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ARRÊT N°
CS/LZ
COUR D’APPEL DE BESANÇON
– 172 501 116 00013 –
ARRÊT DU 20 OCTOBRE 2022
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
Contradictoire
Audience publique du 08 Septembre 2022
N° RG 22/00696 – N° Portalis DBVG-V-B7G-EQET
S/appel d’une décision du Tribunal de Commerce de BELFORT en date du 19 avril 2022 [RG N° R22-0314]
Code affaire : 78F – Demande en nullité et/ou en mainlevée, en suspension ou en exécution d’une saisie mobilière
SAS SEGULA MATRA AUTOMOTIVE C/ S.A.S. COFAMECA CONCEPTION ET FABRICATION DE MECANIQUE PRISE EN LA PERSONNE DE SES REPRESENTANTS LEGAUX, S.A.S. COFA EST PRISE EN LA PERSONNE DE SES REPRESENTANTS LEGAUX
PARTIES EN CAUSE :
SAS SEGULA MATRA AUTOMOTIVE
RCS de Nanterre 844 926 311
prise en la personne de ses représentants légaux en exercice
Sise [Adresse 1]
Représentée par Me Ludovic PAUTHIER de la SCP DUMONT – PAUTHIER, avocat au barreau de BESANCON, avocat postulant,
Représentée par Me Laurent LAGARDETTE de l’AARPI TERSOU LAGARDETTE ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
APPELANTE
ET :
S.A.S. COFAMECA CONCEPTION ET FABRICATION DE MECANIQUE
RCS de Coutances 340 856 947
Prise en la personne de ses representants legaux
[Adresse 4]
Représentée par Me Alexandra MOUGIN de la SELARL MOUGIN, avocat au barreau de BELFORT, avocat postulant,
Représentée par Me Valentine COUDERT de la SELARL OCTAAV, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
S.A.S. COFA EST
RCS de Belfort 898 835 145
prise en la personne de ses representants legaux
[Adresse 5]
Représentée par Me Alexandra MOUGIN de la SELARL MOUGIN, avocat au barreau de BELFORT, avocat postulant,
Représentée par Me Valentine COUDERT de la SELARL OCTAAV, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
INTIMÉES
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats :
MAGISTRAT RAPPORTEUR : Monsieur Cédric SAUNIER, conseiller, conformément aux dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, avec l’accord des conseils des parties.
GREFFIER : Madame Fabienne ARNOUX, Greffier.
Lors du délibéré :
Monsieur Cédric SAUNIER, conseiller, a rendu compte conformément à l’article 786 du Code de Procédure Civile aux autres magistrats :
Monsieur M. WACHTER, Président et Monsieur Jean-François LEVEQUE, Conseiller.
L’affaire, plaidée à l’audience du 08 septembre 2022 a été mise en délibéré au 20 octobre 2022. Les parties ont été avisées qu’à cette date l’arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.
**************
Faits, procédure et prétentions des parties
Par acte en date du 13 août 2019, la société Segula Technologies, membre du groupe Segula, a acquis auprès de la société DHP Consulting l’ensemble des titres que cette dernière détenait dans le capital de la société de droit roumain TAIM SRL et dans le capital de la société RBS Consulting, laquelle détenait la totalité du capital de la société Machines Spéciales Outillage Développement (MSOD).
Suite à cette cession, la société MSOD a été absorbée par la SAS Segula Matra Automotive (société SMA) avec transfert de l’ensemble de ses salariés.
A la suite de ces opérations, certains employés de la société MSOD nouvellement intégrés dans
la société SMA, dont M. [S] [Z], actionnaire unique de la société BD Investing détenant une partie des titres de la société DHP Consulting et directeur général de la SAS Cofa Est immatriculée au RCS de Belfort sous le numéro 898 835 145 le 30 avril 2021, ont démissionné de leurs fonctions.
Par ordonnance sur requête rendue le 20 janvier 2022 à la demande de la SAS Segula Matra Automotive (société SMA), le président du tribunal de commerce de Belfort a autorisé des opérations de constat et de saisies par huissiers de justice aux sièges de la SAS Cofameca Conception et Fabrication de Mécanique (société Cofameca) situé à [Localité 3] (50) et de la SAS Cofa-Est situé à [Localité 2] (25) qui ont été menées le 14 février 2022 par la SELARL Lexlegati et la SCP Huissiers Normands Associés.
Par ordonnance du 17 février 2022 rendue par le juge des référés du tribunal de commerce de Belfort saisi d’une asssignation d’heure à heure délivrée à la société SMA à la demande des sociétés Cofameca et Cofa-Est, les documents saisis ont été placés sous séquestre provisoire.
Par ordonnance rendue le 19 avril 2022 sur assignation délivrée à la demande des sociétés Cofameca et Cofa-Est, le juge des référés du tribunal de commerce de Belfort a :
– annulé les opérations de saisie pratiquées ;
– ordonné la suppression de tous les éléments entre les mains des huissiers instrumentaires ;
– condamné la société SMA à payer aux sociétés Cofameca et Cofa-Est la somme de 3 000 euros chacune et débouté ces dernières du surplus de leur demande à ce titre ;
– condamné la société SMA aux dépens de l’instance, en ce compris les frais d’expert et d’huissier, dont les frais de greffe s’élevant à la somme de 57,65 euros ;
– débouté les parties du surplus de leurs demandes.
Pour parvenir à cette décision, le juge de première instance a considéré que la signification aux sociétés Cofameca et Cofa-Est de l’ordonnance autorisant les mesures d’instruction est nulle, de même que les actes de saisie lui étant rattachés, dans la mesure où elle a été effectuée à la demande de la société SMA immatriculée sous le numéro 817 465 651 au RCS de Nanterre, dépourvue de la personnalité morale suite à sa radiation intervenue le 26 janvier 2022 du fait de sa fusion-absorption par la société SMA immatriculée sous le numéro 844 926 311 au même registre.
Par déclaration du 26 avril 2022, la société SMA a régulièrement interjeté appel de cette ordonnance en toutes ses dispositions et, selon ses dernières conclusions transmises le 29 juillet 2022, elle conclut à son infirmation et demande à la cour :
A titre principal :
– de débouter les sociétés Cofameca et Cofa-Est de l’ensemble de leurs demandes formées dans le cadre de leur appel incident ;
A titre subsidiaire :
– d’ordonner aux études d’huissiers de justice ayant procédé aux mesures d’établir une liste des pièces dont la communication est envisagée à l’appui de leurs procès-verbaux de constat ;
– de leur ordonner de détruire/supprimer toutes les pièces issues de leurs opérations de constats menées le 14 février 2022 qu’elles n’auront pas jugé pertinentes ;
– de ‘juger’ que l’accès aux pièces dont la communication est envisagée par les huissiers instrumentaires sera réservée aux seuls conseils des sociétés Cofameca, Cofa-Est et SMA, lesquels en prendront connaissance sous le sceau de la confidentialité ;
– de ‘juger’ que les sociétés Cofameca et Cofa-Est disposeront d’un délai d’un mois à compter de la signification de la décision à intervenir pour remettre au juge de la rétractation une liste des pièces dont la communication est contestée et, pour chacune de celles-ci, la version confidentielle intégrale de cette pièce, une version non confidentielle ou un résumé ainsi qu’un mémoire précisant, pour chaque information ou partie de la pièce en cause, les motifs qui lui confèrent le caractère d’un secret des affaires ;
– de ‘juger’ qu’à défaut pour les sociétés Cofameca et Cofa-est de produire ces éléments dans le délai prescrit, les huissiers de justice concernés pourront communiquer sans autre délai toutes les pièces non contestées et visées à l’appui de leurs procès-verbaux de constat ;
– de ‘juger’ qu’en cas d’opposition à la communication d’une ou plusieurs pièces par les sociétés Cofameca et Cofa-Est, la société SMA pourra, sur la base du mémoire susvisé, faire valoir ses observations ;
– de ‘juger’ que le juge statuera sans audience sur la communication des pièces contestées, dans leur version intégrale ou confidentielle, qui sera ordonnée ou refusée au regard des dispositions des articles R. 153-5 et suivants du code de commerce ;
A titre infiniment subsidiaire :
– d’ordonner la suppression de l’ordonnance du 20 janvier 2022 des seuls termes « PSA Automobiles », « Stellantis » et « Faurecia » ;
En tout état de cause :
– de condamner les sociétés Cofameca et Cofa-Est à lui verser, chacune, la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– de les condamner aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Elle fait valoir :
‘ Concernant la nullité alléguée de la signification de l’ordonnance sur requête du 20 janvier 2022 :
– que la signification litigieuse comporte une simple erreur de plume portant sur une mention non obligatoire dépourvue de conséquence sur la validité de l’opération et ne générant aucun grief pour les sociétés Cofameca et Cofa-Est, tandis que l’intégralité des mentions requises à peine de nullité par l’article 648 du code de procédure civile figure dans l’acte ;
– que l’erreur de numéro d’immatriculation de la société SMA a par ailleurs été commise dans le seul acte dressé par la SCP Huissiers Normands Associés à l’attention de la société Cofameca, de sorte qu’elle ne saurait en tout état de cause entraîner la nullité des opérations de saisie diligentées le même jour par la SELARL Lexlegati au sein du siège de la société Cofa-Est ;
– qu’en tout état de cause, il résulte des articles 495 et 503 du code de procédure civile que les ordonnances sur requête sont exécutoires au seul vu de la minute, de sorte que la seule présentation de la décision vaut notification ;
– que les sociétés Cofameca et Cofa-Est ont reçu copie de la décision du 20 janvier 2022 et de la requête du 8 décembre 2021 au commencement des opérations de constat ;
‘ Concernant la nullité alléguée de l’ordonnance sur requête du 20 janvier 2022 et des opérations de saisies-constats :
– qu’elle est fondée, en qualité d’absorbante de la société SMA immatriculée 817 465 651, à poursuivre l’exécution de la décision prononcée en faveur de cette dernière dont elle est l’ayant-cause universelle ;
– qu’à supposer établi le fait que seule une copie de l’ordonnance aurait été présentée lors des opérations effectuées au sein des locaux de la société Cofameca, aucun texte ne prévoit une nullité des opérations subséquentes tandis qu’aucun grief n’est démontré ;
– concernant les opérations diligentées au sein des locaux de la société Cofa-est, que cette dernière a reconnu en première instance s’être vu présenter une copie de l’ordonnance litigieuse tandis que l’établissement d’un procès-verbal de signification de l’ordonnance n’est pas imposé;
‘ Concernant le motif légitime au soutien des opérations en cause :
– que le transfert des salariés de la société MSOD, dont neuf d’entre-eux y compris M. [Z] ont démissionné entre le 20 février et le 29 juin 2021, constituait un élément essentiel du consentement de la société Segula Technologies à l’acquisition le 13 août 2019, auprès de la société DHP Consulting, des titres détenus dans le capital de la société RBS Consulting, laquelle détenait la totalité du capital de la société MSOD qui a ensuite été absorbée par la société SMA;
– que ces démissions sont intervenues non pas en raison d’un climat social de tension dont la réalité n’est pas démontrée, mais après que les salariés concernés ont été démarchés par les sociétés Cofameca et Cofa-Est, tout en restant en contact avec les deux plus gros clients de la société MSOD à savoir les sociétés Stellantis et Faurecia ;
– que parallèlement, treize démissions de salariés anciennement employés par la société TAIM SRL ont été constatées entre les mois de janvier et de juin 2021 par la société Segula Technologies Romania, avant leur embauche par la société Staim SRL, laquelle a notamment pour associés les sociétés Cofameca et BD Investing et pour administrateur M. [Z] ;
– que le fait, pour les sociétés Cofameca et Cofa-Est, de procéder au débauchage de plusieurs salariés d’un concurrent dans le but de le désorganiser et de capter sa clientèle constitue des actes de concurrence déloyale justifiant les mesures d’instruction, de sorte que les intimées doivent être déboutées de leur demande de rétractation ;
‘ Concernant les demandes de modification de l’ordonnance et de séquestre :
– que la demande de séquestre n’est pas justifiée, en ce que les huissiers instrumentaires n’ont vocation à lui transmettre aucun autre document que ceux relatifs aux actes de conccurence déloyale et étant nécessaires à la solution du litige ;
– qu’en application de l’article R. 153-6 du code de commerce, le fait qu’une pièce soit susceptible de porter atteinte au secret des affaires est sans incidence ;
– que si un séquestre devait être ordonné, il ne pourra l’être que dans le cadre défini par les articles R. 153-1 et suivants du code de commerce ;
– que les mots clés dont il est sollicité la suppression par les intimées est mal fondée dans la mesure où ceux-ci sont nécessaires à la recherche des faits d econcurrence déloyale, tandis que la demande de séquestre exclut par ailleurs tout risque de communication infondée d’un document.
Les sociétés Cofameca et Cofa-Est ont répliqué en dernier lieu par conclusions transmises le 30 juin 2022 pour demander à la cour :
A titre principal,de débouter la société SMA de l’ensemble de ses moyens, fins et prétentions et de confirmer l’ordonnance critiquée en toutes ses dispositions ;
A titre subsidiaire, de débouter la société SMA de l’ensemble de ses moyens, fins et prétentions et :
– de rétracter l’ordonnance dont appel ;
– d’ordonner la suppression de tous les éléments entre les mains des huissiers instrumentaires ;
A titre plus subsidiaire, de débouter la société SMA de l’ensemble de ses moyens, fins et prétentions et :
– d’ordonner la suppression de l’ordonnance du 20 janvier 2022 des mots clefs « PSA Automobiles » et/ou « Stellantis » et/ou « Faurecia », et/ou les noms de « Segula » ou « Segula Technologie » ;
– d’ordonner à la SCP Huissiers Normands Associés de remettre sur support informatique à la société Cofameca, ou à toute personne mandatée par celle-ci, l’ensemble des éléments restants appréhendés en ses locaux le 14 février 2022 dans les quinze jours du prononcé de l’arrêt à intervenir ;
– d’ordonner à la SELARL Lexlegati de remettre sur support informatique à la société Cofa-Est, ou à toute personne mandatée par celle-ci, l’ensemble des éléments restants appréhendés en ses locaux le 14 février 2022 dans les quinze jours du prononcé de l’arrêt à intervenir ;
– d’ordonner le tri par les sociétés Cofameca et Cofa-Est de ces pièces dans les trois catégories suivantes en précisant pour chacune d’elles la référence employée pour leur numérotation par l’huissier de justice commis :
‘ liste A : pièces pour lesquelles ces dernières ne s’opposent pas à leur communication;
‘ liste B : pièces pour lesquelles ces dernières ne s’opposent pas à leur communication à la condition qu’elles soient corrigées afin d’effacer ou de rendre illisibles ponctuellement dans le texte des informations confidentielles, sans utilité pour la solution du litige, avec pour chacune d’elles une proposition de texte ainsi retraité ;
‘ liste C : pièces pour lesquelles ces dernières s’opposent à leur communication en raison d’une violation disproportionnée du secret des affaires (C1), d’une violation disproportionnée de la vie privée (C2), du secret des correspondances entre l’avocat et son client (C3) ou de leur défaut d’intérêt pour la solution du litige (C4) ;
– d’ordonner la transmission du résultat du tri ci-dessus au moins une semaine avant l’audience d’examen des pièces par le président du tribunal de commerce de Belfort sous format électronique ;
En tout état de cause :
– de condamner la société SMA à leur payer la somme de 15 000 euros chacune au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– de la condamner aux entiers dépens de l’instance, en ce compris les frais d’expert et d’huissier.
Elle exposent :
– que la signification à la société Cofameca de l’ordonnance autorisant les mesures d’instruction est nulle en application de l’article 117 du code de procédure civile pour avoir été effectuée à la requête d’une société dépourvue de la personnalité morale, à savoir la société SMA anciennement immatriculée au RCS de Nanterre sous le numéro 817 465 651 absorbée au 31 décembre 2021 par la société du même nom immatriculée 844 926 311 ;
– que par ailleurs, seule une copie de l’ordonnance a été présentée à la société Cofameca lors des opérations, et non la minute tel qu’exigé par l’article 503 du code précité, de sorte qu’une nullité de fond est encourue ;
– que la société Cofa-Est n’a été destinataire ni d’une présentation de l’ordonnance autorisant les mesures d’instruction, ni d’un procès-verbal de signification, étant précisé que l’original de la décision n’a pu lui être présenté dès lors que les deux opérations concommitantes avaient lieu à plusieurs centaines de kilomètres de distance, de sorte que la nullité des procès-verbaux dressés par les huissiers de justice doit être prononcée ;
– que l’ordonnance du 20 janvier 2022 a été rendue au profit de la société SMA immatriculée sous le numéro 817 465 651, dépourvue d’existence légale au jour de son prononcé, de sorte qu’elle est affectée d’une nullité de fond ;
– qu’aucune circonstance ne justifiait une dérogation au principe de la contradiction, la recherche d’un seul effet de surprise étant insuffisante alors même que les documents concernés n’étaient pas susceptibles de disparition en ce qu’ils consistent en des documents relatifs à l’embauche de salariés dont la conservation est obligatoire ;
– qu’aucun motif légitime au sens de l’article 145 du code de procédure civile ne justifie les mesures d’instruction, en l’absence d’actes de concurrence déloyale ayant désorganisé la requérante, de sorte que la mesure doit être rétractée ;
– qu’au contraire, les documents saisis comportent des informations soumises au secret industriel ou commercial s’apparentant à une mesure générale d’investigation sanctionnée par la jurisprudence ;
– sur le fondement des articles L. 151-1 et R. 153-1 du code de commerce, que d’une part les mots clefs ‘PSA Automobiles’, ‘Stellantis, ‘Faurecia’, ‘Segula’, ‘Segula Matra Automotive’ et ‘Segula Technologie’ doivent être supprimés de l’ordonnance en ce qu’ils sont susceptibles de donner lieu à la saisie de documents confidentiels et d’autre part le séquestre des documents doit être ordonné.
Pour l’exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
Par ordonnance de référé rendue le 16 juin 2022, le premier président de la cour d’appel de Besançon, estimant qu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation de l’ordonnance entreprise dont l’exécution risquerait d’entraîner des conséquences manifestement excessives, a ordonné l’arrêt de l’exécution provisoire de la décision du juge des référés du tribunal de commerce de Belfort du 19 avril 2022, a rejeté les demandes formées par les sociétés Cofameca et Cofa-Est sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et les a condamnées aux dépens.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 7 septembre 2022 et l’affaire a été appelée à l’audience du 8 septembre suivant et mise en délibéré au 20 octobre 2022.
En application de l’article 467 du code de procédure civile, le présent arrêt est contradictoire.
Motifs de la décision
– Sur la demande tendant à la nullité de l’ordonnance du 20 janvier 2022,
Aux termes de l’article 117 du code de procédure civile, constituent des irrégularités de fond affectant la validité de l’acte et non soumise à la preuve d’un grief :
– le défaut de capacité d’ester en justice ;
– le défaut de pouvoir d’une partie ou d’une personne figurant au procès comme représentant soit d’une personne morale, soit d’une personne atteinte d’une incapacité d’exercice ;
– le défaut de capacité ou de pouvoir d’une personne assurant la représentation d’une partie en justice.
En application de l’article L. 236-3 I du code de commerce, la fusion ou la scission entraîne la dissolution sans liquidation des sociétés qui disparaissent et la transmission universelle de leur patrimoine aux sociétés bénéficiaires, dans l’état où il se trouve à la date de réalisation définitive de l’opération.
S’il résulte de ces dispositions que le fait qu’une procédure soit engagée par une partie dépourvue de personnalité juridique constitue une irrégularité de fond qui ne peut être couverte, la société absorbante acquiert de plein droit, à la date d’effet de la fusion, la qualité de partie aux instances antérieurement engagées par la société absorbée et peut dès lors se prévaloir des condamnations prononcées au profit de celle-ci.
En l’espèce, il résulte de la fusion-absorption de la société SMA immatriculée sous le numéro 817 465 651 au RCS de Nanterre par la société SMA immatriculée sous le numéro 844 926 311 au même registre intervenue le 31 décembre 2021 que la seconde était, en sa qualité d’ayant cause universelle de la société absorbée, fondée à se prévaloir de l’ordonnance du 20 janvier 2022 rendue sur requête de la société absorbée et à en poursuivre l’exécution et qu’il n’en résulte aucune nullité de fond.
– Sur la demande tendant à la nullité des opérations de saisie-constat,
En application de l’article 495 du code de procédure civile, l’ordonnance sur requête est exécutoire au seul vu de la minute, tandis que la copie de la requête et de l’ordonnance doit être remise à la personne à laquelle elle est opposée.
L’exécution sur minute suppose que celle-ci, à l’exclusion d’une copie, soit présentée.
En l’espèce, les sociétés Cofameca et Cofa-Est invoquent le fait que seule une copie de l’ordonnance autorisant les mesures a été présentée à la société Cofameca ainsi qu’il résulte du défaut de mention de la présentation de l’original dans l’acte de signification, tandis qu’aucune présentation de l’ordonnance n’a été effectuée à la société Cofa-Est ainsi qu’il résulte de l’absence de tout procès-verbal de signification ou de présentation et de l’impossibilité matérielle de présenter le même original au même moment en deux lieux éloignés.
Pour conclure à l’absence d’irrégularité, la société SMA indique que les intimées disposaient nécessairement de l’ordonnance susvisée dans la mesure où elles en font mention dans leur assignation et produit le procès-verbal de signification à personne établi le 14 février 2022 à 9 heures 07 par M. [A] [X], huissier de justice, à l’attention de la société Cofameca, lequel mentionne la remise d’une copie de l’ordonnance et de la requête.
Etant rappelé que les dispositions prévues par l’article 495 du code de procédure civile ont pour objet le respect du principe de la contradiction au stade de l’exécution de mesures préalablement autorisées selon une procédure non-contradictoire, de sorte que l’absence de grief est sans incidence, il résulte des éléments susvisés qu’il n’est pas attesté, par la société SMA, de la présentation de la minute de l’ordonnance rendue le 20 janvier 2022 aux sociétés Cofameca et Cofa-Est lors de la réalisation des opérations de constat et de saisie.
En conséquence, lesdites opérations doivent être annulées et l’ordonnance du 19 avril 2022 sera confirmée par substitution de motifs.
Par ces motifs,
La cour, statuant contradictoirement, après débats en audience publique et en avoir délibéré conformément à la loi :
Confirme, dans les limites de l’appel, l’ordonnance rendue entre les parties le 19 avril 2022 par le juge des référés du tribunal de commerce de Belfort.
Condamne la SAS Segula Matra Automotive aux dépens d’appel.
Et, vu l’article 700 du code de procédure civile, la déboute de sa demande et la condamne à payer à la SAS Cofameca Conception et Fabrication de Mécanique et à la SAS Cofa-Est la somme de 3 000 euros chacune.Ledit arrêt a été signé par M. Michel Wachter, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré, et par Mme Leila Zait, greffier.
Le greffier,Le président de chambre,