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COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 39H
14e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 01 JUIN 2023
N° RG 22/05335 – N° Portalis DBV3-V-B7G-VMAV
AFFAIRE :
Société [E] [O] & SONS GENERAL TRADING & CONTRACTING WLL
C/
Société TRACTEBEL ENGINEERING GMBH,
…
Décision déférée à la cour : Ordonnance rendu le 21 Juillet 2022 par le Président du TC de NANTERRE
N° RG : 2022R00051
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 01.06.2023
à :
Me Martine DUPUIS, avocat au barreau de VERSAILLES
Me Oriane DONTOT, avocat au barreau de VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE PREMIER JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Société [E] [O] & SONS GENERAL TRADING & CONTRACTING WLL
société de droit du Koweït, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 9],
[Localité 3]
Ayant pour avocats plaidants Me Christophe BOUCHEZ et Me Me Eric DEUBEL de l’ASSOCIATION VEIL JOURDE, Plaidants, du barreau de PARIS, vestiaire : T06
Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625
APPELANTE
****************
Société TRACTEBEL ENGINEERING GMBH,
société de droit allemand, immatriculée au RCS de Francfort-sur-le-Main sous le n°0412.639.681, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 7] (ALLEMAGNE)
S.A. INTERNATIONAL POWER,
société de droit belge immatriculée à la Banque Carrefour des Entreprises sous le n°0403.203.264, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 5]
[Localité 2] (BELGIQUE)
S.A. ENGIE
agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 8]
Société TRACTEBEL ENGINEERING SA
Société de droit Belge, prise en la personne de ses représentant légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 5]-[Adresse 6]
[Localité 2] BELGIQUE
Représentant : Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 – Assistées de Me Delphine MICHOT du LLP CLEARY, GOTTLIEB, STEEN & HAMILTON LLP, Plaidant, avocat au barreau de PARIS et Me Jean-baptiste COMBE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
INTIMEES
****************
Composition de la cour :
L’affaire a été débattue à l’audience publique du 05 Avril 2023, Madame Marina IGELMAN, Conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller faisant fonction de président,
Madame Marina IGELMAN, Conseiller,
Madame Marietta CHAUMET, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Monsieur Mohamed EL GOUZI
EXPOSE DU LITIGE
En 2010, le gouvernement du Koweït, via le Bureau Technique des Partenariats (ci-après dénommé PTB pour Partnerships Technical Bureau), a lancé un appel d’offres pour la construction et la mise en service d’une centrale à gaz de production d’électricité et d’une usine de dessalement de l’eau de mer, destinée à devenir la propriété de l’Etat du Koweït, projet intitulé Az-Zour North IWPP.
Dans le cadre de cet appel d’offres, le PTB s’est adjoint les services de trois consultants techniques dont la société Lahmeyer International.
Le 24 mars 2011, une demande de propositions a été communiquée aux soumissionnaires, préalablement sélectionnés.
Le 27 septembre 2011, le PTB a reçu cinq offres, dont celles :
– du consortium International Power S.A. – Sumitomo – A.H. Al Sagar composé de la société International Power S.A. (société du groupe GDF-SUEZ, qui deviendra Engie), de la société Sumitomo Corporation et de la société A.H. Al Sagar & Brothers Group (soit le consortium International Power SA, que les autorités adjudicatrices ont appelé le « consortium GDF-Suez »),
– et celle du consortium [G] Corporation composé de la société [G] Corporation et de la société [E] [O] & Sons General Trading & Contracting Company WLL (le consortium [G] [O]).
Début mars 2012, le PTB a désigné le consortium International Power S.A. en tant que vainqueur de l’appel d’offres.
Après un an de négociations des termes contractuels, le 13 décembre 2013, les membres du consortium International Power S.A. ont annoncé la levée des conditions suspensives et l’attribution définitive du projet.
Le 15 septembre 2014, GDF-Suez a annoncé sa décision d’acquérir le groupe allemand Lahmeyer, via sa filiale belge Tractebel Engineering SA.
La société [E] [O] & Sons General Trading & Contracting Company WLL (la société [E] [O]), considérant que le rachat de la société Lahmeyer par Tractebel GmbH, filiale d’Engie, certes postérieur à la décision du PTB, mais précédé de négociations, laissait craindre l’existence d’un conflit d’intérêts ayant pu avoir une influence sur la décision du PTB, elle a, par requête en date du 16 octobre 2019, saisi le président du tribunal de commerce de Nanterre d’une demande de mesures d’instruction destinées à établir et conserver la preuve de faits utiles à une éventuelle action en concurrence déloyale qu’elle pourrait introduire à l’encontre d’Engie et/ou de toute autre entité juridique dont la responsabilité pourrait se voir engagée.
Par ordonnance en date du 23 octobre 2019, il a été fait droit aux mesures demandées par la société [E] [O] permettant ainsi de faire réaliser dans les locaux d’Engie des saisies dans les termes de l’article 145 du code de procédure civile.
Par ordonnance de référé du 10 février 2021, le président du tribunal de commerce de Nanterre a rétracté l’ordonnance sur requête et ordonné à l’huissier de justice mandaté de détruire les documents saisis au motif, notamment que « ni la requête, ni l ‘ordonnance ne justifient le recours à une procédure non contradictoire » et que d’autre part « les mesures ordonnées étaient disproportionnées et avaient de ce fait le caractère d ‘une investigation générale ».
Par acte d’huissier de justice délivré le 5 janvier 2022, la société [E] [O] & Sons General Trading & Contracting WLL a fait assigner en référé les sociétés Engie S.A., Tractebel Engineering GmbH, Tractebel Engineering S.A. et International Power S.A. aux fins d’obtenir principalement la désignation d’un huissier de justice pour réaliser des saisies de documents (dossiers, correspondances, notes…) dans les locaux d’Engie et de ses filiales.
Par ordonnance contradictoire rendue le 21 juillet 2022, le juge des référés du tribunal de commerce de Nanterre a :
– dit l’exception d’incompétence recevable et bien fondée et s’est déclaré incompétent,
– débouté [E] [O] & Sons General Trading & Contracting WLL des mesures sollicitées à l’encontre de International Power S.A., Tractebel Engineering S.A. et Tractebel Engineering GmbH,
– renvoyé [O] à mieux se pourvoir devant les juridictions belges et allemandes,
– constaté l’absence de motif légitime de [E] [O] & Sons General Trading & Contracting WLL,
– constaté que les mesures sollicitées sont manifestement disproportionnées et ne sont pas légalement admissibles,
– rejeté l’ensemble des demandes de [E] [O] & Sons General Trading & Contracting WLL,
– condamné [E] [O] & Sons General Trading & Contracting WLL à verser à Engie S.A., Tractebel Engineering S.A., Tractebel Engineering GmbH et International Power S.A. la somme de 20 000 euros à chacune au titre l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné [E] [O] & Sons General Trading & Contracting WLL aux dépens,
– rappelé que l’exécution provisoire est de droit,
– liquidé les dépens à recouvrer par le greffe à la somme de 91,63 euros, dont TVA 15,27 euros.
Par déclaration reçue au greffe le 12 août 2022, la société [E] [O] a interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de disposition.
Dans ses dernières conclusions déposées le 6 mars 2022 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société [E] [O] & Sons General Trading & Contracting WL demande à la cour, au visa des articles 145 du code de procédure civile, L. 153-1 et R. 153-1 et suivants du code de commerce et du Règlement (UE) 2020/ 1783 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2020 relatif à la coopération entre les juridictions des États membres dans le domaine de l’obtention des preuves en matière civile ou commerciale de :
‘infirmer l’ordonnance entreprise en ce que le président du tribunal de commerce de Nanterre a :
– dit l’exception d’incompétence bien fondée et s’est déclaré incompétent ;
– débouté la société [E] [O] & Sons General Trading & Contracting WLL des mesures sollicitées à l’encontre de International Power S.A,, Tractebel Engineering S.A. etTractebel Engineering GmbH ;
– renvoyé la société [E] [O] & Sons General Trading & Contracting WLL à mieux se pourvoir devant les juridictions belges et allemandes ;
– constaté l’absence de motif légitime de la société [E] [O] & Sons General Trading & Contracting WLL ;
– constaté que les mesures sollicitées sont manifestement disproportionnées et ne sont pas légalement admissibles ;
– rejeté l’ensemble des demandes de la société [E] [O] & Sons General
Trading & Contracting WLL ;
– condamné la société [E] [O] & Sons General Trading & Contracting WLL à verser à Engie S.A., Tractebel Engineering S.A., Tractebel Engineering GmbH et Intemational Power S.A. la somme de 20 000 euros à chacune au titre l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la société [E] [O] & Sons General Trading & Contracting WLL aux dépens ;
statuant à nouveau :
1/ sur la mesure d’instruction visant la société Engie :
désigner tout commissaire de justice territorialement compétent avec pour mission de :
– se rendre dans les locaux de la société Engie, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Nanterre sous le numéro 542 107 651, dont le siège social est situé au [Adresse 1], et si nécessaire en tout autre lieu du territoire français où elle exploite son activité et conserve ses archives ;
– se faire remettre ou à défaut rechercher, en vue de procéder à leur copie, tous dossiers, correspondances, présentations, comptes rendus de réunion, notes, agendas, documents, ainsi que leurs annexes et pièces jointes, quel qu’en soit le support (papier, électronique ou autre), permettant de révéler, le cas échéant, l’existence de relations, liens ou contacts entre les sociétés GDF-Suez (devenue Engie), International Power SA, Lahmeyer International (devenue Tractebel Engineering GmbH) et Tractebel Engineering SA, leurs dirigeants et/ou leurs préposés, en rapport avec le Projet Az Zour North IWPP ainsi qu’avec les faits exposés dans la présente assignation et ce, sur une période allant du 1 er janvier 2011 au 31 décembre 2014, en menant des recherches notamment sur les supports informatiques en utilisant impérativement les mots clés suivants, étant précisé que ceux-ci peuvent être utilisés séparément ou de façon combinée afin de répondre à l’objet de ladite mission :
– Azzour North
– AZN
– Al Zour
– Az-Zour
– Al-Zour
– Al Zur Northern
– PPP
– IWPP
– IPP
– PTB
– MEW
– Minister of Electricity and Water
– Koweit ou Kuwait
– Lahmeyer
– [E] [O] ou [X]
– [G]
– Sumitomo
– Al Sagar
– prendre copie des résultats individualisés des éléments faisant mention des mots clés
et/ou locutions clés cités ci-dessus ;
– fusionner l’ensemble de ces résultats avant de procéder avec l’assistance des techniciens informatiques, à une deuxième recherche, sur la base des résultats de la recherche précédente, en pratiquant un filtre avec l’un au moins des mots clés ou locutions suivants, qui pourront être combinés entre eux, en tant que de besoin :
– Tractebel
– [W] [B]
– [L] [F]
– Power Block
– SPA ou share purchase agreement
– proposition ou proposal ou offer
– pourparlers ou discussions ou talks
– rachat ou redemption ou repurchase ou buying back
– achat ou purchase
– cession ou assignment
– titres ou securities ou shares
– actifs ou assets
– EBITDA
– prix ou price
– contrat ou agreement
– acquisition
– prendre copie des résultats de chacune de ces recherches combinées ;
– se faire communiquer l’ensemble des codes d’accès, notamment aux équipements informatiques, nécessaires à l’exécution de sa mission ;
– autoriser le commissaire de justice désigné à se faire assister de tout commissaire de justice territorialement compétent ;
– autoriser le commissaire de justice désigné à se faire assister, si nécessaire, de la force publique et de tout technicien de son choix, notamment expert en matière informatique, pour mettre à exécution l’ordonnance à intervenir ;
– autoriser le commissaire de justice désigné et le technicien choisi par lui à avoir accès à l’ensemble des serveurs et postes informatiques, y compris téléphones mobiles, tablettes numériques, ainsi que tous autres serveurs ou supports, externes ou internes, de données informatiques de la société Engie aux fins d’y rechercher les éléments nécessaires au bon accomplissement de la mission ;
– autoriser le commissaire de justice désigné et le technicien choisi par lui, à avoir accès à tous systèmes de messagerie et tous logiciels de communication de type Whatsapp, Messenger, sans que cette liste soit limitative, aux agendas électroniques, journaux d’appel, contacts contenus dans les boîtes de messagerie et/ou téléphones portables et/ou systèmes de communication si faire se peut et à procéder à l’enregistrement de tout message audio émanant d’un dirigeant ou préposé d’une société du groupe Engie ;
– autoriser le commissaire de justice désigné et le technicien choisi par lui à effectuer les recherches sur tous supports informatiques, y compris sur ceux renfermant les messageries personnelles, incluant également tout fichier et/ou mail effacé qui pourrait être récupéré par le technicien choisi par le commissaire de justice désigné au moyen d’un logiciel approprié ;
– dire que seront exclus du champ de la recherche tous documents ou dossiers appartenant aux dirigeants, préposés, collaborateurs et revêtus de la mention « personnel », « perso » ou « privé » ;
– dire qu’en cas de présence d’un tel document ou dossier, le commissaire de justice désigné aura la possibilité de s’assurer du caractère réellement privé des informations qu’il contient, seulement dans l’hypothèse où une occurrence ressortirait par l’un ou plusieurs des mots clés précités tendant vers ce type de dossier ;
– autoriser le commissaire de justice désigné avec l’aide du technicien choisi par lui à installer tout logiciel ou connecter tout périphérique de recherche, lecture ou de stockage pour
les besoins des opérations de recherche, de constatation ou de copie ;
– autoriser le commissaire de justice désigné, en cas de difficultés rencontrées dans l’accès aux moyens et supports informatiques ci-dessus, à effectuer des copies complètes des supports ou fichiers pour en extraire, de manière différée, les éléments recherchés qui seuls seront consignés dans son procès-verbal et communiqués au requérant ;
– autoriser le commissaire de justice désigné à accéder à tout local, bureau, tiroir, armoire pouvant renfermer les éléments recherchés, sans que cette liste soit limitative ;
– dire que la société Engie devra s’abstenir d’entraver de quelque manière que ce soit les opérations diligentées sous le contrôle du commissaire de justice désigné, notamment en verrouillant ou entravant l’accès physique à ses locaux ou à ses ordinateurs et systèmes d’information ;
– autoriser le commissaire de justice désigné à consigner toutes paroles qui seront prononcées au cours des opérations de constat, à réaliser toutes photographies et/ou toutes photocopies, copies des éléments identifiés ;
– dire que le commissaire de justice désigné devra dresser constat des diligences ainsi accomplies et des pièces appréhendées et de l’inventaire des messages identifiés au besoin par captures d’écrans et de tous éléments ou documents, incluant la description succincte des modalités techniques de leur exécution ;
– dire que le commissaire de justice désigné devra remettre à la requérante et à la requise un exemplaire du constat des diligences, lequel devra mentionner, par nature d’éléments, le nombre d’éléments appréhendés dans le cadre des deux points de la mission, sauf impossibilité matérielle d’y procéder ;
– dire que l’ensemble des éléments recueillis par le commissaire de justice désigné seront conservés par lui, en séquestre provisoire, sans qu’il puisse en donner connaissance à la requérante ;
– dire que les parties viendront devant nous, en référé, afin d’examen, en présence du commissaire de justice désigné, des pièces séquestrées et qu’il soit statué sur leur communication à la requérante ;
– dire qu’en vu de cet examen, le commissaire de justice désigné tiendra à disposition de la partie requise, sur un support informatique adapté, une copie des pièces séquestrées afin que cette dernière puisse, pour les besoins de leur examen par le juge, sélectionner celles à la communication desquelles elle s’oppose ;
– dire que, faute pour la requérante d’assigner en référé à cet effet la partie visée par la mesure d’instruction, dans un délai d’un mois après la remise à la requérante du constat d’exécution de ladite mesure, le commissaire de justice désigné tiendra les pièces et documents recueillis à la disposition de la partie auprès de laquelle il les aura obtenus, et, passé le délai de six mois, pourra les détruire ;
– fixer le montant de la provision à verser par la requérante au commissaire de justice désigné avant toute mise à exécution de sa mission ;
– dire que cette provision devra être versée dans un délai d’un mois à compter de l’ordonnance à intervenir, à peine de caducité ;
– dire que le commissaire de justice désigné procédera à sa mission dans un délai de deux mois à compter du versement de la provision ;
2/ Sur les mesures d’instruction visant les sociétés belges Tractebel Engineering SA et International Power SA :
– demander au tribunal de première instance francophone de Bruxelles de désigner un mandataire de justice territorialement compétent avec pour mission de :
– se rendre dans les locaux de Tractebel Engineering SA, société de droit belge, enregistrée à la Banque Carrefour des Entreprises sous le numéro 0412.639.681, dont le siège social est situé au [Adresse 5]-[Adresse 6], Belgique, et de International Power SA, société de droit belge, enregistrée à la Banque Carrefour des Entreprises sous le numéro 0403.203.264, dont le siège social est situé au [Adresse 5], et si nécessaire en tout autre lieu du territoire belge où elle exploite son activité et conserve ses archives ;
– se faire remettre ou à défaut rechercher, en vue de procéder à leur copie, tous dossiers, correspondances, présentations, comptes rendus de réunion, notes, agendas, documents, ainsi que leurs annexes et pièces jointes, quel qu’en soit le support (papier, électronique ou autre), permettant de révéler, le cas échéant, l’existence de relations, liens ou contacts entre les sociétés GDF-Suez (devenue Engie), International Power SA, Lahmeyer International (devenue Tractebel Engineering GmbH) et Tractebel Engineering SA, leurs dirigeants et/ou leurs préposés, en rapport avec le Projet Az Zour North IWPP ainsi qu’avec les faits exposés dans la présente assignation et ce, sur une période allant du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2014, en menant des recherches notamment sur les supports informatiques en utilisant impérativement les mots clés suivants, étant précisé que ceux-ci peuvent être utilisés séparément ou de façon combinée afin de répondre à l’objet de ladite mission :
– Azzour North
– AZN
– Al Zour
– Az-Zour
– Al-Zour
– Al Zur Northern
– PPP
– IWPP
– IPP
– PTB
– MEW
– Minister of Electricity and Water
– Koweit ou Kuwait
– Lahmeyer
– [E] [O] ou [X]
– [G]
– Sumitomo
– Al Sagar
– prendre copie des résultats individualisés des éléments faisant mention des mots clés et/ou locutions clés cités ci-dessus ;
– fusionner l’ensemble de ces résultats avant de procéder avec l’assistance des techniciens informatiques, à une deuxième recherche, sur la base des résultats de la recherche précédente, en pratiquant un filtre avec l’un au moins des mots clés ou locutions suivants, qui pourront être combinés entre eux, en tant que de besoin :
– Tractebel
– [W] [B]
– [L] [F]
– Power Block
– SPA ou share purchase agreement
– proposition ou proposal ou offer
– pourparlers ou discussions ou talks
– rachat ou redemption ou repurchase ou buying back
– achat ou purchase
– cession ou assignment
– titres ou securities ou shares
– actifs ou assets
– EBITDA
– prix ou price
– contrat ou agreement
– acquisition
– prendre copie des résultats de chacune de ces recherches combinées ;
– se faire communiquer l’ensemble des codes d’accès, notamment aux équipements informatiques, nécessaires à l’exécution de sa mission ;
– demander au tribunal de première instance francophone de Bruxelles de :
– autoriser le mandataire de justice désigné à se faire assister, si nécessaire, de la force publique et de tout technicien de son choix, notamment expert en matière informatique, pour mettre à exécution l’ordonnance à intervenir ;
– autoriser le mandataire de justice désigné et le technicien choisi par lui à avoir accès à l’ensemble des serveurs et postes informatiques, y compris téléphones mobiles, tablettes numériques, ainsi que tous autres serveurs ou supports, externes ou internes, de données informatiques des sociétés Tractebel Engineering SA et International Power SA aux fins d’y rechercher les éléments nécessaires au bon accomplissement de la mission ;
– autoriser le mandataire de justice désigné et le technicien choisi par lui, à avoir accès à tous systèmes de messagerie et tous logiciels de communication de type Whatsapp, Messenger, sans que cette liste soit limitative, aux agendas électroniques, journaux d’appel, contacts contenus dans les boîtes de messagerie et/ou téléphones portables et/ou systèmes de communication si faire se peut et à procéder à l’enregistrement de tout message audio émanant d’un dirigeant ou préposé d’une société du groupe Engie ;
– autoriser le mandataire de justice désigné et le technicien choisi par lui à effectuer les recherches sur tous supports informatiques, y compris sur ceux renfermant les messageries personnelles, incluant également tout fichier et/ou mail effacé qui pourrait être récupéré par le technicien choisi par le mandataire de justice désigné au moyen d’un logiciel approprié ;
– dire que seront exclus du champ de la recherche tous documents ou dossiers appartenant aux dirigeants, préposés, collaborateurs et revêtus de la mention « personnel », « perso » ou « privé » ;
– dire qu’en cas de présence d’un tel document ou dossier, le mandataire de justice désigné aura la possibilité de s’assurer du caractère réellement privé des informations
qu’il contient, seulement dans l’hypothèse où une occurrence ressortirait par l’un ou plusieurs des mots clés précités tendant vers ce type de dossier ;
– autoriser le mandataire de justice désigné avec l’aide du technicien choisi par lui à installer tout logiciel ou connecter tout périphérique de recherche, lecture ou de stockage pour les besoins des opérations de recherche, de constatation ou de copie ;
– autoriser le mandataire de justice désigné, en cas de difficultés rencontrées dans l’accès aux moyens et supports informatiques ci-dessus, à effectuer des copies complètes des supports ou fichiers pour en extraire, de manière différée, les éléments recherchés qui seuls seront consignés dans son procès-verbal et communiqués au requérant ;
– autoriser le mandataire de justice désigné à accéder à tout local, bureau, tiroir, armoire pouvant renfermer les éléments recherchés, sans que cette liste soit limitative ;
– dire que les sociétés Tractebel Engineering SA et International Power SA devront s’abstenir d’entraver de quelque manière que ce soit les opérations diligentées sous le contrôle du mandataire de justice désigné, notamment en verrouillant ou entravant l’accès physique à leurs locaux ou à leurs ordinateurs et systèmes d’information ;
– autoriser le mandataire de justice désigné à consigner toutes paroles qui seront prononcées au cours des opérations de constat, à réaliser toutes photographies et/ou toutes photocopies, copies des éléments identifiés ;
– dire que le mandataire de justice désigné devra dresser constat des diligences ainsi accomplies et des pièces appréhendées et de l’inventaire des messages identifiés au besoin par captures d’écrans et de tous éléments ou documents, incluant la description succincte des modalités techniques de leur exécution ;
– dire que le mandataire de justice désigné devra remettre à la requérante et aux requises un exemplaire du constat des diligences, lequel devra mentionner, par nature d’éléments, le nombre d’éléments appréhendés dans le cadre des deux points de la mission, sauf impossibilité matérielle d’y procéder ;
– dire que l’ensemble des éléments recueillis par le mandataire de justice désigné seront
transmis par lui au commissaire de justice français précédemment désigné, qui les conservera en séquestre provisoire, sans qu’il puisse en donner connaissance à la requérante ;
– dire que les parties viendront devant nous, en référé, afin d’examen, en présence du commissaire de justice français précédemment désigné, des pièces séquestrées et qu’il soit statué sur leur communication à la requérante ;
– dire qu’en vue de cet examen, le commissaire de justice désigné tiendra à disposition des parties requises, sur un support informatique adapté, une copie des pièces séquestrées afin que ces dernières puissent, pour les besoins de leur examen par le juge, sélectionner celles à la communication desquelles elles s’opposent ;
– dire que, faute pour la requérante d’assigner en référé à cet effet les parties visées par la mesure d’instruction, dans un délai d’un mois après la confirmation à la requérante, par le
commissaire de justice français précédemment désigné, de la réception des pièces placées sous séquestre provisoire, le commissaire de justice désigné tiendra les pièces et documents recueillis à la disposition des parties auprès desquelles il les aura obtenus, et, passé le délai de
six mois, pourra les détruire ;
3/ Sur la mesure d’instruction visant la société allemande Tractebel Engineering GmbH :
– demander au tribunal de district de Francfort-sur-le-Main (Amtsgericht Frankfurt am Main) de désigner un mandataire de justice territorialement compétent avec pour mission de :
– se rendre dans les locaux de Tractebel Engineering GmbH (anciennement dénommée Lahmeyer International GmbH), société de droit allemand, enregistrée au registre du commerce de Francfort-sur-le-Main sous le numéro HRB 80852, dont le siège social est situé au [Adresse 4], et si nécessaire en tout autre lieu du territoire allemand où elle exploite son activité et conserve ses archives ;
– se faire remettre ou à défaut rechercher, en vue de procéder à leur copie, tous dossiers, correspondances, présentations, comptes rendus de réunion, notes, agendas, documents, ainsi que leurs annexes et pièces jointes, quel qu’en soit le support (papier, électronique ou autre), permettant de révéler, le cas échéant, l’existence de relations, liens ou contacts entre les sociétés GDF-Suez (devenue Engie), International Power SA, Lahmeyer International (devenue Tractebel Engineering GmbH) et Tractebel Engineering SA, leurs dirigeants et/ou leurs préposés, en rapport avec le Projet Az Zour North IWPP ainsi qu’avec les faits exposés dans la présente assignation et ce, sur une période allant du 1 er janvier 2011 au 31 décembre 2014, en menant des recherches notamment sur les supports informatiques en utilisant impérativement les mots clés suivants, étant précisé que ceux-ci peuvent être utilisés séparément ou de façon combinée afin de répondre à l’objet de ladite mission :
– Azzour North
– AZN
– Al Zour
– Az-Zour
– Al-Zour
– Al Zur Northern
– PPP
– IWPP
– IPP
– PTB
– MEW
– Minister of Electricity and Water
– Koweit ou Kuwait
– Lahmeyer
– [E] [O] ou [X]
– [G]
– Sumitomo
– Al Sagar
– prendre copie des résultats individualisés des éléments faisant mention des mots clés
et/ou locutions clés cités ci-dessus ;
– fusionner l’ensemble de ces résultats avant de procéder avec l’assistance des
techniciens informatiques, à une deuxième recherche, sur la base des résultats de la
recherche précédente, en pratiquant un filtre avec l’un au moins des mots clés ou
locutions suivants, qui pourront être combinés entre eux, en tant que de besoin :
– Tractebel
– [W] [B]
– [L] [F]
– Power Block
– SPA ou share purchase agreement
– proposition ou proposal ou offer
– pourparlers ou discussions ou talks
– rachat ou redemption ou repurchase ou buying back
– achat ou purchase
– cession ou assignment
– titres ou securities ou shares
– actifs ou assets
– EBITDA
– prix ou price
– contrat ou agreement
– acquisition
– prendre copie des résultats de chacune de ces recherches combinées ;
– se faire communiquer l’ensemble des codes d’accès, notamment aux équipements informatiques, nécessaires à l’exécution de sa mission ;
– demander au tribunal de district de Francfort-sur-le-Main (Amtsgericht Frankfurt am Main) de :
– autoriser le mandataire de justice désigné à se faire assister, si nécessaire, de la force publique et de tout technicien de son choix, notamment expert en matière informatique, pour mettre à exécution l’ordonnance à intervenir ;
– autoriser le mandataire de justice désigné et le technicien choisi par lui à avoir accès à l’ensemble des serveurs et postes informatiques, y compris téléphones mobiles, tablettes numériques, ainsi que tous autres serveurs ou supports, externes ou internes, de données informatiques de la société Tractebel Engineering GmbH aux fins d’y rechercher les éléments nécessaires au bon accomplissement de la mission ;
– autoriser le mandataire de justice désigné et le technicien choisi par lui, à avoir accès à tous systèmes de messagerie et tous logiciels de communication de type Whatsapp, Messenger, sans que cette liste soit limitative, aux agendas électroniques, journaux d’appel, contacts contenus dans les boîtes de messagerie et/ou téléphones portables et/ou systèmes de communication si faire se peut et à procéder à l’enregistrement de tout message audio émanant d’un dirigeant ou préposé d’une société du groupe Engie ;
– autoriser le mandataire de justice désigné et le technicien choisi par lui à effectuer les recherches sur tous supports informatiques, y compris sur ceux renfermant les messageries personnelles, incluant également tout fichier et/ou mail effacé qui pourrait être récupéré par le technicien choisi par le mandataire de justice désigné au moyen d’un logiciel approprié ;
– dire que seront exclus du champ de la recherche tous documents ou dossiers appartenant aux dirigeants, préposés, collaborateurs et revêtus de la mention « personnel », « perso » ou « privé » ;
– dire qu’en cas de présence d’un tel document ou dossier, le mandataire de justice désigné aura la possibilité de s’assurer du caractère réellement privé des informations qu’il contient, seulement dans l’hypothèse où une occurrence ressortirait par l’un ou plusieurs des mots clés précités tendant vers ce type de dossier ;
– autoriser le mandataire de justice désigné avec l’aide du technicien choisi par lui à installer tout logiciel ou connecter tout périphérique de recherche, lecture ou de
stockage pour les besoins des opérations de recherche, de constatation ou de copie ;
– autoriser le mandataire de justice désigné, en cas de difficultés rencontrées dans l’accès aux moyens et supports informatiques ci-dessus, à effectuer des copies complètes des supports ou fichiers pour en extraire, de manière différée, les éléments recherchés qui seuls seront consignés dans son procès-verbal et communiqués au requérant ;
– autoriser le mandataire de justice désigné à accéder à tout local, bureau, tiroir, armoire pouvant renfermer les éléments recherchés, sans que cette liste soit limitative ;
– dire que la société Tractebel Engineering GmbH devra s’abstenir d’entraver de quelque manière que ce soit les opérations diligentées sous le contrôle du mandataire de justice désigné, notamment en verrouillant ou entravant l’accès physique à ses locaux ou à ses ordinateurs et systèmes d’information ;
– autoriser le mandataire de justice désigné à consigner toutes paroles qui seront prononcées au cours des opérations de constat, à réaliser toutes photographies et/ou toutes photocopies, copies des éléments identifiés ;
– dire que le mandataire de justice désigné devra dresser constat des diligences ainsi accomplies et des pièces appréhendées et de l’inventaire des messages identifiés au besoin par captures d’écrans et de tous éléments ou documents, incluant la description succincte des modalités techniques de leur exécution ;
– dire que le mandataire de justice désigné devra remettre à la requérante et à la requise
un exemplaire du constat des diligences, lequel devra mentionner, par nature d’éléments, le nombre d’éléments appréhendés dans le cadre des deux points de la mission, sauf impossibilité matérielle d’y procéder ;
– dire que l’ensemble des éléments recueillis par le mandataire de justice désigné seront transmis par lui au commissaire de justice français précédemment désigné, qui les conservera en séquestre provisoire, sans qu’il puisse en donner connaissance à la requérante ;
– dire que les parties viendront devant nous, en référé, afin d’examen, en présence du commissaire de justice français précédemment désigné, des pièces séquestrées et qu’il soit statué sur leur communication à la requérante ;
– dire qu’en vue de cet examen, le commissaire de justice désigné tiendra à disposition de la partie requise, sur un support informatique adapté, une copie des pièces séquestrées afin que cette dernière puisse, pour les besoins de leur examen par le juge, sélectionner celles à la communication desquelles elle s’oppose ;
– dire que, faute pour la requérante d’assigner en référé à cet effet la partie visée par la mesure d’instruction, dans un délai d’un mois après la confirmation à la requérante, par le commissaire de justice français précédemment désigné, de la réception des pièces placées sous séquestre provisoire, le commissaire de justice désigné tiendra les pièces et documents recueillis à la disposition de la partie auprès de laquelle il les aura obtenus, et, passé le délai de six mois, pourra les détruire ;
4/ en tout état de cause :
– débouter les sociétés Engie Tractebel Engineering SA, international Power et Tractebel Engineering GMBH de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
– réserver les dépens’.
Dans leurs dernières conclusions déposées le 17 mars 2023 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, les sociétés Engie S.A., Tractebel Engineering S.A., Tractebel Engineering GmbH et International Power S.A. demandent à la cour, au visa des articles 145 du code de procédure civile, articles L.153-1 et suivants et R. 153-1, R. 153-2 et suivants du code de commerce et du le règlement européen (CE) n° 1206/2001 du 28 mai 2001 relatif à la coopération entre les juridictions des pays de l’UE dans le domaine de l’obtention des preuves en matière civile ou commerciale et du règlement européen (UE) n° 1215/2012 du 12 décembre 2001 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, de :
‘confirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a :
– dit l’exception d’incompétence recevable et bien fondée et déclaré monsieur le président du tribunal de commerce de Nanterre incompétent;
– débouté [E] [O] & Sons General Trading & Contracting WLL des mesuressollicitées à l’encontre de International Power S.A., Tractebel Engineering S.A. et Tractebel Engineering GmbH ;
– renvoyé [O] à mieux se pourvoir devant les juridictions belges et allemandes ;
– constaté l’absence de motif légitime de [E] [O] & Sons General Trading & Contracting WLL ;
– Constaté que les mesures sollicitées sont manifestement disproportionnées et ne sont pas légalement admissibles ;
– rejeté l’ensemble des demandes de [E] [O] & Sons General Trading & Contracting WLL ;
– condamné [E] [O] & Sons General Trading & Contracting WLL à verser à Engie S.A., Tractebel Engineering S.A., Tractebel Engineering GmbH et International Power S.A.la somme de 20 000 euros à chacune au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné [E] [O] & Sons General Trading & Contracting WLL aux dépens ;
– rappelé que l’exécution provisoire est de droit.
A titre subsidiaire, dans le cas où la Cour infirmerait l’ordonnance entreprise et statuerait à
nouveau pour ordonner des mesures d’instruction :
– constater que les mesures sollicitées sont manifestement disproportionnées ;
– juger que les mesures de saisie sollicitées à l’égard d’Engie S.A., d’International Power S.A.,de Tractebel Engineering S.A. et de Tractebel Engineering GmbH ne nécessitent pas l’intervention d’un commissaire ou mandataire de justice ;
en conséquence,
– Modifier le champ des mesures sollicitées, notamment (i) en excluant les lieux autres que le siège social des Intimées comme lieu d’exécution des mesures d’instruction sollicitées, (ii) en réduisant la période de recherche du 27 septembre 2011 au 31 mars 2012, ou au plus tard au 13 décembre 2013, (iii) en supprimant les mots-clés suivants : « PPP », « IWPP », « IPP », « PTB », « FA », « SPA ou share purchase agreement », « proposition ou proposal ou offer », « pourparlers ou discussions ou talks », « rachat ou redemption ou repurchase ou buying back », « achat ou purchase », « cession ou assignment », « titres ou securities ou shares », « actifs ou assets », « EBITDA », « prix ou price », « contrat ou agreement », « acquisition », et (iv) en ne recherchant que les correspondances, présentations, documents, notes échangés entre Lahmeyer et Engie S.A. ou ses filiales belges, International Power S.A. et Tractebel Engineering S.A., et allemande, Tractebel Engineering GmbH, excluant ainsi toutes les informations et échanges internes propres à chacune de ces sociétés ainsi que les communications entre Engie S.A. et ses filiales belges et allemande ;
– enjoindre à Engie S.A., International Power S.A., Tractebel Engineering S.A. et Tractebel Engineering GmbH de produire les documents, correspondances et emails répondant aux critères de recherche ainsi fixés.
en tout état de cause,
– juger qu’il sera fait application des articles L. 153-1 et R. 153-2 et suivants du code de commerce ;
– fixer un délai de trois mois pour la remise par Engie S.A.,Tractebel Engineering S.A., Tractebel Engineering GmbH et International Power S.A. de la version confidentielle intégrale, d’une version non confidentielle et d’un mémoire précisant, document par document, les motifs leur conférant un caractère confidentiel ainsi que les modalités de communication prévues par les articles R. 153-3 et suivants du code de commerce ;
– condamner [O] à verser à chacune des sociétés Engie S.A., Tractebel Engineering S.A., Tractebel Engineering GmbH et International Power S.A. la somme de 50 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner [O] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Oriane Dontot, JRF & Associés, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile’.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 mars 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
La société [E] [O] relate qu’en juillet 2011, le PTB avait précisé les spécifications fonctionnelles minimales requises pour la mise en place du projet, parmi lesquelles était posée l’exigence que la centrale fût composée de plusieurs blocs d’alimentation.
Elle précise que le rapport d’évaluation des 5 offres publié en novembre 2011 par le PTB démontrait que seules les offres des consortium [E] [O] et Malakoff étaient conformes aux caractéristiques attendues, celle du consortium GDF-Suez portant sur une centrale constituée d’un seul bloc d’alimentation et que pourtant, c’est ce dernier qui a été retenu pour la réalisation du projet.
Par ailleurs, elle explique que :
– le 15 septembre 2014, GDF-Suez a annoncé son intention d’acquérir le groupe allemand Lahmeyer via sa filiale belge Tractebel Engeneering SA,
– en octobre 2014, le parlement koweitien a publié un rapport qui dénonçait les vices ayant affecté la procédure de sélection des offres et exposait que le véritable gagnant de l’offre aurait dû être le consortium [E] [O],
– en 2016 a été annoncé l’aboutissement du processus de rachat du groupe Lahmeyer par Engie,
– en 2018, un comité d’experts nommé dans le cadre de l’action en responsabilité administrative qu’elle a initiée à l’encontre des autorités koweitiennes a rendu un rapport concluant que la proposition du consortium GDF-Suez n’était pas conforme aux exigences techniques de l’offre.
C’est dans ces circonstances qu’elle explique avoir déposé le 16 octobre 2019 une requête aux fins d’obtenir une mesure instruction non contradictoire, laquelle a été rétractée par ordonnance de référé du 10 février 2021.
Elle expose qu’ayant pris acte de la constatation qu’elle justifiait d’un motif légitime, elle a saisi le juge des référés d’une nouvelle demande, cette fois-ci contradictoire, en sollicitant des mesures d’instruction non seulement contre Engie mais aussi contre ses filiales Tractebel SA, Tractebel GmbH et International Power SA.
Elle demande l’infirmation de l’ordonnance querellée du 21 juillet 2022 qui a considéré :
– que le juge des référés français n’était pas compétent à l’égard des trois filiales belges et allemande de la société Engie,
– et que ses demandes à l’égard de cette dernière étaient dépourvues de motif légitime et en outre, que les mesures sollicitées étaient disproportionnées.
Sur la compétence du président du tribunal de commerce de Nanterre, elle argue de l’application de l’article 42 du code de procédure civile et critique la motivation du premier juge qui a retenu que la société Engie serait, dans le cadre d’un procès ultérieur au fond, un « défendeur artificiel », insusceptible de voir sa responsabilité engagée.
Elle fait au contraire valoir que :
– les pièces versées aux débats (rapport du PTB du 30 novembre 2011, circonstances de l’annonce de l’attribution du Projet à la société GDF-Suez, acquisition de Lahmeyer par GDF-Suez) suffisent à établir au stade des référés l’implication avérée de la société Engie dans l’attribution du marché de la centrale Az Zour North à sa filiale belge International Power SA et donc l’existence d’indices plausibles d’une possible action en responsabilité délictuelle à son encontre si la preuve d’agissements fautifs lui étant personnellement imputables devait être révélée au moyen des mesures d’instruction demandées ;
– la circonstance qu’Engie n’ait été partie prenante au Projet qu’indirectement à travers sa filiale belge n’exclut pas que sa responsabilité délictuelle puisse être engagée, concurremment ou alternativement à la responsabilité propre, également délictuelle, de ladite filiale, comme des autres filiales attraites à l’instance ;
– dans sa précédente ordonnance du 10 février 2021, le président du tribunal de commerce de Nanterre avait, à l’inverse, considéré que la responsabilité personnelle d’Engie était susceptible d’être engagée.
Sur le motif légitime de voir ordonner une mesure d’instruction in futurum, la société [E] [O] entend démontrer qu’elle justifie en l’espèce d’une série de faits avérés et non hypothétiques dont il résulte qu’il est raisonnable de considérer qu’Engie (GDF-Suez à l’époque) a pu, directement ou indirectement par l’intermédiaire de l’une de ses filiales, exercer à son profit une certaine influence sur le pouvoir adjudicataire koweïtien lors de la sélection des offres du projet, de telle sorte que si la preuve de ces agissements pouvait être établie par la mesure d’instruction ordonnée, la concluante serait fondée à exercer une action en concurrence déloyale à l’encontre d’Engie, voire le cas échéant à l’encontre de ses filiales International Power SA, Tractebel SA ou Tractebel GmbH (ex Lahmeyer International).
Elle soutient qu’il est légitime de s’interroger sur la raison pour laquelle l’offre techniquement la moins conforme – celle de GDF-Suez – a finalement été retenue sur les conseils d’une entité censément indépendante – Lahmeyer – qui sera en définitive acquise par le vainqueur de l’appel d’offres au terme d’un processus dont on apprendra, en 2016, qu’il avait débuté dès 2011, c’est-à-dire à une époque où Lahmeyer intervenait dans le processus de sélection des offres.
Elle conteste par ailleurs que le moyen tiré de la prescription de l’action qu’elle entend engager puisse être retenu à ce stade, faisant valoir que :
– son action n’étant pas encore née, aucun délai de prescription n’a par définition commencé à courir ;
– subsidiairement, à supposer que s’applique la loi koweitienne, la prescription, dont le délai est de quinze ans à compter de la survenance du dommage, n’est en tout état de cause pas intervenue ;
– enfin, l’application de la loi koweitienne n’est en toute hypothèse pas acquise puisque la loi française, notamment, est également susceptible de recevoir application, et avec elle le délai de prescription quinquennale, de telle sorte que le juge des référés, juge de l’évidence, ne saurait considérer que l’éventuelle action au fond de [E] [O] serait « manifestement irrecevable ».
Sur le caractère légalement admissible des mesures sollicitées, la société [E] [O] fait observer que par rapport à sa requête de 2019, elle a considérablement restreint le champ temporel de la recherche et se réfère à l’utilisation impérative de mots-clés.
S’agissant du champ temporel de la recherche, d’abord, elle soutient qu’il est légitime de faire débuter la période d’examen au 1er janvier 2011 dès lors que le processus d’appel d’offres a commencé dès le mois de juin 2010, et de limiter cette période de recherche à la fin de l’année 2014 puisque c’est au cours de cet exercice social que Tractebel SA a fait l’acquisition de Lahmeyer.
Quant aux listes de mots-clés proposés, elle rappelle que si la seconde liste comporte des termes génériques, elle a précisément vocation à restreindre le champ de la recherche puisqu’elle ne doit être employée que dans un second temps, à partir du résultat de la recherche réalisée au moyen de la première liste de mots-clés, plus spécifiques, de sorte qu’elle opère un rôle de filtre de second rang.
Par ailleurs, elle expose que les mots-clés ou acronymes figurant dans la première liste sont bien en lien avec l’objet du litige.
Enfin, elle invoque en tout état de cause que le recours au séquestre et à la possibilité de faire application des dispositions des articles R. 153-1 et suivants du code de commerce sur la protection du secret des affaires, est de nature à éviter tout risque de violation de celui-ci.
Elle ajoute que des mesures d’instruction doivent également être exécutées en Belgique et en Allemagne, sur commissions rogatoires, en application du Règlement (UE) 2020/1783 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2020 relatif à la coopération entre les juridictions des États membres dans le domaine de l’obtention des preuves en matière civile ou commerciale, dit « Règlement Preuve », qui permet à une juridiction d’un Etat membre, conformément aux dispositions de sa législation, de demander à la juridiction compétente d’un autre Etat membre de procéder à un acte d’instruction en vue d’une procédure en cours ou susceptible d’être engagée devant la juridiction requérante.
Elle demande donc à la cour de décerner respectivement au Tribunal de première instance francophone de Bruxelles et au Tribunal de district de Francfort-sur-le-Main (Amtsgericht Frankfurt am Main), des demandes de mesures d’instruction dirigées d’une part contre les sociétés belges Tractebel Engineering SA et International Power SA, d’autre part contre la société allemande Tractebel Engineering GmbH, conformément au formulaire A annexé au dit Règlement.
Soutenant que les allégations de l’appelante sont factuellement erronées, les sociétés intimées sollicitent la confirmation de l’ordonnance attaquée.
Elles relatent quant à elles que l’enquête parlementaire sur les conditions d’attribution du projet au consortium International Power SA dont argue l’appelante a été ouverte à sa demande et que le rapporteur a des liens notoirement connus avec [O].
Elles exposent en outre que ce rapport ne soutient en rien la thèse développée par la société [E] [O] et n’identifie pas davantage d’éléments relatifs aux prétendues non-conformités techniques de l’offre du consortium International Power SA.
Elles entendent par ailleurs démontrer que l’intérêt de Tractebel pour l’acquisition de Lahmeyer puis son implication dans le processus de son rachat sont postérieurs de plus d’un an au choix par le PTB du consortium International Power SA comme soumissionnaire privilégié relatif au projet, en mars 2012.
In limine litis, elles avancent que le président du tribunal de commerce de Nanterre n’était pas compétent pour ordonner des mesures d’instruction in futurum à portée extraterritoriale à l’encontre des filiales étrangères d’Engie S.A puisque le Règlement « Preuve » suppose une potentielle compétence territoriale au fond, tandis que la mise en mise artificielle d’Engie échoue à l’établir.
Elles insistent sur le fait que la société Engie n’a aucun lien avec le Projet en question et qu’il n’est même pas allégué une immixtion dans celui-ci, de sorte qu’aucune action en responsabilité délictuelle à son encontre n’est susceptible d’aboutir.
Les sociétés intimées concluent ensuite à la confirmation de l’ordonnance qui a rejeté les autres demandes de la société [E] [O], après avoir constaté que les mesures sollicitées étaient dépourvues de motif légitime et qu’elles étaient « manifestement disproportionnées » et non « légalement admissibles ».
Sur l’absence de motif légitime, elles soutiennent que leur mise en cause n’est pas sérieuse, rappelant que :
* d’une part, Engie ne faisait pas partie du consortium International Power S.A., directement mis en cause par l’appelante, lequel était composé d’International Power S.A., filiale belge d’Engie S.A., de Sumitomo Corporation et d’A.H. Al Sagar et Brothers Group ;
* d’autre part, Engie n’entretenait aucun lien avec Lahmeyer, et ce n’est pas elle, mais sa filiale belge Tractebel Engineering S.A., soit une entité juridique distincte, qui a procédé à l’acquisition de la société-mère de cette dernière fin 2014 ;
* les autres intimées ont été mises en cause à un stade tardif de la procédure ;
* Tractebel n’est entrée en négociations avec les actionnaires de Lahmeyer qu’à la mi-2013,
* l’attribution de l’appel d’offres au consortium International Power SA reposait sur des critères objectifs.
Elles ajoutent que l’action envisagée par la société [E] [O] est manifestement prescrite, que la loi koweitienne soit applicable (prescription par 3 ans des actions en responsabilité délictuelle) ou la loi française (prescription par 5 ans).
Elles exposent que selon les 2 législations, le point de départ de la prescription se situe au jour où la victime a eu connaissance des faits reprochés, soit au plus tard en l’espèce au 15 septembre 2014, date à laquelle l’appelante a eu connaissance de l’acquisition de Lahmeyer par Tractebel.
Les sociétés intimées concluent ensuite sur le caractère manifestement disproportionné de la mesure de saisie sollicitée par [O], laquelle n’est pas une mesure légalement admissible au titre de l’article 145 du code de procédure civile, faisant valoir que :
– la société [E] [O] sollicite l’utilisation de termes volontairement vagues et génériques, sans rapport avec le projet, tentant en réalité de procéder à une mesure investigation générale proscrite par la jurisprudence,
– sa méthode de recherche conduirait à appréhender des documents internes relatifs à la préparation, la structuration et la mise en ‘uvre d’autres appels d’offres ou d’autres partenariats publics-privés que le Projet Az Zour North IWPP, ou en lien avec d’autres opérations capitalistiques que le rachat de la société-mère de Lahmeyer par Tractebel, menées entre 2011 et 2014 par Engie S.A. ou par ses filiales belges et allemande,
– outre l’atteinte au secret des affaires, la mesure sollicitée porterait une atteinte disproportionnée au principe fondamental de la libre concurrence,
– l’appelante ne s’explique pas sur le champ spatial de la mesure qui peut se dérouler en tous lieux où les intimées exploitent leur activité, et non uniquement à leur siège social,
– la mesure n’est pas limitée aux faits allégués.
A titre subsidiaire, les sociétés intimées demandent, si la cour infirmait l’ordonnance dont appel, que la mesure de saisie sollicitée par [O] soit être modifiée, et son champ de recherche réduit.
En tout état de cause, elles sollicitent la mise en ‘uvre les dispositions des articles L. 153-1 et R. 153-1 et suivants du code de commerce relatives à la protection du secret des affaires.
Sur ce,
Sur la compétence du tribunal de commerce de Nanterre :
Selon le règlement (UE) 2020/1783 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2020 relatif à la coopération entre les juridictions des États membres dans le domaine de l’obtention des preuves en matière civile ou commerciale, refondu, une mesure tendant à l’obtention de preuves destinées à être utilisées dans une procédure judiciaire qui est déjà engagée ou qui est envisagée, peut être demandée par la juridiction d’un État membre saisie à la juridiction d’un autre Etat membre, à condition que la juridiction demanderesse soit compétente pour connaître du fond du litige en cours ou en germe.
En application de l’article 8.1 du règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, refondu, si par principe, la juridiction compétente est celle du for du domicile du défendeur, il est constant qu’en cas en cas de pluralité de défendeurs, il faut que le codéfendeur déterminant la compétence de la juridiction saisie soit un véritable défendeur, outre que le lien de connexité avec les demandes formulées à l’égard des autres défendeurs soit réel.
Au cas présent, seul le domicile de la société Engie serait de nature à justifier la compétence territoriale du tribunal de commerce de Nanterre et la prorogation de compétence à l’égard des autres défenderesses.
L’appelante soutient qu’elle envisage d’intenter contre une action en responsabilité délictuelle à l’encontre de la société Engie (anciennement GDF-Suez).
Elle affirme « qu’elle entend bien agir au fond à l’encontre d’Engie s’il ressort de la mesure d’instruction que sa responsabilité délictuelle est engagée » (page 17 de ses conclusions), ne faisant ainsi que procéder par une allégation qu’elle conditionne elle-même au résultat de la mesure sollicitée.
Elle entend ensuite démontrer qu’elle justifie d’éléments suffisants au stade du référé pour permettre de considérer comme plausible l’existence d’une action au fond ultérieure en responsabilité délictuelle propre, au vu des pièces qu’elle verse aux débats, établissant selon elle une implication avérée de la société Engie (ex GDF-Suez) dans l’attribution du marché de la centrale Az Zour North à sa filiale belge International Power SA.
A l’appui de ces dires, la société [E] [O] vise le rapport établi par le PTB le 30 novembre 2011, duquel il ressort selon elle que pour le pouvoir adjudicataire lui-même, c’est GDF-Suez qui était le chef de file du consortium constitué par celle-ci avec la société Sumitomo Corporation et la société A.H. Al Sagar & Brothers Group.
Or à l’évidence, s’il apparaît en effet que par une facilité de langage les autorités adjudicataires ont désigné le consortium International Power S.A. sous le vocable « consortium GDF-Suez », il n’en demeure pas moins qu’il n’est établi par aucun élément du dossier que la société GDF-Suez, devenue Engie, aurait été d’une quelconque manière impliquée dans le projet litigieux, autrement que par sa détention capitalistique de 43,75 % des droits du consortium, insusceptible d’engager sa responsabilité dans le déroulement du processus d’attribution.
La société [E] [O], pour démontrer la possible implication de la société Engie dans les faits, vise ensuite les divers communiqués diffusés au cours des années 2012 à 2014 suivants :
– proclamation par la société GDF-Suez (i.e. Engie), dans son communiqué de presse du 6 mars 2012 à l’en-tête d’Engie, que « GDF-Suez et International Power (détenue à 70% par GDF SUEZ) ont le plaisir d’annoncer avoir reçu, avec leurs partenaires du consortium, une notification de soumissionnaire privilégié du Bureau Technique des Partenariats (PTB) du Koweït pour la construction et l’exploitation du Projet Indépendant d’Eau et d’Electricité (IWPP) d’Az Zour North »,
– annonce, dans un nouveau communiqué de presse du 13 décembre 2013, que le projet avait définitivement été attribué à son consortium, et ce, sans même préciser que sa participation était détenue par l’intermédiaire de sa filiale International Power SA, M. [H] [J], président-directeur-général de GDF-Suez, s’exprimant en personne pour s’en féliciter, et non le dirigeant de la filiale belge International Power S.A.,
– communiqué de l’autre membre principal du consortium International Power S.A., la société japonaise Sumitomo Corporation du même jour, faisant exclusivement référence à la société GDF-Suez,
– communiqué publié sur le site d’Engie le 15 septembre 2014 lors de l’acquisition de Lahmeyer indiquant que c’est « GDF-Suez, via Tractebel Engineering » qui « devient un acteur mondial de 1er plan dans les services d’ingénierie », et prise de parole de l’un des directeurs généraux adjoints de la société GDF-Suez.
Toutefois, s’il résulte sans conteste de ces éléments que le groupe français GDF-Suez, devenu le groupe Engie, auquel appartiennent tant la société belge membre du consortium attributaire du projet de construction et d’exploitation Az Zour North, la société International Power S.A., que la société belge Tractebel Engineering ayant acquis la société Lahmeyer, s’est ainsi exprimé, il ne peut juridiquement en être déduit aucune conséquence quant à l’implication de la société GDF-Suez, puis Engie, fut-elle la société mère du groupe auquel elle donne le nom, et ce en vertu du principe de l’autonomie des personnes morales. (soulignés par la cour)
Si la société [E] [O] appelante conclut également que la circonstance qu’Engie (à l’époque GDF-Suez) n’ait été partie prenante au projet qu’indirectement à travers sa filiale belge contrôlée à 70 % n’exclut en aucune façon que sa responsabilité soit susceptible d’être engagée, concurremment ou alternativement à la responsabilité délictuelle de la filiale, comme à celle des autres filiales attraites à la procédure, elle ne procède ainsi que par une allégation qui n’est étayée par aucun indice tangible d’une intervention indirecte, autre que capitalistique, de la société mère, un motif hypothétique étant insuffisant pour constituer un grief plausible.
La société [E] [O] échouant ainsi à démontrer l’existence d’indices laissant supposer qu’une action en responsabilité à l’encontre de la société Engie ne serait pas manifestement vouée à l’échec, il convient de retenir qu’Engie n’est pas une défenderesse véritable et sérieuse susceptible de fonder la compétence de la juridiction française à l’égard des mesures sollicitées à l’encontre des sociétés belges et allemandes.
L’ordonnance dont appel sera en conséquence confirmée en ce que le premier juge s’est déclaré incompétent pour connaître des demandes formées à l’encontre des sociétés Tractebel Engineering S.A., Tractebel Engineering GmbH et International Power S.A, au motif que la société Engie est un défendeur artificiel à un éventuel litige.
Il sera en outre observé qu’en l’absence d’autorité de chose jugée attachée aux motifs des décisions judiciaires, il est indifférent que le président du tribunal de commerce de Nanterre, dans son ordonnance du 10 février 2021, ait pu considérer, à tort, que le fait qu’Engie n’ait été intéressée au projet qu’indirectement à travers sa filiale International Power SA n’avait pas nécessairement pour effet d’exclure que sa responsabilité délictuelle puisse être engagée.
Sur les demandes formées à l’encontre de la société Engie :
Selon l’article 145 du code de procédure civile, ‘s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées, à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé’.
Il est constant que le demandeur à la mesure d’instruction in futurum n’a pas à rapporter la preuve, ni même un commencement de preuve, du grief invoqué, mais qu’il doit toutefois démontrer l’existence d’éléments précis constituants des indices de violation possible d’une règle de droit permettant d’établir la vraisemblance des faits dont la preuve pourrait s’avérer nécessaire dans le cadre d’un éventuel procès au fond, afin notamment d’établir l’existence d’un procès en germe possible.
Or, comme il a été ci-dessus jugé, la société [E] [O] échoue à rapporter la preuve de l’existence d’un procès futur à l’encontre de la société Engie qui ne serait pas manifestement voué à l’échec.
Dans ces conditions, sans nécessité d’examiner les autres moyens et arguments de la requérante, l’ordonnance critiquée sera également confirmée en ce qu’elle a retenu que l’action de la société [E] [O] à l’encontre de la société Engie était dépourvue de motif légitime et l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes.
Sur les demandes accessoires :
L’ordonnance sera confirmée en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance.
Partie perdante, la société [E] [O] ne saurait prétendre à l’allocation de frais irrépétibles. Elle devra en outre supporter les dépens d’appel qui seront recouvrés avec distraction au bénéfice de l’avocat qui en a fait la demande.
Il serait par ailleurs inéquitable de laisser aux sociétés Engie S.A., Tractebel Engineering S.A., Tractebel Engineering GmbH et International Power S.A. la charge des frais irrépétibles exposés en cause d’appel. L’appelante sera en conséquence condamnée à leur verser, ensemble, une somme globale de 30 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant par arrêt contradictoire,
Confirme l’ordonnance du 21 juillet 2022 en toutes ses dispositions,
Condamne la société [E] [O] & Sons General Trading & Contracting Company WLL à verser aux sociétés Engie S.A., Tractebel Engineering S.A., Tractebel Engineering GmbH et International Power S.A., ensemble, la somme globale de 30 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en appel,
Dit que la société [E] [O] & Sons General Trading & Contracting Company WLL supportera les dépens d’appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller faisant fonction de Président et par Madame Elisabeth TODINI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,