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11 juillet 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
23/04319
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 8
ARRÊT DU 11 JUILLET 2023
(n° / 2023, 5 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/04319 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CHHJ4
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 février 2023 – Tribunal de commerce de PARIS – RG n° 2023006226
APPELANTE
S.A.S. C.S.E. ASSURANCE, représentée par son président, Monsieur [C] [R], domicilié en cette qualité audit siège,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 829 445 857,
Dont le siège social est situé [Adresse 2]
[Localité 6]
Représentée par Me Benjamin MERCIER, avocat au barreau de PARIS, toque : C0138,
INTIMÉS
S.C.P. [J], prise en la personne de Maître [W] [J], ès qualités,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PONTOISE sous le numéro 798 818 118,
Dont le siège social est situé [Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée et assistée de Me Isabelle PETIT PERRIN de l’AARPI MONCEAU AVOCATS, avocate au barreau de PARIS, toque : J0083,
La société SELECTIRENTE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés d’EVRY sous le numéro 414 135 558,
Dont le siège social est situé [Adresse 1]
[Localité 8]
Représentée et assistée de Me Philippe RENAUD de la SCP SCP D’AVOCATS RENAUD ROUSTAN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0139,
Monsieur LE PROCUREUR GÉNÉRAL – SERVICE FINANCIER ET COMMERCIAL
[Adresse 3]
[Localité 7]
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 27 juin 2023, en audience publique, devant la cour, composée de:
Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre,
Madame Florence DUBOIS-STEVANT, conseillère,
Madame Constance LACHEZE, conseillère,
Qui en ont délibéré.
Un rapport a été présenté à l’audience par Madame [Y] [E] dans les conditions prévues à l’article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL
ARRÊT :
– Contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Florence DUBOIS-STEVANT, conseillère par suite d’un empêchement de la présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.
*
* *
La SASU CSE Assurance exerce une activité d’agents et courtiers en assurances.
Sur assignation du 22 novembre 2022 délivrée par la société Selectirente et par jugement du 15 février 2023, le tribunal de commerce de Paris a :
– ouvert une procédure de liquidation judiciaire simplifiée à l’égard de la société CSE Assurance,
– désigné la SCP [J] prise en la personne de Me [W] [J] en qualité de mandataire judiciaire-liquidateur,
– fixé la date de cessation des paiements au 30 juin 2022, date d’arrêt d’activité,
– dit que les dépens ainsi que les frais de publicité et de signification seront portés en frais de liquidation judiciaire.
Le tribunal a estimé, à défaut de renseignements sur le chiffre d’affaires, le nombre de salariés et la situation active et passive de la société, que celle-ci se trouvait en état de cessation des paiements et qu’un redressement ne pouvait pas être envisagé compte tenu de l’existence d’un passif exigible et de l’absence d’activité depuis juin 2022.
Par déclaration du 28 février 2023, la SAS CSE Assurance a relevé appel de ce jugement.
L’affaire a été fixée en circuit court le 14 mars 2023.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 14 avril 2023, la société CSE Assurance demande à la cour :
– de la recevoir en ses demandes, fins et conclusions ;
– d’infirmer le jugement du 15 février 2023 ;
– de dire qu’elle est in bonis et de clôturer la procédure de liquidation.
La société CSE Assurance soutient que du fait de son activité de courtier en assurances et d’assureur en automobile, elle dispose d’un portefeuille de clients lui permettant de faire régulièrement face à son passif avec son actif disponible. Elle précise qu’elle est propriétaire de différents véhicules qui, une fois vendus, permettront largement de désintéresser le créancier principal, et qu’elle a d’ailleurs adressé un courrier au mandataire afin d’obtenir la liste des créances pour éventuellement régler d’autres créanciers en vue d’un retour in bonis.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 28 avril 2023, la société Selectirente demande à la cour :
– de la recevoir en ses demandes et l’en dire bien fondée ;
– de confirmer le jugement ;
– de condamner la société CSE Assurance à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens sur le fondement de l’article 699 du code de procédure civile.
La société Selectirente expose que par une ordonnance de référé rendue le 20 avril 2022, le tribunal judiciaire de Paris a constaté l’acquisition de la clause résolutoire du bail commercial et prononcé l’expulsion de la société CSE Assurance qui a eu lieu le 19 juillet 2022, la créance locative s’élevant alors à 10 212,95 euros.
Elle soutient que la société CSE Assurance a reconnu lors de l’audience du 15 février 2023 ne pas pouvoir faire face à sa dette locative, qu’elle n’est pas en mesure de faire face à son passif exigible, ce qu’a mis en évidence le caractère infructueux des poursuites diligentées contre elle, qu’elle ne produit aucune pièce de nature à étayer ses affirmations et qu’en raison de l’ancienneté de la dette, le redressement est manifestement impossible de sorte que seule la liquidation judiciaire peut être envisagée.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 2 mai 2023, la SCP [J] ès qualités demande à la cour :
– de confirmer en toutes ses dispositions le jugement ;
– de statuer ce que de droit sur les dépens.
Elle indique qu’elle n’a connaissance d’aucun actif, qu’aucune pièce n’est versée aux débats par la société CSE Assurance pour prouver qu’elle est en mesure de régler les créances déclarées au passif, qu’aucune pièce comptable et aucun prévisionnel ne sont versés aux débats, que la liste des créanciers ne lui a pas été remise, si bien que les créanciers n’ont pas pu être avisés.
Elle ajoute que trois créanciers ont produit leurs créances entre ses mains : la société Selectirente (créance de 10 352,09 euros), la société Mercedes Benz (créance de 17 577,08 euros) et la DRFIP (créance de 229, 04 euros), que le passif déclaré s’élève ainsi à 28.158,21 euros, dont un montant de 80 euros déclaré à titre provisionnel, et que l’état des inscriptions révèle trois contrats de crédit-bail pour l’achat d’une moto Honda et de deux véhicules Mercedes Bens Fortwo Cabriolet.
Dans son avis communiqué par RPVA le 11 mai 2023, le ministère public est d’avis que la cour :
– sous réserve qu’il soit justifié d’une activité et du désintéressement des créanciers dont les créances sont échues, infirme le jugement en estimant que la SASU CSE Assurance n’est pas en état de cessation des paiements ;
– si l’entreprise peut justifier d’un résultat de nature à en envisager la possibilité, ouvre un redressement judiciaire avec une période d’observation de trois mois ;
– à défaut, confirme la liquidation judiciaire.
Le ministère public rappelle que la société CSE Assurance fait l’objet de créances déclarées à titre échu au 3 mars 2023 de 28 078, 21 euros, et qu’il est prétendu qu’elle est toujours en activité.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 6 juin 2023.
SUR CE,
L’article L. 640-1 du code de commerce dispose que : ” Il est institué une procédure de liquidation judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné à l’article L. 640-2 en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible. ”
Il résulte des termes de l’article L.631-1 du code de commerce qu’est en état de cessation des paiements tout débiteur qui est dans l’impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible et que le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n’est pas en cessation des paiements.
En cas d’appel, l’état de cessation des paiements s’apprécie au jour où la cour statue.
En l’espèce, la liste des créances déclarées versée aux débats fait état d’un passif définitif et échu d’un montant total de 28.078,21 euros, composé de la créance privilégiée du bailleur Selectirente d’un montant de 10.352,09 euros, d’une créance chirographaire déclarée par la société Mercédès Benz Financial Services France à hauteur de 17.577,08 euros correspondant à un contrat de location d’un véhicule Smart et une créance fiscale d’un montant de 149,04 euros. Aucune de ces créances n’est discutée par la société CSE Assurance. En outre, dans la mesure où il n’est pas fait état d’une instance au fond susceptible de remettre en cause la décision rendue en référé le 20 avril 2022, la dette locative qui en découle entre dans la définition du passif exigible.
Au total, le passif exigible s’élève ainsi à 28.078,21 euros.
Quant à l’actif disponible, la société Selectirente fait état d’une vaine tentative de saisie-attribution réalisée le 16 juin 2022 auprès du CIC Nord-Ouest. Toutefois la banque ayant indiqué que la société CSE Assurance lui était inconnue, ce seul acte, à défaut d’autres pièces, ne permet pas d’établir l’absence de toute disponibilité bancaire à cette date.
Toutefois, devant la cour, il n’est fait état d’aucun actif disponible. En effet le liquidateur judiciaire affirme qu’il n’a connaissance d’aucun actif et la société CSE Assurance invoque seulement ” un portefeuille de clients lui permettant de faire régulièrement face à son passif avec son actif disponible “, sans en préciser le montant et l’origine, et la propriété de véhicules qu’elle pourrait vendre, alors que ni l’un ni l’autre ne sont susceptibles d’être considérés comme un actif disponible.
Il s’en déduit que l’actif disponible est inexistant.
En l’absence d’actif disponible, il convient dès lors de constater l’état de cessation des paiements de la société CSE Assurance.
Nonobstant un faible passif échu ou à échoir, la cour relève que la société CSE Assurance ne dispose plus de locaux depuis qu’elle a été expulsée le 19 juillet 2022, l’extrait K-bis à jour au 24 avril 2023 ne mentionnant pas un autre siège social ou un autre établissement, qu’elle n’a pas justifié d’une activité comme l’y a pourtant invitée le ministère public, et qu’au surplus son dirigeant n’est pas investi dans la procédure collective, n’ayant pas établi la liste des créanciers lui incombant en application de l’article L. 622-6 du code de commerce. Il s’ensuit que le redressement de la société CSE Assurance est manifestement impossible et qu’il y a lieu de confirmer le jugement.
S’agissant enfin de la date de cessation des paiements, et contrairement à ce qu’a retenu le tribunal, l’arrêt d’activité de la société n’emporte pas nécessairement cessation des paiements. A défaut de plus amples éléments, la date de cessation des paiements sera fixée au jour du jugement d’ouverture, soit le 15 février 2023.
Les dépens d’appel seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.
L’équité commande de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu’il a fixé la date de cessation des paiements au 30 juin 2022 ;
Statuant à nouveau de ce seul chef infirmé,
Fixe la date de cessation des paiements au 15 février 2023 ;
Ordonne l’emploi des dépens en frais privilégiés de procédure collective et accorde aux avocats de la cause qui peuvent y prétendre le droit de recouvrement direct conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.
La greffière,
Liselotte FENOUIL
Pour la présidente empêchée,
Florence DUBOIS-STEVANT,
conseillère