Résiliation d’un contrat de location meublée : Validité du congé pour vente et obligations du bailleur

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Résiliation d’un contrat de location meublée : Validité du congé pour vente et obligations du bailleur
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Constitution du bail

Par acte sous seing privé en date du 4 octobre 2018, Madame [E] [F] veuve [D] a donné à bail meublé à Monsieur [X] [Z] un studio situé au [Adresse 3], pour une durée d’un an renouvelable tacitement, moyennant un loyer de 1250 euros charges comprises. Madame [E] [F] est l’usufruitière de l’appartement, tandis que les consorts [D] en sont les nus propriétaires.

Congé pour vendre

Le 7 mai 2023, Madame [E] [F] a délivré à Monsieur [X] un congé pour vendre, effectif au 4 octobre 2023. Monsieur [X] étant resté dans les lieux, les consorts [D] ont assigné ce dernier devant le juge des contentieux de la protection pour obtenir la validation du congé, son expulsion, et le paiement d’arriérés de loyers.

Audience et demandes des parties

Lors de l’audience du 2 septembre 2024, les consorts [D] ont actualisé leur créance à 22500 euros pour l’arriéré de loyers et ont demandé 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Monsieur [X] a contesté les demandes et a sollicité la requalification du bail en bail non meublé, ainsi que des indemnités pour préjudice.

Qualification du bail

Le juge a examiné la qualification du bail, notant que le logement était meublé conformément aux exigences légales. L’inventaire fourni prouve la présence d’équipements conformes, et le bail ne sera donc pas requalifié en bail non meublé.

Validité du congé pour vendre

Le congé pour vendre a été jugé valide, ayant été délivré dans les délais légaux et avec un motif justifié. Le bail a été résilié le 4 octobre 2023, laissant Monsieur [X] occupant sans droit ni titre.

Demande de paiement d’arriérés locatifs

Monsieur [X] a été condamné à payer 22500 euros d’arriérés de loyers, avec intérêts, et à verser une indemnité mensuelle d’occupation jusqu’à la libération des lieux.

Obligation de délivrance du bailleur

Le juge a constaté un manquement à l’obligation de délivrance du bailleur, en raison de problèmes d’humidité dans l’appartement. Monsieur [X] a été indemnisé pour le préjudice subi, s’élevant à 4500 euros.

Injonction de travaux et expertise

Les demandes de Monsieur [X] concernant des travaux et une expertise ont été rejetées, car il n’avait plus de titre d’occupation depuis la résiliation du bail.

Décision finale

Monsieur [X] a été condamné à payer 18000 euros après compensation, ainsi qu’une indemnité mensuelle d’occupation. Chaque partie conserve la charge de ses dépens, et la décision est exécutoire de plein droit.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

28 octobre 2024
Tribunal judiciaire de Paris
RG n°
24/04943
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :

Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Maître Mohamed NAIT KACI
Maître Rémi Yacine HOUDAIBI

Pôle civil de proximité

PCP JCP fond

N° RG 24/04943 – N° Portalis 352J-W-B7I-C43QC

N° MINUTE :

JUGEMENT
rendu le lundi 28 octobre 2024

DEMANDEURS
-Madame [Y] [D], domiciliée c/o CNK ASSOCIES, [Adresse 1]
-Madame [I] [D], domiciliée c/o CNK ASSOCIES, [Adresse 1]
– Monsieur [W] [D], domicilié c/o CNK Associés, [Adresse 1]
– Madame [E] [F] veuve [D], domiciliée c/o CNK ASSOCIES, [Adresse 1]
tous représentés par Maître Mohamed NAIT KACI de l’AARPI CNK ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #E1763

DÉFENDEUR
Monsieur [X] [Z]
demeurant [Adresse 2]
représenté par Maître Rémi Yacine HOUDAIBI, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Romain BRIEC, Juge des contentieux de la protection
assisté de Coraline LEMARQUIS, Greffière,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 02 septembre 2024

JUGEMENT
contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 28 octobre 2024 par Romain BRIEC, Juge des contentieux de la protection, assisté de Coraline LEMARQUIS, Greffière

Décision du 28 octobre 2024
PCP JCP fond – N° RG 24/04943 – N° Portalis 352J-W-B7I-C43QC

EXPOSE DES MOTIFS

Par acte sous seing privé en date du 4 octobre 2018, à effet le même jour, Madame [E] [F] veuve [D] a donné à bail meublé à Monsieur [X] [Z] un logement de type studio situé au [Adresse 3], pour une durée d’un an renouvelable par tacite reconduction et moyennant un loyer de 1250 euros charges comprises. Madame [E] [F] veuve [D] est l’usufruitière dudit appartement tandis que Madame [Y] [D], Madame [I] [D] et Monsieur [W] [D] en sont les nus propriétaires.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 mai 2023, dont le pli a été signé le 12 mai suivant, Madame [E] [F] veuve [D] a fait délivrer à Monsieur [X] [Z] un congé pour vendre à effet au 4 octobre 2023.

Ce dernier étant demeuré dans les lieux, les consorts [D] ont, par acte de commissaire de justice en date du 2 avril 2024, fait assigner Monsieur [X] [Z] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris aux fins d’obtenir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire :
– la validation du congé pour vente délivré le 7 mai 2023 à titre principal sinon, subsidiairement, le prononcé de la résiliation judiciaire du bail aux torts exclusifs de Monsieur [X] [Z],
– son expulsion et celle de tous les occupants de son chef, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision, avec le concours d’un serrurier et de la force publique si besoin est et avec séquestration des meubles,
– la suppression du délai de deux mois, prévu par les articles L412-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution avant de pouvoir procéder à l’expulsion,
– Sa condamnation à payer à Madame [E] [F] veuve [D] l’arriéré de loyers et d’indemnités d’occupation depuis le mois de mars 2023, soit 15000 euros au jour de l’assignation, ainsi qu’à leur payer une indemnité mensuelle d’occupation égale au montant des loyers et charges dus si le contrat s’était poursuivi jusqu’à la libération définitive des lieux,
– Sa condamnation au paiement de la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles, outre aux dépens.

L’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 2 septembre 2024.

A l’audience, les consorts [D], représentés par leur conseil, ont fait viser des écritures par lesquelles ils ont sollicité le rejet des prétentions en défense et ont maintenu leurs demandes, sauf à actualiser leur créance au titre de l’arriéré de loyers et d’indemnités d’occupation à 22500 euros et à augmenter leur prétention sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile à la somme de 5000 euros.

Monsieur [X] [Z] a été représenté à l’audience utile et a fit viser des conclusions qu’il a développé oralement. Il a sollicité d’obtenir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire :
– Le rejet des prétentions des demandeurs,
– La requalification du bail en bail non meublé et l’annulation en conséquence du congé vente,
– La condamnation solidaire des consorts [D] à lui verser les indemnités de 26250 euros au titre du préjudice de jouissance, 3775,52 euros en remboursement des loyers indûment perçus, 5000 euros en réparation du préjudice moral, 50,61 euros en réparation du préjudice financier, avec compensation des créances réciproques entre les parties,
– Leur condamnation solidaire, à titre principal, à réaliser les travaux nécessaires au rétablissement de la décence du logement, à savoir les travaux d’isolation et de remise en état de la ventilation, sous astreinte de 50 euros par jour de retard pendant 90 jours, passé un délai d’un mois à compter de la signification de la décision, et avec suspension du paiement des loyers le temps de la réalisation desdits travaux, sinon subsidiairement, la désignation d’un expert pour effectuer une expertise qui serait ordonnée pour constater les désordres de l’appartement et fournir tous les éléments techniques utiles afin d’apprécier les éventuels préjudices du locataires et de déterminer le cas échéant le montant de la diminution du loyer.

A l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré au 28 octobre 2024 par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande principale fondée sur le congé pour vendre et ses conséquences

Sur la qualification du bail

En application de l’article 12 du code de procédure civile, le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables. Il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.

Selon l’article 25-4 de la loi du 6 juillet 1989, un logement meublé est un logement décent équipé d’un mobilier en nombre et en qualité suffisants pour permettre au locataire d’y dormir, manger et vivre convenablement au regard des exigences de la vie courante. L’article 25-5 de cette même loi ajoute qu’un inventaire et un état détaillé du mobilier sont établis dans les mêmes formes et en autant d’exemplaires que de parties lors de la remise et de la restitution des clés.

A défaut de tels documents, la preuve par tout moyen est admise (CA Paris, 20 mars 2008 ; CA Aix-en-Provence, 11 janvier 2013).
L’article 2 du décret n°2015-981 du 31 juillet 2015 fixe la liste des éléments de mobilier d’un logement meublé, à savoir ” 1° Literie comprenant couette ou couverture ; 2° Dispositif d’occultation des fenêtres dans les pièces destinées à être utilisées comme chambre à coucher ; 3° Plaques de cuisson ; 4° Four ou four à micro-ondes ; 5° Réfrigérateur et congélateur ou, au minimum, un réfrigérateur doté d’un compartiment permettant de disposer d’une température inférieure ou égale à – 6 °C ; 6° Vaisselle nécessaire à la prise des repas ; 7° Ustensiles de cuisine ; 8° Table et sièges ; 9° Etagères de rangement ; 10° Luminaires ; 11° Matériel d’entretien ménager adapté aux caractéristiques du logement “.
Le juge du fond a la faculté de requalifier le contrat si le logement concerné n’est pas meublé de manière suffisante pour permettre au locataire d’y vivre convenablement sans y apporter ses propres éléments de mobilier (Civ.3e, 18 juillet 2000, loyers et copropriété 2001).

En l’espèce, il sera relevé qu’un inventaire est versé aux débats, signé des parties (pièce n°9 en défense). Toutefois, Monsieur [X] [Z] conteste le caractère meublé du bail dans ses écritures au motif que le logement ne comportait ” aucun élément permettant le couchage ou encore la vaisselle nécessaire à la prise des repas ” (page 8). Or, s’agissant d’une part de la vaisselle, l’inventaire renvoie a de l’électroménager en état ” neuf ” (plaque de cuisson, four micro-ondes, réfrigérateur) et qui va au-delà des exigences du décret du 31 juillet 2015 puisque l’appartement est aussi doté d’un lave-vaisselle, d’un grille-pain et d’une cafetière dont les coûts d’acquisition ont été supportés par les propriétaires. L’appartement dispose en outre d’une ” box Internet FREE “, ce qui est une prestation de confort ne figurant pas non plus dans les dispositions du décret du 31 juillet 2015. Dans ces conditions, le long trait marqué au stylo sur l’inventaire, au niveau des éléments de vaisselle, donne à penser qu’il s’est agi d’indiquer que le logement en est doté, sans pour autant en donner les détails. En ce sens, les cases de l’inventaire correspondant à du mobilier non présent dans l’appartement, sont quant à elles laissées vides (il n’y a pas de trait au stylo) et le contrat de bail lui-même mentionne que le logement est doté ” d’une cuisine équipée ” (page 1). D’autre part, s’agissant de la literie, les consorts [D] produisent des justificatifs de l’achat d’une telle literie en date du 7 avril 2016, dont la livraison est fixée à l’adresse du bien objet du litige. Les demandeurs ne résident quant à eux pas dans cet arrondissement parisien (pièce n°4 en demande) ce qui exclut qu’elle ait pu être achetée pour leurs propres besoins. Il sera par ailleurs observé que Monsieur [X] [Z] n’a effectué aucune observation dans l’inventaire s’agissant d’éléments aussi essentiels et basiques que la vaisselle et la literie (page 4). Il ne communique pas non plus aux débats de facture d’achat d’un lit ni d’élément de vaisselle.
Il ressort de l’ensemble de ces éléments que la preuve est suffisamment rapportée de la présence dans l’appartement pris à bail d’équipements mobilier conformes à l’article 2 du décret n°2015-981 du 31 juillet 2015, en ce compris la vaisselle et la literie. Le bail meublé ne sera en conséquence pas requalifié en bail non meublé.

Sur la validité du congé pour vendre

S’agissant d’un contrat de location meublée, les dispositions de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 s’appliquent et conformément à l’article 25-7 ” le contrat est conclu pour une durée d’au moins un an. Si les parties ne donnent pas congé dans les conditions prévues à l’article 25-8, le contrat parvenu à son terme est reconduit tacitement pour une durée d’un an “.

En l’espèce, le bail a été conclu le 4 octobre 2018 à effet le même jour jusqu’au 4 octobre 2019 et a ensuite été tacitement reconduit, en dernier lieu pour la période du 4 octobre 2022 au 3 octobre 2023.

Conformément aux dispositions de l’article 25-8 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, le bailleur qui ne souhaite pas renouveler le contrat pour vendre le bien doit informer le locataire avec un préavis de trois mois. En outre, le congé rappelle le motif du congé, à savoir la vente du bien loué.

En cas de contestation, le juge peut, même d’office, vérifier la réalité du motif du congé et le respect des obligations prévues au présent article. Il peut notamment déclarer non valide le congé si la non-reconduction du bail n’apparaît pas justifiée par des éléments sérieux et légitimes.

En l’espèce, le congé du bailleur a délivré un congé pour vendre le 7 mai 2023, par courrier recommandé avec accusé de réception dont le pli a été signé par le locataire le 12 mai suivant. Le congé a donc été délivré plus de trois mois avant l’échéance du bail. Le courrier précise le motif du congé, à savoir la vente du bien au prix de 300.000 euros.

Ce congé respecte ainsi les formes et délais légaux requis.

S’agissant de la réalité et de la sincérité du motif du congé pour vendre, les consorts [D] produisent un mandat de vente signé électroniquement le 2 décembre 2023 pour un prix de 325.000 euros dans lequel ils ont renoncé au bénéfice du droit de rétractation (page 8). Ce mandat fait suite à une estimation de la valeur du bien réalisée le 29 novembre 2023 (pièce n°14). La réalité et la sincérité du motif du congé pour vendre sont dès lors établies.

Il convient en conséquence de déclarer le congé valable et le bail s’est donc trouvé résilié par l’effet du congé le 4 octobre 2023. Monsieur [X] [Z] se trouve ainsi occupant sans droit ni titre du local litigieux depuis le 4 octobre 2023 et il convient d’ordonner son expulsion ainsi que l’expulsion de tous occupants de son chef, selon les modalités prévues au dispositif de la présente décision.

Aucune circonstance particulière de l’espèce ne justifiant que le délai de deux mois, prévu par les dispositions des articles L. 412-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution soit réduit ou supprimé, il convient d’indiquer que passé le délai de deux mois suivant la signification du commandement d’avoir à libérer les lieux, il pourra être procédé à cette expulsion, avec le concours de la force publique.

Il n’apparaît pas non plus nécessaire d’assortir l’obligation de quitter les lieux d’une astreinte. En effet, la condamnation au paiement d’une indemnité mensuelle d’occupation (voir ci-après), de nature à réparer le préjudice subi par la bailleresse satisfait déjà l’objectif assigné à l’astreinte en cette matière par l’article L.421-2 du code des procédures civiles d’exécution.

Il sera enfin rappelé que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution, dont l’application relève, en cas de difficulté -laquelle n’est à ce stade que purement hypothétique-, de la compétence du juge de l’exécution et non de la présente juridiction.

Sur la demande en paiement de l’arriéré locatif et de l’indemnité d’occupation

Monsieur [X] [Z] est redevable des loyers impayés jusqu’à la date de résiliation du bail en application des articles 1103 et 1217 du code civil. Par ailleurs, le maintien dans les lieux postérieurement à la date d’expiration du bail constitue une faute civile ouvrant droit à réparation en ce qu’elle cause un préjudice certain pour le propriétaire dont l’occupation indue de son bien l’a privé de sa jouissance. Au-delà de cet aspect indemnitaire, l’indemnité d’occupation, qui est également de nature compensatoire, constitue une dette de jouissance correspondant à la valeur équitable des locaux.

En l’espèce, les consorts [D] invoquent dans leurs dernières écritures et à l’audience du 2 septembre 2024 que Madame [E] [F] veuve [D] est créancière de la somme de 22500 euros (1250×18) d’arriéré de loyers, charges et indemnités d’occupation pour la période du 1er mars 2023 au 2 septembre 2024, mensualité de septembre 2024 incluse. Ils ajoutent qu’aucun règlement, même partiel, n’est intervenu depuis 18 mois, ce qu’un procès-verbal de saisi-attribution du 14 mars 2024 dressé par commissaire de justice tend à corroborer (pièce en défense n°11).

Monsieur [X] [Z] n’en conteste à l’audience utile ni le principe ni le montant. Il sera donc condamné au paiement de cette somme de 22500 euros, mensualité de septembre 2024 incluse, avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation.

Monsieur [X] [Z] sera aussi condamné au paiement d’une indemnité mensuelle d’occupation pour la période courant du 1er octobre 2024 à la date de la libération effective et définitive des lieux, égale au montant des loyers et charges qui auraient été dus si le bail s’était poursuivi.

Sur le manquement à l’obligation de délivrance du bailleur

Aux termes de l’article 6 de la loi du 6 juillet 1989, applicable aux locations meublées conformément aux dispositions de l’article 25-3, le bailleur est tenu de mettre à disposition un logement et ses équipements dans leurs consistance et aux conditions prévues au contrat et de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé, exempt de toute infestation d’espèces nuisibles et parasites, répondant à un critère de performance énergétique minimale et doté des éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation.

Le décret n°2202-120 du 30 janvier 2002 vient préciser qu’un logement décent doit assurer le clos et le couvert et que le gros œuvre du logement et de ses accès doit être en bon état d’entretien et de solidité et protéger les locaux contre les eaux de ruissellement et les remontées d’eau.

Ce même décret indique également que le logement doit permettre une aération suffisante et que les dispositifs d’ouverture et les éventuels dispositifs de ventilation des logements soient en bon état et permettent un renouvellement de l’air et une évacuation de l’humidité adaptés aux besoins d’une occupation normale du logement et au fonctionnement des équipements. Une ventilation insuffisante peut générer une humidité importante et engager la responsabilité du propriétaire (CA Versailles, 1re ch., 2e sect., 30 nov. 2010, n° 09/09539 ; CA Aix-en-Provence, 11e ch. B, 7 mai 2013, n° 2013/240).

Le bailleur est également obligé de délivrer au locataire le logement en bon état d’usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement.

Ces obligations forment plus généralement l’obligation de délivrance du bail. De telles obligations sont des obligations de résultat et ne nécessitent pas de rapporter la preuve d’une faute du bailleur ou d’un défaut de diligences.

En cas de méconnaissance par le bailleur de son obligation de délivrance, le locataire dispose de l’action en exécution des travaux avec demande d’indemnisation pour les préjudices subis tels que la restriction d’usage ou le préjudice d’agrément.

En matière d’indécence en particulier, l’article 20-1 de la loi du 6 juillet 1989 prévoit deux sanctions. La première consiste pour le locataire à demander au bailleur ou à exiger judiciairement de lui une mise en conformité des locaux lorsque le logement loué ne satisfait pas aux normes de décence fixées par les textes. La deuxième lui reconnaît le droit, à défaut de mise en conformité, d’obtenir du juge une réduction du loyer. En revanche, le locataire n’a pas d’autres droits, particulièrement celui de répondre à l’indécence par une suspension du paiement des loyers. L’exception d’inexécution n’est en effet pas plus admise sauf en cas d’impossibilité totale d’habiter les lieux.

En l’espèce, il ressort du constat de commissaire de justice du 7 janvier 2023 diligenté par Monsieur [X] [Z] que plusieurs murs de l’appartement ” présentent des traces intenses d’humidité, se matérialisant par d’importantes traces noirâtres de moisissures sur de très larges zones ” (page 2). Il est noté ” des traces d’infiltration sur les embrasures des fenêtres ” et ” la présence de condensation sur les vitrages ” (page 2). Le rapport en recherche de fuite visuelle du 18 janvier 2023, à l’initiative des consorts [D], confirme la présence de ” tâches d’humidité noires dans toutes les pièces “, en raison ” d’infiltration provenant de la façade extérieure “. Toujours sur l’origine des désordres, le service de salubrité de la Ville de [Localité 4] indique quant à lui dans un courrier du 4 juin 2024 qu’ils proviennent de ” la ventilation autoréglables (qui) ne fonctionne pas en permanence “.

En ces conditions le manquement objectif à l’obligation de délivrance du bailleur sera retenu et il sera fait droit à la demande de réparation du préjudice en résultant pour la période du 7 janvier 2023 correspondant à la date du constat au jour de la résiliation du bail le 4 octobre suivant.

Celui-ci sera toutefois revu à de plus justes proportions. Monsieur [X] [Z] justifie que le trouble de jouissance subi a impacté son état de santé et son moral, comme le met en exergue un certificat médical du 18 janvier 2023 selon lequel les désordres de l’appartement ont ” aggravé un état dépressif réactionnel ” et généré ” des difficultés respiratoires “. Pour tenter de réduire les effets néfastes de l’humidité du logement, Monsieur [X] [Z] a acquis en outre un absorbeur d’humidité pour un montant de 50,61 euros TTC, selon facture produite aux débats.

S’agissant du moyen invoqué par les consorts [D] selon lesquels Monsieur [X] [Z] aurait refusé l’accès au logement à un technicien diligenté par eux, comme il ressort d’un courrier d’avocat du 10 février 2023, celui-ci ne sera pas retenu puisque Monsieur [X] [Z] n’a pas exclu de laisser des travaux se réaliser dans un courrier en réponse du 15 février suivant. Pas plus, il n’est établi que le locataire aurait refusé l’accès à un architecte en mars 2023.

En revanche, Monsieur [X] [Z] ne saurait prétendre à restitution du loyer puisqu’il ne démontre pas que le logement était impropre à l’habitation. Il est d’ailleurs constant qu’il s’est maintenu dans les lieux au-delà de la résiliation du bail.

En conséquence, il sera alloué à Monsieur [X] [Z] la somme globale de 4500 euros, correspondant à une juste réparation des préjudices de jouissance, du préjudice moral et du préjudice matériel sur la période considérée.

Sur la demande en injonction de travaux et d’expertise

Aux termes de l’article 30 du code de procédure civile, l’action est le droit, pour l’auteur d’une prétention, d’être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou mal fondée. L’article 31 du même code ajoute que l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

En l’espèce, Monsieur [X] [Z] étant dépourvu de tout titre d’occupation depuis le 4 octobre 2023 sur l’appartement objet du litige, il ne présente aucun intérêt à agir en injonction de travaux et en expertise judiciaire.

Ses demandes seront en conséquence rejetées.

Au final, en application des articles 1289 et suivants du code civil, par compensation, Monsieur [X] [Z] sera condamné au paiement de 18000 euros (22500-4500) d’arriéré de loyers, charges et indemnités d’occupation, mensualité de septembre 2024 incluse, avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation, outre la condamnation déjà prononcée en paiement d’une indemnité mensuelle d’occupation pour la période courant du 1er octobre 2024 à la date de la libération effective et définitive des lieux, égale au montant des loyers et charges qui auraient été dus si le bail s’était poursuivi.

Sur les demandes accessoires

Chaque partie conservera la charge de ses dépens, en application de l’article 696 du code de procédure civile.

Il n’y pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément à l’article 514 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Le juge des contentieux de la protection statuant publiquement et en premier ressort par jugement contradictoire mis à disposition au greffe,

CONSTATE que les conditions de délivrance à Monsieur [X] [Z] d’un congé pour vendre relatif au bail conclu le 4 octobre 2018 et concernant l’appartement à usage d’habitation de type studio situé au [Adresse 3], sont réunies au 4 octobre 2023 ;

ORDONNE en conséquence à Monsieur [X] [Z] de libérer les lieux et de restituer les clés dans le délai de quinze jours à compter de la signification de la présente décision ;

DIT par ailleurs qu’à défaut pour Monsieur [X] [Z] d’avoir volontairement libéré les lieux, Madame [E] [F] veuve [D], Madame [Y] [D], Madame [I] [D] et Monsieur [W] [D] pourront, deux mois après la signification d’un commandement de quitter les lieux, faire procéder à son expulsion ainsi qu’à celle de tous occupants de leur chef, conformément à l’article L.412-1 du code des procédures civiles d’exécution, y compris le cas échéant avec le concours d’un serrurier et de la force publique ;

DIT n’y avoir lieu à ordonner l’enlèvement, le transport et la séquestration des meubles éventuellement laissés sur place et rappelle que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution ;

CONDAMNE Monsieur [X] [Z], après compensation, à payer à Madame [E] [F] veuve [D] la somme de 18000 euros d’arriéré de loyers, charges et indemnités d’occupation, mensualité de septembre 2024 incluse, avec intérêts au taux légal à compter du 2 avril 2024 ;

CONDAMNE Monsieur [X] [Z] à verser à Madame [E] [F] veuve [D] une indemnité mensuelle d’occupation pour la période courant du 1er octobre 2024 à la date de la libération effective et définitive des lieux, égale au montant des loyers et charges qui auraient été dus si le bail s’était poursuivi ;

REJETTE le surplus des demandes ;

DIT que chaque partie conservera la charge de ses dépens ;

RAPPELLE que la présente décision est de plein droit exécutoire de plein droit.

La greffière, Le juge des contentieux de la protection

Décision du 28 octobre 2024
PCP JCP fond – N° RG 24/04943 – N° Portalis 352J-W-B7I-C43QC


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