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En application de l’article 26 de la loi N°77-2 du 03 janvier 1977, “Le conseil national et le conseil régional de l’ordre des architectes concourent à la représentation de la profession auprès des pouvoirs publics.
Ils ont qualité pour agir en justice en vue notamment de la protection du titre d’architecte et du respect des droits conférés et des obligations imposées aux architectes par les lois et règlements. En particulier, ils ont qualité pour agir sur toute question relative aux modalités d’exercice de la profession ainsi que pour assurer le respect de l’obligation de recourir à un architecte.(…)”. L’article 40 de la même loi dispose que “Toute personne qui ne remplit pas les conditions requises par la présente loi et qui porte le titre d’architecte ou d’agréé en architecture ou accompagne ou laisse accompagner son nom ou la raison sociale de la société qu’elle dirige de termes propres à entretenir dans le public la croyance erronée en la qualité d’architecte ou d’agréé en architecture ou de société d’architecture, est punie des peines prévues à l’article 433-17 du code pénal pour l’usurpation de titres (…)”. En application de l’article 1240 du Code civil, “tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.” En la cause, il ressort des pièces versées aux débats par l’Ordre des architectes que la société Maison Bois d’Architecte et son directeur général utilisaient de manière répétée le vocable “architecte”de nature à faire croire au recours d’un architecte et dès lors une société d’architecture. Ces agissements fautifs ont porté atteinte à la profession d’architecte et nui à son image, de sorte qu’ils ont généré un préjudice moral dont le Conseil Régional de l’Ordre des Architectes PACA, garant de la protection du titre d’architecte et du respect des droits conférés et des obligations imposées aux architectes par les lois et règlements, est recevable et bien fondé à demander réparation (2000 euros de dommages et intérêts). Le Conseil Régional de l’Ordre des Architectes Provence Alpes Côte d’Azur a assigné la société Maison Bois d’Architecte et Monsieur [R] [N] devant le tribunal, les accusant d’usurpation du titre d’architecte et d’exercice illégal de la profession d’architecte. Les demandes incluent la reconnaissance de la recevabilité de l’action, la condamnation des défendeurs à verser des dommages-intérêts de 5000 € pour préjudice subi, ainsi qu’une interdiction d’utiliser le terme d’architecte dans leurs documents professionnels, sous astreinte de 250 € par infraction. Le 18 septembre 2023, une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l’égard de la société Maison Bois d’Architecte. Le 11 janvier 2024, le Conseil Régional a informé le liquidateur judiciaire de la procédure en cours et a demandé la jonction des deux instances. Le liquidateur n’a pas constitué avocat. Une ordonnance de clôture a été rendue le 17 octobre 2023, et les deux procédures sont prévues pour plaidoiries le 13 mai 2024. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
PREMIERE CHAMBRE CIVILE
JUGEMENT N°24/293 DU 08 Juillet 2024
Enrôlement : N° RG 23/09497 – N° Portalis DBW3-W-B7H-3TBE et N° RG 24/1011 – N° Portalis DBW3-W-B71-4MGX
AFFAIRE : LE CONSEIL REGIONAL DE L’ORDRE DES ARCHITECTES – Provence Alpes Côte d’Azur (ci-après PACA) ( la SELARL PLANTAVIN REINA ET ASSOCIES)
C/ M [N] [R], [U], [X] et SAS MAISON BOIS D’ARCHITECTE et Me [F] [K] pris en qualité de liquidateur judiciaire de la société SAS MAISON BOIS D’ARCHITECTE
DÉBATS : A l’audience Publique du 13 Mai 2024
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Président : BERGER-GENTIL Blandine, Vice-Présidente
Greffier lors des débats : BESANÇON Bénédicte, Greffier
Vu le rapport fait à l’audience
A l’issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 08 Juillet 2024
Jugement signé par BERGER-GENTIL Blandine, Vice-Présidente et par BESANÇON Bénédicte, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
NATURE DU JUGEMENT
réputée contradictoire et en premier ressort
NOM DES PARTIES
DEMANDEUR
LE CONSEIL REGIONAL DE L’ORDRE DES ARCHITECTES – Provence Alpes Côte d’Azur (ci-après PACA) pris en la personne de son Président en exercice, domicilié es qualité audit siège, dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Maître Joanne REINA de la SELARL PLANTAVIN REINA ET ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE
CONTRE
DEFENDEURS
Maître [F] [K] Pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société MAISON BOIS D’ARCHITECTE, selon jugement en date du 18 septembre 2023 rendu par le Tribunal de commerce de MARSEILLE.
de nationalité Française, demeurant [Adresse 3]
défaillant
S.A.S. MAISON BOIS D’ARCHITECTE prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège social est sis [Adresse 1]
défaillant
Monsieur [R], [U], [X] [N]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]
défaillant
Suivant exploit délivré le 15 septembre 2023 auquel il sera expressément renvoyé pour l’exposé des moyens, le Conseil Régional de l’Ordre des Architectes Provence Alpes Côte d’Azur a assigné devant le tribunal de céans la société Maison Bois d’Architecte et Monsieur [R] [N] aux fins de :
– juger recevable et bien fondée l’action introduite et les demandes formulées par le Conseil Régional de l’Ordre des Architectes PACA ;
– juger que la société Maison Bois d’Architecte et Monsieur [R] [N] persistent à usurper le titre d’architecte et exercent illégalement la profession de société d’architecture et d’architecte ;
– juger que la société Maison Bois d’Architecte se présente comme une société d’architecture dans ses documents et supports ;
– juger que Monsieur [R] [N] se présente comme architecte auprès du public;
– juger qu’ils entretiennent volontairement dans le public la croyance erronée en leur qualité de société d’architecture et d’architecte ;
– juger qu’ils usurpent le titre de société d’architecture et d’architecte ;
– juger qu’ils exercent illégalement la profession d’architecte ;
– juger que les fautes relevées lui ont directement causé un préjudice en ce qu’il est garant de la protection du titre d’architecte et du respect des droits conférés et des obligations imposées aux architectes par les lois et règlements ;
– en conséquence, les condamner solidairement à lui verser la somme de 5000 € à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice subi ;
– leur faire interdiction d’utiliser le terme d’architecte, d’agréé en architecture ou de société d’architecture dans tous leurs documents professionnels et supports et ce, sous astreinte de 250 € par infraction constatée à compter de la signification du jugement à intervenir ;
– les condamner solidairement au paiement de la somme de 4000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Les condamner solidairement aux entiers dépens.
La société Maison Bois d’Architecte et Monsieur [R] [N], régulièrement assignés, n’ont pas constitué avocat.
Par jugement en date du 18 septembre 2023 rendu par le tribunal de commerce de Marseille, une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l’égard de la société Maison Bois d’Architecte.
Par acte en date du 11 janvier 2024, le Conseil Régional de l’Ordre des Architectes Provence Alpes Côte d’Azur a dénoncé la procédure à Maître [F] [K], de la SAS Les Mandataires, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Maison Bois d’Architecte, et par le même acte, l’a assigné aux fins de lui rendre commune et opposable la procédure engagée à l’encontre de la société Maison Bois d’Architecte, prononcer la jonction entre les deux instances, et le condamner es qualité de liquidateur judiciaire aux dépens.
Maître [F] [K], de la SAS Les Mandataires, es qualité de liquidateur judiciaire de la société Maison Bois d’Architecte n’a pas constitué avocat.
Une ordonnance de clôture a été rendue le 17 octobre 2023 dans l’instance introduite sous le N°RG 23/09497.
Les deux procédures N°RG 23/09497 et N°RG 24/1011 ont été appelées à l’audience de plaidoiries du 13 mai 2024.
En liminaire, il y a lieu d’ordonner la jonction des procédures N°RG 23/09497 et N°RG 24/1011 sous le numéro le plus ancien.
Sur les demandes principales :
En application de l’article 26 de la loi N°77-2 du 03 janvier 1977, “Le conseil national et le conseil régional de l’ordre des architectes concourent à la représentation de la profession auprès des pouvoirs publics.
Ils ont qualité pour agir en justice en vue notamment de la protection du titre d’architecte et du respect des droits conférés et des obligations imposées aux architectes par les lois et règlements. En particulier, ils ont qualité pour agir sur toute question relative aux modalités d’exercice de la profession ainsi que pour assurer le respect de l’obligation de recourir à un architecte.(…)”.
L’article 40 de la même loi dispose que “Toute personne qui ne remplit pas les conditions requises par la présente loi et qui porte le titre d’architecte ou d’agréé en architecture ou accompagne ou laisse accompagner son nom ou la raison sociale de la société qu’elle dirige de termes propres à entretenir dans le public la croyance erronée en la qualité d’architecte ou d’agréé en architecture ou de société d’architecture, est punie des peines prévues à l’article 433-17 du code pénal pour l’usurpation de titres (…)”.
En application de l’article 1240 du Code civil, “tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.”
***
En l’espèce, la société Maison Bois d’Architecte dont Monsieur [R] [N], était l’un des associés et le directeur général a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés du tribunal de commerce de Marseille le 27 janvier 2017 ; l’activité exercée était celle de «conseil en architecture et en ingénierie, courtage de tous travaux de bâtiment et le négoce en France et à l’étranger de tous matériaux et matériels de bâtiments d’habitation, industriels, commerciaux, agricoles, publics. »
Non seulement le terme «architecte» apparaît dans le libellé même de la dénomination de la société Maison Bois d’Architecte mais encore, il ressort du procès-verbal de constat du 18 mars 2019 que les différentes mentions relatant l’activité de la société sur son site Internet et sur son blog font état d’un “architecte” et de “conception architecturale”, invitant tout client potentiel à découvrir « les missions de l’architecte et de la construction maison bois qui vous reviendront moins cherès que chez un constructeur”.
Le nom de Monsieur [N] apparaît également dans le cadre des activités de cette société.
Sur le compte Twitter de Monsieur [N] apparaissent également des mentions concernant la société SAS MAISON BOIS D’ARCHITECTE “conception architecturale, économie de la construction, assistance à maîtrise d’ouvrage », notamment décrite comme un « cabinet d’architecte spécialisé dans la construction de maisons bois en Provence et partout en France depuis 30 ans (1987)”.
Le procès-verbal de constat du 18 mars 2019 démontre que la société Maison Bois d’Architecte a participé à l’édition 2019 de la foire de [Localité 4], présente au stand N°80 du salon Bâtir, la plaquette publicitaire destinée aux visiteurs du salon indiquant que la société fédère «des femmes et hommes de l’art dans l’acte de construire. Architectes, ingénieurs, géologues, thermicien et autres… les architectes fédérés, inscrits à l’ordre ont la faculté (exclusive) de signer tout permis de construire excédent une surface dépassant 150 m² habitables » ; s’agissant du projet d’habitat il est précisé qu’il sera « réalisé à partir des réunions de travail, de vos dessins ou croquis par notre architecte délégué sur les Alpes-Maritimes… »
Ainsi, il ressort des pièces versées aux débats par l’Ordre des architectes que la société Maison Bois d’Architecte et son directeur général utilisaient de manière répétée le vocable “architecte”de nature à faire croire au recours d’un architecte et dès lors une société d’architecture.
Elle communiquait sur son site Internet un dossier de permis de construire sur lequel était apposée sur chaque page son logo ; or, l’apposition du logo de la société sur les planches du dossier de permis de construire pour la construction de maisons individuelles permettait à quiconque de présumer que la société Maison Bois d’Architecte était bien une société d’architecture.
Or ni la société Maison Bois d’Architecte, ni Monsieur [R] [N] ne sont inscrits sur le tableau ordinal de l’Ordre des architectes de sorte qu’ils ne peuvent se prévaloir du titre d’architecte ni utiliser des termes propres à entretenir dans le public la croyance erronée en cette qualité et ne peuvent pas davantage exercer les missions qui y sont attachées.
Les lettres recommandées avec accusé de réception adressées par l’Ordre des Architectes PACA en date des 10 octobre 2017 et 18 janvier 2018 sont demeurées sans effet, les défendeurs persistants manifestement à utiliser sur l’ensemble de leurs supports publicitaires le vocable « architecte ».
C’est dans ces circonstances que le Conseil Régional de l’Ordre des Architectes PACA a voté, en séance du 29 mars 2019, une résolution l’autorisant à déposer plainte avec constitution de partie civile à l’encontre de Monsieur [R] [N] et de la société Maison Bois d’Architecte pour usurpation du titre d’architecte, et qu’une plainte a été déposée entre les mains de Monsieur le Procureur de la République du tribunal judiciaire de Marseille le 16 juillet 2019.
Il est en tout état de cause établi par l’ensemble des pièces versées aux débats que la société Maison Bois d’Architecte comme son directeur général, Monsieur [R] [N], ont délibérément utilisé le terme d’architecte ou de société d’architecture malgré leur parfaite connaissance du défaut d’agrément rappelé à plusieurs reprises par le conseil de l’Ordre des Architectes PACA, de sorte qu’ils ont usurpé le titre d’architecte et exercé ainsi illégalement la profession d’architecte.
Ces agissements fautifs ont porté atteinte à la profession d’architecte et nui à son image, de sorte qu’ils ont généré un préjudice moral dont le Conseil Régional de l’Ordre des Architectes PACA, garant de la protection du titre d’architecte et du respect des droits conférés et des obligations imposées aux architectes par les lois et règlements, est recevable et bien fondé à demander réparation.
En conséquence, et par une appréciation souveraine des éléments de la cause, Monsieur [R] [N] sera condamné in solidum avec la société Maison Bois d’Architecte représentée par Maître [F] [K] es qualité de liquidateur judiciaire à payer au Conseil Régional de l’Ordre des Architectes PACA la somme de 2000 € à titre de dommages intérêts en réparation de son préjudice moral.
Il convient de fixer au passif de la société Maison Bois d’Architecte représentée par Maître [F] [K] es qualité de liquidateur judiciaire la somme de 2 000€ à titre de dommages et intéréts au profit du Conseil Régional de l’Ordre des Architectes PACA.
En outre il sera fait interdiction à Monsieur [R] [N] et à la société Maison Bois d’Architecte représentée par Maître [F] [K] es qualité de liquidateur judiciaire d’utiliser le terme d’architecte, d’agréé en architecture, ou de société d’architecture dans tous leurs documents professionnels et supports, de quelque nature qu’ils soient, et ce sous astreinte de 250 € par infraction constatée à compter de la signification du présent jugement.
Sur les demandes accessoires :
Monsieur [R] [N] et la société Maison Bois d’Architecte représentée par Maître [F] [K] es qualité de liquidateur judiciaire seront condamnés in solidum aux entiers dépens conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.
Il n’est pas inéquitable de les condamner à payer au Conseil Régional de l’Ordre des Architectes PACA la somme de 3500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Il convient de fixer au passif de la société Maison Bois d’Architecte représentée par Maître [F] [K] es qualité de liquidateur judiciaire la somme de 3 500€ à titre de frais irrépétibles au profit du Conseil Régional de l’Ordre des Architectes PACA.
LE TRIBUNAL, statuant après débats publics par mise à disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire rendu en premier ressort,
ORDONNE la jonction des procédures N°RG 23/09497 et N°RG 24/1011 sous le numéro le plus ancien ;
CONDAMNE in solidum Monsieur [R] [N] et la société Maison Bois d’Architecte représentée par Maître [F] [K] es qualité de liquidateur judiciaire à payer au Conseil Régional de l’Ordre des Architectes PACA la somme de 2000 € à titre de dommages intérêts en réparation de son préjudice moral ;
FIXE au passif de la société Maison Bois d’Architecte représentée par Maître [F] [K] es qualité de liquidateur judiciaire la somme de 2 000€ à titre de dommages et intérêts au profit du Conseil Régional de l’Ordre des Architectes PACA ;
FAIT interdiction à Monsieur [R] [N] et à la société Maison Bois d’Architecte représentée par Maître [F] [K] es qualité de liquidateur judiciaire d’utiliser le terme d’architecte, d’agréé en architecture, ou de société d’architecture dans tous leurs documents professionnels et supports, de quelque nature qu’ils soient, et ce sous astreinte de 250 € par infraction constatée à compter de la signification du présent jugement ;
CONDAMNE in solidum Monsieur [R] [N] et la société Maison Bois d’Architecte représentée par Maître [F] [K] es qualité de liquidateur judiciaire à payer au Conseil Régional de l’Ordre des Architectes PACA la somme de 3500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
FIXE au passif de la société Maison Bois d’Architecte représentée par Maître [F] [K] es qualité de liquidateur judiciaire la somme de 3 500€ à titre de frais irrépétibles au profit du Conseil Régional de l’Ordre des Architectes PACA ;
CONDAMNE in solidum Monsieur [R] [N] et la société Maison Bois d’Architecte représentée par Maître [F] [K] es qualité de liquidateur judiciaire aux entiers dépens.
AINSI JUGE PAR MISE A DISPOSITION AU GREFFE DE LA PREMIERE CHAMBRE CIVILE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE 08 Juillet 2024
LE GREFFIER LE PRESIDENT