Protection de l’identité visuelle d’une émission

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Protection de l’identité visuelle d’une émission
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L’identité visuelle d’une émission n’est protégée que si elle originale.


Affaire Pendant ce Temps-Là

La société Pendant ce Temps-Là évincée de la production de l’émission “complément d’enquête” a fait valoir sans succès que France Télévisons s’était  rendue coupable de parasitisme en conservant le plateau de l’émission avec ses fauteuils rouges emblématiques.

La société a agit sur le fondement de l’article 1240 nouveau du code civil en recherchant la responsabilité délictuelle de la société France Télévisions pour parasitisme, lui reprochant d’avoir conservé le même plateau après la rupture.

Moyens de défense de France Télévisions

La société France Télévisions conteste d’une part le fait que M. [S] soit l’auteur du format de « Complément d’Enquête » puisque le magazine a été conçu par M. [B] [X] et d’autre part que la « reprise » des fauteuils rouges dans les émissions à compter de septembre 2019 caractérise un parasitisme fautif de France Télévisions à son préjudice comme la société PDTL le soutient.

Elle considère que M. [S] ne justifie d’aucun travail de conception, l’utilisation des deux fauteuils rouges pour les interviews étant le fruit du hasard. Par ailleurs les fauteuils rouges se retrouvent dans un grand nombre d’émissions d’interviews.

Ce que dit le contrat de production exécutive

L’article 8 « PROPRIETE » des conventions de production exécutive « Complément d’enquête » contient les dispositions suivantes

« 8.1 PROPRIETE DU CONCEPT

Le concept de la série, est la propriété exclusive de Francetélévisions.

(…)

8.2 : PROPRIETE DES ELEMENTS CORPORELS ET INCORPORELS DE L’EMISSION (HORS CONCEPT)

Sous réserve des dispositions de l’article 8.1 ci-dessus, au fur et à mesure de la production de l’émission, tous les éléments corporels et incorporels de celle-ci ainsi que les droits y attachés seront la propriété de Francetélévisions.

(…) »

Il est notable que le logo de l’émission a changé, avec la silhouette du présentateur debout et une ligne verticale perpendiculaire à une ligne horizontale de 2001 à 2012, puis deux fauteuils « conversation » rouges disposés ainsi en S de 2012 à 2017 et enfin un logo stylisé avec des lignes courbes verticales opposées de couleur rouge.

L’origine de l’utilisation des deux fauteuils rouges, revendiquée par M. [S], est pourtant bien retracée par la société France Télévisions qui produit un extrait du Complément d’Enquête en hommage à [B] [X] contenant un passage dans lequel M. [U] [S] relate la genèse de son idée en ces termes :

« on était en discussion/réflexion avec la Direction de France 2. J’étais dans les couloirs de la Direction. Il y avait une vingtaine de fauteuils rouges disséminés comme çà dans les couloirs. On est parti avec ces fauteuils rouges qu’on a pris et puis on les a descendus dans le studio : et puis voilà, et on a démarré avec çà… »

La société a versé aux débats des visuels de nombreuses émissions sur les chaînes KTO, France 3 et Equidia notamment, contenant la même disposition de fauteuils rouges pour des interviews.

Aucune faute de FTV

Il en ressort qu’il ne peut être reproché à la société France Télévisions d’avoir poursuivi l’utilisation d’un plateau de télévision identique à celui en place lors de sa relation avec la société PDTL, M. [S] ne démontrant pas être la source d’une création particulière, d’un savoir-faire unique dont l’intimée aurait tiré profit.

Définition du parasitisme

Pour rappel, le parasitisme se définit comme l’ensemble des comportements par lesquels un agent économique s’immisce dans le sillage d’un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire.


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 11

ARRET DU 16 JUIN 2023

(n° , 13 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/19914 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CEVO4

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Septembre 2021 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 2020008202

APPELANTS

Monsieur [U] [S]

[Adresse 5]

[Localité 4]

né le 05 Octobre 1956 à [Localité 6]

SAS PENDANT CE TEMPS LA

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris sous le numéro 398 065 078

représentés par Me Frédéric LALLEMENT de la SELARL BDL Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

Assistée de Me Frédéric WIZMANE, avocat au barreau de Paris

INTIMEE

S.A. FRANCE TELEVISIONS

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Localité 3]

immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris sous le numéro 432 766 947

représentée par Me Delphine LEFAUCHEUX de la SELARL KOHN ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0233

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Mme Marie-Sophie L’ELEU DE LA SIMONE, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Denis ARDISSON, Président de chambre

Mme Marie-Sophie L’ELEU DE LA SIMONE, Conseillère,

M. Frédéric ARBELLOT, Conseiller désigné pour la conseillère empêchée afin de compléter la formation collégiale de la chambre,

Qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : M.Damien GOVINDARETTY

ARRÊT :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

-signé, en vertu de l’article 456 du code de procédure civile, par Mme Marie-Sophie L’ELEU D E LA SIMONE, conseillère pour le Président empêché, et par M.Damien GOVINDARETTY, greffiern présent lors de la mise à disposition.

Pendant près de dix-huit ans, la société France Télévisions a confié à la société Pendant ce Temps-Là la production exécutive de l’émission et à son gérant, M. [U] [S], la réalisation de l’ensemble des émissions « Complément d’enquête », magazines français de télévision d’investigation diffusés depuis 2001.

L’interview dans des fauteuils rouges est devenue caractéristique de cette émission.

La société France Télévisions lui a également confié la production exécutive de l’émission « Envoyé Spécial » pour la saison 2016/2017.

Par lettre recommandée du 2 mai 2018, la société France Télévisions a confié à la société Pendant ce Temps-Là l’enregistrement des plateaux de l’émission « Complément d’enquête » pour la saison 2018-2019 comprenant environ 26 émissions d’une durée de 70 minutes et a informé cette dernière de la cessation de leur relation à la fin de la saison 2018/2019. La société PDTL et M. [S] ont reproché par lettre recommandée avec accusé de réception du 6 novembre 2019 de leur conseil une rupture brutale de la relation commerciale établie et des agissements de parasitisme. Par lettre recommandée avec avis de réception du 6 décembre 2019 la société France Télévisions a contesté ces griefs.

Suivant exploit du 31 janvier 2020, M. [U] [S] et la société Pendant ce Temps-là ont fait assigner la société France Télévisions devant le tribunal de commerce de Paris afin d’obtenir réparation du préjudice qu’ils estimaient avoir subi du fait de la rupture brutale de la relation commerciale établie.

Par jugement du 27 septembre 2021, le tribunal de commerce de Paris a :

débouté la société Pendant ce Temps-Là de sa demande au titre d’une rupture brutale de relation commerciale établie,

débouté la société Pendant ce Temps-Là de ses demandes au titre du parasitisme,

débouté M. [U] [S] de ses demandes pour préjudice d’image et préjudice moral,

condamné, in solidum, la société Pendant ce Temps là et M. [U] [S] à payer à la société France Télévisions la somme de 6.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

débouté les parties de leurs demandes autres plus amples ou contraires,

condamné, in solidum, la société Pendant ce Temps là et M. [U] [S] aux dépens.

La société Pendant ce Temps-Là et M. [U] [S] ont formé appel du jugement par déclaration du 17 novembre 2021 enregistrée le 19 novembre 2021.

Suivant leurs dernières conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 14 décembre 2022, la société Pendant ce Temps-Là et M. [U] [S] demandent à la cour :

de réformer le jugement rendu par la 13ème chambre du tribunal de commerce de Paris rendu le 27 septembre 2021, RG 202008202 en ce qu’il a :

– débouté la société Pendant ce Temps-Là de sa demande au titre d’une rupture brutale de relation commerciale établie,

– débouté la société Pendant ce Temps-Là de ses demandes au titre du parasitisme,

– débouté M. [U] [S] de ses demandes pour préjudice d’image et préjudice moral,

– condamné, in solidum, la société Pendant ce Temps-Là et M. [U] [S] à payer à la SA France Télévisions la somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

– débouté la société Pendant ce Temps-Là et M. [U] [S] de ses demandes autres plus amples ou contraires

– condamné, in solidum, la société Pendant ce Temps-Là et M. [U] [S] aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 95,13 euros dont 15,64 euros de TVA.

Statuant à nouveau,

I. Sur la rupture brutale de la relation commerciale établie

Vu l’ancien article L. 442-6 I, 5° ancien du code de commerce,

de juger recevable et bien fondée l’action de la société Pendant ce Temps-Là ;

de juger que les relations commerciales ininterrompues entre la société France Télévisions et la société Pendant ce Temps-Là depuis 2001, soit depuis 18 ans, étaient établies ;

de juger que la société France Télévisions a rompu de manière brutale les relations commerciales établies avec la société Pendant ce Temps-Là en laissant un préavis de 12 mois en raison :

i. des dix-huit années de relations commerciales ;

ii. de la situation de très forte dépendance économique de la société Pendant ce Temps-Là à l’égard de France Télévisions (à hauteur de 78,61% du chiffres d’affaires réalisé sur les cinq derniers exercices), ce qui rend d’autant plus difficile et longue la reconversion de la société Pendant ce Temps-Là ce que confirme les résultats très faibles de la société Pendant ce Temps-Là postérieurement à la rupture brutale (C.A. sur la saison 2019/2020 de 69.030 euros HT, C.A. de 44.800 euros HT en 2020 (Pièces n°11 et 21)

iii. de la saisonnalité de l’activité ;

iv. du fait que l’activité de la société Pendant ce Temps-Là était, depuis dix-huit ans, en très grande partie consacrée à la production de l’émission « Complément d’enquête » et « Envoyé Spécial » et ne pouvait être diversifiée par d’autres contrats conclus avec d’autres chaînes de télévision puisqu’elle travaillait quasiment à temps plein pour France Télévisions  ;

v. du caractère « intuitu personae » des conventions qui étaient exécutées par le gérant de la société Pendant ce Temps-Là, M. [U] [S] en tant qu’auteur réalisateur : l’article 6 de la convention de productions mentionne expressément que le choix du réalisateur est une des « conditions déterminantes » de la conclusion de la convention (Pièces n°4-1 à 4-4).

vi. du fait que l’identité de la société Pendant ce Temps-Là qui est très liée à celle de France Télévisions (service public) au regard des émissions produites  ;

vii. du marché très restreint du magazine d’investigation ;

de juger que la société France Télévisions aurait dû respecter un préavis de 28 mois pour mettre un terme à ses relations commerciales établies avec la société Pendant ce Temps-Là ;

de condamner la société France Télévisions au paiement de la somme de 960.548 euros correspondant à la marge brute qu’aurait réalisée la société Pendant ce Temps-Là sur une période de 16 mois établie en prenant référence aux exercices précédant la rupture brutale ;

À titre subsidiaire,

de condamner la société France Télévisions au paiement de la somme de 919 855,22 euros correspondant à la marge brute qu’aurait réalisée la société Pendant ce Temps-Là sur une période de 16 mois établie en prenant référence aux exercices précédant la rupture brutale ;

À titre très subsidiaire :

Vu l’article 4 du code civil, et l’arrêt Cass. Civ. 3e, 5 nov. 2020, n°19-22724,

de condamner la société France Télévisions au paiement d’une somme de 450.000 euros à titre de provision en réparation de l’insuffisance de la durée du préavis à la suite de la rupture brutale des relations commerciales établies ;

de condamner la société France Télévisions au paiement d’une somme de 15.000 euros à titre de provision ad litem ;

de commettre tel expert judiciaire près la Cour d’appel de Paris qu’il plaira au Tribunal (Catégorie D01.01 exploitation de toutes données chiffrées) avec pour mission de :

o Se faire remettre l’ensemble des documents comptables et financiers de la société Pendant ce Temps-Là depuis 2016 ;

o Déterminer le chiffre d’affaires réalisé sur les émissions « Complément d’enquête » et « Envoyé spécial » ;

o Déterminer le pourcentage de la part du chiffre d’affaires réalisé par les émissions « Complément d’enquête » et « Envoyé spécial » par rapport au chiffre d’affaires global réalisé par la société Pendant ce Temps-Là.

o Déterminer le taux de marge brut de la société Pendant ce Temps-Là sur les émissions « Complément d’enquête » et « Envoyé spécial » par saison pour la période de septembre 2016 à juin 2019

o Déterminer le chiffre d’affaires réalisé par la société Pendant ce Temps-Là depuis la fin de la relation commerciale

o Évaluer le préjudice subi par la société Pendant ce Temps-Là lié à la seule insuffisance du préavis

o De manière générale, faire toute constatation et observation utile à la manifestation de la vérité,

o Entendre tous sachants qu’il estimera utile,

o Répondre aux dires des parties ;

o Dire que l’expert, en concertation avec les parties, définira un calendrier prévisionnel de ses opérations à l’issue de la première réunion d’expertise et qu’il actualisera ce calendrier en tant que de besoin notamment en fixant aux parties un délai pour procéder aux extensions de mission nécessaires ;

o Dire que l’expert pourra, dans le cadre de sa mission, se faire assister ou adjoindre un spécialiste de son choix dans un domaine de compétence distinct du sien ainsi qu’il est dit à l’article 278 du code de procédure civile ;

o Dire que l’expert effectuera sa mission dans le respect du principe du contradictoire et prendra en compte, dans son avis, conformément aux dispositions de l’article 276 du code de procédure civile, les observations qui lui seront éventuellement faites ;

o Dire que l’expert préalablement au dépôt de son rapport, adressera aux parties un document de synthèse présentant ses conclusions provisoires et destiné à provoquer leurs observations ;

o Dire que l’expert devra fixer la date limite de dépôt des observations qui lui seront adressées ;

o Dire que l’expert devra déposer son rapport au greffe du Tribunal de commerce de Paris dans un délai de six mois de l’avis de consignation qui lui sera adressé par le greffe ;

o Dire qu’en cas de difficultés dans l’exécution de sa mission, l’expert pourra en référer au juge chargé du contrôle de l’exécution de la mesure d’instruction ;

o Dire qu’en cas d’empêchement, l’expert sera remplacé par ordonnance rendue sur requête ;

o Fixer la provision allouée à l’expert, laquelle devra être consignée par la société Pendant ce Temps-Là dans un délai d’un mois à compter du prononcé du jugement à intervenir.

II. Sur les actes de parasitisme

Vu le nouvel article 1240 du code civil,

Vu l’article 1382-2 du code civil,

de juger que les termes des conclusions de la Société France Télévisions « « Dès lors, la cessation de sa collaboration à cette émission « Complément d’enquête » n’a en aucun cas pu induire le moindre effet dans la perception du public » constituent un aveu judiciaire ;

de juger que France Télévisions a commis des actes de parasitisme en reprenant l’ensemble de l’identité et du format créés par M. [U] [S] ès qualités de représentant de la société Pendant ce Temps-Là et auteur -réalisateur : scénographie des fauteuils rouges (qui sont la signature de de Complément d’Enquête pour les plateaux (« être là où l’action se passe »), un générique spécifique pour chaque thème (Pièces n°17 à 18-1).

de condamner la société France Télévisions à payer à la société Pendant ce Temps-Là la somme de 100.000 euros au titre du parasitisme ;

de condamner la société France Télévisions à payer à la société Pendant ce Temps-Là au paiement de la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice d’image et de notoriété subi ;

de condamner la société France Télévisions à payer à la société Pendant ce Temps-Là au paiement de la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi ;

III. Sur les préjudices personnels de M. [U] [S]

de condamner la société France Télévisions à payer à M. [U] [S] la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice professionnel subi et à la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi ;

IV. En tout état de cause

de condamner la société France Télévisions à payer à la société Pendant ce Temps-Là la somme de 10.000 euros et à M. [S] la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

de condamner la société France Télévisions aux entiers dépens de première instance et d’appel ;

de débouter la société France Télévisions de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions.

Suivant ses dernières conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 13 décembre 2022, la société France Télévisions demande à la cour :

Vu l’article L442-6 I 5° du code de commerce

Vu l’article 1240 du code civil,

Vu l’article 514 du code de procédure civile

de confirmer le jugement rendu le 27 septembre 2021 en toutes ses dispositions,

Et à ce titre,

S’agissant des demandes sur le fondement de l’article L442-6 I 5° du code de commerce

de dire et juger qu’il n’y a pas eu de brusque rupture de relations commerciales établies, en raison du préavis de 16 mois laissé à la société Pendant ce Temps-Là, qui est largement suffisant eu égard à la nature de ses prestations et relations contractuelle avec France Télévisions, et eu égard également aux usages dans le secteur de l’audiovisuel ;

de dire et juger infondées les demandes de la Société Pendant ce Temps-Là, sur le fondement de la rupture de relations commerciales établies, tant en leur principe qu’en leur quantum ;

Et en conséquence,

de débouter la Société Pendant ce Temps-Là, de toutes ses demandes sur le fondement de l’article L442-6 I 5° du Code de commerce ;

S’agissant des demandes sur le fondement du parasitisme allégué

de dire et juger qu’aucun parasitisme ne peut être imputable à France Télévisions,

En conséquence

de débouter les appelants de leurs demandes indemnitaires à l’encontre de France Télévisions au titre du parasitisme allégué,

S’agissant des demandes de Monsieur [U] [S] au titre d’un préjudice personnel :

de dire et juger totalement infondé le préjudice professionnel et moral invoqué par Monsieur [U] [S], en lien avec la rupture brutale de relation commerciale alléguée par la société Pendant ce Temps-Là ;

En conséquence,

de débouter Monsieur [U] [S] de toutes ses demandes indemnitaires ;

En tout état de cause,

de condamner in solidum la Société Pendant ce Temps-Là et Monsieur [U] [S] à payer à la Société France Télévisions la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

de les condamner in solidum aux entiers dépens.

*

La clôture a été prononcée suivant ordonnance en date du 15 décembre 2022.

SUR CE, LA COUR,

Sur demande au titre de la rupture brutale d’une relation commerciale établie

La société Pendant ce Temps-Là et M. [S] revendiquent le respect d’un préavis de vingt-huit mois. Ils se prévalent de la dépendance économique de la société Pendant ce Temps-Là dont l’activité ne pouvait être diversifiée par d’autres contrats conclus avec d’autres chaînes au motif qu’elle travaillait quasiment à plein temps pour France Télévisions. Elle soutient que son chiffre d’affaires s’est effondré postérieurement à la rupture.

La société France Télévisions conteste le caractère « établi » de la relation commerciale en l’absence de stabilité. Elle soutient qu’elle ne pouvait s’attendre légitimement à la poursuite de celles-ci, à tout le moins s’agissant de l’activité liée à l’émission « Envoyé Spécial ». Elle fait valoir que le préavis de seize mois était raisonnable et que la société Pendant ce Temps-Là n’est pas fondée à se prévaloir d’une dépendance économique, ayant contribué concomitamment à de nombreux programmes pour plusieurs chaînes. L’intimée souligne en effet que la nature essentiellement technique de la prestation (enregistrement des plateaux ‘ séquences avec un invité ‘ et postproduction du programme), et le format de « Complément d’Enquête » (3 émissions par mois) permettaient tout à fait ces collaborations multiples et une diversification plus aisée. La société France Télévisions conteste également, au moins depuis janvier 2016, l’intuitu personae dont se prévaut la société Pendant ce Temps-Là s’agissant de l’exécution des commandes par son gérant en tant que réalisateur. En outre la société Pendant ce Temps-Là n’était liée à France Télévisions par aucune clause d’exclusivité. Enfin selon l’intimée, la société Pendant ce Temps-Là a bénéficié du temps nécessaire puisqu’elle a pu retrouver des partenaires commerciaux avant que n’intervienne la pandémie.

Aux termes de l’article L. 442-6 I 5° du code de commerce dans sa version applicable en la cause, antérieure à l’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 :

« I. – Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers :

5° De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. (‘) Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d’inexécution par l’autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure. (…) ; ».

Le champ d’application de ce texte est celui des relations commerciales établies, c’est-à-dire les cas où la relation commerciale entre les parties revêtait avant la rupture un caractère suivi, stable et habituel et où la partie victime de l’interruption pouvait raisonnablement anticiper pour l’avenir une certaine continuité du flux d’affaire avec son partenaire commercial.

Le texte précité vise à sanctionner, non la rupture elle-même, mais sa brutalité caractérisée par l’absence de préavis écrit ou l’insuffisance de préavis, lequel doit s’entendre du temps nécessaire à l’entreprise délaissée pour se réorganiser en fonction de la durée, de la nature et des spécificités de la relation commerciale établie, du produit ou du service concerné.

La cour doit procéder à une appréciation in concreto des conditions de déroulement et de la spécificité de la relation.

Ici les collaborations de la société Pendant ce Temps-Là pour « Complément d’Enquête » ont donné lieu :

à la signature de contrats de production exécutive les 11 juillet 2011, 2 janvier 2012 et 20 août 2012 relatifs aux émissions des périodes septembre/décembre 2011, janvier/30 juin 2012 et septembre/décembre 2012,

à la signature de bons de commande de France Télévisions, émission par émission, sur la base de devis de la société Pendant ce Temps-Là.

Pour la saison de septembre 2016 à juin 2017 de Complément d’Enquête une convention de production exécutive, similaire à celles signées en 2011 et 2012, a été envoyée à la société Pendant ce Temps-Là mais n’a pas été retournée signée. Cette dernière a cependant exécuté les prestations prévues. A compter de janvier 2016, les relations se sont noués par simples bons de commande de France Télévisions, émission par émission. La société Pendant ce Temps-Là a également collaboré à la production exécutive de l’émission Envoyé Spécial pour la saison de septembre 2016 à juin 2017.

Les conventions de prestations « Complément d’Enquête » précisent ainsi leur objet en article 1 :

1.1 Le COCONTRACTANT s’engage à réaliser et produire les enregistrements des plateaux et la post production ou programme destiné à la télévision, ci-après dénommé « Complément d’Enquête », pour le compte de FRANCE TELEVISIONS, à partir d’un concept appartenant à Francetélévisions, et dans les conditions ci-après définies, et dont les principales caractéristiques sont décrites au paragraphe 1.2, ci-dessous. Les émissions seront mises à la disposition de FRANCETELEVISIONS dans les conditions définies dans la présente convention.

La présente convention a donc notamment pour objet de déterminer les conditions techniques et financières de production et d’exploitation de la série.

CONCEPT : Le concept et les éléments relatifs au contenu de chaque émission sont sous la responsabilité de la société FRANCETELEVISIONS. Les éléments relatifs au contenu de chaque émission seront communiqués aux représentants du Contractant avant le début des tournages correspondants.

OBJECTIFS EDITORIAUX : Les objectifs éditoriaux des émissions seront définis par Francetélévisions et acceptés par le « contractant ». Leur réalisation sera suivie par FRANCETELEVISIONS au fur et à mesure de la production. »

La société France Télévisions a adressé à la société Pendant ce Temps-Là (PDTL) une lettre recommandée avec accusé de réception le 2 mai 2018 pour engager une nouvelle collaboration pour la saison 2018/2019 et en lui notifiant l’arrêt des relations commerciales à l’issue de cette nouvelle saison 2019 soit un préavis de seize mois selon elle.

La société PDTL et M. [S] ont effectué une première réclamation par lettre recommandée avec accusé de réception de leur conseil du 6 novembre 2019 à laquelle la société France Télévisions a répondu par lettre recommandée avec accusé de réception du 6 décembre 2019.

Sur le caractère établi ou non de la relation commerciale, la société France Télévisions reconnaît que la collaboration avec la société Pendant ce Temps-Là consistant en la production exécutive de l’émission « Complément d’Enquête » est ancienne ‘ 18 ans ‘ mais soutient qu’elle était dépourvue de caractère stable particulièrement depuis la saison 2016/2017 à compter de laquelle les parties ont cessé de s’engager contractuellement par saisons ou demi-saisons.

Cependant, l’absence de régularisation d’un contrat écrit et l’établissement de bons de commande émission par émission ne confèrent pas à la relation commerciale un caractère précaire dans la mesure où la collaboration a été poursuivie sans aucune interruption pendant de très nombreuses années. De la même façon, c’est par une interprétation hardie que la société France Télévisions soutient que l’absence de retour signé du contrat de production exécutive pour la saison 2016/2017 démontrerait que celle-ci souhaitait se ménager une grande liberté pour réaliser les projets de son choix. L’exécution sans discontinuer de la relation contractuelle, même sans support écrit, démontre le caractère établi de la relation commerciale nouée entre la société Pendant ce Temps-Là et la société France Télévisions concernant l’émission « Complément d’Enquête ». Quant à l’émission « Envoyé Spécial », si la collaboration n’a duré qu’une saison, elle fait partie de la relation commerciale unissant les parties et doit être intégrée dans l’appréciation in concreto de la demande.

Sur la durée du préavis, que les appelantes jugent insuffisante, la société France Télévisions considère qu’elle est de seize mois, soit du 2 mai 2018 jusqu’à la saison suivante débutant en septembre 2019. Les appelantes soutiennent qu’il est de douze mois. La société Pendant ce Temps-Là a pourtant poursuivi l’exécution de son préavis et ses prestations pour France Télévisions jusqu’à fin juin 2019. Les premiers juges en ont donc déduit que la durée du préavis était de quatorze mois en excluant du calcul la période d’intersaison de juillet et d’août 2019. Ce dernier calcul doit être retenu car en phase avec la réalité du préavis exécuté, à savoir les deux mois de fin de saison en cours, suivi de deux mois d’intersaison puis d’une nouvelle saison de dix mois.

Pour contrer l’argumentation de la société Pendant ce Temps-Là sur son rôle central quant à la production de l’émission et sa forte dépendance économique, la société France Télévisions soutient que M. [S] et la société Pendant ce Temps-Là n’ont joué aucun rôle dans la conception éditoriale de l’émission « Complément d’Enquête » qui demeure du ressort des journalistes et sous la responsabilité éditoriale de France Télévisions. Elle fait valoir que le rôle des appelants s’est toujours limité à un rôle de prestataire pour le compte de France Télévisions pour la production et la réalisation matérielle de l’émission Complément d’Enquête (tournage de la partie plateau d’une durée de 20 mn environ sur 60 mn d’émission avec des prestations accessoires : finition des plateaux et post production, génériques, habillages et musique). La société France Télévisions dit avoir eu l’initiative ainsi que la responsabilité financière, technique et artistique de producteur de ce programme. Elle reproche en outre à la société PDTL d’avoir considérablement augmenté ses devis et facturations sur bon de commande, émission par émission.

Force est de constater que les clauses des conventions ci-dessus rappelées confirment l’existence d’une prestation matérielle et technique à la charge de la société Pendant ce Temps-Là et sont claires quant au rôle éditorial et et de constitution des contenus de chaque émission dévolu à la société France Télévisions.

Sur la dépendance économique dont se prévaut la société Pendant ce Temps-Là pour réclamer un préavis de vingt-huit mois, soit le double du préavis effectivement accordé par la société France Télévisions, il est indubitable que la société Pendant ce Temps-Là a consacré l’essentiel de son activité à la production exécutive de l’émission Complément d’Enquête, même si elle a contribué ponctuellement à d’autres programmes (Bibliothèque Médicis notamment). Si, comme l’ont relevé les premiers juges, il était risqué, alors que la société France Télévisions n’avait pas exigé d’exclusivité de sa part, d’affecter toutes ses ressources à la production d’une seule émission, il est cependant notable que la production de « Complément d’Enquête » à un tel rythme ne pouvait que réduire les chances pour la société PDTL de diversifier son activité.

Pendant les 18 ans qu’a duré la relation commerciale, la société Pendant ce Temps-Là a en effet produit 435 émissions et réalisé 78,61 % de son chiffre d’affaires sur les cinq derniers exercices avec France Télévisions. La société France Télévisions qui justifie la rupture par des réductions budgétaires et des marges trop élevées de la société Pendant ce Temps-Là sur l’émission Complément d’Enquête ne démontre cependant pas s’en être ouverte auprès de l’appelante.

Ainsi la particularité de la situation de la société Pendant ce Temps-Là vis-à-vis de la société France Télévisions, bien que les usages propres à la production audiovisuelle aient été respectés puisque le préavis accordé correspond à la durée de la période séparant la fin d’une saison audiovisuelle du début de la saison suivante, justifie la fixation d’un préavis à hauteur de 18 mois.

En conséquence, la société Pendant ce Temps-Là, qui pouvait espérer la poursuite de la relation commerciale et qui, sans avoir fait l’objet de critiques sur le travail accompli depuis tant d’années, ne pouvait se douter d’une rupture prochaine de sorte qu’elle aurait dû bénéficier d’un délai de préavis de 18 mois, soit quatre mois de plus que celui appliqué par la société France Télévisions, s’est vue imposer une rupture brutale de la relation commerciale établie avec la société France Télévisions.

La société Pendant ce Temps-Là propose un calcul de son préjudice, pièces comptables à l’appui, tiré de la marge brute qu’elle aurait réalisée établie sur la base des cinq exercices précédant la rupture (saisons 2014 à 2019). Elle inclut, au grand dam de la société France Télévisions, la saison de l’émission Envoyé Spécial particulièrement rémunératrice. Comme il a été développé supra, cette saison fait partie intégrante de la relation économique entre les parties et ne doit pas en être exclue. S’il est usuel de ne retenir que la moyenne des trois derniers exercices, la durée particulièrement longue et pérenne de la relation entre la société PDTL et la société France Télévisions justifie la moyenne retenue sur les cinq exercices antérieurs. Ainsi, la moyenne de sa marge brute par an pour les saisons de 2014 à 2019 s’établit à 720.411 euros. Il en résulte que la moyenne de la marge brute mensuelle réalisée par la société PDTL est de 60.034,25 euros. Le préjudice subi par la société appelante sur la durée de quatre mois de préavis non réalisée est de 240.137 euros. La société France Télévisions sera donc condamnée à payer cette somme à la société Pendant ce Temps-Là et le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur la demande au titre du parasitisme

La société Pendant ce Temps-Là insiste sur l’identité visuelle de l’émission Complément d’Enquête consistant en la disposition de deux fauteuils rouges face à face mais décalés, scénographie qu’elle a conçue et qui est donc la « signature » de l’émission. Elle agit sur le fondement de l’article 1382 ancien (1240 nouveau) du code civil en recherchant la responsabilité délictuelle de la société France Télévisions pour parasitisme, lui reprochant d’avoir conservé le même plateau après la rupture.

La société France Télévisions conteste d’une part le fait que M. [S] soit l’auteur du format de « Complément d’Enquête » puisque le magazine a été conçu par M. [B] [X] et d’autre part que la « reprise » des fauteuils rouges dans les émissions à compter de septembre 2019 caractérise un parasitisme fautif de France Télévisions à son préjudice comme la société PDTL le soutient. Elle considère que M. [S] ne justifie d’aucun travail de conception, l’utilisation des deux fauteuils rouges pour les interviews étant le fruit du hasard. Par ailleurs les fauteuils rouges se retrouvent dans un grand nombre d’émissions d’interviews.

La parasitisme se définit comme l’ensemble des comportements par lesquels un agent économique s’immisce dans le sillage d’un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire.

Il y a lieu de rappeler que l’article 8 « PROPRIETE » des conventions de production exécutive « Complément d’enquête » contient les dispositions suivantes

« 8.1 PROPRIETE DU CONCEPT

Le concept de la série, est la propriété exclusive de Francetélévisions.

(…)

8.2 : PROPRIETE DES ELEMENTS CORPORELS ET INCORPORELS DE L’EMISSION (HORS CONCEPT)

Sous réserve des dispositions de l’article 8.1 ci-dessus, au fur et à mesure de la production de l’émission, tous les éléments corporels et incorporels de celle-ci ainsi que les droits y attachés seront la propriété de Francetélévisions.

(…) »

Il est notable que le logo de l’émission a changé, avec la silhouette du présentateur debout et une ligne verticale perpendiculaire à une ligne horizontale de 2001 à 2012, puis deux fauteuils « conversation » rouges disposés ainsi en S de 2012 à 2017 et enfin un logo stylisé avec des lignes courbes verticales opposées de couleur rouge.

L’origine de l’utilisation des deux fauteuils rouges, revendiquée par M. [S], est pourtant bien retracée par la société France Télévisions qui produit un extrait du Complément d’Enquête en hommage à [B] [X] contenant un passage dans lequel M. [U] [S] relate la genèse de son idée en ces termes :

« on était en discussion/réflexion avec la Direction de France 2. J’étais dans les couloirs de la Direction. Il y avait une vingtaine de fauteuils rouges disséminés comme çà dans les couloirs. On est parti avec ces fauteuils rouges qu’on a pris et puis on les a descendus dans le studio : et puis voilà, et on a démarré avec çà… »

L’intimée verse en outre aux débats des visuels de nombreuses émissions sur les chaînes KTO, France 3 et Equidia notamment, contenant la même disposition de fauteuils rouges pour des interviews.

Il en ressort qu’il ne peut être reproché à la société France Télévisions d’avoir poursuivi l’utilisation d’un plateau de télévision identique à celui en place lors de sa relation avec la société PDTL, M. [S] ne démontrant pas être la source d’une création particulière, d’un savoir-faire unique dont l’intimée aurait tiré profit.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté la société Pendant ce Temps-Là de toutes ses demandes au titre du parasitisme.

Sur les demandes de M. [U] [S]

M. [S] soutient avoir subi un préjudice professionnel et un préjudice moral personnels qu’il entend voir indemniser à hauteur de 50.000 et 10.000 euros. Il agit sur le fondement de la responsabilité civile délictuelle.

La société France Télévisions fait valoir que M. [U] [S] en tant que réalisateur n’est en aucun cas associé dans l’esprit du public à « Complément d’Enquête ». Elle souligne que les bons de commande émis à partir de janvier 2016 émission par émission ne mentionnaient pas M. [S] en tant que réalisateur.

M. [S] ne démontre pas l’existence d’un préjudice professionnel personnel subi du fait de la rupture brutale imposée par la société France Télévisions à la société PDTL dont il est le dirigeant, dans la mesure où, inconnu du grand public, il ne rapporte pas la preuve que son image aurait été irrémédiablement atteinte vis-à-vis des tiers et même des partenaires commerciaux potentiels. En revanche, les circonstances de la rupture sont à l’origine d’un préjudice moral personnel pour l’appelant. En effet, la collaboration originelle de M. [S] à la production de Complément d’Enquête, l’investissement personnel qu’il y a consacré et les liens tissés avec les présentateurs emblématiques de l’émission auraient justifié, compte-tenu de la seule raison avancée par France Télévisions pour justifier la rupture d’une réduction des coûts et des tarifs considérés comme exorbitants qui auraient été pratiqués par la société PDTL, au minimum un entretien pour tenter d’entrer en discussion et évoquer les possibilités envisageables. A cet égard, c’est à juste titre que M. [S] déplore l’absence de la moindre discussion préalable à la notification de la rupture à la société PDTL.

Il en résulte que M. [S] a subi un préjudice moral résultant des agissements de la société France Télévisions, préjudice qui sera raisonnablement fixé à hauteur de 10.000 euros.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a débouté M. [S] de sa demande de 50.000 euros au titre du préjudice d’image mais infirmé en ce qu’il l’a débouté de sa demande de condamnation à hauteur de 10.000 euros au titre de son préjudice moral. La société France Télévisions sera par conséquent condamnée à payer à M. [S] la somme de 10.000 euros au titre de son préjudice moral.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

La société France Télévisions succombant à l’action, il convient d’infirmer le jugement en ce qu’il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles. La société France Télévisions sera par conséquent condamnée aux dépens. Il apparaît en outre équitable de la condamner à payer à la société Pendant ce Temps-Là la somme de 10.000 euros et à M. [U] [S] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

INFIRME le jugement sauf en ce qu’il a débouté la société Pendant ce Temps-Là de ses demandes au titre du parasitisme et M. [U] [S] de sa demande au titre du préjudice d’image ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

CONDAMNE la société France Télévisions à payer à la société Pendant ce Temps-Là la somme de 240.137 euros au titre de la rupture brutale de la relation commerciale établie ;

CONDAMNE la société France Télévisions à payer à M. [U] [S] la somme de 10.000 euros au titre de son préjudice moral ;

CONDAMNE la société France Télévisions aux dépens de première instance et d’appel ;

CONDAMNE la société France Télévisions à payer à la société Pendant ce Temps-Là la somme de 10.000 euros et à M. [U] [S] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA CONSEILLÈRE POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ


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