Séquestre provisoire : 21 décembre 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 23/00081

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Séquestre provisoire : 21 décembre 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 23/00081
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 23/00081 – N° Portalis DBVH-V-B7H-IVPH

CS

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE CARPENTRAS

04 janvier 2023

RG:22/00106

Société NOUVEL LLC

C/

[X]

S.A.S. MIRAVAL PROVENCE

S.A.S. FAMILLES [X]

E.U.R.L. FAMILLE [X]

S.A.R.L. M. [V]

Grosse délivrée

le

à Selarl Pericchi

Selarl Vajou

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section C

ARRÊT DU 21 DECEMBRE 2023

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CARPENTRAS en date du 04 Janvier 2023, N°22/00106

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Sylvie DODIVERS, Présidente de chambre,

Mme Laure MALLET, Conseillère,

Mme Corinne STRUNK, Conseillère,

GREFFIER :

Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l’audience publique du 16 Octobre 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 23 Novembre 2023, prorogé à ce jour.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

APPELANTE :

Société NOUVEL LLC société de droit californien, prise en la personne de son manager

[Adresse 3]

[Localité 13]

[Localité 13] ETATS UNIS

Représentée par Me Philippe PERICCHI de la SELARL AVOUEPERICCHI, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Thomas HEINTZ de la SELARL BOSCO AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS :

Monsieur [N] [X]

né le [Date naissance 2] 1970 à [Localité 11]

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représenté par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représenté par Me Quentin DE MARGERIE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

S.A.S. MIRAVAL PROVENCE immatriculée au RCS d’AVIGNON sous le n° 793 067 554 prise en la personne de son président en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 12]

[Localité 5]

Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Quentin DE MARGERIE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

S.A.S. FAMILLES [X] immatriculée au RCS d’AVIGNON sous le n° 790 402 762 prise en la personne de son président en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 12]

[Localité 5]

Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Quentin DE MARGERIE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

SARL FAMILLE [X] immatriculée au RCS d’AVIGNON sous le n° 534 451 372 prise en la personne de son président en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 8]

[Localité 5]

Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Quentin DE MARGERIE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

S.A.R.L. M. [V] immatriculée au RCS d’AVIGNON sous le n° 884 734 732 prise en la personne de son président en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Quentin DE MARGERIE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

Affaire fixée en application des dispositions de l’article 905 du code de procédure civile avec ordonnance de clôture rendue le 09 Octobre 2023

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe de la Cour et signé par Madame Sylvie DODIVERS, Présidente de chambre, le 21 décembre 2023,

EXPOSE DU LITIGE

En 2008, les acteurs américains, [L] [Y] et [G] [K], par l’intermédiaire de leurs holdings personnelles respectives la société Nouvel LLC et la société Mondo Bongo, ont acquis chacune 50% du capital de la Holding Quimicum qui possède la SA [Adresse 6], comprenant le château et le domaine viticole attenant comprenant 4 hectares de vignes, le tout situé sur la commune de [Localité 7] dans le Var.

La société [Adresse 6] est dirigée depuis 2017 par M. [M] [R] et [J] [C].

La société [Adresse 6] s’est rapprochée de la famille [X], investie dans la viticulture et l’activité de négociants en vin depuis 5 générations, et qui exploite un domaine familial, le château de Beaucastel, comprenant 100 hectares de vignes dont l’essentiel en appellation Chateauneuf-du-Pape, ainsi que plus de 200 autres hectares.

Leur activité s’exerce par le biais d’un groupe familial, la SAS Famille [X], composé notamment de la société Vins et Domaines [X] et la société [X] et Fils.

Le 22 mai 2013, la société [Adresse 6] a ainsi créé avec le groupe familial [X] présidée par M. [N] [X], une joint-venture, appelée «’Miraval Provence’», qui sera présidée par M. [N] [X], avec un capital détenu à 50% par [Adresse 6] et 50% par la société Famille [X] SAS.

L’objectif poursuivi était de valoriser, de commercialiser la production du domaine Miraval et de distribuer la production du domaine viticole, via le développement d’une activité de négoce et de production de cuvées d’assemblage en lui faisant profiter du savoir-faire technique et du réseau de fournisseurs’ et distributeurs ainsi que la capacité de production du groupe [X].

La société Miraval Provence détient’:

”” 100%’ de l’Eurl M.[V] laquelle détient 99% du capital de la société d’exploitation agricole Miraval’;

”” 80% du capital de la Sas Fleur de Miraval immatriculée le 29 janvier 2020.

Par une assemblée extraordinaire du 9 août 2021, les deux actionnaires de Miraval Provence , à savoir [Adresse 6] et la SAS Familles [X], ont voté la transformation de la SNC Miraval Provence en SAS.

Suite à la séparation du couple [Y]/[K], [L] [Y] a cédé en octobre 2021 sa participation’ dans la société Nouvel LLC à une entité du groupe de vins et spiritueux, Stoli, à savoir Tenute del Mondone. Cette cession est aujourd’hui contestée en considération de la violation d’un droit d’agrément stipulé au profit de [G] [K] et de sa holdding Mondo Bongo, et fait l’objet d’une action en justice devant les juridictions américaines.

La société Nouvel LLC suspecte les dirigeants de la société [Adresse 6] d’appauvrir la société Miraval Provence, en charge de la commercialisation de la production du domaine viticole [Adresse 6],’ par un transfert illicite de ses actifs au bénéfice d’autres sociétés dans le seul intérêt du Groupe [X] et de la société Mondo Bongo.

Dans ce contexte et par requête du 3 février 2022, la société Nouvel LLC a demandé à la Présidente du tribunal judiciaire de Carpentras, sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, qu’elle commette un huissier de justice afin de se rendre au siège des sociétés Miraval Provence, Familles [X], la SARL Famille [X] et l’EURL M.[V], ainsi qu’au domicile de M. [N] [X] afin d’y prendre copie de «’tous dossiers, fichiers, documents, correspondances ‘ quel qu’en soit le support, informatique ou autre… en rapport avec des fautes de gestion et d’actes d’abus de biens sociaux’» .

Par ordonnance du 3 février 2022, la président du tribunal judiciaire de Carpentras a fait droit à cette requête en autorisant un commissaire de justice, la SCP Bertrand-Cadi§Grappin, de se rendre aux sièges sociaux desdites sociétés et au domicile de M [X] afin’;

«’- d’y rechercher et prendre copie, par tout moyen de tous dossiers, fichiers, documents, correspondances, se trouvant dans lesdits locaux ou annexes, quel qu’en soit le support informatique ou autre (notamment serveurs, ordinateurs ou smartphone) en rapport avec les fautes de gestion et acte d’abus de biens sociaux décrits dans la requête sur la période postérieure au 1er juin 2019

Etant précisé qu’à cette fin, le commissaire de justice devra notamment’:

”””””’ -1/ se faire communiquer ou prendre copie de l’intégralité des contrats, factures, correspondances (en ce compris les emails), pièces de comptabilité, documents de travail, présents sur les serveurs informatiques et/ou sur les postes informatiques postérieurement au 1er juin 2019 comprenant l’un des mots clés suivants (en majuscules, minuscules, avec / sans accentuations, etc)’:

– trademark

– trademark licence

– trademark licensing

– brand

– brand licensing

– marque

– Word & Design

– Block letter

– propriété intellectuelle

– intellectual property

– IP

– licence

– enregistrement

– registration

– register trademark USA

– United States Patent and Trademark Office

– USPTO

– Institut national de la propriété intellectuelle

– INPI

– Bulletin officiel de la propriété industrielle

– BOPI

– QUIMICUM

– NOUVEL

– loyer

– rent

– rental

– lease payment

– marques/ trademarks et/and MIRAVAL PROVENCE

– marques/ trademarks et/and [Adresse 6]

– marques/ trademarks et/and MIRAVAL COTES DE PROVENCE

– marques/ trademarks et/and MIRAVAL COTES DE PROVENCE MIRAVAL MILLISIME 2012 ;

– marques/ trademarks et/and FLEUR DE MIRAVAL EXCLUSIVEMENT ROSE ;

– marques/ trademarks et/and FLEUR MIRAVAL

– marques/ trademarks et/and FPP FLEUR DE MIRAVAL EXCLUSIVEMENT ROSE ;

– marques/ trademarks et/and MRVL

– marques/ trademarks et/and MIRAVAL

”””””’ 2/ Se faire communiquer ou prendre copie, sur les postes informatiques se trouvant dans les locaux de Miraval Provence, EURL M [V] et Famille [X] et au domicile de [N] [X], les correspondances postérieures au 1er juin 2019 émises ou reçues par [N] [X], et/ou par toute personne ayant une adresse [Courriel 10] ou et/ou par toute personne ayant une adresse [Courriel 9] relatives à l’enregistrement des marques suivantes’:

”” MIRAVAL;

”” MITRAVAL COTES DE PROVENCE ;

”” MIRAVAL COTES DE PROVENCE MIRAVAL MILLISIME 2012 ;

”” FLEUR MIRAVAL ;

”” FLEUR DE MIRAVAL EXCLUSIVEMENT ROSE;

”” FPP FLEUR DE MIRAVAL EXCLUSIVEMENT ROSE

”” MRVL

‘ainsi que la création des sociétés contenant le terme «’Miraval’»’;

”””””’ 3/ Se faire communiquer ou prendre copie, sur les téléphones portables utilisés par [N] [X] de l’intégralité des correspondances échangées par SMS ou autre messagerie, postérieures au 1er juin 2019 relatives à l’enregistrement des marques suivantes’:

”” MIRAVAL;

”” MIRAVAL COTES DE PROVENCE ;

”” MIRAVAL COTES DE PROVENCE MIRAVAL MILLISIME 2012 ;

”” FLEUR MIRAVAL ;

”” FLEUR DE MIRAVAL EXCLUSIVEMENT ROSE;

”” FPP FLEUR DE MIRAVAL EXCLUSIVEMENT ROSE:

”” MRVL

ainsi qu’à la création des sociétés contenant le terme « MIRAVAL »

afin d’exécuter ces mesures d’instruction’:

”” Autorisons chaque huissier intervenant à accéder à la messagerie et aux archives de fichiers de messagerie électronique, y compris les sauvegardes temporelles, quel qu’en soit le format (POP, IMAP, WEBMAIL,messageries hébergées, fichiers d’archives, les pièces jointes, les fichiers envoyés, les brouillons) notamment numérique, par fichiers de type Outlook, Entourage, Mail ou programme similaire, ou programme similaire, ou base de données ou base de messagerie type, PST ou similaires, situées’:

– sur les ordinateurs utilisés par [N] [X]’;

– ainsi que sur les serveurs de MIRAVAL PROVENCE, EURL M [V], et FAMILLE [X] présents dans les locaux de l’entreprise’;

”” Autorisons chaque huissier intervenant à se faire assister pour l’aider dans sa mission, d’un ou plusieurs expertis informatiques de son choix indépendants des parties en présence’;

”” Autorisons chaque huissier intervenant, avec l’aide de l’expert informatique, à installer tout logiciel ou brancher tout périphérique pour les besoins des opérations’;

”” Autorisons chaque huissier intervenant à accéder à l’ensemble des serveurs et postes informatiques des sociétés’ MIRAVAL PROVENCE, EURL M [V], et FAMILLE [X], locaux ou distants, et à tous autres supports utiles (externes et internes) de données informatiques, de procéder à l’extraction des disques durs des unités centrales et ordintaures, à leur examen à l’aide des outils d’investigation de son choix, puis à la remise en plae de ces disques dans leur unité centrale ou ordinateurs respectifs’;…

”” Disons que l’ensemble des éléments copiés par chaque huissier de justice intervenant seront conservés par lui en séquestre provisoire.

Cette mesure a été exécutée le 4 mars 2022.

Sur assignation en référé rétractation délivrée à la société Nouvel LLC le 1er avril 2022, les sociétés Miraval Provence, SAS Familles [X], la SARL Famille [X] et M.[V], ainsi que M. [N] [X] ont saisi la présidente du tribunal judiciaire de Carpentras à titre principal d’une demande en rétractation’ de l’ordonnance du 3 février 2022 avec annulation du procès-verbal dressé par le commissaire de justice en charge de l’exécution de la mesure autorisée et enfin que soit ordonnée la restitution sans délai des éléments appréhendés aux sociétés saisies et à M [X], et de supprimer toute copie de ces éléments.

A titre subsidiaire, il était demandé au magistrat de faire application des articles L 153-1 et R 153-1 et suivants du code de commerce en fixant notamment’ un délai de 4 mois pour que les demandeurs organisent la protection du secret de leurs affaires ainsi que de tout élément couvert par tout autre type de secret au sein des documents placés sous séquestre.

Par ordonnance du 4 janvier 2023, la présidente du tribunal judiciaire de Carpentras a’:

”” rétracté l’ordonnance du 3 février 2022 rendue par le président du tribunal judiciaire de Carpentras à la requête de la société Nouvel LLC’;

”” ordonné l’annulation du procès-verbal dressé par le commissaire de justice ayant procédé à l’exécution de la mesure prévue par cette ordonnance et des notes techniques rédigées par les experts en informatique ayant assisté le commissaire de justice’;

”” ordonné au commissaire de justice ayant procédé à l’exécution de la mesure prévue par cette ordonnance de restituer sans délai l’ensemble des éléments appréhendés aux sociétés Miraval Provence, Familles [X], la SARL Famille [X] et M.[V] et à’ M. [N] [X]’ et de supprimer toute copie de ces éléments’;

”” débouté la société Nouvel LLC de toutes ses demandes’;

”” dit n’y avoir lieu à prononcer une amende civile’;

”” rejeté la demande en réparation du préjudice résultant d’une procédure abusive’;

”” condamné la société Nouvel LLC à payer aux sociétés Miraval Provence, Familles [X], la SARL Famille [X] et M.[V] et à’ M. [N] [X] la somme de 1.500 euros à chacun au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

* * * *

Par déclaration du 5 janvier 2023, la société Nouvel LLC a formé appel de cette ordonnance en toutes ses dispositions sauf en ce qu’elle a débouté les intimés de leur demande d’amende civile et d’allocation de dommages et intérêts fondée sur le caractère abusif de la procédure initiée.

Par conclusions notifiées par RPVA le 6 octobre 2023, la société Nouvel LLC, appelante, a demandé à la cour, en application des articles 145 et 493 du code de procédure civile’, de’:

”” infirmer l’ordonnance de référé rendue le 4 janvier 2023 en toutes ses dispositions’;

Statuant à nouveau’:

A titre principal,

”” juger mal fondés les griefs soulevés par les intimés aux fins de rétractation de l’ordonnance du 3 février 2022′;

”” rejeter l’ensemble des demandes présentées par les intimés’;

A titre subsidiaire,

”” modifier le périmètre de la mission’;

A titre reconventionnel,

”” ordonner la libération des éléments séquestrés au profit de la société Nouvel’;

En conséquence,

”” fixer une date pour procéder à l’examen contradictoire des pièces saisies à la communication desquelles les sociétés Miraval Provence, Familles [X] SAS, la SARL Famille [X] et M.[V] et à’ M. [N] [X] s’opposent afin de statuer sur leur communication ou pas’;

”” juger la société Nouvel légitime et bien-fondée à être représentée aux audience sur la levée de séquestre afin d’y formuler ses observations s’agissant des demandes d’exclusions qui pourront être soulevées par les sociétés Miraval Provence, Familles [X], la SARL Famille [X] et M.[V] et à’ M. [N] [X]’;

”” juger qu’en vue de cette audience, les sociétés Miraval Provence, Familles [X], la SARL Famille [X] et M.[V] et à’ M. [N] [X] devront identifier les pièces à la communication desquelles il s’opposent en distinguant les pièces dont la communication est autorisée et celles devant faire l’objet d’un examen contradictoire en justifiant de la non-communication’;

”” juger que l’ordonnance qui statuera sur la levée de séquestre après examen contradictoire des pièces indiquera celles dont la communication à Nouvel est envisagée ne lui seront pas remises tant que l’ordonnance du 3 février 2022 n’est pas définitive’;

En tout état de cause,

”” rejeter l’ensemble des demandes, fins et prétentions des sociétés Miraval Provence, Familles [X], la SARL Famille [X] et M.[V] et à’ M. [N] [X]’;

”” juger que les éléments saisis demeureront sous séquestre entre les mains de l’huissier jusqu’à une décision définitive rendue sur la demande de rétractation ou de modification de l’ordonnance critiquée’;

”” condamner in solidum les sociétés Miraval Provence, Familles [X], la SARL Famille [X] et M.[V] et à’ M. [N] [X] à lui verser la somme de 20.000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens, ceux d’appel distraits au profit de la Selarl AVOUEPERICCHI.

Au soutien de ses conclusions, l’appelante expose un contexte révélant de la mainmise de Mondo Bongo et du groupe Famille [X] sur les actifs de la société Miraval Provence s’illustrant notamment par la subordination de M. [R] à [G] [K], la constitution de nouvelles sociétés dans lesquelles la société [Adresse 6] n’a pas ou peu de parts’.

Elle évoque ainsi la société «’Le Domaine’», qui produit et commercialise des cosmétiques à partir de produits de la vigne émanant de la société [Adresse 6], qui a pour associé unique la société «’Petrichor’», créée le 5 août 2021, elle-même détenue par la société Mondo Bongo et la Sci Vins et Domaines [X]. Elle accuse la société «’Le Domaine’» de commercialiser des produits qui sont constitués de ressources issues du domaine Miraval tout en exploitant l’image du château sans aucune contrepartie.

Elle dénonce également la création de la SAS Miraval Studios dans laquelle la société [Adresse 6] ne possède que 10% des actions ou bien l’Eurl M.[V] ou encore la Sas Fleur de Miraval immatriculée le 29 janvier 2021, l’objectif étant de contourner la société [Adresse 6] tout en utilisant ou dilapidant ses actifs.

Elle condamne dans le même sens la transformation de la SNC Miraval Provence en SAS, forme juridique moins transparente que la précédente. Elle expose enfin avoir découvert récemment, lors de la publication des comptes [Adresse 6], que la participation de la société [Adresse 6] dans la société Miraval Provence est passée de 50% à 49,997% lui faisant ainsi perdre le contrôle égalitaire de cette filiale.

Pour finir, elle fait part d’un contexte conflictuel au sein de la holding Quimicum, qui est dépourvue de tout gérant, entraînant le blocage de la société [Adresse 6],’ suite à la séparation du couple et aux tentatives de mainmise par la désignation d’administrateurs favorables à [G] [K] dans l’objectif de verrouiller le contrôle de [Adresse 6].

Elle expose avoir découvert, dans ce contexte de blocage persistant, que les administrateurs de la société [Adresse 6]’ ont permis le détournement d”actifs de la société au profit d’autres entités s’illustrant notamment par la duplication des droits de propriété intellectuelle au profit de la société Miraval Provence ou autres sociétés tierces, à l’instar de la SCEA Miraval ou la société Fleur de Miraval, comme la marque «’Miraval côte de Provence’».

Ainsi, les marques initialement déposées par la société [Adresse 6] ont progressivement été récupérées à partir de 2017 par la société Miraval Provence. De même’, cette société a créé de nouvelles marques au nom Miraval écartant la société appelante’; tel est le cas de la marque «’Fleur Miraval’». L’homologation de l’enregistrement des marques a été faite en parfaite connaissance de cause par le dirigeant de la société [Adresse 6], M [R], qui a organisé volontairement la dépossession frauduleuse des actifs de la société qu’il était censé protéger. Elle explique aujourd’hui’ n’avoir jamais consenti à ce que Miraval Provence devienne propriétaire des marques à titre définitif ce qui constitue un détournement d’actifs et est contraire à la licence de 2013 lui reconnaissant un droit exclusif sur lesdites marques.

Elle dénonce ainsi la collusion entre Mondo Bongo, les dirigeants de [Adresse 6] et le groupe [X] qui bénéfice de l’appropriation des marques.’ Ce système permet de contourner la société [Adresse 6] tout en utilisant ou dilapidant ses actifs en lui laissant malgré tout le coût des charges d’exploitation sans en tirer aucun bénéfice.

Ce faisant, ce contexte l’a conduite à solliciter des saisies dans le cadre d’une procédure non contradictoire pour réunir les éléments justifiant ce détournement d’actifs.

Dans le cadre de l’appel, la société Nouvel LLC affirme que la liste des pièces visées dans la requête était bien jointe à l’acte de signification contrairement à ce qu’a retenu le premier juge critiquant sur ce point la portée accordée aux actes produits par le commissaire de justice. Elle affirme que les expéditions sont des actes authentiques dont la valeur probante ne peut être remise en cause par les simples déclarations des intimés à défaut de procédure en inscription de faux. Sur ce point , le commissaire de justice affirme que la liste des pièces a été jointe aux actes de signification qui se retrouve en effet en page 23 de la requête.

S’agissant de la signification, elle assure que la requête concernait bien la Sas Famille [X] qui a reçu une signification valable de la requête et l’ordonnance.

Sur la prétendue absence de justification du recours à une procédure non-contradictoire, l’appelante soutient le risque de destruction des documents et fichiers notamment informatiques, des correspondances, de déperdition de preuves, ce risque étant d’autant plus accru par le concert frauduleux dénoncé tel qu’il est exposé en pages 16 et 17 de la requête. La société Nouvel LLC considère que la connaissance par les personnes visées par la requête de procédures judiciaires à venir est indifférente au choix de la procédure non-contradictoire tout en soulignant que le moyen selon lequel elle aurait consenti aux enregistrements de marque est d’une part inexacte et d’autre part sans incidence. Elle souligne sur ce point un afflux soudain d’enregistrements de marque dès 2020 soit bien avant le projet de partenariat avec LVMH tout en exposant que la possession des dépôts d’enregistrement des marques ne permettait pas de mesurer l’étendue de la spoliation.

En réponse aux moyens développés par les intimés, elle ne considère pas être un concurrent direct de la société Miraval Provence mais simplement un actionnaire à 50% de la société Quimicum précisant à cet égard que son actionnaire Tenute del Mondone ne produit ni ne commercialise de vin rosé susceptible de concurrencer les vins Miraval.

Elle ajoute que la présentation d’une première requête devant le tribunal de commerce ne la prive en rien de la possibilité d’en déposer une nouvelle tout en soulignant des différences notamment quant aux personnes concernées. De même, les autres procédures initiées n’ont aucun lien ni incidence sur la régularité de ladite requête étant au mieux complémentaires puisque s’exerçant aux Etats-Unis.

Sur l’absence de litige ultérieur plausible et crédible,’ elle rappelle qu’elle n’avait à justifier à ce stade de la procédure que l’existence d’un litige potentiel et considère être la seule en capacité d’agir pour sauvegarder les intérêts de [Adresse 6] en engageant une action contre ses dirigeants et complices pour le compte de ladite société. Elle se prévaut de sa qualité d’actionnaire de la maison mère elle-même actionnaire exclusive de [Adresse 6]. Elle se réfère à une jurisprudence constante de la cour de cassation qui consacre la possibilité pour l’actionnaire de la société mère d’agir «’ut singuli’» à l’encontre des dirigeants de la filiale à raison d’abus de biens sociaux, ainsi qu’à l’opinion du Professeur [D] [E]. Elle souligne enfin que cette société est actuellement dépourvue de tout dirigeant et administrateur se trouvant ainsi dans une situation de blocage.

Sur l’existence du délit d’abus de biens sociaux, elle allègue’ l’existence de plusieurs options procédurales à l’encontre de diverses personnes impliquées dans le détournement d’actifs. Elle considère que le détournement de droits sur les marques est constitutif dudit délit alors que ces enregistrements ont eu lieu sans aucune contrepartie dans le seul intérêt d’autres sociétés et en méconnaissance de l’accord conclu en 2013.

Sur l’inutilité d’une telle mesure, elle assure que si les dépôts d’enregistrement de marque sont publics, ils ne sont que la manifestation du délit. Enfin, elle ajoute que le dépôt de plainte est motivée par un souci d’éviter la prescription des faits délictueux.

S’agissant du caractère imprécis et manifestement disproportionné de la mesure, elle rappelle que l’huissier de justice n’était pas libre de réaliser des recherches mais que son action était bien limitée par les trois chefs de missions prévus par l’ordonnance en dépit de l’utilisation du terme «’notamment’» alors qu’il a procédé à un tri des éléments recueillis pour écarter des pièces sans liens avec les faits mentionnés dans la requête et éviter ainsi le grief de perquisition civile. De même, les mots-clés utilisés sont liés aux faits exposés étant ajouté que le périmètre de la mission est limité dans le temps. Elle rappelle enfin que le juge de la rétractation peut toujours modifier les termes de l’ordonnance.

Enfin, la société Nouvel’ LLC oppose le rejet du respect du secret des affaires ou de la vie privée’ en présence d’un motif légitime et nécessaire à la protection de ses droits ainsi qu’une limitation du périmètre d’intervention de la saisie.

Par conclusions notifiées par RPVA le 4 octobre 2023, M. [N] [X], la SAS Miraval Provence, la SAS Familles [X], la SARL Famille [X] et la Sarl M.[V], intimés, ont demandé à la cour, en application des articles 16, 145, 494 à 497 du code de procédure civile, L 151-1 et suivants, L 153-1 et suivantes, R 153-1 et suivants et enfin L 225-251 du code de commerce’, de’:

A titre principal,

”” confirmer l’ordonnance de référé rendue le 4 janvier 2023 en toutes ses dispositions’;

A titre subsidiaire, si par extraordinaire l’ordonnance de référé rendue était infirmée en ce qu’elle a rétracté l’ordonnance du 3 février 2023′:

”” ordonner qu’il soit fait application des articles L 153-1 et R 153-1 et suivants du code de commerce’;

”” fixer un délai de 4 mois aux sociétés Miraval Provence, Familles [X], la SARL Famille [X] et M.[V] et à’ M. [N] [X] pour organiser la protection de leurs secrets d’affaires ainsi que de tout élément couvert par tout autre type de secret au sein des documents placés sous séquestre et remettre à la cour’:

”” une version intégrale et confidentielle de chacun des documents qui relèvent, de leur point de vue, de la protection du secret des affaires ou de tout autre secret protégé par la loi’;

”” une version non confidentielle ou un résumé lorsqu’une telle production est envisageable’;

”” un mémoire contenant des explications précisant, document par document, les motifs leur conférant un caractère confidentiel’;

”” statuer sans audience sur la levée du séquestre et sur les pièces devant ou non être communiquées à Nouvel’LLC ;

”” restreindre l’accès de la société Nouvel LLC aux pièces dont la mainlevée aura été ordonné à une personne physique désignée par ses soins’;

”” juger qu’aucun des éléments placés sous séquestre ne pourra être remis à la société Nouvel LLC tant que la décision à intervenir ne sera pas définitive’;

”” condamner la société LLC à prendre en charge l’intégralité des frais exposés par’ Miraval Provence, Familles [X], la SARL Famille [X] et M.[V] et à’ M. [N] [X] dans le cadre de l’organisation de la protection des éléments couverts par le secret des affaires ou tout autre secret protégé par la loi parmi les éléments placés sous séquestre’;

En tout état de cause,

”” débouter la société Nouvel LLC de toutes ses demandes, fins et conclusions principales, subsidiaires et reconventionnelles’;

”” condamner à l’appelante à leur verser la somme de 15.000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

Au soutien de leurs conclusions, les intimés dénoncent principalement une violation des dispositions des articles 494 et 495 du code de procédure civile’:

”” la requête ne contient aucune indication des pièces sur lesquelles elle était fondée’;

”” l’ordonnance a été exécutée à l’encontre de personnes qu’elle ne visait pas, et n’a pas été dénoncée à l’une des personnes qu’elle visait.

Ils précisent que la requête et l’ordonnance dénoncées doivent comporter la liste précise des pièces invoquées afin d’assurer le principe de la contradiction et qu’à défaut, l’irrecevabilité est encourue sans nécessité de caractériser un grief, la rétractation de l’ordonnance s’imposant alors. Ils soutiennent encore qu’en cas de divergence de mentions ou de contenu entre l’expédition d’un acte d’huissier et l’exemplaire de cet acte effectivement remis à son destinataire, c’est le dernier qui fait foi.

‘Les concernant, ils exposent que les actes de signification de la requête et de l’ordonnance remis par le commissaire de justice comportent bien 16 feuilles sans que l’intitulé des pièces uniquement numérotées ne soit jamais précisé tant dans le corps de la requête que dans la décision dont il est demandé la rétractation. Ils soulignent enfin l’absence de bordereau. A cet égard, les premières expéditions produites par l’appelante ne sont pas des copies conformes des actes remis aux intimés et ont été établies après les opérations diligentées le’ 4mars 2022 de sorte qu’elles n’ont aucune valeur probante’.

Aussi, la signification litigieuse méconnaît les dispositions de l’article 494 susvisé justifiant la confirmation de la décision déférée en ce qu’elle a ordonné la rétractation de l’ordonnance du 3 février 2022.

Les intimés ajoutent que la requête a été signifiée à la SAS Familles [X], pourtant non visée par la requête, et non à la SARL Familles [X] qui elle était concernée par ladite requête. Tel est également le cas pour la société [X] et fils qui se trouve concernée par le champ d’application de la saisie alors qu’elle n’est nullement concernée par la requête.

Sur le fond, les intimés prétendent que’le recours à une procédure non contradictoire n’est pas justifiée ni motivée dans la mesure où le risque de destruction de preuve ou de concert frauduleux entre les protagonistes n’étaient étayés par aucun élément factuel, l’appelante s’étant contentée de pures pétitions de principe. Ainsi, le dépôt de marques «’Miraval’» par Miraval Provence, qui constitue l’essentiel du grief, est attesté’ par les dépôts à l’INPI donc insusceptibles de destruction, et est revendiqué par les intimés qui en ont toujours informé la société Nouvel.

Sur ce point, ils exposent que les accords de 2013 prévoyaient que les diverses marques «’Miraval’», existantes et à créer,’ resteraient la propriété de la société [Adresse 6] bien que Miraval Provence assurait le dépôt et le financement des marques et que le vin du domaine Miraval n’entrait que pour une faible part dans les assemblages.

Ils soutiennent qu’une telle situation ne pouvait se poursuivre à compter de 2016 en raison d’une part des discussions relatives à l’éventuelle entrée de [A] [Z] au capital de’ la société Miraval Provence nécessitant une réorganisation’ notamment pas la constitution d’actifs propres, et d’autre part afin de permettre un légitime rééquilibrage des relations entre les parties lié au succès rencontré par les vins assemblés et commercialisés par Miraval Provence sous l’impulsion de [N] [X], qui était seul à l’origine de la création de toutes les nouvelles marques depuis 2013, et des apports de groupe [X].

Dans ce contexte, dans une parfaite transparence et sans une quelconque opposition des actionnaires, la société Miraval Provence’ a déposé à compter de 2017 pour son propre compte certaines marques contenant le terme’«’Miraval’» à l’instar des marques préexistantes «’Miraval’», «’Miraval Côtes de Provence’» et créées «’Studio Miraval’» ou «’Fleur de Miraval’», étant souligné que la marque «'[Adresse 6]’» et ses déclinaisons ne seraient pas concernées. Ces dépôts de marques ont revêtu un caractère public et ont été faits en toute transparence avec l’accord de [Adresse 6].

Les difficultés sont apparues à la suite de la cession de la société Nouvel LLC au groupe STOLI, décrit comme un concurrent direct de la société Miraval Provence, et dont l’objectif poursuivi est de prendre le contrôle de Quimicum. L’arrivée du groupe Stoli marque un changement de stratégie puisqu’il est fait le reproche à la société Miraval Provence du dépôt de plusieurs marques «’Miraval’» en son nom alors que ce fonctionnement était acté depuis 2017 avec l’accord de [Adresse 6].

Les intimés soutiennent par ailleurs que la société Nouvel LLC s’est bien gardée d’aviser le juge des requêtes de l’existence de nombreuses procédures initiées au niveau international rendant la requête litigieuse inutile puisque’:

”” une action a été engagée contre [G] [K] et la holding Mondo Bongo pour obtenir de multiples documents en lien avec un usage des biens de [Adresse 6] dont les marques’;

”” une action a été engagée par’ [G] [K] et la holding Mondo Bongo pour voir invalider la cession de la société Nouvel en raison de la violation du droit d’agrément prévu aux statuts de Quimicum’;

”” la société Nouvel a saisi le 25 novembre 2021 le président du tribunal de commerce de Draguignan d’une requête fondée sur l’article 145 du code de procédure civile visant en substance à obtenir les mêmes documents et informations, requête qui a été rejetée pour défaut de motif légitime.

Ils ajoutent que postérieurement à l’ordonnance du 3 février 2022, la société Nouvel a déposé plainte en France pour les faits décrits dans la requête ce qui traduit l’inutilité de la requête aux fins de mesure d’instruction in futurum.

En second lieu,la mesure sollicitée ne répond à aucun motif légitime considérant que les pièces sollicitées sont déjà en la possession de la société Nouvel et que l’action envisagée au fond est manifestement irrecevable, la société Nouvel n’étant ni actionnaire direct de la société’ [Adresse 6] ni de’ la société Miraval Provence. L’action it singuli prévue à l’article L 225-251 du code de commerce ne peut être exercée que par l’actionnaire direct de la personne morale à l’encontre des dirigeants de droit de la société concernée. Cette règle est transposable pour une action pénale.

En troisième lieu,’ la mesure sollicitée n’est pas légalement admissible puisqu’elle s’analyse comme une véritable perquisition civile, l’ordonnance laissant en effet au commissaire de justice une mission large lui permettant de collecter un grand nombre de documents. Ils critiquent également en ce sens les termes génériques proposés par la société Nouvel’ qu’ils considèrent manifestement inadaptés puisque l’utilisation des mots-clés proposés’ amène au recueil d’un grand nombre de documents, plus de dizaine de milliers,’ dont la plupart n’ont pas le moindre rapport avec les faits dénoncés. Sur ce point, les intimés soutiennent que le commissaire de justice a modifié les critères de recherche et a «’post-filtrer’» les documents saisis sans la moindre autorisation. Ils dénoncent également que l’intégralité du contenu du téléphone de M [X] ait été extraite sans aucun filtre ni tri sur place.

Considérant que la saisie ordonnée n’est pas suffisamment circonscrite et porte une atteinte disproportionnée aux intérêts légitimes des personnes visées par la requête du fait d’un contexte concurrentiel évident, les intimés’ réclament la rétractation de l’ordonnance initiale.

A titre subsidiaire, les intimés réclament l’organisation de la levée du séquestre.

Par ordonnance rendue le 21’ avril 2023, le premier président de la cour d’appel de Nîmes a ordonné l’arrêt de l’exécution provisoire de la décision rendue le 4 janvier 2023 par le président du tribunal judiciaire de Carpentras, en référé et a dit n’y avoir lieu à l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

La clôture de la procédure est intervenue le 9 mai 2023 et l’affaire a été fixée à l’audience du 15 mai 2023. Sur demande des parties, l’affaire a été renvoyée à l’audience du 16 octobre 2023 avec révocation de l’ordonnance de clôture avec fixation d’une nouvelle clôture le 9 octobre 2023, pour être mise en délibéré, par disposition au greffe, le’ 23 novembre 2023.

MOTIFS DE LA DECISION :

”” Sur la violation’ des articles 494 et 495 du code de procédure civile :

Le premier juge a accueilli favorablement la demande tendant à voir constater l’irrecevabilité de la requête en relevant que les actes signifiés par le commissaire de justice aux cinq parties intimées ne comportaient pas la liste précise des pièces invoquées et qu’aucun élément figurant dans la requête ou l’ordonnance ne permettait de remplacer cette liste. Sur ce, le juge des référés a indiqué que la nullité de la requête entraîne celle des mesures exécutées.

La société Nouvel LLC oppose la qualité d’officier ministériel de l’auteur de la première expédition et des correspondances susvisées au soutien de la validité de l’expédition et de la présence de la liste des pièces.

En application de l’article 494 du code de procédure civile, la requête est présentée en double exemplaire. Elle doit être motivée. Elle doit comporter l’indication précise des pièces invoquées.

En vertu de ‘l’article 495 (‘) «’Copie de la requête et de l’ordonnance est laissée à la personne à laquelle elle est opposée’».

Le défaut d’indication des pièces invoquées dans la requête constitue une violation du principe de la contradiction de nature à mettre en cause sa recevabilité. Il s’agit d’une fin de non-recevoir accueillie sans qu’il soit nécessaire de justifier d’un grief comme en dispose l’article 124 du code de procédure civile.

L’appréciation de la validité de la requête suppose d’apprécier celle les actes de signification effectués et la valeur des expéditions établies par l’huissier instrumentaire.

L’article 1371 du code civil énonce que l’acte authentique fait foi jusqu’à inscription de faux de ce que l’officier public dit avoir personnellement accompli ou constaté. Ceci étant, les constatations matérielles relatées par les huissiers n’ont que la valeur de simples renseignements que l’huissier ait été commis par justice ou qu’il ait procédé à la requête de particuliers.

‘Par ailleurs, il résulte de l’article 1379 que la copie fiable a la même force probante que l’original. La fiabilité est laissée à l’appréciation du juge. Néanmoins, est réputée fiable la copie exécutoire ou authentique d’un écrit authentique. Est présumée fiable jusqu’à preuve contraire toute copie résultant d’une reproduction à l’identique de la forme et du contenu de l’acte et dont l’intégrité est garantie dans le temps par un procédé conforme à des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat.

En l’espèce, la requête du 3 février 2022 déposée par la société Nouvel LLC et l’ordonnance rendue à la même date par la Présidente du tribunal judiciaire de Carpentras ont fait l’objet d’une signification le 4 mars 2022 à M. [N] [X] (à personne), à l’EURL M [V] , à la SAS Miraval Provence, au groupe Famille [X] et à la SAS Familles [X] par remise pour ces’ dernières à [F] [X], habilité à en recevoir copie. (pièce 57).

Les actes signifiés produits par les intimés sont identiques et comportent 16’ feuilles comme précisé dans la page relative à la signification comprenant la requête (pages 1 à 22), l’ordonnance litigieuse (5 pages suivantes) ce qui correspond matériellement à 29 pages comprenant deux pages blanches (pièces 23 à 23-4 appelante).

Ainsi, l’examen attentif de ces actes de signification révèle que’:

”””” la première page est consacrée à la signification et ne comporte pas de verso (page vierge)’;

”””” les 11 feuilles suivantes concernent la requête signifiée, qui comporte 22 pages recto-verso mais sans contenir la page 23 relative aux pièces litigieuses’;

”””” les trois feuilles suivantes concernent l’ordonnance avec la dernière feuille établie uniquement en recto’;

”””” la dernière feuille rédigée seulement au recto est liée à la signification avec les modalités de remise de l’acte.

Les actes de signification’ ne comportent aucune feuille relative à la liste des pièces versées à l’appui de la requête alors que les expéditions conservées à l’étude du commissaire de justice incluent cette liste.

La pièce 48 produite par l’appelante intitulée «’1ère expédition – signification d’ordonnance sur requête’» fait en effet bien état en page 23 de la liste des 31 pièces titrées et versées aux débats à l’appui de requête. Cette première expédition comprend 16 feuilles et 30 pages imprimées.

Les expéditions conservées par le commissaire de justice sont identiques aux actes susvisés jusqu’à la page 22.’ Elles mentionnent par la suite sur le 13ème feuillet en recto la liste des pièces en cause et au verso la première page de l’ordonnance du 3 février 2022, suivie de deux autres feuilles recto-verso relatives à l’ordonnance et une dernière feuille rédigée seulement au recto est liée à la signification avec les modalités de remise de l’acte.

La comparaison des deux actes révèle une différence de pagination puisqu’en dépit d’un nombre de feuilles identique, il manque dans les actes produits par les intimés une page correspondant à la page 23 de la requête qui porte sur la liste des pièces dont la présence est contestée.

Dans un premier courrier daté du 25 octobre 2022 rédigé par le commissaire de justice instrumentaire, il est attesté «’qu’après la remise de l’acte et au retour à l’étude, est effectué un traitement des significations par le passage au répertoire des actes signifiés. Ce procédé génère automatiquement une première et une seconde expédition comprenant une page de modalité de remise de l’acte non manuscrite’; il s’agit d’un traitement informatique qui retranscrit l’intégralité du déroulé des opérations de signification sur site

Il n’en demeure pas moins que, mis à part la page de modalité de remise de l’acte non manuscrite, les mentions figurant sur les copies signifiées aux destinataires sont en tout point identiques aux premières et secondes expéditions qu’il s’agisse de l’identité et de la qualité du réceptionnaire de l’acte, de la date, du contenu et du nombre de pages de l’acte, dont la mention permet d’ailleurs d’écarter toute possibilité d’oubli ou d’erreur’»’;

En pièce 64, un second courrier daté du 30 mars 2023, le commissaire de justice instrumentaire affirme que «’ les mentions figurant sur les copies signifiées aux destinataires sont en tout point identiques quant à l’identité, à la qualité du réceptionnaire de l’acte mais également de la date et du nombre de pages de l’acte’» et ajoute que«’il a ainsi été laissé en copie de l’ordonnance et de la requête y afférente dans leur intégralité aux parties requises, étant bien précisé que la page de la requête intitulée «’liste des pièces versées aux débats à l’appui de la présente’» dans laquelle sont énoncées et titrées 31 pièces, page qui figure dans chacune des expéditions conservées à l’étude, lesquelles font foi, figurait effectivement dans les actes de significations remises aux défendeurs, contrairement à ce qui est allégué’».

Enfin, en pièce 65, un troisième courrier daté du 5 octobre 2023 émanant de l’étude’ rappelle qu’il est certain que «’la liste des pièces jointe à la requête a bien été signifiée à vos clients et ce indépendamment de l’erreur matérielle de retranscription du lieu de délivrance de l’acte à M. [N] [X]. Le fait que la délivrance, s’agissant de ce dernier, ait été faite au siège de la société Miraval Provence, auquel il s’était entre temps rendu, et non à son domicile comme il avait été indiqué dans le projet d’acte, est à notre sens sans incidence sur le contenu et l’intégrité de chacun des cinq actes délivrés aux parties visées, lesquels contenaient la requête avec en dernière page la liste des pièces, ainsi que de l’ordonnance’».

Ceci étant, en application des articles 1371 et 1379 du code civil, l’expédition, dont se prévaut l’appelante, n’est pas une copie exécutoire ou authentique d’un écrit authentique, et ne peut de ce fait bénéficier d’une présomption irréfragable jusqu’à inscription de faux.

En outre, les expéditions bénéficiant d’une présomption simple, il appartient au juge d’apprécier la «’fiabilité’» de la copie au regard des éléments produits aux débats par les parties et tenant compte de ce que les constatations matérielles relatées par les huissiers n’ont que la valeur de simples renseignements.

Enfin, quelles que soient les indications portées sur les autres exemplaires de l’acte, en cas de divergences, c’est la copie signifiée d’un acte d’huissier de justice qui tient lieu d’original pour la partie à laquelle elle a été remise ou adressée.

Les intimés produisent les orignaux des actes qui leur ont été remis lors de la signification qui ne comportent pas la liste des pièces versées au soutien de la requête déposée par la société Nouvel LLC.

Il doit en conséquence être constatée la méconnaissance des dispositions énoncées à l’article 494 du code de procédure civile entraînant l’irrecevabilité de la procédure. L’ordonnance déférée sera donc confirmée en toutes ses dispositions.

”””” Sur les demandes accessoires’:

Il y lieu de confirmer l’ordonnance entreprise concernant les condamnations au titre des dépens et des frais irrépétibles de première instance.

En application de l’article 696 du code de procédure civile, l’appelante supportera les dépens d’appel.

L’équité commande de faire application des dispositions au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de condamner’ la société Nouvel LLC à payer la somme totale de 2500 euros.

PAR CES MOTIFS,

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant après débats en audience publique par mise à disposition au greffe, ar arrêt contradictoire, et en dernier ressort,

Confirme l’ordonnance rendue le 4 janvier 2023 par la présidente du tribunal judiciaire de Carpentras en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,’

Condamne la société nouvel LLC à payer à M. [N] [X], la SAS Miraval Provence, la SAS Familles [X], la SARL Famille [X] et la Sarl M.[V] la somme totale de 2.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société nouvel LLC aux dépens d’appel.

”””””””””””””””””

Arrêt signé par la présidente de chambre et par la greffière.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,

 


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