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6 juillet 2023
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG n°
22/08550
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-9
ARRÊT AU FOND
DU 06 JUILLET 2023
N° 2023/507
Rôle N° RG 22/08550 N° Portalis DBVB-V-B7G-BJSCH
[V] [L]
C/
[S] [N]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Henri- Charles LAMBERT
Me Jean-François JOURDAN
Décisions déférées à la Cour :
Jugement du Juge de l’exécution de NICE en date du 13 Juin 2022 enregistré au répertoire général sous le n° 19/05169.
Jugement du Juge de l’exécution de NICE en date du 13 Juin 2022 enregistré au répertoire général sous le n° 20/00043.
Jugement du Juge de l’exécution de NICE en date du 13 Juin 2022 enregistré au répertoire général sous le n° 20/00933.
APPELANT
Monsieur [V] [L]
né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 7]
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 3]
représenté et plaidant par Me Henri-Charles LAMBERT, avocat au barreau de NICE, substitué par Me Brigitte MINDEGUIA, avocat au barreau de NICE
INTIMÉ
Monsieur [S] [N]
né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 9],
demeurant [Adresse 5]
représenté par Me Jean-François JOURDAN de la SCP JF JOURDAN – PG WATTECAMPS ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Pascale OUALID, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 17 Mai 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Evelyne THOMASSIN, Président
Madame Pascale POCHIC, Conseiller
Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Josiane BOMEA.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Juillet 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Juillet 2023,
Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et Madame Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Le 5 juillet 2019, monsieur [L] faisait assigner monsieur [N] devant le juge des référés de Nice aux fins de résiliation du bail professionnel qui lui avait été consenti.
Aux termes d’une ordonnance du 24 octobre 2019, signifiée le 13 novembre suivant à monsieur [L], le juge des référés de Nice disait n’y avoir lieu à référé et condamnait ce dernier au paiement d’une indemnité de 1 500 € pour frais irrépétibles.
Le 13 novembre 2019, monsieur [N] faisait délivrer à monsieur [L] un commandement de payer la somme totale de 1 665,99 €. Le 18 novembre suivant, monsieur [L] faisait assigner monsieur [N] devant le juge de l’exécution de Nice aux fins de nullité du commandement précité.
Le 21 novembre 2019, monsieur [N] faisait délivrer une saisie-attribution entre les mains de la société Immorel, laquelle se révélait infructueuse.
Le 22 novembre 2019, monsieur [N] faisait délivrer une saisie-attribution entre les mains de la banque HSBC aux fins de paiement de la somme de 2 337,33 € dont 1 500 € en principal, laquelle était dénoncée le 25 novembre 2019 à monsieur [L]. Elle produisait son effet à hauteur de 2 217,91 €.
Le 24 décembre 2019, ce dernier faisait assigner monsieur [N] devant le juge de l’exécution de Nice aux fins de mainlevée des saisies précitées.
Le 21 février 2020, monsieur [N] faisait délivrer une saisie-attribution entre les mains de la banque HSBC aux fins de paiement d’un solde de 713,90 € correspondant à une somme de 2 931,81 € sous déduction de la somme précitée de 2 217,91 €.
Le 2 mars 2020, monsieur [L] faisait assigner monsieur [N] devant le juge de l’exécution de Nice aux fins de mainlevée de la saisie précitée.
Aux termes de trois jugements du 13 juin 2022, le juge de l’exécution de Nice prononçait la nullité de chacune des trois assignations délivrées à monsieur [N] et condamnait monsieur [L] au paiement d’une indemnité de 2 000 € pour frais irrépétibles (soit 6 000 €) et aux entiers dépens.
Le premier juge fondait sa décision sur la délivrance d’une assignation à une adresse que le demandeur savait ne pas être le domicile de monsieur [N], ni son lieu de domiciliation, et le grief constitué par le retard dans l’organisation de sa défense.
Par une déclaration unique reçue le 14 juin 2022 au greffe de la cour d’appel, monsieur [L] formait appel des trois jugements.
Aux termes de ses dernières écritures, notifiées le 15 mars 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé du litige, monsieur [L] demande à la cour de :
– déclarer irrecevable et subsidiairement mal fondée l’exception de nullité de sa déclaration d’appel,
– infirmer les jugements déférés dans toutes leurs dispositions,
– prononcer la nullité du commandement du 13 novembre 2019,
– déclarer caduques les saisies-attribution des 21 et 22 novembre 2019,
– prononcer la nullité de la saisie-attribution du 21 février 2020,
– subsidiairement, ordonner la compensation des créances au titre de l’article 700 du code de procédure civile avec la dette locative de monsieur [N],
En tout état de cause,
– condamner monsieur [N] au paiement d’une somme de 10 000 € de dommages et intérêts et d’une indemnité de 10 000 € pour frais irrépétibles,
– dire que tous les frais des actes d’exécution annulés resteront à la charge de monsieur [N] y compris ceux de mainlevée à intervenir,
– condamner monsieur [N] aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Il invoque la faculté de faire appel de plusieurs décisions dans une déclaration unique et conteste son irrecevabilité pour adresse inexacte de l’intimé au motif que cette demande relève de la compétence du président de chambre et doit être formée dans le délai d’un mois et avant toute défense au fond. Sur le fond, il invoque une adresse fictive de monsieur [N] en Angleterre où il est incapable d’établir une quelconque activité depuis quatre ans, comme en témoigne la délivrance à [Localité 10], de l’assignation en référé et où il dispose d’une ligne téléphonique fixe. Il précise avoir envoyé le paiement de l’indemnité pour frais irrépétibles à Richmond pour établir le caractère fictif de la domiciliation en Angleterre alléguée par l’intimé. Le principal établissement de monsieur [N] se trouverait toujours à La Trinité où il est propriétaire d’une maison, siège de ses activités, alors qu’il est seulement omis du Barreau de Nice. En tout état de cause, monsieur [L] conteste tout grief constitué par le retard dans l’organisation d’une défense alors que suite à des renvois contradictoires successifs, les affaires ont été plaidées en novembre 2021.
Il fonde sa demande de nullité du commandement aux fins de saisie-vente sur l’absence de signification préalable du titre exécutoire et sur la compensation de l’indemnité de 1 500 € avec la dette locative de 15 000 €, certaine, fongible et exigible, peu importe qu’elle ne soit pas l’objet d’un titre exécutoire dès lors que la société Judicial, cessionnaire de la clientèle de monsieur [N], a reconnu ne disposer d’aucun titre locatif opposable au bailleur.
Il conteste la saisie-attribution du 21 novembre 2019, non dénoncée, au motif qu’il conserve toujours un intérêt à obtenir sa caducité et celle du 22 novembre suivant, non dénoncée à madame [Y], cotitulaire du compte joint saisi. En tout état de cause, il invoque des frais indus et l’extinction de sa dette par compensation.
Il invoque un abus lors de la délivrance de la saisie du 21 février 2020 alors que celle du 22 novembre 2019 était fructueuse et à titre subsidiaire, la compensation de sa dette avec sa créance de 140 000 € résultant du jugement du 14 mars 2023 du tribunal judiciaire de Nice. Il qualifie le comportement de l’intimé d’aigrefin, terme couvert par l’immunité de l’article 41 de la loi sur la liberté de la presse.
Aux termes de ses dernières écritures, notifiées le 13 avril 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé du litige, monsieur [N] demande à la cour de :
– ordonner la suppression du paragraphe suivant des conclusions de monsieur [L] : « M. [N] n’est pas content d’être qualifié de ce qu’il est : un aigrefin et selon la définition du Paul Robert, un homme qui emploie l’artifice, la fourberie, la ruse pour gruger, tromper, voler. Dans l’exercice des droits qui sont les siens, M. [L] est parfaitement fondé à dénoncer M. [N] et à faire valoir, ne lui en déplaise, l’attitude de l’intéressé qui se révèle tout au long du litige. Les écrits du concluant étant non seulement couverts par l’immunité de l’article 41 mais participant de la défense de ses intérêts, et ce parfaitement habile à souligner :
– Les multiples activités commerciales de M. [N] en violation de son serment d’avocat,
– Les faillites auxquelles elles ont conduit,
– sa fausse domiciliation en Angleterre,
– son « mensonge sur ses vacances à [Localité 10],
Et depuis la communication par ses soins le 27 février 2023 de l’acte de cession :
– la vente d’un bien dont la SCP [N] n’est pas propriétaire
– le mensonge « contractuel » de l’information du propriétaire sur cette vente clandestine ‘
– alors que l’intéressé laisse à son bailleur une dette locative de 140.000 euros’ »,
– condamner monsieur [L] au paiement d’une somme de 1 000 € de dommages et intérêts au titre des propos précités,
– confirmer les jugements déférés dans toutes leurs dispositions et y ajoutant, condamner monsieur [L] au paiement d’une indemnité de 6 000 € pour frais irrépétibles et des dépens d’appel,
– à titre subsidiaire, débouter monsieur [L] de toutes ses demandes et en cas de compensation, retenir sa créance pour un montant de 7 655,91 €,
– à titre reconventionnel et en tout état de cause, condamner monsieur [L] au paiement d’une somme de 10 000 € de dommages et intérêts et d’une indemnité de 6 000 € pour frais irrépétibles ainsi qu’aux entiers dépens.
Il soulève une exception de nullité de la déclaration d’appel recevable devant la formation de jugement et soulevée in limine litis dans le délai imparti à l’intimé. Il invoque une adresse erronée à [Localité 10], alors qu’il n’est pas propriétaire du logement, lequel constitue seulement son lieu de vacances au cours desquelles il a reçu au hasard de sa présence, la signification d’une assignation à comparaître en audience de référés devant le premier président, le 16 août 2022, finalement non enrôlée.
Il précise n’avoir eu connaissance de l’appel que par la signification au cabinet de son conseil d’une autre assignation en référé devant le premier président.
Il rappelle que son domicile en Angleterre était déjà mentionné sur l’ordonnance de référé du 24 octobre 2019 et sur la signification des actes d’exécution ainsi que sur l’arrêt confirmatif du 25 novembre 2021. En outre, il rappelle son élection de domicile à l’étude de l’huissier poursuivant dans les actes d’exécution de l’ordonnance de référé précitée.
Il invoque un grief constitué par une intention de nuire dans la poursuite de procédures en procédant de sorte que la partie adverse n’en ait pas connaissance.
Il fonde sa demande subsidiaire de confirmation des trois jugements déférés sur la signification à une fausse adresse des assignations en contestation délivrées. Il invoque les dispositions de l’article 689 du code de procédure civile et le défaut de signification des assignations à son domicile et à défaut, à sa résidence de [Localité 8] depuis janvier 2019, lequel est établi par les factures d’électricité et taxe immobilière. Il précise qu’il exerçait les fonctions de gérant et d’associé de la société Parthera Team dont les locaux sont situés à Silverstone. Il relève, qu’une assignation du 2 décembre 2020 rédigée par monsieur [L] mentionne qu’il s’est expatrié en Angleterre, et qu’il lui a envoyé le règlement de l’article 700 à son domicile anglais.
Il caractérise le grief par la délivrance d’une assignation sciemment, à une adresse erronée dans l’intention de lui nuire et l’ayant privé d’un temps suffisant pour préparer sa défense.
Sur le fond, il soutient que le commandement aux fins de saisie-vente a été signifié le même jour mais postérieurement à la signification du titre exécutoire.
Il invoque le caractère infructueux de la saisie-attribution du 21 novembre 2019 dénoncée hors délai de sorte que monsieur [L] n’a plus d’intérêt à agir en contestation. Il relève que la saisie-attribution du 22 novembre 2019 porte sur un compte personnel créditeur de plus de 32 000 € et sur un compte-joint dont seule madame [Y] pourrait invoquer l’irrégularité pour défaut de dénonce à sa personne. Il précise que les actes d’huissier sont listés et leur coût mentionné en marge de l’acte. Il conteste tout abus de saisie, le 22 novembre 2020, en l’état d’une première somme saisie de 2 217,91 € et d’un reliquat persistant de 713,90 €.
Il conteste toute compensation avec une dette locative de 134 091 € en l’état d’une procédure en cours sur appel du jugement du 14 mars 2023 et de la dissimulation d’une procédure contre la société Judicial devant la cour d’appel de Nîmes. Si un arrêt du 1er février 2023 prononce une condamnation provisionnelle de 75 124,74 € au titre des loyers de janvier 2021 à septembre 2022, une transaction du 23 février 2023 conclue entre monsieur [L] et la société Judicial couvre les sommes dues jusqu’à la restitution des locaux. Il en conclut que sa prétendue dette locative est éteinte.
L’instruction de la procédure était clôturée par ordonnance du 18 avril 2023.
MOTIVATION DE LA DÉCISION
En l’état de la clôture de la procédure fixée au 18 avril 2023, la pièce communiquée le 16 mai 2023 par l’appelant sera écartée des débats.
– Sur les propos diffamatoires ou injurieux dans les dernières écritures de monsieur [L]
L’article 41 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse dispose notamment que ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux. Pourront néanmoins les juges, saisis de la cause et statuant sur le fond, prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires, et condamner qui il appartiendra à des dommages-intérêts.
Pourront toutefois les faits diffamatoires étrangers à la cause donner ouverture, soit à l’action publique, soit à l’action civile des parties, lorsque ces actions leur auront été réservées par les tribunaux, et, dans tous les cas, à l’action civile des tiers.
En l’espèce, monsieur [L] qualifie monsieur [N] d’aigrefin. La définition produite par l’appelant définit un aigrefin comme ‘ un homme qui emploie l’artifice, la fourberie, la ruse pour gruger, tromper, voler ‘. Le dictionnaire mentionne que ce terme est notamment synonyme des termes d’ ‘escroc, filou, voleur’. Or, monsieur [L] procède par voie d’affirmation et ne justifie pas du moindre élément de preuve de nature à établir l’existence de manoeuvres frauduleuses ou d’un vol.
Ainsi, le terme d’aigrefin employé par monsieur [L] pour qualifier le comportement de monsieur [N] doit être qualifié d’injurieux et outrageant. Son emploi n’est pas couvert par l’immunité de l’article 41 de la loi et la suppression de la partie des écritures invoquée par l’intimé doit donc être ordonnée.
Monsieur [N] a subi un préjudice moral en lien avec l’atteinte portée à son honneur, laquelle sera réparée par la condamnation de monsieur [L] au paiement d’une somme de 500 € de dommages et intérêts.
– Sur la demande de nullité de la déclaration d’appel :
Monsieur [N] ne sollicite plus la nullité de la déclaration d’appel pour défaut de déclaration distincte à l’encontre des trois jugements mais maintient sa demande fondée sur le défaut de mention de son adresse en Angleterre.
Selon les dispositions combinées des articles 789 et 907 du code de procédure, si le conseiller de la mise en état dispose d’une compétence exclusive pour statuer sur les exceptions de procédure, notamment l’exception de nullité de la déclaration d’appel, le président de chambre ne dispose pas, dans le cadre de la procédure d’appel à bref délai de l’article 905 du même code, des mêmes pouvoirs que le conseiller de la mise en état. Il s’en déduit que la formation collégiale de la cour est compétente pour statuer sur l’exception de nullité de la déclaration d’appel.
Il résulte des dispositions combinées des articles 901 et 57 alinéa 3 du code de procédure civile que la déclaration d’appel doit comporter, à peine de nullité, les nom, prénom, domicile, date et lieu de naissance des personnes physiques. Cependant, une nullité de forme ne peut être prononcée que si la partie qui soulève cette exception établit un grief en lien avec le défaut de mention précité.
En l’espèce, monsieur [N] soutient que monsieur [L] a sciemment omis de mentionner son adresse à Richmond sur sa déclaration d’appel du 14 juin 2022 des trois jugements déférés afin qu’il ne soit pas informé de l’exercice de cette voie de recours.
Or, la déclaration d’appel précitée mentionne sous la mention de l’adresse de l’intimé : ‘se disant domicilié [Adresse 5] ‘.
Il s’en déduit que l’exception de nullité de la déclaration d’appel n’est pas fondée et doit être rejetée.
– Sur la demande de nullité des trois assignations introductives d’instance,
Selon les dispositions de l’article 57 alinéa 3 du code de procédure civile, une assignation doit comporter à peine de nullité, notamment la mention de son domicile.
Les articles 654 et suivants du code de procédure civile disposent que la signification doit être faite à personne et que si elle s’avère impossible, l’acte peut être délivré soit à domicile, soit à défaut de domicile connu, à résidence. L’article 689 dispose que les notifications sont faites au lieu où demeure le destinataire s’il s’agit d’une personne physique. Elle est aussi valablement faite au domicile élu lorsque la loi l’admet ou l’impose. Ces dispositions sont prescrites à peine de nullité par l’article 693.
En application des dispositions précitées de l’article 114 du code de procédure civile, monsieur [N] doit établir l’existence d’un grief en lien avec le défaut de délivrance des assignations introductives d’instance à son domicile situé à Richmond en Angleterre.
En l’espèce, les assignations des 18 novembre 2019, 24 décembre 2019, et du 2 mars 2020, d’avoir à comparaître devant le juge de l’exécution, étaient signifiées par dépôt à l’étude d’huissier en raison d’une signification impossible à la personne de monsieur [N], à l’adresse située [Adresse 6].
Monsieur [L] avait connaissance de la domiciliation de monsieur [N] au [Adresse 5] (TW 93 AA) en Angleterre dès lors que cette dernière est mentionnée sur l’ordonnance de référé du 24 octobre 2019, les actes d’exécution de la décision précitée (commandement de payer du 13 novembre 2019, saisies-attribution des 21, 22 novembre 2019 et 21 février 2020 ).
La mention du nom de monsieur [N] sur la boîte aux lettres de la maison de la Trinité et celle de l’adresse, au lieu précité, du gérant de sociétés dont il avait la direction sur un extrait Kbis non actualisé, n’est pas suffisante pour établir le caractère fictif de son adresse à Richmond.
Il en est de même de la signification de l’assignation en référé devant le premier président à la personne de monsieur [N] au [Adresse 4] à [Localité 10], laquelle est intervenue, le 18 août 2022, de sorte que sa présence pouvait s’expliquer par la période estivale et non par une résidence permanente à cette adresse.
En effet, sa résidence à [Localité 8] est établie par une facture d’électricité de Shell Energy du 25 février 2020 et par un avis de taxe immobilière des 7 mars 2019 et 9 mars 2020 aux noms de monsieur [N] et de sa compagne en qualité de locataires.
Il produit des documents (pièces n°15 et 17) de nature à établir qu’il détenait 99 parts de la société Panthera Team et que cette dernière était locataire de locaux à Silverstone. Enfin, dans une assignation délivrée le 9 décembre 2020 notamment à la Selarl Judicial et des conclusions du 3 janvier 2023, monsieur [L] affirme que monsieur [N] ‘ s’est expatrié en Angleterre pour faire des affaires ‘ et reconnaît ainsi la réalité de son domicile ou de sa résidence en Angleterre.
Il s’en déduit que le domicile de monsieur [N] à Richmond en Angleterre ne présentait pas un caractère fictif démontré de sorte que le défaut de délivrance, au domicile anglais de l’intimé, des assignations à comparaître devant le juge de l’exécution de Nice constitue une irrégularité de forme.
Par contre, monsieur [N] doit établir l’existence d’un grief en lien avec l’irrégularité précitée. S’il invoque un temps insuffisant pour préparer sa défense, le dossier de première instance établit que les trois procédures ont été appelées pour la première fois à l’audience du 23 mars 2020, ont fait l’objet de plusieurs renvois contradictoires avant d’être plaidées à l’audience du 8 novembre 2021. Ainsi, monsieur [N] a disposé du temps nécessaire pour préparer sa défense de sorte qu’il n’établit pas l’existence du grief qu’il allègue en lien avec l’irrégularité de forme précitée.
Par conséquent, le jugement déféré sera infirmé en ce qu’il a prononcé la nullité des assignations introductive d’instance des 18 novembre et 24 décembre 2019 ainsi que du 2 mars 2020.
– Sur la demande de nullité du commandement de payer du 13 novembre 2019,
Selon les dispositions de l’article 503 du code de procédure civile, les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu’après leur avoir été notifiés, à moins que l’exécution n’en soit volontaire.
Il appartient au créancier poursuivant de rapporter la preuve de la notification préalable de la décision dont il se prévaut.
En l’espèce, les procès-verbaux de signification du 13 novembre 2019 de l’ordonnance de référé et du commandement contesté ne mentionnent pas l’heure de leur délivrance. De plus, le procès-verbal de signification du commandement mentionne qu’il est délivré en vertu de l’ordonnance de référé du 24 octobre 2019 mais ne mentionne pas que cette dernière a été préalablement signifiée. Ainsi, monsieur [N] n’établit pas le caractère préalable de la signification de l’ordonnance précitée.
Par conséquent, la nullité du commandement de payer aux fins de saisie-vente du 13 novembre 2019 sera prononcée.
– Sur la demande de caducité de la saisie-attribution du 21 novembre 2019,
Selon les dispositions de l’article R 211-3 du code des procédures civiles d’exécution, à peine de caducité, la saisie est dénoncée au débiteur par acte d’huissier de justice dans un délai de huit jours.
En l’espèce, une saisie-attribution a été délivrée le 21 novembre 2019 à la société Immorevel. La dénonciation alléguée du 3 janvier 2020 à monsieur [L] n’est pas produite au débat.
En tout état de cause, cette saisie est caduque pour n’avoir pas été dénoncée dans le délai précité de huit jours. Un simple préjudice moral suffit à monsieur [L] pour justifier de la recevabilité de sa contestation en raison de l’atteinte que toute mesure d’exécution forcée porte à son image et à son crédit.
Par conséquent, la caducité de la saisie-attribution du 21 novembre 2019 sera prononcée.
– Sur la demande de nullité de la saisie-attribution du 22 novembre 2019,
Selon les dispositions de l’article R 211-22 du code des procédures civiles d’exécution, lorsque la saisie est pratiquée sur un compte-joint, elle est dénoncée à chacun des titulaires du compte. Si les nom et adresse des autres titulaires du compte sont inconnus de l’huissier de justice, ce dernier demande à l’établissement qui tient le compte de les informer immédiatement de la saisie et du montant des sommes réclamées.
Il s’en déduit que le défaut de dénonciation de la saisie-attribution au co-titulaire du compte joint sur lequel porte la mesure d’exécution n’est pas sanctionné par la caducité de la saisie.
En l’espèce, seule madame [Y] serait recevable à invoquer le défaut de dénonce de la saisie-attribution. Même dans cette hypothèse, ce dernier n’est pas sanctionné, aux termes des dispositions précitées de l’article R 211-22, par la caducité ou la nullité de la saisie.
Par conséquent, la demande de nullité de la saisie-attribution du 22 novembre 2019 fondée sur le défaut de dénonce à madame [Y] sera rejetée.
– Sur les autres contestations de la saisie-attribution du 22 novembre 2019,
Selon les dispositions de l’article L 211-1 du code des procédures civiles d’exécution, tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d’un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d’argent.
Selon les dispositions des articles L 111-7 et L 121-2 du code des procédures civiles d’exécution, le créancier a le choix des mesures propres à assurer l’exécution ou la conservation de sa créance. L’exécution de ces mesures ne peut excéder ce qui se révèle nécessaire pour obtenir le paiement de l’obligation.
Le juge de l’exécution a le pouvoir d’ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages et intérêts en cas d’abus de saisie.
Selon les dispositions de l’article 1347 du code civil, issues de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, la compensation est l’extinction simultanée d’obligations réciproques entre deux personnes. Elle s’opère, sous réserve d’être invoquée, à due concurrence, à la date où ses conditions se trouvent réunies.
En l’espèce, monsieur [L] conteste la validité de la saisie- attribution du 22 novembre 2019 mais ne formule pas de demande de mainlevée ou de nullité de cet acte d’exécution forcée.
Le procès-verbal de cette saisie mentionne qu’elle est délivrée pour le recouvrement de la somme de 1 500 € en principal outre frais et intérêts, soit un montant total de 2 337,34 €.
Le principal de 1 500 € correspond à l’indemnité allouée au titre des frais irrépétibles par l’ordonnance de référé du 24 octobre 2019. Le droit proportionnel de 37,06 € n’est pas contesté. Les intérêts au taux nécessairement légal (5,23 €) sont dus.
Au titre des frais, si l’article 650 du code de procédure civile dispose que les frais afférents aux actes inutiles ou nuls sont à la charge des huissiers de justice qui les ont délivrés, monsieur [N] ne pouvait mettre à la charge de monsieur [L] que les frais nécessaires au recouvrement forcé de sa créance.
Or, le procès-verbal de saisie ne précise pas la nature des actes d’exécution pour un montant retenu de 290,04 €. A défaut de précision et de justificatif produit, il ne peut s’agir que des frais de signification de l’ordonnance de référé pour un montant de 87,37 € HT. Par contre, les frais de signification du commandement de payer annulé restent à la charge du créancier.
Les frais de requête Ficoba (imputés pour 51,48 € HT) ne font pas l’objet d’une tarification spécifique mais peuvent être comptabilisés pour 21,28 € HT à titre de frais de requête aux fins de recherche d’information ( A 444-33 n°151 du tarif des huissiers ).
Les frais de délivrance du procès-verbal de saisie sont justifiés pour un montant de 131,12 € HT. Au titre des frais à venir, seuls les frais de dénonce de la saisie-attribution (105,39 €) ainsi que de mainlevée (73,01 € ) sont des frais futurs nécessaires à l’exclusion de ceux relatifs au certificat de non-contestation (51,48 €) et à sa signification (93,53 €).
Il s’en déduit que la saisie-attribution du 22 novembre 2019 a produit son effet attributif immédiat à hauteur de 1 960,46 €.
Au titre de la compensation invoquée par monsieur [L], le jugement du 14 mars 2023 du tribunal judiciaire de Nice, signifié le 22 mars suivant, constate la résiliation de plein droit du bail professionnel du 29 février 2000 à effet au 29 juin 2019 et condamne avec exécution provisoire monsieur [N] au paiement des sommes de :
– 8 277,69 € au 5 juin 2019 au titre de l’arriéré locatif à la date de résiliation du bail outre intérêts au taux légal à compter du 29 mai 2019, date du commandement, avec capitalisation des intérêts,
– 2 000 € de dommages et intérêts,
– 3 250 € par mois à titre d’indemnité d’occupation à compter du 1er juillet 2019 jusqu’à libération des lieux.
Le juge de l’exécution, saisi d’une contestation d’actes d’exécution forcée, est compétent pour, statuer sur l’exception de compensation entre les créances réciproques des parties, et faire leur compte.
L’arrêt de la cour d’appel de Nîmes du 1er février 2023 oppose monsieur [L] et la société Judicial et condamne cette dernière au paiement d’une somme provisionnelle de 75 124,54 € au titre des loyers et charges de janvier 2021 à septembre 2022. Le 21 février suivant, les parties ont signé un protocole transactionnel, lequel stipule une restitution des locaux loués au 15 avril et le règlement des sommes de 15 000 €, le 15 mars 2023, et de 36 000 € en 24 échéances mensuelles de 1 500 € à compter du 1er mai 2023.
Cependant, monsieur [N] n’est partie ni à l’arrêt du 1er février 2023, ni à la transaction postérieure de sorte que par l’effet relatif des conventions, la transaction précitée lui est inopposable. En outre, cette dernière ne stipule pas que monsieur [L] renonce au bénéfice du jugement du 14 mars 2023 et son exécution n’est pas établie. Enfin, l’arrêt et la transaction précités portent sur les sommes dues de janvier 2021 à septembre 2022 et ne couvrent donc pas l’intégralité des condamnations prononcées par le jugement du 14 mars 2023 (arriéré locatif de 8 277,69 € au 5 juin 2019, dommages et intérêts, et indemnité d’occupation mensuelle de 3 250 € à compter du 1er juillet 2019 jusqu’à restitution des locaux ).
Il s’en déduit que les créances de monsieur [N] de, 4 000 € d’indemnités pour frais irrépétibles ( 1 000 € par ordonnance de référé du 24 octobre 2019, 1 500 € par arrêt du 25 novembre 2021, 1 500 € par ordonnance du JME du 8 avril 2022 ), 3 655,91 € à titre de restitution du dépôt de garantie, ainsi que celle de 500 € de dommages et intérêts alloués par le présent arrêt, sont éteintes par l’effet de la compensation avec les sommes dont il est débiteur à l’égard de monsieur [L] au titre de l’exécution du jugement du 14 mars 2023.
Au titre de la créance de 1960,46 € de monsieur [N], ce dernier a contesté les créances de monsieur [L] devant le juge des référés et le juge du fond. Elles ne revêtent donc les caractères certain, liquide et exigible que depuis le jugement du 14 mars 2023. Ainsi, monsieur [L] n’était pas titulaire, au jour de la saisie du 22 novembre 2019, de créances certaines, liquides et exigibles à l’égard de monsieur [N] de sorte que les conditions de la compensation n’étaient pas réunies à cette date. Ainsi, la créance de 1960,46 € n’est donc pas éteinte par l’effet de la compensation et la saisie-attribution précitée doit produire son effet attributif.
Par conséquent, la compensation entre les créances réciproques des parties sera ordonnée sauf la créance de 1960,46 € recouvrée par la saisie du 22 novembre 2019.
– Sur la demande de nullité de la saisie-attribution du 21 février 2020,
Selon les dispositions des articles L 111-7 et L 121-2 du code des procédures civiles d’exécution, le créancier a le choix des mesures propres à assurer l’exécution ou la conservation de sa créance. L’exécution de ces mesures ne peut excéder ce qui se révèle nécessaire pour obtenir le paiement de l’obligation.
Le juge de l’exécution a le pouvoir d’ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages et intérêts en cas d’abus de saisie
La saisie-attribution du 19 novembre 2021 s’est avérée fructueuse en l’état des déclarations du tiers saisi sur le solde créditeur des deux comptes saisis d’un montant respectif de 32 191,28 € et de 3 878,63 €.
En l’état du caractère fructueux de la saisie précitée, monsieur [N] ne pouvait valablement faire délivrer, le 21 février 2020, une nouvelle saisie-attribution aux fins de recouvrer la même créance en principal de 1 500 € mais en y ajoutant une somme de 822,38 € sous la mention ‘ actes ‘ sans préciser la nature et le coût des actes allégués. Ainsi, les frais d’exécution de 822,38 € ne sont pas justifiés de sorte que la créance précitée ne pouvait fonder la saisie-attribution du 21 février 2020, laquelle présente un caractère abusif.La délivrance de cette seconde saisie a imposé à monsieur [L] des démarches pour la contester et a porté atteinte sa réputation. Cet abus sera sanctionné par l’allocation d’une somme de 200 € de dommages et intérêts.
Par conséquent, la nullité de la saisie-attribution du 21 février 2020 sera prononcée et monsieur [N] sera condamné au paiement de la somme de 200 € de dommages et intérêts au titre de la réparation du préjudice en lien avec cet abus.
Enfin, les frais générés par les actes d’exécution forcée annulés resteront à la charge de monsieur [N].
– Sur les demandes accessoires,
Monsieur [N], partie perdante en appel, ne rapporte pas la preuve d’un abus de procédure de monsieur [L] de sorte que sa demande de dommages et intérêts n’est pas fondée et sera rejetée.
Monsieur [N] qui succombe pour l’essentiel supportera les dépens de première instance et d’appel.
L’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant après débats en audience publique et après en avoir délibéré, conformément à la loi, par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe,
ECARTE des débats la pièce communiquée le 16 mai 2023 par monsieur [V] [L],
INFIRME les jugements déférés dans toutes leurs dispositions,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
REJETTE les exceptions de nullité de la déclaration d’appel et des assignations délivrées les 18 novembre 2019, 24 décembre 2019 et 2 mars 2020, à comparaître devant le juge de l’exécution de Nice,
ORDONNE la suppression des mentions suivantes des conclusions de monsieur [V] [L] notifiées le 28 février 2023 :
« M. [N] n’est pas content d’être qualifié de ce qu’il est : un aigrefin et selon la définition du Paul Robert : un homme qui emploie l’artifice, la fourberie, la ruse pour gruger , tromper, voler. Dans l’exercice des droits qui sont les siens, M. [L] est parfaitement fondé à dénoncer M. [N] et à faire valoir, ne lui en déplaise , l’attitude de l’intéressé qui se révèle tout au long du litige. Les écrits du concluant étant non seulement couverts par l’immunité de l’article 41 mais participant de la défense de ses intérêts, et ce parfaitement habile à souligner :
– Les multiples activités commerciales de M. [N] en violation de son serment
d’avocat,
– Les faillites auxquelles elles ont conduit,
– sa fausse domiciliation en Angleterre,
– son mensonge sur ses vacances à [Localité 10],
Et depuis la communication par ses soins le 27 février 2023 de l’acte de cession :
– la vente d’un bien dont la SCP [N] n’est pas propriétaire
– le mensonge « contractuel » de l’information du propriétaire sur cette vente clandestine ‘
– alors que l’intéressé laisse à son bailleur une dette locative de 140.000 euros’ », et
CONDAMNE monsieur [V] [L] au paiement d’une somme de 500 € de dommages et intérêts à ce titre,
PRONONCE la nullité du commandement de payer aux fins de saisie-vente du 13 novembre 2019,
PRONONCE la caducité de la saisie-attribution du 21 novembre 2019,
DIT que la saisie délivrée le 22 novembre 2019 produit son effet attributif immédiat à hauteur de 1 960,46 €,
PRONONCE la nullité de la saisie-attribution du 21 février 2020 et CONDAMNE monsieur [S] [N] au paiement d’une somme de 200 € de dommages et intérêts,
ORDONNE la compensation entre les créances réciproques des parties à l’exception de celle de 1960,46 € recouvrée par la saisie-attribution du 22 novembre 2019,
DIT que les frais des actes d’exécution forcée annulés resteront à la charge de monsieur [S] [N],
DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE monsieur [S] [N] aux entiers dépens de première instance et d’appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE