Saisie-attribution : 13 juillet 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 23/00021

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Saisie-attribution : 13 juillet 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 23/00021
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13 juillet 2023
Cour d’appel de Bordeaux
RG n°
23/00021

RÉFÉRÉ N° RG 23/00021 – N° Portalis DBVJ-V-B7H-NENG

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Société L’AUXILIAIRE

c/

S.A. ALBINGIA

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DU 13 JUILLET 2023

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Grosse délivrée

le :

ORDONNANCE

Rendue par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Le 13 JUILLET 2023

Véronique LEBRETON, Première Présidente de Chambre à la Cour d’Appel de BORDEAUX, désignée en l’empêchement légitime de la Première Présidente par ordonnance en date du 16 décembre 2022, assistée de Audrey COLLIN, Greffière,

dans l’affaire opposant :

Société L’AUXILIAIRE agissant en la personne de son représentant légal prise en sa qualité d’assureur de la Société FORTEN, domicilié en cette qualité [Adresse 2]

absente

représentée par Me Jean-David BOERNER de la SCP H. BOERNER J.D. BOERNER, avocat au barreau de BORDEAUX substitué par Me Morgane BERNARD, avocat au barreau de BORDEAUX

Demanderesse en référé suivant assignation en date du 24 février 2023,

à :

S.A. ALBINGIA prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité [Adresse 1]

absente

représentée par Me Jean-Jacques BERTIN, avocat postulant au barreau de BORDEAUX et par Me Emmanuelle BOCK, membre de la SCPA NABA, avocat plaidant au barreau de PARIS

Défenderesse,

A rendu l’ordonnance contradictoire suivante après que la cause a été débattue en audience publique devant nous, assistée de Séverine Roma, Greffière, le 29 juin 2023 :

EXPOSE DU LITIGE

Par jugement du tribunal judiciaire de Bordeaux, saisi par acte du

24 décembre 2020, en date du 16 janvier 2021 la SCCV Lacanau Giralda, maître de l’ouvrage ayant fait procéder à la réalisation d’un immeuble à Lacanau, a obtenu la condamnation de la SA Albingia à lui payer la somme de 330 312 € hors-taxes au titre de la garantie dommage ouvrage.

Par jugement en date du 31 mai 2022 le tribunal Judiciaire de Bordeaux a condamné in solidum la SARL Forten, son assureur la société l’Auxiliaire et la SAS SBE à payer à la SA Albingia la somme de 330 312 € avec intérêts au taux légal à compter du jugement et la capitalisation par année entière, et a indiqué que dans leurs rapports entre elles la SAS SBE devrait supporter 85 % de la condamnation et la SARL Forten, les 15 % restants.

La société l’Auxiliaire a fait appel de ce jugement par déclaration du

23 juin 2022.

La société l’Auxiliaire a réglé la quote-part mise à la charge de son assurée. Le 18 octobre 2022 le tribunal de commerce de Bordeaux a prononcé le redressement judiciaire de la SAS SBE.

La SA Albingia a fait pratiquer une saisie attribution sur les comptes de la société l’Auxiliaire le 6 janvier 2023 pour obtenir paiement du solde soit la somme de 294 101,95 €, la société l’Auxiliaire ayant contesté cette mesure d’exécution devant le juge de l’exécution de Nanterre.

Par acte de commissaire de justice en date du 24 février 2023 la société l’Auxiliaire a fait assigner la SA Albingia aux fins de voir, à titre principal ordonner l’arrêt de l’exécution provisoire du jugement du 31 mai 2022, et à titre subsidiaire de voir désigner en qualité de séquestre de la somme de 294 101,95 € le Crédit Lyonnais à Lyon, banque de la société l’Auxiliaire, et de voir statuer ce que de droit sur les dépens.

Par conclusions en date du 14 juin 2023, soutenues à l’audience, la société l’Auxiliaire maintient ses demandes.

Elle soutient qu’il existe des moyens sérieux de réformation en ce que les demandes de la SA Albingia sont irrecevables, car elle ne pouvait agir qu’au titre de la subrogation de l’article 1231-1 du Code civil et que contre la SAS SBE et son assureur, à l’exclusion de la SARL Forten et son assureur, et en ce que le contrat de maîtrise d”uvre qui a été confiée à son assuré ne comporte qu’une obligation de moyens et a pris fin le 5 mars 2019 sans qu’aucune anomalie n’ait été ultérieurement constatée.

Elle ajoute que l’exécution de la décision aura des conséquences manifestement excessives, car la restitution des fonds versés aura une durée qui mettra sa trésorerie en difficulté alors qu’elle est constituée en mutuelle.

Par conclusions déposées le 24 mai 2023, et soutenues à l’audience, la SA Albingia sollicite que la société l’Auxiliaire soit déboutée de ses demandes et condamnée aux dépens, dont distraction au profit de Maître Jean-Jacques Bertin, avocat au barreau de Bordeaux, en application de l’article 699 du code de procédure civile, et au paiement d’une somme de 10 000 € au titre de l’article 700 du même code.

Elle expose que la société l’Auxiliaire n’a pas fait valoir d’observations relatives à l’exécution provisoire devant le premier juge et ne démontre pas l’existence de conséquences manifestement excessives survenues postérieurement à la décision, de sorte que sa demande d’arrêt d’exécution provisoire n’est pas recevable.

Elle indique en outre qu’il n’existe aucun moyen sérieux de réformation en ce qu’ayant réglé une indemnité dommages ouvrage pour un désordre structurel affectant des balcons imputables à Forten, Artche et SBE, elle est recevable à exercer un recours subrogatoire contre Forten et son assureur et en ce que le dispositif du jugement déclarant irrecevable la demande de la société l’Auxiliaire au titre de la police TRC est devenue irrévocable, de sorte qu’elle n’a commis aucune faute en ne mobilisant pas cette garantie.

L’affaire a été mise en délibéré au 13 juillet 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L’article 514-3 du code de procédure civile dispose qu’en cas d’appel, le premier président peut être saisi afin d’arrêter l’exécution provisoire de la décision lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.

La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d’observations sur l’exécution provisoire n’est recevable que si, outre l’existence d’un moyen sérieux d’annulation ou de réformation, l’exécution provisoire risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.

Le risque de conséquences manifestement excessives doit être apprécié au regard des facultés de paiement du débiteur ou des facultés de remboursement du créancier, ces deux critères étant alternatifs et il suppose la perspective d’un préjudice irréparable et d’une situation irréversible en cas d’infirmation.

En l’espèce, il n’est pas discuté que la société l’Auxiliaire n’a formulé aucune observation relative à l’exécution provisoire devant le premier juge, car l’exécution provisoire étant de droit et le juge ne pouvant l’écarter que dans les conditions des alinéas 2 et 3 de l’article 514 du code de procédure civile, ceci suppose que les parties formulent une prétention en ce sens et développent une argumentation spécifique à son soutien, la simple formule « déboute de toutes ses demandes » étant à cet égard inopérante.

Par conséquent les dispositions de l’alinéa 2 de l’article 514-3 sus-cité sont applicables au demandeur qui doit démontrer l’existence de conséquences manifestement excessives survenues postérieurement au jugement.

Or en l’occurrence, la société l’Auxiliaire invoque le fait qu’en cas d’infirmation du jugement la restitution aurait une durée de nature à mettre à mal sa trésorerie alors qu’elle est organisée sur un mode mutualiste sans pour autant produire de pièce justificative de sa situation financière et en toutes hypothèses ce risque préexistait au jugement, nonobstant l’ouverture d’une procédure collective au bénéfice de la société SBE. Elle échoue donc à rapporter la preuve de l’existence de conséquences manifestement excessives survenue postérieurement au jugement.

Par conséquent il convient de déclarer irrecevable la demande principale de la société l’Auxiliaire sans qu’il soit nécessaire d’analyser l’existence d’un moyen sérieux de réformation de la décision dont appel puisque, dès lors que l’une des deux conditions prévues pour prétendre à l’arrêt de l’exécution provisoire n’est pas remplie, il n’y a pas lieu d’examiner la seconde compte tenu de leur caractère cumulatif.

Aux termes de l’article 521, 1er alinéa, du code de procédure civile, la partie condamnée au paiement de sommes autres que des aliments, des rentes indemnitaires ou des provisions peut éviter que l’exécution provisoire soit poursuivie en consignant, sur autorisation du juge, les espèces ou les valeurs suffisantes pour garantir, en principal, intérêts et frais, le montant de la condamnation.

Il doit être rappelé que cette possibilité d’aménagement de l’exécution provisoire relève du pouvoir discrétionnaire du premier président et n’est pas subordonnée à la condition que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.

En l’espèce, les circonstances de la cause et l’importance de la condamnation justifient de faire droit à la demande de consignation qui est de nature à préserver les droits des parties.

La société l’Auxiliaire, partie succombante à titre principal dans la présente instance, au sens des dispositions de l’article 696 du Code de procédure civile, sera condamnée aux entiers dépens.

Il apparaît conforme à l’équité de laisser à la charge de chaque partie leurs propres frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Déclare la société l’Auxiliaire irrecevable en sa demande tendant à l’arrêt de l’exécution provisoire résultant du jugement du tribunal judiciaire en date du 16 janvier 2021,

Autorise la société l’Auxiliaire à consigner la somme de 294 101,95 € entre les mains de la caisse des dépôts et consignation,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société l’Auxiliaire aux entiers dépens de la présente instance.

La présente ordonnance est signée par Véronique LEBRETON, Première Présidente de Chambre et par Audrey COLLIN, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La greffière La présidente

 


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