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Les sociétés intimées s’estimant victime d’une décision discriminatoire de la part de leur cocontractant, la société Infosanté, a agi sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, recherchant avant tout procès des éléments de nature à établir des manquements contractuels et des fautes qui auraient été commises par l’appelante.
L’article L 153-1 du code de commerce dispose que lorsque, à l’occasion d’une instance civile ou commerciale ayant pour objet une mesure d’instruction sollicitée avant tout procès au fond ou à l’occasion d’une instance au fond, il est fait état ou est demandée la communication ou la production d’une pièce dont il est allégué par une partie ou un tiers ou dont il a été jugé qu’elle est de nature à porter atteinte à un secret des affaires, le juge peut, d’office ou à la demande d’une partie ou d’un tiers, si la protection de ce secret ne peut être assurée autrement et sans préjudice de l’exercice des droits de la défense :
1° Prendre connaissance seul de cette pièce et, s’il l’estime nécessaire, ordonner une expertise et solliciter l’avis, pour chacune des parties, d’une personne habilitée à l’assister ou la représenter, afin de décider s’il y a lieu d’appliquer des mesures de protection prévues au présent article ;
2° Décider de limiter la communication ou la production de cette pièce à certains de ses éléments, en ordonner la communication ou la production sous une forme de résumé ou en restreindre l’accès, pour chacune des parties, au plus à une personne physique et une personne habilitée à l’assister ou la représenter ;
3° Décider que les débats auront lieu et que la décision sera prononcée en chambre du conseil ;
4° Adapter la motivation de sa décision et les modalités de publicité de celle-ci aux nécessités de la protection du secret des affaires.
L’article R 153-3 de ce code prévoit qu’à peine d’irrecevabilité, la partie ou le tiers à la procédure qui invoque la protection du secret des affaires pour une pièce dont la communication ou la production est demandée remet au juge, dans le délai fixé par celui-ci :
1° La version confidentielle intégrale de cette pièce ;
2° Une version non confidentielle ou un résumé ;
3° Un mémoire précisant, pour chaque information ou partie de la pièce en cause, les motifs qui lui confèrent le caractère d’un secret des affaires.
Le juge peut entendre séparément le détenteur de la pièce, assisté ou représenté par toute personne habilitée, et la partie qui demande la communication ou la production de cette pièce.
En l’occurrence, il est constant que la société appelante a établi et transmis à la cour d’appel un mémoire confidentiel qui n’a pas été communiqué aux sociétés intimées. L’appelante a donc remis, à l’attention de la seule cour, les pièces et le mémoire visés à l’article R.153-3 du code de commerce. Ce faisant, alors qu’elle invoque la protection du secret des affaires, le secret médical et le secret professionnel, elles se sont conformées aux dispositions de l’article R 153-3 du code de commerce qui ne prévoit pas la remise à la partie adverse du mémoire confidentiel établi à l’attention de la cour d’appel.
Force est d’ailleurs de constater que la finalité de ces dispositions exclut à ce stade le débat contradictoire, la cour devant statuer en fonction des seules observations aux termes du mémoire confidentiel de la partie qui invoque le secret des affaires, et le droit pour les parties de prendre connaissance des pièces remises devant être mis en balance avec le droit des entreprises à protéger le secret de leurs affaires (Com., 19 janvier 2016, no 14-21.671). La société Infosanté s’était donc conformée aux dispositions citées.
Seules peuvent être retenues par la cour d’appel les catégories définies par l’ordonnance du 27 novembre 2020, confirmée par arrêt du 8 septembre 2021, à savoir :
Sont en litige en revanche les pièces de catégorie B et de catégorie C.
De manière générale, n’est pas prohibé par principe, le recours à une mesure d’instruction destinée à obtenir des éléments normalement couverts par le secret des correspondances ou le secret des affaires.
Il appartient au juge de faire la balance entre des droits contraires mais également protégés, le droit de rapporter la preuve d’un fait essentiel pour le succès de ses prétentions, d’une part, celui de protéger notamment le secret des affaires, d’autre part, de sorte qu’il existe bien un « droit à la preuve » permettant l’accès à des informations confidentielles. Constitue ainsi une atteinte au principe de l’égalité des armes résultant du droit à un procès équitable garanti par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme le fait d’interdire à une partie de faire la preuve d’un élément de fait essentiel pour le succès de ses prétentions. Aussi, le juge doit rechercher, in concreto, si la mesure d’instruction sollicitée concilie le droit à la preuve et celui à la protection du secret.
Pour rappel, l’article L 151-1 du code de commerce dispose qu’est protégée au titre du secret des affaires toute information répondant aux critères suivants :
1° Elle n’est pas, en elle-même ou dans la configuration et l’assemblage exacts de ses éléments, généralement connue ou aisément accessible pour les personnes familières de ce type d’informations en raison de leur secteur d’activité ;
2° Elle revêt une valeur commerciale, effective ou potentielle, du fait de son caractère secret ;
3° Elle fait l’objet de la part de son détenteur légitime de mesures de protection raisonnables, compte tenu des circonstances, pour en conserver le caractère secret.
Si le secret des affaires ne constitue pas en lui-même un obstacle à l’application des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile, c’est à la condition que le juge constate que les mesures procèdent d’un motif légitime, sont nécessaires à la protection des droits des parties qui les ont sollicitées et ne portent pas une atteinte disproportionnée aux droits de l’autre partie au regard de l’objectif poursuivi.
L’article R 153- 3, 3° du code de commerce prévoit que la partie ou le tiers à la procédure qui invoque la protection du secret des affaires pour une pièce dont la communication ou la production est demandée remet au juge un mémoire précisant, pour chaque information ou partie de la pièce en cause, les motifs qui lui confèrent le caractère d’un secret des affaires.
L’article R 153-6 du code de commerce indique que le juge ordonne la communication ou la production de la pièce dans sa version intégrale lorsque celle-ci est nécessaire à la solution du litige, alors même qu’elle est susceptible de porter atteinte à un secret des affaires.
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