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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 8
ARRET DU 21 SEPTEMBRE 2023
(n° , 8 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/00911 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDA6D
Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Décembre 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° 18/08269
APPELANTE
S.A.S. GROUPE COURREGES
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151
INTIMÉE
Madame [W] [E]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Sonia HADJALI, avocat au barreau de PARIS, toque : E0054
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 Juin 2023, en audience publique, les avocats ne s’étant pas opposés à la composition non collégiale de la formation, devant Madame Nicolette GUILLAUME, présidente, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Madame Nicolette GUILLAUME, présidente, rédactrice
Madame Sophie GUENIER-LEFEVRE, présidente
Madame Véronique BOST, vice-présidente placée
Greffier, lors des débats : Madame Clara MICHEL
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
– signé par Madame Nicolette GUILLAUME, présidente et par Madame Nolwenn CADIOU, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE
Après un stage, puis un CDD en qualité d’employée d’atelier à partir du 3 avril 2000, Mme [W] [E] a été embauchée le 1er avril 2001, en qualité de seconde main dans le cadre d’un CDI par la société Groupe Courrèges.
La convention collective applicable est celle des industries de l’habillement.
Au dernier état de leur relation, Mme [W] [E] exerçait les fonctions de responsable d’atelier modéliste.
Par courrier en date du 14 juin 2018, Mme [E] a été convoquée pour le 22 juin 2018 à un entretien préalable.
Licenciée le 3 juillet 2018, Mme [E] a saisi le 2 novembre 2018, le conseil de prud’hommes de Paris qui par jugement rendu le 8 décembre 2020 a :
– dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse ,
– condamné la société Groupe Courrèges à payer à Mme [W] [E] les sommes suivantes :
– 4 568,52 euros au titre de rappel RTT,
– 65 250 euros au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– ordonné le remboursement à Pôle Emploi par la société Courrèges des indemnités de chômage versées à Mme [E] du jour de la rupture de son contrat de travail au jour du prononcé du jugement, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage,
– débouté Mme [E] du surplus de ses demandes,
– débouté la société Groupe Courrèges de sa demande reconventionnelle,
– condamné la société Groupe Courrèges au paiement des entiers dépens.
Par déclaration du 11 janvier 2021, la société Groupe Courrèges a interjeté appel de ce jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a débouté Mme [E] du surplus de ses demandes.
Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées au greffe par voie électronique le 17 avril 2023, le Groupe Courrèges demande à la cour de :
– infirmer le jugement de première instance en ce qu’il l’a condamné à verser la somme de 65 250 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ordonné le remboursement à Pôle-Emploi des indemnités de chômages versées à Mme [E] dans la limite de 6 mois d’indemnités, l’a condamné à verser 4 568,52 euros à titre de rappel de salaire JRTT et 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– en conséquence, statuant à nouveau :
– débouter Mme [E] de l’ensemble de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– débouter Mme [E] de sa demande de dommages et intérêts pour rupture brutale et vexatoire du contrat de travail,
– débouter Mme [E] de sa demande de rappel de salaire au titre des JRTT,
– condamner Mme [E] à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées au greffe par voie électronique le 11 février 2022, Mme [E] demande à la cour de :
– la déclarer recevable et bien fondée en toutes ses demandes, fins, moyens et prétentions,
– y faire droit
– dire qu’elle a fait l’objet d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– dire qu’elle a fait l’objet d’un licenciement brutal et vexatoire,
– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Paris en ce qu’il a dit que son licenciementétait sans cause réelle et sérieuse, mais l’infirmer sur le quantum de la condamnation,
– confirmer la condamnation au titre du rappel de salaire RTT, congés payés afférents,
– l’infirmer en ce qu’il l’a déboutée du surplus de ses demandes,
– et statutant à nouveau,
– condamner le Groupe Courrèges à lui payer les sommes de :
.86 400 euros net de Csg/Crds au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. 20 000 euros net de Csg/Crds au titre des dommages et intérêts pour conditions brutales et vexatoires de la rupture du contrat de travail,
. 4 568,52 euros à titre de rappel de salaire sur des jours de RTT acquis non pris avec congés payés afférents,
– en tout état de cause :
– condamner le Groupe Courrèges à lui payer la somme de 6 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure devant la cour d’appel,
– condamner à l’intérêt au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud’hommes,
– condamner le Groupe Courrèges aux entiers dépens.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 18 avril 2023 et l’audience de plaidoiries a été fixée au 16 juin 2023.
Il convient de se reporter aux énonciations de la décision déférée pour un plus ample exposé des faits et de la procédure antérieure, ainsi qu’aux conclusions susvisées pour l’exposé des moyens des parties devant la cour.
MOTIFS DE L’ARRÊT
Sur la demande de rappel de salaire au titre des jours de RTT
En principe, à défaut d’un accord collectif prévoyant une indemnisation, l’absence de prise des jours de repos au titre de la réduction du temps de travail n’ouvre droit à une indemnité que si cette situation est imputable à l’employeur.
En l’espèce, il est établi que d’une part, Mme [E] bénéficiait de 9 jours de RTT par an et d’autre part, que les bulletins de salaires émis par le groupe Courrèges ne comportent plus depuis janvier 2017 de compteur de RTT, de sorte que l’employeur n’a pas mis sa salariée en position d’en réclamer l’usage et ne peut donc se prévaloir de leur déchéance annuelle.
Le jugement attaqué sera donc confirmé en ce qu’il a jugé à ce titre.
Sur le licenciement
La notification de son licenciement a été faite le 3 juillet 2018 à Mme [E] dans les termes qui suivent :
‘Nous vous avons convoquée par lettre remise en main propre contre décharge le 14 juin 2018 à un entretien préalable fixé le 22 juin demier.
Les explications que vous nous avez fournies lors de cet entretien n`ont pas permis de modifier notre appréciation de la situation de sorte que nous nous voyons contraints de vous signifier par la présente lettre votre licenciement.
Cette décision est motivée par les faits suivants :
Pour rappel, vous avez été embauchée le 22 mai 2000 suivant contrat de travail à durée indéterminée en qualité d’EmpIoyée d’AteIier. En octobre 2015, vous avez pris le poste de Responsable d’atelier / modéliste, statut Cadre.
Les principales missions relatives à ce poste sont les suivantes :
– Etude et interprétation des croquis
– Ebauche de la mise en volume au mannequin pour validation du styliste
– Essayage et calage de la toile au mannequin de bois ou vivant
– Explication du travail et assistance technique au personnel de l’ateIier
– Essayage des modèles ou des prototypes
– Planification à court et moyen termes des activites des moyens techniques et humains de l’ateIier
Pour rappel, la Société GROUPE COURREGES a mis en place un «coaching managérial ” en début d’année 2016 pour vous aider à manager efficacement votre équipe.
Cette formation a eu une durée de 15 heures et a été effectuée avec le cabinet STTMULI.
Or. nous avons constaté des difficultés importantes de management et d’anticipation sur les moyens techniques et humains à mettre en ‘uvre pour la bonne marche de votre service ; ces difficultés perturbent considérablement le fonctionnement de l`atelier et de l’entreprise (studio et organisation du défilé).
En effet, nous constatons un écart très important entre nos attentes et le travail accompli par vos équipes dont vous êtes la responsable.
Les modéles réalisés par l’atelier sont en dessous de nos attentes. Il y a de nombreuses imperfections, des erreurs techniques qui ne devraient pas exister eu égard à ce que nous pouvons attendre d’un atelier de Prêt-à-Porter de luxe.
Nous avons eu beaucoup de problèmes de qualités qui ont eu pour impact de ralentir la validation des toiles et/ou de remettre en question les modéles.
Les toiles étaient vraiment mal montées : rabats de poche pas droits, pieds de col non dégarnis, surpiqures accrochant la tête de manche, surpiqures non droites et irrégulières.
Les toiles ont manqué de précisions, elles n’étaient que des ébauches grossières. La directrice de collection. [T] [C] a dû, elle-même, rencontrer votre équipe pour leur redonner de la motivation.
Ces erreurs s’expliquent par un manque d’anticipation et d’organisation de votre service ainsi qu’un manque total de communication, notamment avec votre seconde d`atelier.
Pour rappel, vous aviez déjà rencontré le 8 mars 2018, [K] [V], Responsable RH, qui vous avait déjà fait part des dysfonctionnements au sein de votre atelier, et notamment sur le manque de communication entre vous et votre seconde, [S] [R], créant une ambiance difficile et un management inégal de votre équipe.
Un écrit vous a alors été adressé le 20 mars 2013 à la suite de cette reunion vous demandant de laisser plus de liberté individuelle, d’autonomie, de vous assurer d`une ambiance sereine au sein de l’atelier, motiver vos collaborateurs et organiser notamment les congés de manière égalitaire.
Malgré cela et tout le soutien que nous avons pu vous apporter. il apparait encore aujourd`hui de nombreux problèmes mettant en péril le bon fonctionnement de l’atelier dans une période importante pour la société.
Vous n’arrivez absolument pas à organiser le travail de vos collaborateurs, à anticiper sur du court et moyen terme, laissant parfois des équipes sans travail dans une période pourtant intense. inversement, il vous arrive de demander le jour même à vos équipes de faire des heures supplémentaires alors que celles-ci auraient pu être anticipées.
Votre méthode de communication avec votre seconde ne permet toujours pas de bons échanges et conduit à une perte de temps, une désorganisation et un climat tendu pour l’ensemble de l’équipe.
Les instructions par écrit ne suffisent pas. Alors que vous pourriez échanger oralement avec votre seconde qui travaille dans le même bureau que vous, vous préférez,lorsqu`eIle vous demande des informations, lui répondre qu`elle n`a qu’à lire vos mails.
Celle-ci est trés déstabilisée par la méthode de communication que vous avez adoptée : vous lui adressez un mail tous les mardis soirs pour donner vos instructions et refusez tout autre mode de communication. En conséquence, elle ne peut pas vous poser les questions qu’eIle souhaite, bien mettre en oeuvre vos consignes et suivre certaines de vos instructions.
Les instructions données sont incomplètes et une partie des informations peut parfois se perdre, ce qui conduit à une véritable désorganisation du service. De surcroit, comme expliqué précédemment, si vous ne vous concertez pas avec votre seconde d`atelier sur le rythme de travail, l’organisation de l’atelier et la présence des collaborateurs, cette mauvaise communication conduit nécessairement à une baisse de la qualité des modèles qui arrivent au studio.
Aujourd’huí, nous devons faire face à un retard considérable du à cette désorganisation, ce manque d’anticipation et ce refus de communiquer de façon fluide et quotidienne avec votre seconde.
Or, le rôle de l’atelier dans notre activité est capital et si celui-ci dysfonctionne, c`est l’ensemble de l`activité de l’entreprise qui est touché. Le studio n’arrive plus à travailler efficacement et le retard pris entraîne des perturbations générales mettant en péril le délai fixé au 26 septembre 20l8.
Dans ce contexte, nous ne sommes plus en mesure de poursuivre notre collaboration et sommes contraints de vous notifier votre licenciement.
Votre préavis d’une durée de 4 mois débutera à la date de premiére présentation de cette lettre, préavis que nous vous dispensons d’effectuer mais qui vous sera intégralement rémunéré aux échéances habituelle de la paye.(…)’
En application des alinéas 1 et 2 de l’article L. 1235-2 du code du travail : ‘Les motifs énoncés dans la lettre de licenciement prévue aux articles L. 1232-6, L. 1233-16 et L. 1233-42 peuvent, après la notification de celle-ci, être précisés par l’employeur, soit à son initiative soit à la demande du salarié, dans des délais et conditions fixés par décret en Conseil d’Etat.
La lettre de licenciement, précisée le cas échéant par l’employeur, fixe les limites du litige en ce qui concerne les motifs de licenciement.’
À l’évidence, même si l’expression n’est pas employée, l’employeur justifie le licenciement de Mme [E] par une insuffisance professionnelle notamment dans les termes qui suivent : ‘des difficultés importantes de management et d’anticipation sur les moyens techniques et humains à mettre en ‘uvre pour la bonne marche de votre service ; ces difficultés perturbent considérablement le fonctionnement de l`atelier et de l’entreprise (studio et organisation du défilé)’. Il précise que ‘ces erreurs s’expliquent par un manque d’anticipation et d’organisation (de votre) service ainsi qu’un manque total de communication, notamment avec (votre) seconde d`atelier.’
Les difficultés évoquées sont récentes puisqu’elles perdurent jusqu’à la décision de licenciement. Elles ont une incidence sur la bonne marche de l’entreprise. Il est dit dans la lettre de licenciement : ‘nous devons faire face à un retard considérable du à cette désorganisation, ce manque d’anticipation et ce refus de communiquer de façon fluide et quotidienne avec votre seconde.
Or, le rôle de l’atelier dans notre activité est capital et si celui-ci dysfonctionne, c`est l’ensemble de l`activité de l’entreprise qui est touché. Le studio n’arrive plus à travailler efficacement et le retard pris entraîne des perturbations générales mettant en péril le délai fixé au 26 septembre 20l8″
Les griefs sont suffisamment précis puisque des exemples très concrets sont donnés, par exemple : ‘des équipes sans travail dans une période pourtant intense. inversement, (il vous arrive de demander le jour même à vos équipes de faire) des heures supplémentaires alors que celles-ci auraient pu être anticipées’, ‘un mail tous les mardis soirs pour donner vos instructions et refusez tout autre mode de communication’ et ‘les instructions données sont incomplètes et une partie des informations peut parfois se perdre, ce qui conduit à une véritable désorganisation du service’, avec des conséquences sur la qualité du travail, toujours avec des exemples très précis : ‘Les toiles étaient vraiment mal montées : rabats de poche pas droits, pieds de col non dégarnis, surpiqures accrochant la tête de manche, surpiqures non droites et irrégulières.
Les toiles ont manqué de précisions, elles n’étaient que des ébauches grossières.’
Repose sur l’employeur la charge de prouver les faits sur lesquels il fonde le licenciement. Le doute profite au salarié.
L’insuffisance professionnelle constitue une cause légitime de licenciement. Ce grief doit être matériellement vérifiable pour que la lettre soit dûment motivée et doit reposer sur des éléments concrets. L’employeur doit également démontrer qu’il aura accompli tous les efforts préalables pour que sa salariée puisse remédier à son insuffisance.
Or dans le cas d’espèce, la cour relève que dès sa prise de fonction et donc sa promotion au rang de responsable d’atelier, l’employeur avait identifié les difficultés managériales de la salariée écrivant à l’organisme de formation, la société Stimuli pour demander un accompagnement: « Nous avons besoin d’accompagner notre chef d’atelier, [W] [E], à une prise de fonction managériale. (…) Nous avons pu constater que [W] a eu parfois du mal à bien vivre ce stress. Ses rapports avec les autres peuvent être parfois tendus et compliqués (avec son équipe, son management, et les autres équipes)» « il est donc important de l’accompagner dans cette prise de fonction, lui donner les outils de base du manager l’aider à trouver son propre management, l’aider à progresser dans sa relation avec les autres » (pièce n°34 de l’appelant : mail adressé le 30 novembre 2015 à la société Stimuli).
Il indique d’ailleurs en page 7 de ses conclusions que : ‘dès les premiers mois de la prise de poste, des difficultés très significatives de management ont été relevées.’
Une formation a ainsi été donnée à Mme [E] par la société Stimuli. La pièce 5 de l’appelant indique sans autre précision que ‘cette formation a commencé en 2016 et (qu’elle) se poursuivra en 2017″. Cette pièce est datée du 28 mars 2017. Le programme de cette formation qui figure en pièce 17 précise qu’il s’agit de 5 modules de 3 heures dont les objectifs et le programme sont qualifiés de particulièrement ambitieux par la cour, sans que les moyens pour y parvenir ne soient pourtant davantage précisés. Ce programme est ainsi libellé dans les termes qui suivent :
‘Intitulé : Manager d’équipe
objectifs :
Développer son leadership
Apprendre à manager et coacher au quotidien
Apprendre à mobiliser une équipe
Programme : 5 modules de 3 heures
Module 1 – Les moteurs et les freins à l’action : la signature i-Lead’ pour identifier la nature de son leadership – schémas de succès et de déraillement : utiliser ses aptitudes naturelles dans son management, identifier la source de ses difficultés et les solutions
Module 2 – Construire une vision inspirante : les 4 bulles de la vision. Le partage de la vision. Le diagramme des opportunités. La transformation de la vision en plan d’actions.
Module 3 – Le management situationnel : autonomie, styles de management, cycle progressif, cycle régressif. Liens avec le leadership naturel.
Module 4 – L’entretien individuel : la méthode DIRECT : entrainement au recadrage et au soutien. Le feedback sandwich. Moteurs et freins dans le processus de feedback.
Module 5 – Le pilotage et l’animation collective – objectifs et indicateurs – comportements clés de performance – animation de réunion de mobilisation. Sociodynamique et stratégie des alliés.’
L’employeur ne fait en outre état d’aucun retour de cette formation qui lui aurait été fait par la société Stimuli ou qui aurait été fait à sa salariée.
Il n’y a pas davantage de trace dans les pièces de l’appelant d’un entretien d’évaluation ou de compte-rendu d’entretien avec des objectifs fixés à la salariée selon une marge de progression définie tendant notamment à une amélioration de ses performances managériales.
Dans ces conditions, l’accompagnement proposé par l’employeur sera qualifié d’insuffisant.
Enfin, outre le fait qu’aucune preuve n’est produite de rappel à l’ordre sur les 18 années d’ancienneté de la salariée au cours desquelles elle n’a cessé de progresser dans l’entreprise, face aux difficultés de Mme [E] faisant grief dont la cour a pu observer qu’elles n’avaient pas été réglées, l’employeur lui a seulement adressé le 20 mars 2018 un mail reprenant les griefs dans les termes qui suivent :
‘Bonjour [W],
Je fais suite à notre échange du 8 mars au cours duquel je t’ai fait part des difficultés qui m’ont été mentionnées par certains de tes collaborateurs. Il est ainsi souligné une ambiance difficile à l’atelier et un management inégal de ton équipe, et ce malgré la formation en coaching managérial dont tu as bénéficié en 2016.
Comme je te l’ai dit, certains de tes comportements peuvent mettre en souffrance certains de tes collaborateurs et nous devons veiller à un bon climat social pour le bien-être de chaque salarié.
Tu m’as confirmé que, même si la formation t’a permis d’améliorer certaines choses, tu peux être parfois maladroite, impulsive et directive mais que tu ferais le nécessaire pour améliorer tes échanges avec tes collaborateurs, et notamment avec [S], ta seconde à qui tu dois donner plus d’autonomie, l’impliquer davantage dans le travail au quotidien et lui donner toutes les informations dont elle a besoin pour tenir au mieux sa mission de seconde. Lors de notre réunion, il a été décidé que tu la rencontrerais pour pouvoir échanger avec elle sur une meilleure organisation de travail entre vous.
Tu dois donc laisser plus de liberté individuelle et d’autonomie à tes collaborateurs, t’assurer d’une ambiance sereine au sein de l’atelier, motiver ton équipe, les faire monter en compétence et organiser les congés de manière égalitaire et avec leur collaboration en fonction des besoins de la société.
Je reste bien entendu à ta disposition pour t’accompagner dans cette évolution vers un management collaboratif et améliorer ainsi le bon climat de l’atelier.’
Au regard des difficultés de la salariée qui ont perduré selon l’employeur et qui motivent le licenciement, il n’y a pas de rappel à l’ordre avant cette date du 20 mars 2018, ce qui appararaît tardif au regard de la date du licenciement seulement 3 mois après.
En conséquence, à supposer même que les difficultés relationnelles et managériales de Mme [E] puissent effectivement être à l’origine des dysfonctionnements engageant les performances de l’entreprise, griefs qui restent très contestés, les parties produisant chacune des attestations contraires, il sera retenu que l’employeur n’a pas donné à sa salariée les moyens de surmonter ces difficultés qu’il avait cependant parfaitement identifiées dès sa promotion au rang de chef d’atelier, de sorte que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et que le jugement attaqué doit être confirmé en ce qu’il a jugé à ce titre.
Sur les demandes indemnitaires
Sur l’indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse, en réponse aux développements de l’intimée, la cour retient la conventionnalité du barème prévu par l’article L. 1235-3 du code du travail qui sera donc appliqué au regard de la date de la rupture du contrat.
Le salaire brut moyen reste fixé à la somme de 4 501,13 euros.
Mme [E] justifie d’un préjudice professionnel pour avoir dû se reconvertir dans la maroquinerie après le passage d’un CAP (sa pièce 29), et d’un préjudice personnel, cette reconversion étant intervenue alors qu’elle était âgée de plus de 40 ans, de sorte que la somme allouée par le juge initialement saisi qui est exprimée en brut, est confirmée en application du texte précité.
Les attestations produites étant contraires en tout point sur la qualité du management de Mme [E], cette dernière ne parvient cependant pas à démontrer que les reproches qui lui ont été faits étaient injurieux, certaines attestations en dehors même de celle de Mme [R], dénonçant de façon suffisamment circonstanciée des faits préjudiciables à d’autres salariés et à une bonne ambiance de travail (pièces 7, 20, 24 de l’appelant). Dans ce contexte, il n’est pas établi que la dispense de préavis accordée par l’employeur est fautive. L’intimée ne justifie pas par ailleurs, d’un préjudice indépendant qui résulterait de conditions vexatoires de son licenciement, de sorte que le jugement attaqué sera également confirmé en ce qu’il a jugé à ce titre et aucune indemnisation pour un licenciement exercé de façon brutale, vexatoire ou injurieuse n’est justifiée.
Le jugement sera également confirmé en ce qu’il a ordonné le remboursement à Pôle Emploi.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Partie perdante, l’employeur doit être tenu aux dépens de première instance, par confirmation du jugement entrepris, et d’appel. Il ne peut prétendre au remboursement de ses frais irrépétibles.
L’équité commande de faire application de l’article 700 du code de procédure civile et d’allouer à ce titre à Mme [E] la somme de 2 000 euros.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
CONFIRME le jugement déféré,
Y ajoutant,
CONDAMNE la société Groupe Courrèges à payer à Mme [E] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
ORDONNE l’envoi par le greffe d’une copie certifiée conforme du présent arrêt, par lettre simple, à la Direction Générale de Pôle Emploi,
REJETTE les autres demandes des parties,
CONDAMNE la société Groupe Courrèges aux dépens d’appel.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE