, dès le BCO en vertu des dispositions de l’article R.1454-14 du code du travail ;

– dire et juger que les indemnités de prévoyance relèvent d’une obligation issue de la convention collective du bâtiment et des accords de branche ;

– infirmer la décision entreprise sur la créance au titre des règlements Pro-BTP non reversés au salarié à la somme de 3 696,70 euros, rappeler qu’elles ont une nature salariale et fixer la créance sur la liquidation à ce montant (débouté non repris au dispositif du jugement) ;

– confirmer le jugement sur la fixation de la créance sur la liquidation des congés payés restant dus soit : 2 498,56 euros ;

– fixer sa créance sur la liquidation à la somme de 4 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rétention d’indemnités de prévoyance, défaut de déclaration à la médecine du travail après transfert du siège, perte de chance d’être licencié pour inaptitude professionnelle, privation d’indemnité journalières depuis le 2 septembre 2021 en infirmant la décision sur ce point ;

– confirmer la décision en ce qu’elle a fixé la créance de dommages et intérêts au titre du défaut de mutuelle supprimée délibérément lors du transfert de siège social à 500 euros ;

– dire que ces dommages et intérêts tirant leur origine dans l’inexécution du contrat de travail et du statut collectif, seront pris en charge par le CGEA conformément à la jurisprudence et à la loi,

V – dire que le CGEA devra garantir ces créances dans la limite de ses plafonds ;

VI – le tout avec intérêts légaux capitalisés après une année entière ;

VII – dire n’y avoir lieu à l’article 700 du code de procédure civile, le salarié bénéficiant de l’aide juridictionnelle totale et condamner la liquidation judiciaire aux dépens liquidés comme en matière d’aide juridictionnelle.

Par dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 29 mars 2023, l’association Unedic délégation AGS CGEA Ile de France Est demande à la cour de confirmer le jugement, sauf en ce qu’il a dit que sa garantie était due dans le cadre de l’exécution du contrat de travail, dit que les parties était liées par un contrat de travail, inscrit au passif de la liquidation diverses sommes, et statuant à nouveau :

A titre principal, de : constater l’absence de réalité du contrat de travail de M. [S] et le débouter en conséquence de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;

A titre subsidiaire, de :

– débouter M. [S] de ses demandes de garantie au titre des créances éventuellement fixées au passif au titre de la liquidation de l’astreinte, au titre au titre des indemnités versées par PROBTP, au titre des dommages et intérêts au titre de la rétention d’indemnités de prévoyance, du défaut de déclaration à la médecine du travail après transfert du siège, de la perte de chance d’être licencié pour inaptitude professionnelle, de la privation d’indemnité journalières depuis le 2 septembre 2021, au titre de dommages et intérêts pour défaut de mutuelle, au titre de la résiliation judiciaire du contrat de travail, soit : les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’indemnité compensatrice de préavis et de congés payés y afférents, l’indemnité de licenciement ;

– débouter M. [S] de sa demande au titre du maintien de salaire à 100 % durant ses trois premiers mois d’arrêt de travail et de sa demande au titre des congés payés restant dus ;

En tout état de cause, de :

– débouter M. [S] de toute demande plus ample ou contraire ;

– dire qu’elle ne peut en aucun cas être condamnée et que sa garantie n’est due que dans le cadre de l’exécution du contrat de travail, et en conséquence, dire que l’AGS ne peut en aucun cas garantir la somme sollicitée au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ni au titre de l’astreinte ;

– dire que sa garantie n’est également due, toutes créances avancées confondues pour le compte du salarié, que dans la limite des 3 plafonds définis notamment aux articles L.3253-17, D.3253-2 et D.3253-5 du code du travail et dans la limite des textes légaux définissant l’étendue et la mise en ‘uvre de sa garantie (articles L.3253-8 à L.3253-13, L.3253-15 et L.3253-19 à 24 du code du travail) ;

– dire que, par application des dispositions de l’article L.622-28 du code de commerce, le cours des intérêts a été interrompu à la date de l’ouverture de la procédure collective.

Le liquidateur judiciaire, auquel ont régulièrement été signifiées (à domicile) la déclaration d’appel et les conclusions, n’a pas constitué avocat.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 22 novembre 2023, pour l’affaire être plaidée à l’audience du 7 décembre suivant.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé aux dernières conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, il sera rappelé que l’article L.3253-8 du code du travail énumère les catégories de créances garanties par l’AGS, à savoir les créances nées antérieurement au jugement d’ouverture de la procédure, intervenant à l’occasion de la rupture du contrat de travail pendant la période d’observation ou dans le prolongement du plan ou de la liquidation, celles liées au contrat de sécurisation professionnelle ainsi que les créances nées, dans une certaine limite, pendant la procédure.

Le juge doit s’efforcer de vérifier que les créances «sont dues en exécution du contrat de travail», conformément à l’exigence générale posée par l’article L.3253-6 du même code. Seul compte ainsi le rattachement au contrat, ce qui implique la garantie du paiement de dommages et intérêts accordés en réparation d’un préjudice né de l’inexécution d’une obligation rattachée au contrat de travail. Sont également garanties dans certaines conditions, les sommes dues en vertu d’un accord collectif.

1. Sur l’existence d’un contrat de travail et la demande de résiliation judiciaire

M. [S] fait valoir qu’il a été engagé en qualité de maçon par la société Bati.IR et indique justifier de la réalité de la relation de travail et de l’exécution du contrat de travail, ayant produit beaucoup d’éléments concordants pour prouver tant la réalité de son contrat de travail que de son exécution, alors que l’AGS inverse la charge de la preuve. Il conteste avoir été gérant de plusieurs sociétés dont certaines ont fait l’objet d’une liquidation, soulignant avoir fait l’objet d’une usurpation d’identité, et qu’en tout état de cause le fait d’avoir été gérant par le passé n’empêche pas d’être ensuite salarié d’une entreprise. Il indique avoir été victime de son frère, gérant de la société employeur, qui a refusé violemment de lui payer son dû, l’obligeant ainsi à saisir le conseil de prud’hommes.

L’AGS réplique que la relation de travail alléguée est fictive, alors que le gérant de la société est le frère de M. [S], qu’il était seul salarié dans la société, que les signatures de l’employeur et du salarié sur le contrat de travail se ressemblent étrangement, et que l’intéressé, qui produit essentiellement des attestations qu’il se fait à lui-même ou des attestations sans pièce d’identité jointe non conformes à l’article 202 du code de procédure civile, ne justifie aucunement de l’exécution d’une prestation. Elle souligne que M. [S] ne justifie pas d’un paiement de salaire régulier puisqu’à deux reprises le montant figurant sur le bulletin de paie n’est pas celui perçu au regard de son relevé de compte, et souligne qu’il se prétend victime des agissements de son frère, mais a attendu 18 mois pour saisir le conseil de prud’hommes, alors qu’il est parfaitement au fait de la dissolution des sociétés puisqu’il a été dirigeant de 14 sociétés dont nombre d’entre elles ont fait l’objet d’une procédure collective.

Sur ce,

Le contrat de travail n’est pas défini par le code du travail. L’existence d’une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité des travailleurs. Il se dégage à ce titre trois critères : une prestation, une rémunération et un lien de subordination. Seul ce dernier est réellement déterminant pour caractériser un contrat de travail. Le lien de subordination se définit comme étant l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. Peut constituer un indice de subordination, le travail au sein d’un service organisé lorsque l’employeur en détermine unilatéralement les conditions d’exécution.

Il appartient à celui qui se prévaut d’un contrat de travail d’en établir l’existence. Cependant, en présence d’un contrat de travail apparent, il appartient alors à celui qui invoque le caractère fictif de celui-ci d’en rapporter la preuve.

En l’espèce, M. [S] produit :

– le contrat de travail à durée indéterminée du 2 mai 2019 dont il se prévaut,

– des bulletins de paie de mai 2019 à septembre 2020 établis par «BATI.IR» et son relevé de compte dont la comparaison avec ses bulletins de paie permet de vérifier que le salaire a effectivement été régulièrement perçu, même s’il existe une différence de montants à deux reprises,

– l’avis d’aptitude du 10 septembre 2019 et la fiche de pré-reprise du 8 décembre 2020 rédigés par le médecin du travail mentionnant la société Bati.IR comme employeur,

– des courriers de la caisse Pro-BTP mentionnant la société Bati.IR comme étant l’employeur.

Ces éléments caractérisent l’apparence d’un contrat de travail, et il appartient donc à l’AGS, qui invoque son caractère fictif, de supporter la charge de la preuve de la fraude qu’elle invoque.

Pour démontrer cette fictivité, l’AGS produit cependant uniquement des fiches de procédure collective démontrant que, avant la relation salariée qu’il invoque, M. [S] a été gérant d’une multitude de sociétés, dont certaines ont fait l’objet de procédure collective, et des extraits du BODACC dont il ressort qu’il a fait l’objet le 24 mars 2010 d’un jugement de faillite personnelle et le 30 mars 2009 d’une interdiction de gérer pour une durée de 10 ans, ce qui n’empêche pourtant aucunement l’intéressé, en 2019, d’occuper un poste salarié dans une société dont il n’est, cette fois, pas le gérant mentionné dans le RCS. En l’absence d’autres éléments, la cour ne peut tirer aucune conclusion du fait que le gérant de la société dont M. [S] se dit l’employé, est son frère. Ces éléments sont dès lors insuffisants à démontrer le caractère fictif du contrat de travail de M. [S].

Or, pour le reste, l’AGS se borne à procéder par des affirmations générales qui ne sont corroborées par aucun élément de preuve, et à critiquer les éléments produits par le salarié comme ses allégations, sans pour autant produire le moindre élément contraire.

Notamment, elle ne démontre pas que le contrat de travail est un faux, rien au dossier ne permettant de vérifier que M. [S] serait l’auteur de la signature sous «l’employeur», ce qui ne peut se déduire de la seule comparaison des deux signatures y figurant, qui présentent certes des similitudes mais ne sont pas identiques (le «S» en particulier est différent).

Par ailleurs, l’effectivité de la rémunération est également remise en cause par l’AGS au seul motif d’une distorsion à deux reprises entre la somme effectivement perçue par M. [S] et celle mentionnée sur les bulletins de paie sans pourtant aucune réclamation de sa part avant la présente procédure. Pour autant, l’absence de réclamation ne vaut pas acceptation, et M. [S], qui a saisi le conseil de prud’hommes dans les limites de la prescription, explique sans être utilement contredit qu’il s’agit là d’un manquement de son frère gérant qui ne respectait pas les textes, et auprès duquel il avait formé une réclamation verbalement en vain, alors qu’à l’exception de ces deux mois, le salaire mentionné sur les bulletins de paie était régulièrement payé.

Si la société n’a pas déclaré M. [S] au liquidateur judiciaire comme étant son employé comme l’indique l’AGS sans toutefois d’élément émanant du liquidateur à l’appui, cela ne saurait en tout état de cause suffire à anéantir l’apparence de contrat de travail ci-dessus retenue, alors notamment qu’il apparait que le salarié avait bien été déclaré à la caisse Pro-BTP et que l’AGS ne produit pas même un document de l’URSSAF (qu’elle ne justifie d’ailleurs pas avoir interrogé) démontrant l’absence d’une déclaration préalable à l’embauche malgré la mention figurant sur le contrat de travail.

L’AGS reproche encore à M. [S] , en inversant la charge de la preuve, de ne pas démontrer la réalité d’un travail effectif et un lien de subordination avec son frère, sans elle-même produire le moindre élément au soutien de son argumentation. Il sera néanmoins précisé que la cour ne peut à ce titre tirer aucune conclusion de l’absence d’attestations d’autres salariés de la société cités par M. [S] ou de l’absence de réponse de la société Hexaom maison France confort à un courrier de son avocat du 29 décembre 2021 pour lui demander de confirmer que M. [S] a bien travaillé sur des chantiers de la société Bati.IR entre le 2 mai 2019 et le 10 septembre 2019 dans le 62 et le 59, étant souligné qu’il produit une attestation avec une pièce d’identité jointe de Mme [G] faisant état de la présence de M. [S] travaillant sur le chantier de sa maison en mai 2019, mandaté par Maison France confort qui n’est contredite par aucun élément du dossier.

En conséquence, sans qu’il soit nécessaire de suivre plus avant les parties dans le détail d’une discussion se situant au niveau d’une simple argumentation, l’AGS ne contredit pas utilement les éléments de M. [S], et n’établit pas la fraude qu’elle allègue et le caractère fictif du contrat de travail. Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a retenu l’existence d’une relation de travail entre M. [S] et la société Bati.IR.

2. Sur l’astreinte et la demande de liquidation de l’astreinte

M. [S] expose qu’en dépit de la décision du bureau de conciliation et d’orientation qui ordonnait la remise par la société de documents sous astreinte, aucune régularisation n’est intervenue. Il sollicite par infirmation de la décision déférée une somme de 12 600 euros au titre de la liquidation de l’astreinte du 4 juin au 7 octobre 2021, dès lors que l’inexécution est délibérée et qu’elle entraine de lourdes conséquences pour lui, les bulletins de paie conditionnant les indemnités de prévoyance et journalières. Il souligne que du fait de la défaillance de l’employeur qui ne lui a pas fourni ces documents depuis le transfert de siège social en octobre 2020 ni de certificat de travail, il ne perçoit plus d’indemnités journalières de la sécurité sociale depuis le 10 septembre 2021. Il considère que l’astreinte est liquidée par l’octroi de dommages et intérêts et à ce titre doit être prise en charge par le CGEA dans la limite de ses plafonds.

En réplique, l’AGS fait observer que la liquidation de l’astreinte n’est pas une somme due en exécution du contrat de travail, mais résulte de la résistance fautive de l’employeur et qu’elle ne saurait donc être garantie, ce qui devra être précisé, le conseil de prud’hommes ayant omis de le reprendre dans le dispositif de sa décision.

Sur ce,

La société Bati.IR a été invitée, par décision du 20 mai 2021 du bureau de conciliation et d’orientation notifiée à la société le 28 mai suivant, à remettre au salarié des bulletins de paie et justificatifs d’indemnités journalières dans un délai de 15 jours.

En l’absence de tout recours exercé à l’encontre de cette décision, il n’est pas discuté que l’astreinte a ainsi commencé à courir le 13 juin 2021. Sur la période correspondant à l’injonction, la créance d’astreinte (ayant pour fait générateur la décision qui la prononce) étant antérieure au prononcé de la liquidation judiciaire intervenu le 2 juin 2021, au cours de l’instance devant la juridiction prud’homale, instance qui s’est poursuivie en présence des organes de la procédure ou ceux-ci dûment appelés, ne pouvait être prévue qu’une fixation de créance.

Rien au dossier ne justifie que l’employeur avait remis les documents visés au salarié le 7 octobre 2021, et au fond, le principe de la liquidation de l’astreinte n’est pas contesté, le liquidateur judiciaire, ès qualités, n’ayant pas conclu et ne soumettant donc à la cour aucun moyen de fait ou de droit au soutien d’une infirmation, pas plus que l’AGS.

S’agissant du montant de l’astreinte liquidée, il y a lieu de tenir compte de la liquidation judiciaire intervenue postérieurement à la décision, qui génère de façon évidente des difficultés pour l’exécution de l’injonction. Le premier juge a ainsi parfaitement évalué la créance de M. [S] au titre de la liquidation de l’astreinte à 1 500 euros, et la décision sera confirmée de ce chef, et en ce qu’elle a rejeté la demande de M. [S] de dire que les dommages et intérêts sont liés à une inexécution du contrat de travail et sont pris en charge par société Bati.IR, dès lors qu’en application l’article L.3253-8 du code du travail, les sommes dues au titre d’une astreinte prononcée pour résistance à l’exécution d’une décision de justice échappent à la garantie de l’AGS.

3. Sur l’exécution du contrat de travail

3.1 – Quant à la demande au titre du maintien de salaire

Le salarié demande un reliquat au titre du maintien de salaire pour les 3 premiers mois de maladie professionnelle, en faisant valoir qu’il était victime d’une maladie professionnelle depuis le 26 juillet 2019 pour une période de plus de 30 jours et avait donc droit, en application de la convention collective du bâtiment, à un maintien de son salaire intégralement pendant 90 jours sous déduction des indemnités journalières perçues, ce qui n’a pas été appliqué par l’employeur.

L’AGS réplique que les circonstances de l’arrêt de travail de M. [S] sont obscures dans la mesure où il revendique une maladie professionnelle en raison de ses arrêts de travail mais qu’il a perçu des indemnités journalières tantôt au titre d’un accident du travail tantôt au titre de la maladie simple. Elle soutient que M. [S] ne justifie pas d’une prise en charge au titre d’une maladie professionnelle émanant de la Caisse d’assurance maladie lui donnant droit à un maintien de salaire conventionnel pour la période concernée par sa demande.

Sur ce,

Selon l’article 6-12 de la convention collective des ouvriers employés par les entreprises du bâtiment occupant jusqu’à 10 salariés, en cas d’indisponibilité pour accident ou maladie, professionnels ou non, les ouvriers sont indemnisés dans les conditions fixées ci-dessous s’ils justifient au moment de l’arrêt de travail : pour les ouvriers âgés d’au moins 25 ans, soit de 3 mois d’ancienneté dans l’entreprise ; soit de 1 mois d’ancienneté dans l’entreprise, s’ils ont au moins acquis 750 points de retraite CNRO.

L’article 6.131. précise que l’indemnité est versée après un délai de 3 jours d’arrêt de travail, sauf lorsque l’indisponibilité est due à un accident ou une maladie couverts par la législation de sécurité sociale relative aux accidents du travail et aux maladies professionnelles (à l’exclusion des accidents de trajet générant un arrêt de travail d’une durée inférieure ou égale à 30 jours).

L’article 6.132. ajoute que l’indemnité est calculée sur la base de 1/30 du dernier salaire mensuel précédant l’arrêt de travail, pour chaque jour, ouvrable ou non, d’arrêt de travail. Le salaire mensuel pris en considération comprend tous les éléments constitutifs du salaire, à l’exclusion des indemnités ayant le caractère d’un remboursement de frais.

Selon l’article 6.133. « l’indemnité complète les indemnités journalières de la sécurité sociale et, éventuellement, toute autre indemnité ayant le même objet, perçue par l’ouvrier à l’occasion de son arrêt de travail , dans les conditions suivantes (voir tableaux ci-annexés).

1. Pour un accident ou une maladie non professionnels :

– jusqu’à concurrence de 100 % du salaire de l’intéressé, pendant 45 jours à partir de l’expiration du délai déterminé à l’alinéa 6.131 ;

– jusqu’à concurrence de 75 % du salaire de l’intéressé, après ces 45 jours et jusqu’au 90e jour inclus de l’arrêt de travail ;

2. Pour un accident ou une maladie couverts par la législation de sécurité sociale relative aux accidents du travail et aux maladies professionnelles :

– pour une indisponibilité inférieure ou égale à 30 jours :

– jusqu’à concurrence de 90 % du salaire de l’intéressé du 1er au 15e jour d’ arrêt ;

– jusqu’à concurrence de 100 % du salaire de l’intéressé après ces 15 jours et jusqu’au 30e jour inclus de l’arrêt de travail ;

– pour une indisponibilité supérieure à 30 jours :

– jusqu’à concurrence de 100 % du salaire de l’intéressé du 1er au 90e jour de l’arrêt de travail.»

En l’espèce, M. [S] a été placé en arrêt de travail pour maladie professionnelle le 11 septembre 2019 au regard des avis d’arrêts de travail qu’il produit. Par courrier du 2 novembre 2021, l’assurance maladie a reconnu la prise en charge de cette maladie au titre des risques professionnels. L’AGS ne critique pas utilement ces éléments, dès lors qu’elle ne produit pas le moindre élément contraire.

Il résulte par ailleurs de l’analyse comparative des bulletins de paie et des attestations de paiement des indemnités journalières versés aux débats, que l’employeur n’a pas respecté son obligation de maintenir intégralement le salaire de M. [S] pendant 90 jours, sous déduction des indemnités journalières de la Caisse d’assurance maladie à compter du premier jour d’arrêt pour maladie professionnelle, et le salarié, qui n’a donc pas été rempli de ses droits, livre un calcul exact de l’arriéré réclamé, qui n’est pas spécifiquement contesté à titre subsidiaire s’agissant des données utilisées, de ses modalités ou encore du montant final.

En conséquence, faute pour l’employeur d’avoir régularisé l’intégralité des indemnités complémentaires dues au salarié pour la période en cause, le jugement sera confirmé en ce qu’il a fait droit à la demande de fixation de créance pour le montant exactement retenu.

3.2 – Quant à la créance due au titre des règlements Pro-BTP non reversés au salarié

Le salarié fait valoir que la créance au titre des sommes versées par Pro-BTP à l’employeur ne lui ayant pas été reversées, s’élève à la somme de 3 696,70 euros, et que cette somme a une nature salariale.

L’AGS s’en rapporte à l’appréciation de la cour sur le bien fondé de la demande, mais observe que ces indemnités ne sauraient être garanties, le mécanisme de subrogation par l’employeur dans le cadre du versement des indemnités de prévoyance ne pouvant modifier la nature des sommes et leur conférer un caractère salarial.

Sur ce,

C’est à l’employeur de prouver qu’il a bien reversé au salarié l’intégralité des sommes qu’il a perçues de la caisse pour le compte de celui-ci.

En l’espèce, l’absence de rétrocession par l’employeur des indemnités journalières-prévoyance lui ayant été versées pour le compte du salarié par la caisse ProBTP, subrogée à l’employeur, est établie par les éléments produits par M. [S] que rien au dossier ne vient contredire.

La décision déférée, qui a rejeté la demande, est donc infirmée. Cette créance à l’encontre de la liquidation judiciaire de la société Bati.IR, née antérieurement à l’ouverture de la procédure collective, sera fixée à 3 696,70 euros. Il ne s’agit pas là d’une inexécution du contrat de travail, ni de l’absence de mise en oeuvre par l’employeur du régime de prévoyance, et la garantie de l’AGS ne saurait être retenue pour cette créance qui résulte d’une action en restitution dirigée contre l’employeur pour une somme dont il n’était pas le débiteur. M. [S] sera débouté de sa demande à l’encontre de l’AGS.

3.3 – Quant à la demande de dommages et intérêts pour rétention d’indemnités de prévoyance, défaut de déclaration à la médecine du travail après transfert du siège, perte de chance d’être licencié pour inaptitude professionnelle, privation d’indemnité journalières depuis le 2 septembre 2021

M. [S] fait valoir qu’il a subi un préjudice important du fait de la rétention par l’employeur d’indemnités de prévoyance puisqu’il n’a perçu que ses indemnités journalières de la sécurité sociale et s’est trouvé en conséquence dans une situation financière difficile suite à sa maladie professionnelle. Il soutient que l’employeur qui, de façon répétée, n’ a pas respecté la convention collective, ne l’a pas non plus déclaré à la médecine du travail après le transfert du siège social en octobre 2020 et qu’il a été refusé par la médecine du travail compétente à [Localité 6], qui lui a déclaré ne pas connaître l’entreprise. Il estime que ce défaut de déclaration et de paiement de cotisation de la part de l’employeur est d’autant plus grave qu’il aurait dû être placé en inaptitude professionnelle et licencié, alors qu’en outre il ne perçoit plus d’indemnités journalières depuis septembre 2021 du fait de l’absence de certificat de travail. Il estime que l’AGS doit sa garantie pour les dommages et intérêts ainsi réclamés dès lors que le paiement d’indemnités relève de l’application obligatoire d’une convention collective ou d’un accord de branche.

L’AGS réplique que sa garantie doit être écartée dès lors que la demande de dommages et intérêts ne relève en rien de l’exécution du contrat de travail ou de sa rupture, mais d’une action fautive de l’employeur auquel M. [S] fait grief non pas d’avoir fait une application défaillante du contrat mais de n’avoir notamment pas procédé au versement effectif des fonds reçus en bonne application du contrat de prévoyance.

Sur ce,

Au vu des éléments de la procédure, aucun manquement au titre de la mise en oeuvre du contrat de prévoyance, au titre du paiement des cotisations ou au titre de la déclaration de son salarié, ne peut être retenu à l’encontre de l’employeur. En revanche, il ressort des développements qui précèdent que l’employeur n’a pas reversé au salarié les sommes perçues pour son compte au titre du contrat de prévoyance. Le manquement est donc avéré, et M. [S], qui n’a ainsi pu percevoir les sommes dues pour un montant important de plus de 3 000 euros pendant une période longue, justifie à ce titre d’un préjudice qui est ainsi en lien avec l’inexécution du contrat de prévoyance et non avec l’exécution du contrat de travail ou de la convention collective.

M. [S] justifie par ailleurs que par courrier Pro-BTP lui a réclamé le certificat de travail en septembre 2021, sans toutefois justifier ne plus percevoir d’indemnités depuis lors comme il l’indique sans autre élément à l’appui.

Il affirme également sans preuve avoir réalisé des démarches auprès de la médecine du travail de [Localité 6] postérieurement au transfert du siège social de l’entreprise, qui aurait refusé sa prise en charge. Toutefois, l’employeur ne justifie pas du respect de ses obligations auprès de la médecine du travail de [Localité 6] postérieurement au transfert du siège social. Il n’en demeure pas moins que M. [S], qui produit lui-même une fiche de pré-reprise du 8 décembre 2020 dont il résulte que le médecin du travail du département de la Somme a poursuivi sa prise en charge postérieurement au transfert intervenu en octobre 2020, affirme sans preuve avoir été privé d’une chance d’être licencié pour inaptitude, ne justifie pas du préjudice allégué.

En conséquence, le premier juge ayant parfaitement apprécié le préjudice de M. [S], le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a alloué au salarié un montant de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts, qui répare intégralement le préjudice subi découlant de la seule inexécution du contrat de prévoyance par ailleurs régulièrement mis en oeuvre, les autres points n’ayant pas été retenus. Ce préjudice n’étant pas lié à une inexécution du contrat de travail ou à l’absence de mise en oeuvre par l’employeur du régime de prévoyance, la garantie de l’AGS ne saurait donc être retenue pour cette créance, et le jugement déféré sera de ce chef infirmé.

3.4 – Quant à la demande de dommages et intérêts pour privation de la mutuelle santé

M. [S] fait valoir qu’il ne bénéficie plus d’une complémentaire santé depuis septembre 2019, la mutuelle l’ayant informé d’une rupture de son contrat de travail à compter du 12 septembre 2019 alors pourtant qu’il n’avait ni démissionné ni été licencié et que son contrat de travail était uniquement suspendu du fait de son arrêt de travail. Il soutient que depuis lors l’employeur n’assume plus les cotisations à la mutuelle alors que la mise en place de la mutuelle d’entreprise est prévue par l’accord interprofessionnel promulgué le 11 janvier 2013 et qu’il s’agit donc d’une obligation résultant du contrat de travail, ce qui justifie une prise en charge par l’AGS.

L’AGS réplique que la demande de M. [S] interpelle alors qu’il n’a formulé aucune demande à son employeur avant la saisine du conseil de prud’hommes et ne démontre aucun préjudice. Elle soutient qu’en tout état de cause, elle ne saurait garantir la somme éventuellement fixée au passif à ce titre alors que ces dommages et intérêts ne peuvent tirer leur origine du contrat de travail.

Sur ce,

Depuis le 1er janvier 2016, les entreprises doivent offrir à l’ensemble de leurs salariés une couverture complémentaire frais de santé obligatoire qui garantit un niveau minimal de remboursement des frais engagés par le salarié à l’occasion de la maladie, de la maternité ou de l’accident. Cette couverture minimale dénommée « panier de soins minimal » comprend la prise en charge totale ou partielle des dépenses énumérées par les dispositions des articles L.911-7 et D. 911-1 du code de la sécurité sociale. La couverture minimale frais de santé offerte aux salariés doit prendre en charge intégralement le ticket modérateur, soit la part restant à la charge des assurés sur toute dépense faisant l’objet d’un remboursement par la sécurité sociale, sur les consultations, actes et prestations remboursables par l’assurance-maladie obligatoire.

En application des dispositions de l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver les faits nécessaires au succès de sa prétention, en particulier l’existence d’un fait générateur de responsabilité, du préjudice en découlant et donc d’un lien de causalité entre le préjudice et la faute.

En l’espèce, s’il est constant que M. [S] a bénéficié d’une couverture complémentaire frais de santé jusqu’au 12 septembre 2019, il produit en revanche un courrier du 15 juillet 2020 de CIC assurances lui notifiant la résiliation à effet du 12 septembre 2019 de son adhésion du fait de l’information donnée par l’employeur de la fin de son contrat de travail. Or, la partie adverse ne justifie pas d’élément permettant d’établir que conformément à ses obligations légales, l’employeur a, postérieurement à cette date, offert à l’intéressé une telle couverture alors même qu’il a poursuivi les prélèvements au titre de la complémentaire santé, au regard des bulletins de paie produits.

Si l’AGS s’étonne légitimement de l’absence de réaction de M. [S] avant la saisine de la juridiction prud’homale, plus d’un an après la date d’effet de cette résiliation, il n’en demeure pas moins qu’aucune conséquence juridique ne peut être tirée de cette abstention, alors que le manquement est avéré dès lors que la société Bati.IR a mis fin à la mutuelle sans pour autant avoir régulièrement mis fin au contrat de travail de l’intéressé. Le non respect par la société Bati.IR des obligations mises à sa charge a créé un préjudice au salarié qui s’est ainsi trouvé dépourvu de protection santé, d’autant plus important qu’il était à cette période toujours en arrêt de travail.

En conséquence, le premier juge ayant parfaitement évalué le préjudice qui est intégralement réparé par la somme fixée à 500 euros, la décision déférée sera confirmée.

La garantie de ressources et le remboursement de frais médicaux prévus par la convention collective applicable sont des sommes dues en exécution du contrat de travail et du statut collectif qu’il implique. L’indemnité due en réparation du préjudice subi par le salarié du fait du non-paiement par l’employeur des cotisations au titre du contrat de mutuelle, obligation conventionnelle de l’employeur doit donc être garantie par l’AGS.

3.5 – Quant aux congés payés restant dus

M. [S] fait valoir que la maladie professionnelle et l’accident du travail donnent lieu à des congés payés dans la limite d’un an et que l’employeur n’a pas régularisé sa situation auprès de la caisse de congés du BTP, ce qui implique qu’il a droit à 30 jours ouvrables de congés payés du 12 septembre 2019 au 12 septembre 2020, outre les congés payés afférents à la période précédente et non pris, qui ne lui ont pas été payés.

L’AGS réplique que les circonstances de l’arrêt maladie de M. [S] sont obscures dans la mesure où il revendique une maladie professionnelle alors que la caisse d’assurance maladie a versé des indemnités journalières tantôt au titre d’un accident du travail tantôt au titre de la maladie simple. Elle estime que «faute de justifier de la reconnaissance par la Caisse d’assurance maladie de la maladie professionnelle qu’il revendique et que celle-ci soit survenue à l’occasion des arrêts de travail pour lesquels il s’en prévaut, M. [S] ne pouvait qu’être débouté de sa demande.»

Sur ce,

Aux termes de l’article L.3141-1 du code du travail, tout salarié a droit, dès lors qu’il en remplit les conditions, à un congé annuel payé à la charge de son employeur. L’article L.3141-3 du même code du travail précise qu’il a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur. Selon l’article L.3141-4, sont assimilés à un mois de travail effectif pour la détermination de la durée du congé les périodes équivalentes à quatre semaines ou vingt-quatre jours de travail.

L’article L.3141-5 5° ajoute que certaines périodes sont considérées comme du travail effectif pour la détermination du congé et notamment, dans la limite d’une durée ininterrompue d’un an, celles pendant lesquelles l’exécution du contrat de travail est suspendue pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle.

Conformément à l’article L.3141-24 du code du travail, le congé annuel prévu à l’article L.3141-3 du code du travail ouvre droit à une indemnité de congé payé égale au dixième de la rémunération brute totale perçue par le salarié au cours de la période de référence. Toutefois, cette indemnité ne peut être inférieure au montant de la rémunération qui aurait été perçue pendant la période de congé si le salarié avait continué de travailler.

Dans certains secteurs, le paiement des indemnités de congés payés est confié à une caisse de congés payés à laquelle les employeurs doivent s’affilier obligatoirement en application de l’article L.3141-32 du même code.

Ce régime particulier concerne notamment les professions du secteur des bâtiments et travaux publics (article D.3141-12 et suivants du code du travail), pour lesquelles la gestion et la prise en charge de l’indemnité de congé sont assurées par les caisses de congés payés, organismes de compensation qui se substituent aux employeurs et ont pour mission d’assurer le recouvrement des cotisations imposées aux employeurs assujettis et de verser aux salariés bénéficiaires les indemnités de congés payés qui leur sont dues.

C’est ainsi la caisse de congés payés qui est débitrice des salariés concernés de l’ indemnité, ce dont il résulte que l’employeur, qui n’est pas le débiteur de l’indemnité de congés payés, n’a pas à justifier du paiement de celle-ci et que la demande en paiement de l’indemnité de congés payés doit être dirigée contre la caisse.

Cependant, la caisse peut opposer au salarié une exception d’inexécution lorsque l’employeur a été défaillant dans le paiement des cotisations à sa charge et ne payer dans ce cas les congés qu’à due concurrence des cotisations qu’elle a reçues et ne verser le solde qu’après régularisation par l’employeur de sa dette. La substitution obligatoire de la caisse pour le paiement de l’indemnité de congés payés est en effet subordonnée à l’exécution par l’employeur de ses obligations à son égard, et il appartient à ce dernier, relevant d’une caisse de congés payés, en application des articles L.3141-12, L.3141-14 et L.3141-30 du code du travail, interprétés à la lumière de l’article 7 de la directive 2003/88, de prendre ainsi les mesures propres à assurer au salarié la possibilité de bénéficier effectivement de son droit à congé auprès de la caisse de congés payés, et, en cas de contestation, de justifier qu’il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement. Seule l’exécution de ses obligations entraîne la substitution de l’employeur par la caisse pour le paiement de l’indemnité de congés payés aux travailleurs déclarés par l’employeur. À défaut le salarié pourra contraindre l’employeur défaillant à exécuter son obligation. La charge de la preuve à cet égard incombe à l’employeur.

En l’espèce, M. [S] relève de la convention collective des ouvriers du bâtiment et la société, relevait d’une caisse de congés payés. Il n’est cependant produit aucun élément permettant d’établir que société Bati.IR a mis le salarié en mesure de prendre l’ensemble des jours de congés acquis depuis le début de la relation contractuelle, ni qu’elle a rempli ses obligations à l’égard de la caisse de congés payés à laquelle elle était tenue de s’affilier, privant ainsi le salarié de l’exercice de ses droits.

Faute d’établir avoir satisfait à ses obligations à l’égard de la caisse de congés payés et avoir mis en ‘uvre toutes les mesures pour garantir l’effectivité du droit au repos du salarié, la substitution de l’employeur par la caisse ne s’est pas opérée, et ce dernier reste donc débiteur des indemnités de congés payés correspondantes directement auprès du salarié.

Il résulte des bulletins de paie produit que M. [S] avait cumulé 30 jours de congés payés non pris en 2019 et qu’il a, à compter d’août 2019, été placé en arrêt de travail pour une maladie professionnelle reconnue par l’assurance maladie, continuant ainsi à cumuler pendant un an des jours de congés payés. L’AGS critique les circonstances de cet arrêt maladie en se contentant de les dire obscures sans aucune pièce permettant de remettre en cause les avis d’arrêt de travail produits et la reconnaissance par la caisse d’assurance maladie.

Aussi, le jugement déféré doit être confirmé en ce qu’il a fait droit à la demande de rappel de M. [S] dont le montant n’est pas spécifiquement contesté à titre subsidiaire, pour lequel l’AGS ne conteste pas devoir sa garantie.

3.6 – Sur la remise de bulletins de paie

M. [S] réclame les bulletins de paie à compter de septembre 2020 avec une astreinte de 500 euros par jour de retard, compte tenu de l’absence de production en dépit de l’astreinte précédemment prononcée. L’AGS ne répond pas sur ce point.

Sur ce,

Il n’est pas établi que les bulletins de paie au-delà de septembre 2020 aient été remis à M. [S] qui produit ses fiches de paie jusque septembre 2020 inclus. Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu’il a ordonné la délivrance des bulletins de paie manquants sans prononcer une astreinte, celle-ci n’apparaissant en l’état pas justifiée au regard des éléments du dossier.

4. Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail

M. [S] sollicite la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur à effet au plus tard à la date de la liquidation judiciaire du fait de la disparition de l’entreprise dès avant cette date, aux motifs des multiples manquements de l’employeur et en particulier de la rétention d’indemnités de prévoyance qu’il estime être d’une particulière gravité puisque constitutive d’un abus de confiance, et de l’absence de paiement du salaire. Il souligne que le liquidateur ne l’a pas licencié comme il était tenu de le faire alors qu’au moment de la liquidation il faisait toujours partie des effectifs de la société, n’ayant pas été transféré comme les autres employés, et ne l’a pas non plus informé dans les 10 jours de la liquidation dans le cadre de l’instance en cours. Il indique que la société n’avait plus d’activité avant même la liquidation puisque tous ses salariés avaient été transférés à la société Batiken nouvellement créée et l’activité totalement reprise.

L’AGS réplique qu’au jour de l’ouverture de la procédure collective, le contrat de travail de M. [S] n’était pas rompu mais suspendu du fait de son arrêt de travail en cours depuis août 2019, et que la résiliation ne peut donc intervenir qu’à la date du jugement, ou désormais à la date de l’arrêt à venir. Elle estime que le délai de 15 jours suivant la date du jugement ayant prononcé la liquidation judiciaire de la société Bati.IR expirait le 17 juin 2021, date à laquelle le contrat de travail n’était donc pas rompu, ce qui, en application de l’article L.3253-8 2°, exclut sa garantie pour les dommages et intérêts et indemnités dues dans le cadre de la rupture.

Sur ce,

La voie de la résiliation judiciaire est ouverte au salarié qui invoque que l’employeur a gravement manqué à son égard à ses obligations contractuelles, légales ou conventionnelle, elle produit, lorsqu’elle est accueillie, tous les effets attachés à un licenciement prononcé sans cause réelle et sérieuse ou nul.

Lorsque les manquements de l’employeur à ses obligations légales, conventionnelles ou contractuelles sont établis, ont revêtu une gravité suffisante et empêchent la poursuite du contrat de travail, la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail doit être accueillie. Si le juge fait droit à la demande de résiliation, celle-ci produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il résulte de l’article 1224 du code civil qu’en cas de résiliation judiciaire du contrat de travail, la date d’effet de la résiliation ne peut être fixée qu’au jour de la décision qui la prononce, dès lors que le contrat n’a pas été rompu avant cette date, et que le salarié est toujours au service de l’employeur.

Selon l’article 1353 du même code, il appartient à l’ employeur de démontrer qu’à la date de la décision prononçant la résiliation judiciaire, le salarié ne se tenait plus à sa disposition.

L’AGS n’a pas à garantir les indemnités résultant de la résiliation judiciaire d’un contrat de travail prononcée plus de quinze jours après le jugement de liquidation judiciaire.

En l’espèce, au regard des développements qui précèdent, les manquements allégués par le salarié quant à la rétention par l’employeur des indemnités de prévoyance devant lui être reversées depuis février 2020 jusqu’au 2 septembre 2021 et quant à l’absence de paiement intégral de son salaire d’octobre à novembre 2019 qui n’avait toujours pas été régularisé à la date de sa requête, sont établis. Cette situation a eu pour effet de priver le salarié d’une partie non négligeable de revenus, et ce pendant une longue période. Pris ensemble, ces manquements sont donc d’une gravité telle qu’ils justifient que soit prononcée la résiliation du contrat de travail du salarié aux torts de l’employeur.

M. [S] soutient de façon inopérante que la résiliation judiciaire doit être fixée au plus tard à la date du jugement prononçant la liquidation le 2 juin 2021, au motif que la liquidation judiciaire a pour conséquence de faire cesser définitivement l’activité de la société, alors pourtant que la liquidation judiciaire n’a pas en elle-même pour effet de mettre fin au contrat de travail.

Il s’ajoute que son contrat de travail était suspendu au moment du transfert du siège social de sa société et que son affirmation d’une cessation de la relation de travail dès avant le jugement de liquidation est même contredite par ses propres demandes au titre des diverses obligations de son employeur qu’il invoque jusqu’en septembre 2021.

De plus, s’il justifie du transfert du siège social de la société et de son immatriculation au RCS de Bobigny le 1er octobre 2020, cela ne prouve pas la cessation effective de l’activité avant la date du jugement de liquidation, allégation au demeurant contredite par sa propre requête du 8 mars 2021 dans laquelle il réclamait diverses sommes au titre de la relation contractuelle sans évoquer la cessation d’activité ou la rupture. Ses développements sur l’absence de transfert de son contrat de travail à cette date sont par ailleurs hors de propos puisqu’aucun transfert du contrat de travail n’avait à être opéré en l’absence de preuve que la société, nouvellement immatriculée au RCS de Bobigny au regard de l’extrait produit mentionnant l’intervention du greffe du tribunal de commerce de Bobigny, avait cédé son activité à une autre entreprise comme il le prétend sans aucun élément pertinent à l’appui.

Il résulte des éléments de la procédure et des moyens débattus que la relation de travail s’est poursuivie à tout le moins jusqu’en septembre 2021 inclus. M. [S], qui se prévaut pour justifier sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail de manquements de l’employeur à ses obligations précisément jusqu’en septembre 2021, sollicite néanmoins une rupture à effet du 2 juin 2021 en soutenant (sans pour autant le prouver) que la société n’avait alors déjà plus d’activité, reconnaissant ainsi que de toute évidence il ne s’est pas maintenu à la disposition de l’employeur après la date postérieure ci-dessus retenue.

A défaut pour M. [S] d’avoir bénéficié d’une procédure de licenciement dans le cadre de la procédure collective, le contrat de travail s’est poursuivi et la résiliation de son contrat de travail doit prendre effet au 1er octobre 2021, puisqu’il n’est pas établi que la relation contractuelle se serait poursuivie au-delà de septembre 2021.

La cour infirme donc le jugement déféré et prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [S] aux torts exclusifs de l’employeur au 1er octobre 2021.

Produisant tous les effets d’un licenciement prononcé sans cause réelle et sérieuse, la résiliation judiciaire ouvre doit pour le salarié aux indemnités de rupture ainsi qu’à des dommages et intérêts.

M. [S] est ainsi fondé à réclamer la fixation des sommes suivantes à la procédure collective :

– 3 042,50 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, outre 304,25 euros au titre des congés payés afférents,

– 930,07 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

ces montants n’étant d’ailleurs pas spécifiquement contestés à titre subsidiaire.

Compte-tenu de la date de la résiliation judiciaire du contrat de travail, sont applicables les dispositions de l’article L.1235-3 du code du travail dans leur version issue de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017. L’article L.1235-3 du code du travail dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, dispose que si le licenciement du salarié survient sans cause réelle et sérieuse le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise avec maintien de ses avantages acquis. Si l’une ou l’autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroi au salarié une indemnité à la charge de l’employeur dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux prévus dans des tableaux.

En l’espèce, embauché le 2 mai 2019 dans une société de moins de 11 salariés, M. [S] avait acquis un peu plus de deux ans d’ancienneté, soit deux années complètes au moment de la rupture le 1er octobre 2021, et l’article L.1235-3 du code du travail prévoit une indemnité minimale de 1 mois de salaire et maximale de 3,5 mois de salaire.

En considération des circonstances particulières de la rupture et eu égard notamment à son âge (pour être né en septembre 1966), à sa rémunération de référence (1 521,25 euros par mois) à la faible ancienneté de ses services, et à ses capacités à retrouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle tout en tenant compte de ses problèmes de santé, la cour dispose des éléments nécessaires pour évaluer à la somme de 1 522 euros la réparation intégrale du préjudice subi par le salarié.

Ces sommes seront donc fixées à la procédure collective de la société Bati.IR. L’AGS n’a pas à les garantir dès lors qu’elles résultent de la résiliation judiciaire d’un contrat de travail intervenue plusieurs mois après le jugement de liquidation judiciaire, étant souligné que la cour n’est pas compétente pour se prononcer sur une éventuelle responsabilité du liquidateur en cas de faute de sa part du fait de l’absence de licenciement ou d’information reçue dans les délais par le salarié, qui n’est d’ailleurs pas explicitement évoquée et qui dans tous les cas serait sans effet sur la résiliation.

5. Sur la remise des documents de fin de contrat

Il convient d’ordonner liquidateur judiciaire, ès qualités, de délivrer à M. [S] les documents de fin de contrat conformes à la présente décision tels que mentionnés au dispositif, sans qu’il y ait lieu de prononcer une astreinte qui n’apparait pas justifiée.

6. Sur la garantie de l’AGS

Il convient de dire le présent arrêt opposable à l’Unédic délégation AGS CGEA et de rappeler que la garantie de l’AGS n’est due, toutes créances avancées pour le compte du salarié que dans la limite des plafonds définis notamment aux articles L.3253-17, D.3253-2 et D.3253-5 du code du travail et dans la limite des textes légaux définissant l’étendue de sa garantie à savoir les articles L.3253-8 à L.3253-13, L.3253-15 et L.3253-19 à L.3253-24 du code du travail.

En outre, il convient de rappeler que l’Unédic, délégation AGS CGEA, ne devra être amenée à garantir les éventuelles créances salariales que dans la mesure où l’employeur justifierait de l’impossibilité dans laquelle il se trouve de procéder lui-même au règlement des dites créances et ce en vertu du principe de subsidiarité de la garantie de l’AGS.

7. Sur les intérêts

M. [S] demande les intérêts légaux capitalisés après une année entière. Il sera toutefois rappelé que, comme le précise le premier juge, le jugement d’ouverture de la procédure collective arrête définitivement à sa date le cours des intérêts légaux ainsi que tous intérêts de retard et majorations. L’anatocisme est ainsi proscrit par l’article L.622-28 du code de commerce. La décision déférée sera confirmée en son rappel, et il sera ajouté le rejet des demandes de M. [S].

8. Sur les autres demandes

Le jugement déféré sera confirmé en ses dispositions sur les dépens et les frais irrépétibles.

Le liquidateur de la société Bati.IR, ès qualités, succombant au principal, sera condamné aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt rendu par défaut mis à disposition au greffe,

Infirme le jugement déféré en ses dispositions sur la rétrocession des indemnités de prévoyance versées par Pro-BTP, sur la garantie de l’AGS au titre des dommages et intérêts alloués du fait de la rétention d’indemnités de prévoyance, défaut de déclaration à la médecine du travail, perte de chance d’être licencié pour inaptitude professionnelle et privation d’indemnité journalière depuis le 2 septembre 2021, en ses dispositions sur la résiliation judiciaire,

Le confirme sur le surplus en ses dispositions soumises à la cour,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l’employeur au 1er octobre 2021,

Dit que la résiliation judiciaire produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Fixe la créance de M. [S] au passif de la procédure collective de la société Bati.IR aux sommes suivantes :

– 3 696,70 euros au titre des règlements par Pro-BTP perçus par l’employeur pour le compte de M. [S] et non reversés,

– 3 042,50 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, outre 304,25 euros au titre des congés payés afférents,

– 930,07 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

– 1 522 euros au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Ordonne à la SELARL Bailly MJ, en sa qualité de liquidateur de la société Bati.IR, de délivrer à M. [S] un certificat de travail, une attestation destinée à Pôle emploi et une reçu pour solde de tout compte conformes à la présente décision;

Rejette la demande d’astreinte ;

Déclare le présent arrêt opposable à l’AGS CGEA Ile de France Est qui sera tenue de garantir le paiement des sommes allouées à M. [S] dans les limites et plafonds de sa garantie prévues aux articles L 3253-6 à L 3253-8, D 3253-5 et D 3253-2 du code du travail (en particulier au titre de l’indemnité réparant le préjudice subi par le salarié du fait du non-paiement par l’employeur des cotisations au titre de la mutuelle), à l’exclusion des sommes allouées au titre de la liquidation de l’astreinte, de la créance au titre des règlements Pro-BTP, également au titre du préjudice en résultant, au titre de la rupture et des dépens, et sous réserve de l’absence de fonds disponibles entre les mains du liquidateur ;

Déboute M. [S] de sa demande au titre des intérêts légaux et au titre de l’anatocisme,

Rejette toute autre demande,

Condamne la SELARL Bailly MJ, en sa qualité de liquidateur de la société Bati.IR, aux dépens d’appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

 


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