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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 22/01538 – N° Portalis DBVH-V-B7G-INRA
CS
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D’AVIGNON
08 avril 2022
RG :21/00657
VALLIS HABITAT
C/
[X]
S.A.S. TERRE ET PIERRE GESTION
S.A.S. GANAY PARTICIPATIONS
S.C.I. VERNET 73
Grosse délivrée
le
à
COUR D’APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
2ème chambre section B
ARRÊT DU 09 JANVIER 2023
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d’AVIGNON en date du 08 Avril 2022, N°21/00657
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Corinne STRUNK, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre
Mme Corinne STRUNK, Conseillère
M. André LIEGEON, Conseiller
GREFFIER :
Madame Véronique PELLISSIER, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l’audience publique du 21 Novembre 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 09 Janvier 2023.
Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.
APPELANTE :
VALLIS HABITAT anciennement dénommé MISTRAL HABITAT OPH
Etablissement public local à caractère industriel ou commercial,
inscrit au RCS d’Avignon sous le N° 278 400 023
pris en la personne de son représentant légal en exercice demeurant et domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représentée par Me Philippe PERICCHI de la SELARL AVOUEPERICCHI, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Patrick GONTARD de la SCP PATRICK GONTARD, Plaidant, avocat au barreau d’AVIGNON
INTIMÉS :
Monsieur [Z] [X]
né le 11 Septembre 1959 à [Localité 7]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représenté par Me Corinne CANO de la SCP CANO/CANO, Plaidant, avocat au barreau d’AVIGNON
Représenté par Me Georges POMIES RICHAUD, Postulant, avocat au barreau de NIMES
S.A.S. TERRE ET PIERRE GESTION
inscrite au RCS d’AVIGNON sous le n° 322 215 765
prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentée par Me Laurence BASTIAS de la SCP BASTIAS-BALAZARD, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d’AVIGNON
S.A.S. GANAY PARTICIPATIONS
inscrite au RCS d’AVIGNON sous le n° 804 730 232
prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentée par Me Laurence BASTIAS de la SCP BASTIAS-BALAZARD, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d’AVIGNON
S.C.I. VERNET 73
inscrite au RCS d’AVIGNON sous le n° 828 963 892
prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 5]
[Localité 6]
Représentée par Me Laurence BASTIAS de la SCP BASTIAS-BALAZARD, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d’AVIGNON
Statuant sur appel d’une ordonnance de référé
Ordonnance de clôture rendue le 14 novembre 2022
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre, le 09 Janvier 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.
EXPOSE DU LITIGE
M. [Z] [X] a exercé les fonctions de directeur général au sein de l’Office Public de l’Habitat Grand [Localité 6] Résidences, qui a fait l’objet d’une fusion absorption par l’Office Mistral Habitat à compter du 1er janvier 2019, le nouvel ensemble prenant ainsi le nom de l’EPIC Vallis Habitat.
A la suite de cette opération, M. [X] a exercé les fonctions de directeur général adjoint au sein de l’EPIC Vallis Habitat, devenu Vallis Habitat, jusqu’au 19 avril 2019, date à laquelle les parties ont conclu une rupture conventionnelle de son contrat de travail.
Par notification de Vallis Habitat du 3 septembre 2019, M. [X] était admis au bénéfice de l’aide au retour à l’emploi à compter du 9 novembre 2019 pour une durée de trois années, ces indemnités de chômage étant nécessairement assujetties à une cessation réelle d’activité, précision faite que Vallis Habitat est l’organisme payeur.
Vallis Habitat a saisi le président du tribunal judiciaire d’Avignon sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, afin d’obtenir l’autorisation de voir réaliser un constat au sein de trois sociétés, soupçonnant que M. [X] y exercerait une activité professionnelle.
Par ordonnance sur requête datée du 13 novembre 2020, Maître [G], huissier de justice, était autorisé à effectuer diverses opérations d’instruction et de saisie avec l’aide d’un informaticien dans les locaux des sociétés Terre et Pierre Gestion, Ganay Participations et la SCI Vernet 73 aux fins de vérifier l’éventuel lien de subordination existant entre ces entités et M. [X], vérifier le versement de fonds à son profit qu’ils proviennent de commissions, de salaires ou de toutes autres origines et vérifier l’activité et les relations commerciales que M. [X] peut entretenir en son nom personnel ou en qualité de représentant des trois entités avec d’autres partenaires.
Les opérations étaient menées par Me [G] le jour même.
Par exploit du 31 décembre 2020, Vallis Habitat a assigné devant le juge des référés du tribunal judiciaire d’Avignon M. [X] et les trois sociétés Terre et Pierre Gestion, Ganay Participations ainsi que la SCI Vernet 73, afin de :
– dire que les parties viendront devant lui, en référé, afin d’examen, en présence de l’huissier, des pièces séquestrées et qu’il soit statué sur la communication desdites pièces ;
– dire qu’en vue de cet examen, l’huissier commis tiendra à la disposition de la partie auprès de laquelle il les aura obtenus, sur un support informatique adapté, une copie des pièces séquestrées, afin que cette dernière puisse, pour les besoins de leur examen par le juge, sélectionner celles des pièces à la communication desquelles elle s’oppose.
Par ordonnance du 6 avril 2021, le juge des référés du tribunal judiciaire d’Avignon a :
– déclaré irrecevable la demande de rétractation pour être portée devant le juge des référés incompétent pour en connaître ;
– déclaré recevables les demandes formulées par l’OPDHLM Vallis Habitat ;
– constaté la nullité des opérations d’instruction réalisées par Maître [V] [G] comme non conformes aux termes de l’ordonnance du 13 novembre 2020 ;
– ordonné la restitution aux parties de tous les documents séquestrés et collectés dans le cadre de la mesure d’instruction réalisée le 13 novembre 2020 ;
– ordonné l’effacement des copies numériques et la destruction des supports concernés par le séquestre et la collecte des données précitées ;
– condamné l’OPDHLM Vallis Habitat à payer à M. [Z] [X] la somme de 2 000.00 € en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi que le commande l’équité ;
– condamné l’OPDHLM Vallis Habitat à payer à la SAS Ganay Participations, la SAS Terre et Pierre Gestion, la SCI Vernet 73, la somme de 2 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné l’OPDHLM Vallis Habitat aux entiers dépens de l’instance,
– rappelé que la présente ordonnance bénéficie de l’exécution provisoire de droit.
Par déclaration enregistrée le 9 avril 2021, Vallis Habitat a interjeté appel de cette ordonnance en toutes ses dispositions et a saisi concomitamment le Premier Président de la cour d’appel de Nîmes d’une demande aux fins d’arrêt de l’exécution provisoire attachée à l’ordonnance de référé du 6 avril 2021, qui y a fait droit suivant ordonnance en date du 9 juillet 2021.
Par arrêt en date du 11 octobre 2021, la cour d’appel de Nîmes a :
– dit n’y avoir pas lieu à examiner la demande relative à la recevabilité de I’EPIC Vallis Habitat à saisir le juge des requêtes,
– déclaré l’action de I’EPIC Vallis Habitat devant le juge des référés recevable,
– débouté I’EPIC Vallis Habitat de sa demande de condamnation à des dommages et intérêts sur le fondement de l’article 123 du code de procédure civile,
– dit n’y avoir lieu à ordonner la production des pièces annexées à la requête déposée devant le juge des requêtes,
– rejeté la demande de communication du rapport dressé par l’expert informatique contenant un document sous forme de liste permettant l’identification des éléments copiés tant sur le fichier constat que sur les clés USB,
– infirmé l’ordonnance de référé rendue le 06 avril 2021 par le président du tribunal judiciaire d’Avignon sauf en ce qu’elle a déclaré irrecevable la demande en rétractation et condamné l’EPIC Vallis Habitat aux dépens et au paiement d’indemnités sur le fondement de l’article 700 au code de procédure civile,
Et statuant à nouveau, a :
– dit n’y avoir lieu à référé s’agissant de la demande de nullité des opérations d’instruction réalisées par l’huissier de justice commis et résultant de l’exécution de l’ordonnance rendue sur requête,
– renvoyé les parties à mieux se pourvoir de ce chef,
– rejeté la demande de I’EPIC Vallis Habitat de mainlevée des pièces séquestrées par l’huissier de justice aux fins d’examen par les parties,
– condamné I’EPIC Vallis Habitat à payer à M. [Z] [X] la somme de
2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et à payer à la SAS Terre et Pierre Gestion, la SAS Ganay Participations et la SCI Vernet 73, ensemble, la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné I’EPIC Vallis Habitat aux dépens de la procédure d’appel.
Par exploits d’huissier en date du 17 décembre 2021, l’EPIC Vallis Habitat a assigné M. [Z] [X], les sociétés Terre et Pierre Gestion, Ganay Participations et la SCI Vernet 73 devant le juge des référés du tribunal judiciaire d’Avignon aux fins de l’autoriser à se faire remettre par le biais de la SCP [G] l’intégralité des pièces actuellement séquestrées en l’étude de l’huissier et de condamner chacun des défendeurs au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et de les condamner solidairement aux frais de justice, en ce compris les frais de sommation d’assister ainsi que ceux de citation et de signification de l’ordonnance à intervenir.
Parallèlement à la saisine du juge des référés, et selon assignation délivrée le 24 février 2022, M. [X] a saisi le tribunal judiciaire d’Avignon aux fins notamment d’obtenir l’annulation du procès-verbal de constat, des opérations d’instruction et la saisie des documents réalisés par Me [G] le 13 novembre 2020 en exécution de l’ordonnance présidentielle rendue le même jour, ainsi que la restitution de tous les documents séquestrés et collectés.
Par ordonnance contradictoire du 8 avril 2022 dont appel, le juge des référés du tribunal judiciaire d’Avignon a :
– dit n’y avoir lieu à référé,
– rejeté en l’état les demandes de l’EPIC Vallis Habitat,
– laissé à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés.
Par déclaration du 29 avril 2022, Vallis Habitat a interjeté appel de cette ordonnance en toutes ses dispositions.
Aux termes de conclusions notifiées le 9 août 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, l’EPIC Vallis Habitat, appelant, demande à la cour, au visa de l’article 834 du code de procédure civile, de :
– réformer en toutes ses dispositions l’ordonnance de référé en date du 8 avril 2022 ;
-statuant à nouveau,
– rejeter l’exception d’incompétence soulevée par M. [X] et les sociétés requises ;
– fixer un jour et une heure à l’occasion de laquelle sous le contrôle du magistrat des référés de première instance ou d’un conseiller de la présente chambre dûment désigné, il sera procédé en présence des parties convoquées au tri des pièces séquestrées auprès de la SCP [G] ;
– ou autoriser l’EPIC Vallis Habitat à se faire remettre par le biais de la SCP [G] l’intégralité des pièces actuellement séquestrées en l’étude de l’huissier aux fins d’en faire usage ;
– condamner les intimés à payer chacun à l’EPIC Vallis Habitat la somme de 2 000 € ;
– condamner conjointement et solidairement les intimés aux entiers dépens de première instance et d’appel, lesquels comprendront les frais de sommation d’assister.
Au soutien de son appel, l’EPIC Vallis Habitat conclut tout d’abord au rejet de l’exception d’incompétence soulevée par M. [X] et les sociétés intimées motivée par la saisine du juge du fond.
Il soutient que le premier juge a fait une application inexacte de l’article 834 du code de procédure civile, duquel il en ressort que, d’une part, la condition d’absence de contestation sérieuse est alternative avec celle relative à l’existence d’un différend, et que, d’autre part, la preuve du caractère sérieux de la contestation doit en être rapportée. Il indique qu’il ne saurait exister de contestation sérieuse de l’opération à effectuer dans la mesure où celle-ci résulte d’une décision judiciaire.
Il ajoute que la seule appréciation de la condition d’une contestation sérieuse n’apparaît pas suffisante, dès lors que l’urgence est caractérisée, pour permettre le rejet d’une demande formée devant le juge des référés.
Il reproche également au juge des référés de n’avoir fait aucunement mention de l’existence d’un différend qui, par application de l’article 834, lui permet de prononcer une mesure provisoire dans l’urgence, cette carence le privant de son droit de voir achever les opérations d’instruction ordonnées le 13 novembre 2020, dont l’aboutissement consiste en un tri, puis une remise des pièces.
Il considère que l’existence d’un recours au fond engagé par la même partie, qui se prévaut de la contestation sérieuse, ne saurait être retenue au titre de ladite contestation.
Pour finir, il rappelle qu’en application de l’arrêt rendu par la cour le 11 octobre 2021, il a été procédé à une convocation chez l’huissier de justice avant la procédure de tri de pièces qui s’est avérée infructueuse comme en atteste le procès-verbal de carence en date du 4 novembre 2021. Il s’ensuit qu’il appartient au juge des référés d’organiser l’ultime phase de la procédure initiée sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile. Il considère à toutes fins que l’étape de tri des pièces est un préalable nécessaire à l’examen de la demande de mainlevée des documents séquestrés qui saisit le juge du fond ; la compétence du juge des référés s’impose d’elle-même sans qu’aucune contestation sérieuse ne puisse lui être opposée.
Enfin, au soutien de sa demande d’application de l’article 700 du code de procédure civile, il expose que depuis l’origine, M. [X] et les sociétés intimées ne cessent de faire de la résistance, n’ayant pu obtenir de la cour l’annulation de la procédure diligentée par l’huissier, l’ordonnance de référé ayant réformée, ils n’ont pas voulu assister à l’étape de vérification des pièces saisies, et qu’en conséquence, il a été dans l’obligation de saisir le juge des référés.
M. [Z] [X], en sa qualité d’intimé, par conclusions en date du 12 juillet 2022, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, demande à la cour, au visa des articles 834, 564 et suivants du code de procédure civile, de :
– confirmer l’ordonnance de référé du tribunal judiciaire d’Avignon du 8 avril 2022 ;
– rejeter les demandes formées par l’EPIC Vallis Habitat irrecevables, car nouvelles en appel,
– condamner l’EPIC Vallis Habitat à payer la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile,
– condamner l’EPIC Vallis Habitat aux entiers dépens.
[Z] [X] expose qu’il a saisi le juge du fond aux fins de prononcer la nullité du procès-verbal de constat, des opérations d’instruction et de la saisie des documents réalisés par Maitre [V] [G], huissier de justice, le 13 novembre 2020, en exécution de l’ordonnance du même jour.
Il considère dès lors que le juge des référés est incompétent en l’état pour connaître de la demande de levée de séquestre et remise des pièces détenues par Me [G], huissier de justice, formée par l’EPIC Vallis Habitat et de la demande nouvelle de voir organiser une réunion sous contrôle d’un conseiller pour tri des pièces, un procès-verbal de carence ayant été établi sur ce dernier point et la cour ne pouvant procéder à injonction.
Il expose en effet que les mesures sollicitées par l’EPIC Vallis Habitat aux fins de l’autoriser à se faire remettre par l’intermédiaire de Me [G] l’intégralité des pièces séquestrées en l’étude d’huissier se heurtent à une contestation sérieuse touchant au fond du litige et que ladite contestation sérieuse ne l’autorise pas à retenir sa compétence pour connaitre de la levée de séquestre et remise de pièces détenues par l’huissier.
Il précise qu’une ordonnance sur requête sur le fondement article 145 du code de procédure civile n’a pas autorité de la chose jugée et que le juge du fond demeure compétent pour apprécier la régularité des éléments probatoires et annuler un procès-verbal de constat.
Il soulève également, dans l’hypothèse où les mesures sollicitées se heurteraient à une contestation sérieuse, que l’EPIC Vallis Habitat échoue à démontrer que l’adoption des mesures est justifiée par l’existence d’un différend au sens de l’article 834 du code de procédure civile.
S’agissant de la demande aux fins de communication des pièces afin de procéder à un tri, outre le fait que cette prétention nouvelle est irrecevable, l’intimé considère que la cour statuant en matière de référé ne peut y faire droit, la saisine du juge du fond pour apprécier la validité des opérations de saisie constituant une contestation sérieuse.
Il indique enfin ne pas avoir fait preuve de résistance procédurale mais avoir subi au contraire des procédures abusives de l’EPIC Vallis Habitat, lequel n’exécute pas les décisions judiciaires préférant multiplier des procédures inappropriées et infondées. Ainsi, il considère que ces éléments justifient que l’appelant soit condamné à lui payer une indemnité au titre des frais irrépétibles.
La SAS Terre et Pierre Gestion, la SAS Ganay Participations et la SCI Vernet 73, en leur qualité d’intimées, par conclusions du 19 juillet 2022, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens, demandent à la cour, au visa des articles 834, 564 et suivants du code de procédure civile, de :
– débouter l’EPIC Vallis Habitat de toutes ses demandes, fins et conclusions,
– confirmer l’ordonnance de référé du tribunal judiciaire d’Avignon du 8 avril 2022.
Y ajoutant :
– condamner l’EPIC Vallis Habitat à payer à chacune des sociétés Ganay Participations SAS, Terre et Pierre Gestion SAS et SCI Vernet 73 une somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
– condamner l’EPIC Vallis Habitat aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Les sociétés Terre et Pierre Gestion, Ganay Participations et la SCI Vernet 73 soutiennent qu’en l’état de la procédure au fond, le juge des référés ne peut que se déclarer incompétent au profit du juge du fond en raison de l’existence d’une contestation sérieuse, précisant que les problématiques de la régularité et de la légalité du cadre dans lequel les opérations de constat ont été menées relèvent de la compétence de la seule juridiction du fond.
Elles précisent avoir saisi le tribunal judiciaire d’une procédure au fond car les investigations ont consisté en une véritable perquisition totalement illégale, lesquelles, au surplus, ont violé le secret de leurs affaires.
Par ailleurs, elles indiquent qu’une ordonnance sur requête en application de l’article 145 du code de procédure civile n’a pas autorité de la chose jugée et que le juge du fond demeure compétent pour apprécier la régularité des éléments probatoires et annuler un procès-verbal de constat.
Elles rappellent que pour saisir le juge des référés sur le fondement de l’article 834 du code de procédure civile, il faut démontrer un cas d’urgence, ou que la mesure sollicitée soit ne se heurte à aucune contestation sérieuse, soit se justifie par l’existence d’un différend.
Elles soulèvent également que dans le dispositif de ses écritures, l’appelant demande désormais à la cour « de fixer un jour et une heure à l’occasion de laquelle sous le contrôle d’un magistrat désigné il sera procédé en présence des parties convoquées au tri des pièces séquestrées auprès de l’huissier de justice, ou d’autoriser l’EPIC Vallis Habitat à se faire remettre les pièces séquestrées par la SCP [G] afin d’en faire usage ». Or, elles estiment que de telles demandes sont des demandes nouvelles qui sont irrecevables au regard des articles 564 et suivants du code de procédure civile, outre le fait qu’elles se heurtent à une contestation sérieuse.
La clôture de la procédure est intervenue le 14 novembre 2022 et l’affaire a été fixée au 21 novembre 2022, pour être mise en délibéré, par disposition au greffe, au 9 janvier 2023.
MOTIFS DE LA DECISION :
– Sur la recevabilité de la demande :
Il résulte de l’application combinée des articles 564, 565 et 566 du code de procédure civile que les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions, sauf si ces dernières tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge ou si ces prétentions étaient virtuellement comprises dans les demandes et défenses soumises au premier juge et en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément.
La cour de cassation considère que ne sont pas nouvelles et partant sont recevables, les demandes qui tendent aux mêmes fins que celles présentées devant les premiers juges même si leur fondement juridique est différent (com 19 juin 2019 n°18-11.798).
Il importe peu de changer de moyens y compris de présenter un fondement juridique différent, seul le but recherché importe (civ 3e, 4 mai 2000 n° 98-14.014).
En première instance, Vallis Habitat a sollicité du juge des référés l’autorisation à se faire remettre par le biais de la SCP [G] l’intégralité des pièces actuellement séquestrées en l’étude de l’huissier.
En appel, il est sollicité du juge des référés ou de la cour « de fixer un jour et une heure à l’occasion de laquelle sous le contrôle d’un magistrat désigné ou d’un conseiller de la présente chambre dument désigné, il sera procédé en présence des parties convoquées au tri des pièces séquestrées auprès de l’huissier de justice» ou « autoriser l’EPIC Vallis Habitat à se faire remettre par le biais de la SCP [G] l’intégralité des pièces actuellement séquestrées en l’étude de l’huissier aux fins d’en faire usage ».
Les intimés soutiennent qu’il s’agit d’une demande nouvelle irrecevable en application de l’article 564 du code de procédure civile.
Il y a lieu de considérer que la demande de tri des pièces séquestrées a pour finalité d’en obtenir communication et tend en conséquence aux mêmes fins que celle présentée en première instance, si bien que cette prétention présentée devant la cour d’appel est en conséquence recevable.
– Sur le bien-fondé de la demande :
Selon l’article 834 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.
Au cas présent, Vallis Habitat a obtenu du président du tribunal judiciaire d’Avignon sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, et par ordonnance sur requête datée du 13 novembre 2020, l’autorisation de mandater un huissier de justice pour qu’il effectue diverses opérations d’instruction et de saisie avec l’aide d’un informaticien dans les locaux des sociétés Terre et Pierre Gestion, Ganay Participations et la SCI Vernet 73 afin de vérifier l’éventuel lien de subordination existant entre ces entités et M. [X], vérifier le versement de fonds à son profit qu’ils proviennent de commissions, de salaires ou de toutes autres origines et vérifier l’activité et les relations commerciales que M. [X] peut entretenir en son nom personnel ou en qualité de représentant des trois entités avec d’autres partenaires.
L’ordonnance du 13 novembre 2020 prévoyait le placement sous séquestre des documents saisis sans que l’huissier de justice puisse en donner connaissance aux requérants ainsi que la saisine du juge des référés pour qu’il soit statué sur leur communication.
Cette mise sous séquestre et la procédure de tri, qui en découle, sont autorisées par l’article R 153-1 du code de commerce et ce afin d’assurer la protection du secret des affaires.
En effet, en application de l’article L 153-1 du code de commerce, il est stipulé que :
« Lorsqu’il est saisi sur requête sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile ou au cours d’une mesure d’instruction ordonnée sur ce fondement, le juge peut ordonner d’office le placement sous séquestre provisoire des pièces demandées afin d’assurer la protection du secret des affaires.
Si le juge n’est pas saisi d’une demande de modification ou de rétractation de son ordonnance en application de l’article 497 du code de procédure civile dans un délai d’un mois à compter de la signification de la décision, la mesure de séquestre provisoire mentionnée à l’alinéa précédent est levée et les pièces sont transmises au requérant.
Le juge saisi en référé d’une demande de modification ou de rétractation de l’ordonnance est compétent pour statuer sur la levée totale ou partielle de la mesure de séquestre dans les conditions prévues par les articles R 153-3 à R 153-10 ».
En l’occurrence, l’exécution des opérations d’instruction et de saisie est intervenue le 13 novembre 2020.
Par exploit du 31 décembre 2020, Vallis Habitat a assigné devant le juge des référés du tribunal judiciaire d’Avignon M. [X] et les trois sociétés Terre et Pierre Gestion, Ganay Participations ainsi que la SCI Vernet 73, afin de dire que les parties viendront devant lui, en référé, afin d’examen, en présence de l’huissier, des pièces séquestrées et qu’il soit statué sur la communication desdites pièces.
Dans le cadre de cette instance, M. [X] et les trois sociétés Terre et Pierre Gestion, Ganay Participations ainsi que la SCI Vernet 73 ont saisi le juge des référés d’une demande reconventionnelle tendant à obtenir la nullité des opérations autorisées par l’ordonnance rendue le 13 novembre 2020 considérant leur caractère disproportionnées, l’atteinte au principe du contradictoire ainsi leur caractère illégal, ce qui revenait en conséquence à présenter en référé une demande en rétractation.
En l’occurrence, l’existence de cette demande de rétractation de l’ordonnance contestée dans un délai d’un mois à compter de la signification de la décision excluait la levée « automatique » de la mesure de séquestre provisoire telle qu’elle est énoncée à l’article R 153-1 al 2 du code de commerce.
Aux termes de l’arrêt rendu le 11 octobre 2011, la cour d’appel de Nîmes a déclaré irrecevable la demande des intimés tendant à la rétractation de l’ordonnance du 13 novembre 2020. Sur la demande de mainlevée des pièces séquestrées, la cour indique que leur communication sans examen ni tri préalable n’est pas conforme à l’ordonnance du 13 novembre 2020 justifiant ainsi le rejet de la demande.
S’en est suivie une assignation délivrée le 17 décembre 2022 par Vallis Habitat saisissant le juge des référés d’une demande l’autorisant à se faire remettre par le biais de la SCP [G] l’intégralité des pièces actuellement séquestrées en l’étude de l’huissier.
Il s’ensuit que le juge des référés est compétent pour examiner le bien-fondé de la demande au regard des critères de compétence définis à l’article 834 du code de procédure civile.
Il est cependant justifié de la délivrance d’une assignation le 24 février 2022 aux termes de laquelle les sociétés intimées ont saisi le tribunal judiciaire d’Avignon aux fins notamment d’obtenir l’annulation du procès-verbal de constat, des opérations d’instruction et la saisie des documents réalisés par Me [G] le 13 novembre 2020 en exécution de l’ordonnance présidentielle rendue le même jour, ainsi que la restitution de tous les documents séquestrés et collectés.
Or, l’opération de tri revient à apprécier si une pièce doit être communiquée à la partie requérante ou si au contraire elle relève du secret des affaires. Faire droit à la demande de tri et de communication de pièces subséquente permet ainsi à la partie requérante de recueillir des éléments de preuve et d’en tirer partie avant tout procès.
Les intimés opposent l’irrégularité de la mesure d’instruction et des opérations de saisie sachant que la nullité des actes d’instruction et de saisie emporte restitution des documents séquestrés à la partie saisie.
La demande présentée devant le juge des référés se heurte donc à une contestation sérieuse tenant à la légalité contestée des opérations d’instruction susceptibles de remettre en cause leur communication.
L’ordonnance contestée en appel sera en conséquence confirmée en ce qu’elle a retenu l’existence d’une contestation sérieuse faisant échec aux demandes de Vallis Habitat.
L’appelant oppose en appel l’existence d’un différend pour justifier qu’il soit fait droit à la demande de tri et de communication considérant que les critères posés par l’article 834 du code de procédure civile sont alternatifs et non cumulatifs.
Cependant, la légalité contestée des opérations d’instruction et la question de leur communication dans le souci d’assurer la protection du secret des affaires s’opposent à la demande présentée par Vallis habitat, aucune urgence ne justifiant que soit ordonnée les opérations de tri et de communication.
Les dépens et les frais irrépétibles ont été exactement réglés par le premier juge.
En cause d’appel, il convient d’accorder aux intimés, contraints d’exposer de nouveaux frais pour se défendre, une indemnité de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, d’une part à M. [X], et d’autre part aux sociétés intimées. Vallis Habitat, qui succombe, devra supporter les dépens de l’instance d’appel et ne saurait bénéficier d’une somme au titre des frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en référés et en dernier ressort,
Confirme l’ordonnance rendue le 8 avril 2022 par le juge des référés du tribunal judiciaire d’Avignon en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déboute Vallis Habitat de la demande au titre des frais irrépétibles,
Condamne Vallis Habitat à payer à M. [Z] [X] la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne Vallis Habitat à payer aux sociétés Terre et Pierre Gestion, Ganay Participations et la SCI Vernet 73 la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne Vallis Habitat aux dépens
Arrêt signé par la présidente et par la greffière.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE