Séquestre provisoire : 5 juillet 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 23/10904

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Séquestre provisoire : 5 juillet 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 23/10904
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 1

ORDONNANCE DU 05 JUILLET 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : 23/10904 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CH2IA

Sur demande de rétraction d’une ordonnance rendue par la présidente de la 1ère chambre du pôle 5 le 24 mai 2023 – RG 23/00397

Nature de la décision : Contradictoire

NOUS, Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assistée de Karine ABELKALON, Greffière.

Vu l’assignation en référé délivrée à la requête de :

La S.A.S. MAISON BERTRAND RAVACHE

Société au capital de 1 000 000 euros,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de LIBOURNE sous le numéro 418 482 070

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me François TEYTAUD de l’AARPI TEYTAUD-SALEH, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

Assistée de Me François HERPE de la SELARL CVS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0098

DEMANDERESSE

à

S.C.E.A. SOCIETE CIVILE VINICOLE CHATEAU DU TARIQUET

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Jean AITTOUARES de la SELARL OX, avocat au barreau de PARIS, toque : A0966

Assistée de Me Benjamin MANKUT de la SELARL OX, avocat au barreau de PARIS

DEFENDERESSE

Et après avoir entendu les conseils des parties lors des débats de l’audience publique du 04 juillet 2023 :

***

Vu le jugement rendu le 25 janvier 2022 par le tribunal judiciaire de Paris dans une instance opposant la SOCIETE CIVILE VINICOLE CHATEAU DU TARIQUET (ci-après, la société CHATEAU DU TARIQUET) aux sociétés VIGNOBLES LAUR et CGM VINS, qui a notamment :

– condamné les sociétés CGM VINS et VIGNOBLES LAUR à payer diverses sommes à la société CHATEAU DU TARIQUET pour contrefaçon de ses marques ‘PREMIERES GRIVES’ et ‘DERNIERES GRIVES’ ;

– condamné les sociétés CGM VINS et VIGNOBLES LAUR à remettre à la société CHATEAU DU TARIQUET la copie de tout contrat, devis, bon de commande, facture, et extraits du grand livre comptable, relatifs à la production et la distribution des vins ‘FAUTE DE GRIVES JE BOIS DU MERLE’ depuis janvier 2017, et ce dans un délai de 30 jours à compter de la signification du jugement, puis sous astreinte de 500 euros par jour de retard, qui courra pendant 180 jours, contre chacune de ces deux sociétés ;

– interdit aux societés CGM VINS et VIGNOBLES LAUR de commercialiser de quelque manière que ce soit, du vin ou des produits similaires sous un signe contenant ‘Faute de grive(s)’, sous astreinte ;

– ordonné l’exécution provisoire ;

Vu l’appel interjeté contre ce jugement le 11 février 2022 par la société VIGNOBLES LAUR enregistré sous le n° RG 22/03658 ;

Vu la requête du 24 mai 2023 de la société CHATEAU DU TARIQUET aux fins de saisie-contrefaçon ;

Vu notre ordonnance du 24 mai 2023 autorisant la société CHATEAU DU TARIQUET à pratiquer une saisie-contrefaçon au siège social de la société MAISON BERTRAND RAVACHE, société de négoce en vins située à [Localité 5] ;

Vu la requête du 30 juin 2023 de la société MAISON BERTRAND RAVACHE aux fins d’autorisation d’assigner en référé d’heure à heure devant le premier président de la cour d’appel de Paris afin qu’il soit statué sur sa demande de rétractation ou à défaut de modification visant à protéger les éléments soumis au secret des affaires ou à la confidentialité ;

Vu notre ordonnance du 30 juin 2023 autorisant la société MAISON BERTRAND RAVACHE à assigner la société CHATEAU DU TARIQUET pour l’audience des référés du 4 juillet 2023 à 14 heures ;

Vu l’assignation délivrée le 30 juin 2023 par la société MAISON BERTRAND RAVACHE à la société CHATEAU DU TARIQUET par laquelle elle nous demande :

– à titre principal :

– d’ordonner la rétractation pure et simple de l’ordonnance rendue par Mme Isabelle DOUILLET, présidente ‘de la 5ème chambre’ de la cour d’appel de Paris le 24 mai 2023 ;

– d’ordonner la restitution à la société MAISON BERTRAND RAVACHE des originaux et copies, physiques et/ou électroniques, du procès-verbal de saisie-contrefaçon établi en vertu de ‘l’arrêt rétracté’ et de l’ensemble des fichiers, pièces et documents collectés par l’huissier à l’issue des opérations de saisie-contrefaçon du 28 juin 2023 ;

– à titre subsidiaire :

– d’ordonner la rétractation partielle de l’ordonnance rendue par Mme [X] [I], présidente ‘de la 5ème chambre’ de la cour d’appel de Paris le 24 mai 2023 s’agissant des chefs de missions suivants :

‘- procéder à la copie de la liste des clients et/ou partenaires et/ou prospects auprès desquels la société MAISON BERTRAND RAVACHE a adressé, par quelque moyen que ce soit toute documentation promotionnelle portant en tout ou en partie sur des vins de la gamme FAUTE DE GRIVES ;

– autorisons l’Huissier de justice à se faire communiquer les codes d’accès, notamment informatiques, nécessaires à l’exécution de sa mission et à accéder à l’ensemble des postes informatiques et tous autres supports utiles (externes et internes) de données informatiques aux fins d’y rechercher, extraire et copier tous dossiers, fichiers, documents, données ou correspondances en lien avec les vins de la gamme FAUTE DE GRIVES ;

– autorisons l’Huissier de justice à poser toutes questions et/ou à faire des recherches et constatations utiles afin de découvrir la preuve de la matérialité de la contrefaçon alléguée, consigner les déclarations des répondants et toutes paroles prononcées au cours des opérations ;

– autorisons l’Huissier de justice à utiliser ou réquisitionner les moyens humains et techniques de la société MAISON BERTRAND RAVACHE nécessaire à la réalisation des opérations décrites ci-dessus’ ;

– d’ordonner la restitution à la société MAISON BERTRAND RAVACHE des originaux et copies, physiques et/ou électroniques, du procès-verbal de saisie-contrefaçon établi en vertu de ‘l’arrêt rétracté’ et de l’ensemble des fichiers, pièces et documents collectés par l’huissier à l’issue des opérations de saisie-contrefaçon du 28 juin 2023, dans la mesure où ces éléments sont collectés ou établis sur la base des chefs de mission précités objet de la demande de rétractation ;

– à titre infiniment subsidiaire :

– de modifier l’ordonnance rendue par Mme Isabelle DOUILLET, présidente ‘de la 5ème chambre’ de la cour d’appel de Paris le 24 mai 2023 ;

– d’ordonner le placement sous séquestre provisoire entre les mains de l’étude de commissaires de justice BONNAMY-VIZOSO & LEON de toutes les pièces saisies le 28 juin 2023, et a minima des pièces suivantes ou relatives aux chefs de mission ou pièces suivantes : ‘élément comptables et contractuels’, ‘contrats’, ‘devis’, ‘bons de commandes’, ‘factures sortantes’, ‘la liste des clients et/ou partenaires et/ou prospects auprès desquels MAISON BERTRAND RAVANCHE a adressé, par quelque moyen que ce soit toute documentation promotionnelle portant en tout ou partie sur des vins de la gamme FAUTE DE GRIVES’, et ce jusqu’à un accord des parties pour une communication ou une production des pièces aux débats d’une version non confidentielle des pièces séquestrées saisies ou d’un résumé de ces pièces ;

– de ‘m’en référer’ en cas de défaut d’accord entre les parties dans un délai de deux mois à compter de la décision à intervenir ;

– en tout état de cause :

– de condamner la société CHATEAU DU TARIQUET à payer à la société MAISON BERTRAND RAVACHE la somme de 5 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– de condamner la société CHATEAU DU TARIQUET aux entiers dépens de l’instance.

Vu les conclusions en réponse transmises par la société CHATEAU DU TARIQUET le 4 juillet 2023 dans lesquelles elle nous demande :

– à titre principal, de juger que les demandes de la société MAISON BERTRAND RAVACHE tendant à l’aménagement de l’ordonnance du 24 mai 2023 sont irrecevables, faute pour cette société d’avoir procédé comme indiqué à l’article R. 153-3 du code de commerce ;

– à titre subsidiaire, de débouter la société MAISON BERTRAND RAVACHE de ses demandes tendant à l’aménagement de l’ordonnance du 24 mai 2023 ;

– en tout état de cause :

– de débouter la société MAISON BERTRAND RAVACHE de sa demande de rétractation pure et simple de l’ordonnance du 24 mai 2023 ;

– de débouter la société MAISON BERTRAND RAVACHE de sa demande de restitution des pièces saisies en exécution de l’ordonnance du 24 mai 2023 ;

– de débouter la société MAISON BERTRAND RAVACHE de sa demande de rétractation partielle de l’ordonnance du 24 mai 2023 ;

– de débouter la société MAISON BERTRAND RAVACHE de sa demande de restitution des fichiers, pièces et documents saisis en exécution des chefs de l’ordonnance du 24 mai 2023 dont elle sollicite la rétractation ;

– de juger que la demande de la société MAISON BERTRAND RAVACHE de mise sous séquestre provisoire des pièces saisies en exécution de l’ordonnance du 24 mai 2023 est sans objet ;

– d’ordonner la libération des pièces saisies auprès de la société MAISON BERTRAND RAVACHE en exécution de l’ordonnance du 24 mai 2023, au profit de la société civile vinicole CHATEAU DU TARIQUET ;

– de condamner la société MAISON BERTRAND RAVACHE :

– à payer 6 500 euros à la société CHATEAU DU TARIQUET, en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me AITTOUARES, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Les parties ayant été entendues à l’audience du 4 juillet 2023 ;

Sur ce,

En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé des prétentions et moyens des parties, aux assignation et conclusions écrites qu’elles ont transmises, telles que susvisées.

Sur les demandes de la société MAISON BERTRAND RAVACHE

Sur la demande de rétractation de l’ordonnance rendue sur requête et de restitution des pièces saisies en exécution de cette ordonnance

La société MAISON BERTRAND RAVACHE soutient que l’ordonnance entreprise doit être rétractée, totalement ou partiellement, dès lors (i) qu’elle a été prise par un magistrat non compétent au regard de l’article 958 du code de procédure civile, (ii) que les motifs présentés au magistrat pour justifier de l’urgence sont artificiels et spécieux, (iii) que ceux présentés à ce même magistrat pour justifier qu’il soit dérogé au principe du contradictoire sont fallacieux, le risque de déperdition des preuves invoqué étant en réalité inexistant puisque les pièces recherchées sont des pièces comptables dont la conservation est obligatoire et qu’aucune preuve de sa volonté de dissimulation n’est démontrée alors qu’elle n’est un simple négociant distributeur, qu’elle n’est à ce jour partie à aucune des procédures engagées par la société CHATEAU DU TARIQUET et qu’elle n’a jamais été contactée par cette dernière, (iv) que les mission confiées à l’huissier sont disproportionnées, excédant ses pouvoirs y compris dans le cadre d’une saisie-contrefaçon, et donc irrégulières, ce denier ne pouvant que procéder à de constatations purement matérielles, à l’exclusion de toute recherche, découverte ou réquisition, outre que la saisie de la liste des clients, partenaires ou prospects du saisi est sans rapport avec les besoins du litige puisque leurs identités n’ont pas à être connues du saisissant, surtout si ces documents évoquent d’autres produits ou services du saisi.

La société CHATEAU DU TARIQUET conclut au rejet des demandes. Pour s’opposer en particulier à la demande de rétractation partielle de l’ordonnance s’agissant de l’autorisation donnée de procéder à la copie de la liste des clients, partenaires et prospects de la société MAISON BERTRAND RAVACHE, elle fait valoir qu’elle doit pouvoir déterminer qui a été confronté aux produits contrefaisants, afin d’alerter les personnes concernées et solliciter, le cas échéant, réparation auprès d’elles.

La requête aux fins de saisie-contrefaçon a été adressée au premier président de la cour d’appel de Paris et rendue par la présidente de la chambre 1 du pôle 5 de cette cour conformément à l’ordonnance portant organisation du service (‘ordonnance de roulement’) à compter du 2 janvier 2023 prise par le premier président de cette cour en date du 9 décembre 2022 selon laquelle ‘Les magistrats de la chambre [5-1 spécialisée en matière de contrefaçon] sont délégués par le premier président pour statuer sur requête dans les matières attribuées à la chambre’. La présidente de la chambre 5-1, qui agissait en tant que délégataire du premier président de la cour d’appel, était donc compétente pour rendre l’ordonnance sur requête.

L’article L.716-4-7 du code de la propriété intellectuelle, qui constitue un texte spécial relatif aux saisies-contrefaçons en matière de marques, ne prévoit pas de condition d’urgence pour qu’il soit procédé à de telles mesures. Il est donc vain pour la société MAISON BERTRAND RAVACHE de soutenir que la société CHATEAU DU TARIQUET a invoqué fallacieusement une situation d’urgence pour obtenir la mesure qu’elle sollicitait. Au demeurant, la société CHATEAU DU TARIQUET justifie que la saisie-contrefaçon effectuée au siège de la société MAISON BERTRAND RAVACHE, négociant en vins, le 28 juin 2023, a permis la découverte de documents relatifs à la vente par cette dernière de bouteilles de vins portant la dénomination jugée contrefaisante FAUTE DE GRIVES, et ce, près d’un an et demi après le jugement rendu le 25 janvier 2022 ayant sanctionné la contrefaçon de marques, circonstance de nature à caractériser l’urgence à faire constater la vraisemblable continuation des actes de contrefaçon pour lesquels les sociétés CGM VINS et VIGNOBLES LAUR ont été sanctionnées par le tribunal.

La dérogation au principe du contradictoire apparaît justifiée compte tenu du risque d’écoulement des marchandises contrefaisantes, pouvant être facilité par des opérations promotionnelles, et du risque de destruction de preuves, s’agissant notamment de documents dont la conservation n’est pas obligatoire (documents contractuels, commerciaux…).

Les termes de l’ordonnance du 24 mai 2023 définissent la mission de l’huissier en prévoyant notamment que ce dernier pourra se faire communiquer les codes d’accès, notamment informatiques, nécessaires à l’exécution de sa mission et accéder à l’ensemble des postes informatiques et tous autres supports utiles de données informatiques aux fins d’y ‘rechercher’, extraire et copier tous dossiers, fichiers, documents, données ou correspondances ‘en lien avec les vins de la gamme FAUTE DE GRIVES’, qu’il pourra en outre ‘poser toutes questions et/ou faire des recherches’ et constatations utiles afin de ‘découvrir’ la preuve de la matérialité de la contrefaçon alléguée, et ‘utiliser ou réquisitionner les moyens humains et techniques de la société MAISON BERTRAND RAVACHE nécessaire à la réalisation des opérations décrites ci-dessus’. Ces termes sont proportionnés à la finalité de la saisie-contrefaçon telle que définie en matière de marques par l’article L. 716-4-7 du code de la propriété intellectuelle, et qui doit permettre notamment la saisie réelle de produits ou services prétendument contrefaisants ‘ainsi que tout documents s’y rapportant’, ce qui suppose nécessairement la recherche de documents dématérialisés sur des postes informatiques susceptibles de contenir un très grand nombre de documents, dont la plupart ne se rapportent pas à la contrefaçon, la ‘recherche’ ainsi autorisée étant en l’espèce expressément limitée à des documents ‘en lien avec les vins de la gamme FAUTE DE GRIVES’. L’autorisation donnée à l’huissier de poser des questions, faire des recherches et constatations utiles afin de ‘découvrir’ la preuve de la matérialité de la contrefaçon alléguée correspond pareillement à la finalité de la saisie-contrefaçon.

De même, l’utilisation ou la réquisition des moyens de la société saisie prévue dans l’ordonnance est proportionnée à la nécessité pour l’huissier instrumentaire de pouvoir accéder aux postes informatiques de la société, le cas échéant au moyen de mots de passe, ou à certaines pièces ou locaux, au moyen notamment de clés.

En revanche, la société MAISON BERTRAND RAVACHE doit être suivie quand elle soutient que l’autorisation donnée à l’huissier de procéder ‘à la copie de la liste des clients et/ou partenaires et/ou prospects auprès desquels la société MAISON BERTRAND RAVACHE a adressé, par quelque moyen que ce soit toute documentation promotionnelle portant en tout ou en partie sur des vins de la gamme FAUTE DE GRIVES’ apparaît excessive, l’identité de ses personnes n’étant pas nécessaire à la solution du litige, alors que la société CHATEAU DU TARIQUET a par ailleurs obtenu l’autorisation, selon l’ordonnance critiquée, de faire procéder à la copie ‘de tout élément comptable ou contractuel afférent à l’achat, l’entreposage, le conditionnement, le transport et/ou la vente de vins FAUTE DE GRIVES, en ce compris tous contrats, devis, bons de commandes, factures entrantes ou sortantes’.

L’ordonnance du 24 mai 2023 sera donc rétractée en ce sens. Il y a lieu en conséquence d’ordonner la restitution à la société MAISON BERTRAND RAVACHE des pièces saisies correspondant à ‘la liste des clients et/ou partenaires et/ou prospects auprès desquels la société MAISON BERTRAND RAVACHE a adressé, par quelque moyen que ce soit toute documentation promotionnelle portant en tout ou en partie sur des vins de la gamme FAUTE DE GRIVES’.

Le surplus des demandes de rétractation et de restitution de la société MAISON BERTRAND RAVACHE sera rejeté.

Sur la demande de modification de l’ordonnance

La société MAISON BERTRAND RAVACHE forme une demande de séquestre provisoire entre les mains de l’huissier de justice des pièces saisies à l’occasion des opérations de saisie-contrefaçon du 28 juin 2023.

La société CHATEAU DU TARIQUET oppose que la demande est irrecevable faute pour la société requérante d’avoir fourni les éléments listés à l’article R.153-3 du code de commerce, en tout état de cause mal fondée, voire sans objet puisque l’huissier instrumentaire a finalement procédé au placement de ces pièces sous séquestre.

Il est constant que l’huissier instrumentaire a procédé au placement de ces pièces sous séquestre selon procès-verbal de mise sous séquestre du 30 juin 2023.

Dès lors, comme le souligne la société CHATEAU DU TARIQUET, la demande formée par la requérante est dénuée d’objet.

Sur la demande de la société CHATEAU DU TARIQUET de libération des pièces mises sous séquestre

La société MAISON BERTRAND RAVACHE fait valoir que rien ne justifie plus que les pièces saisies en exécution de l’ordonnance soient maintenues en séquestre et qu’elle doit désormais pouvoir disposer des pièces saisies afin d’exercer son action sur leur fondement.

La société CHATEAU DU TARIQUET objecte que les pièces ‘éléments comptables et contractuels’, ‘contrats’, ‘devis’, ‘bons de commandes’, ‘factures sortantes’ sont des informations confidentielles, non accessibles aux tiers, dont un concurrent du saisi n’a pas à connaître même dans le cadre d’une saisie-contrefaçon et qu’elles ne sont pas nécessaires à la solution du litige, ne pouvant servir de base de calcul à un préjudice allégué ; qu’il convient donc de les laisser sous séquestre jusqu’à un accord des parties pour une communication ou une production aux débats d’une version non confidentielle ou d’un résumé de ces pièces.

Les éléments comptables ou contractuels afférents à l’achat, l’entreposage, le conditionnement, le transport et/ou la vente de vins FAUTE DE GRIVES, en ce compris les contrats, devis, bons de commandes, factures entrantes ou sortantes apparaissent pourtant nécessaires à la démonstration par la société CHATEAU DU TARIQUET de l’étendue du préjudice qu’elle allègue, alors que la société MAISON BERTRAND RAVACHE ne démontre pas que de telles pièces répondent aux critères énoncés par l’article L. 151-1 du code de commerce, issu de la loi n° 2018-670 du 30 juillet 2018 relative à la protection du secret des affaires (‘Est protégée au titre du secret des affaires toute information répondant aux critères suivants : 1° Elle n’est pas, en elle-même ou dans la configuration et l’assemblage exacts de ses éléments, généralement connue ou aisément accessible pour les personnes familières de ce type d’informations en raison de leur secteur d’activité ; 2° Elle revêt une valeur commerciale, effective ou potentielle, du fait de son caractère secret ; 3° Elle fait l’objet de la part de son détenteur légitime de mesures de protection raisonnables, compte tenu des circonstances, pour en conserver le caractère secret’).

Il y a donc lieu de faire droit à la demande de levée du séquestre opéré par l’huissier de justice des pièces saisies au sein de la société MAISON BERTRAND RAVACHE, à l’exclusion de celles concernant ‘la liste des clients et/ou partenaires et/ou prospects auprès desquels la société MAISON BERTRAND RAVACHE a adressé, par quelque moyen que ce soit toute documentation promotionnelle portant en tout ou en partie sur des vins de la gamme FAUTE DE GRIVES’.

Sur les dépens et frais irrépétibles

Chaque partie, succombant sur une partie de ses prétentions, gardera la charge de ses dépens.

L’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Statuant en référé,

Ordonnons la rétractation partielle de notre ordonnance du 24 mai 2023 en ce qu’elle autorise l’huissier de justice à ‘procéder à la copie de la liste des clients et/ou partenaires et/ou prospects auprès desquels la société MAISON BERTRAND RAVACHE a adressé, par quelque moyen que ce soit toute documentation promotionnelle portant en tout ou en partie sur des vins de la gamme FAUTE DE GRIVES’,

Ordonnons en conséquence la restitution à la société MAISON BERTRAND RAVACHE des pièces saisies correspondant à cette liste,

Pour le surplus, ordonnons la levée du séquestre opéré par l’huissier de justice et la remise des pièces saisies le 28 juin 2023 dans les locaux de la société MAISON BERTRAND RAVACHE à la société CHATEAU DU TARIQUET,

Disons que chaque partie gardera la charge de ses dépens,

Rejetons les demandes formées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejetons toutes demandes plus amples ou contraires.

ORDONNANCE rendue par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE

LA PRÉSIDENTE

 


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