Your cart is currently empty!
N° RG 20/07496 – N° Portalis DBVX-V-B7E-NKH2
Décision du
TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de LYON
Au fond
du 02 décembre 2020
RG : 17/10444
ch n°1 cab 01 A
[N]
C/
S.A.S. [5]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
1ère chambre civile B
ARRET DU 27 Juin 2023
APPELANT :
M. [V] [N]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES – LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938
ayant pour avocat plaidant Me Benjamin RENAUD de la SELARL RENAUD AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 504
INTIMEE :
Société [5]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Véronique FONTAINE de la SCP BCF AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 714
ayant pour avocat plaidant Me Anne-laure MERY de la SELAS WENNER, avocat au barreau de PARIS
* * * * * *
Date de clôture de l’instruction : 16 Juin 2022
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 25 Avril 2023
Date de mise à disposition : 27 Juin 2023
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
– Olivier GOURSAUD, président
– Stéphanie LEMOINE, conseiller
– Bénédicte LECHARNY, conseiller
assistés pendant les débats de Elsa SANCHEZ, greffier
A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Olivier GOURSAUD, président, et par Elsa SANCHEZ, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Mr [N] a été employé de la société [5] entre le 1er juin 1988 et le 31 décembre 2016 en qualité de directeur des ventes France.
Par décision du 17 avril 1996, le conseil de surveillance de la société [5] l’a nommé président du directoire et l’assemblée générale extraordinaire a confirmé la nomination de Mr [N] à ce poste par décision du 10 mai 1996.
Mr [N] est parti à la retraite le 1er janvier 2017.
Lors de la vérification des sommes payées à Mr [N] à l’occasion de son départ, le président du conseil de surveillance et le président de la société de droit allemand [5], actionnaire principal de la société française, ont sollicité des explications relativement au versement d’une somme de 69.584,53 €, dont 55.450,05€ correspondant aux droits acquis par Mr [N] au titre de son compte épargne-temps.
Par exploit d’huissier du 20 octobre 2017, la société [5] a fait assigner Mr [N] devant le tribunal de grande instance de Lyon aux fins d’annulation d’une décision datée du 28 septembre 2007, intitulée ‘accord collectif instituant un régime de compte épargne temps’ et de restitution des sommes versées au titre de ce compte épargne temps et en paiement de dommages et intérêts.
Par jugement du 2 décembre 2020, le tribunal judiciaire de Lyon a :
– condamné Mr [N] à payer à la société [5] la somme de 55.450 € correspondant au montant brut de son compte épargne temps,
– condamné Mr [N] à payer à la société [5] la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– rejeté le surplus des demandes de la société [5],
– rejeté les demandes de Mr [N],
– ordonné l’exécution provisoire du jugement à intervenir.
Par déclaration du 29 décembre 2020, Mr [N] a interjeté appel de ce jugement.
Au terme de ses dernières conclusions notifiées le 16 février 2022, Mr [V] [N] demande à la cour de :
– infirmer le jugement en ce qu’il l’a :
– condamné à payer à la société [5] la somme de 54.450 € correspondant au montant brut de son CET, ainsi qu’au paiement de la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– l’a débouté de ses demandes reconventionnelles, visant à la condamnation de la société [5] au versement de la somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts et de celle de 5.000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– confirmer le jugement pour le surplus,
et statuant à nouveau,
à titre principal,
– juger infondée la demande de la société [5] tendant à faire juger qu’il a engagé sa responsabilité et la débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions,
– condamner la société [5] à lui restituer la somme globale de 62.157,65 € versée au titre de l’exécution provisoire du jugement (principal et intérêts),
– condamner la société [5] à lui verser la somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par sa résistance abusive et injustifiée,
à titre subsidiaire,
– juger infondées et irrecevables la demande de nullité du CET à son égard et celle visant à obtenir la restitution des sommes versées au titre du CET pour la période antérieure au 31 décembre 2013,
en tout état de cause,
– débouter la société [5] de sa demande tendant à le voir condamné à la garantir de tout paiement sollicité par les salariés au titre du document intitulé “accord collectif instituant un régime de compte épargne temps” du 28 septembre 2007,
– condamner la société [5] à lui verser la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance distraits au profit de Maître Laffly, Lexavoué, sur son affirmation de droit.
Au terme de ses dernières conclusions notifiées le 29 avril 2022, la société [5] demande à la cour de :
– juger que Mr [N] a engagé sa responsabilité envers elle,
en conséquence,
– confirmer le jugement entrepris du tribunal judiciaire de Lyon du 2 décembre 2020 en ce qu’il a condamné Mr [N] à restituer la somme de 55.450 €,
et statuant à nouveau,
y ajoutant,
– condamner Mr [N] à lui restituer la somme de 39.328,14 € outre les intérêts légaux depuis la sommation restée infructueuse,
– condamner Mr [N] à lui payer la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral et d’image,
en tout état de cause,
– condamner Mr [N] à lui payer la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les 2.000 € octroyés par le tribunal judiciaire dans le jugement attaqué du 2 décembre 2020 et le condamner à supporter tous les dépens,
– débouter Mr [N] de l’ensemble de ses demandes formulées à son encontre.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 16 juin 2022.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1° sur la prescription de l’action en nullité de ‘l’accord collectif instituant un régime de compte épargne temps :
Mr [N] soutient que l’action en nullité de la convention instituant un régime de compte épargne temps du 28 septembre 2007 serait prescrite par application de l’article L 225-42 du code du commerce et la société [5] réplique que cette fin de non recevoir est inopérante dans la mesure où le tribunal n’a pas fondé sa décision sur la nullité de la convention.
Il est constant en effet que le tribunal n’a pas fondé sa décision de condamnation sur la nullité de cette convention et que celle-ci n’est pas sollicitée par la société [5] devant la cour de sorte que la demande tendant à déclarer irrecevable la demande en annulation de la convention au motif qu’elle serait prescrite est sans objet.
2° sur la demande de restitution des sommes versées à Mr [N] au titre d’un compte épargne temps :
La société [5] expose qu’un accord du 28 septembre 2007 intitulé ‘accord collectif instituant un régime de compte épargne temps’ a été mis en place dans des circonstances particulièrement troubles, en violation des dispositions du code du commerce, que Mr [N] a dissimulé cet accord jusqu’à sa retraite et qu’il a eu des conséquences dommageables pour la société qui s’est vue débiter d’une somme de 94.778,19 € en sa faveur.
Elle fait valoir notamment que :
– les documents préalables à l’établissement du régime du compte épargne temps sont inexistants ou ambigus de sorte qu’il n’est pas possible de s’assurer que des négociations antérieures ont eu lieu avec les représentants des salariés et l’existence même de cet accord peut être mise en doute,
– même s’il est considéré que cet accord a une réalité juridique, il s’agit d’ une convention au sens de l’article L225-86 du code de commerce comme ayant mis en place un avantage salarial et créateur d’obligations pour la société qui aurait donc du faire l’objet d’une autorisation du conseil de surveillance et d’une décision de l’assemblée générale et il ne s’agit pas d’une opération courante relevant des dispositions de l’article L 225-87 du code du commerce,
– Mr [N] avait la double qualité de salarié et de président du directoire de sorte qu’en mettant en place le compte épargne temps, il se trouvait en situation de conflit d’intérêt et ses décisions en tant que président du directoire ont avantagé sa situation personnelle en tant que salarié directeur des ventes,
– cette situation lui a procuré une nette amélioration de ses revenus personnels puisque grâce à la mise en place de ce compte épargne temps, il a perçu, à l’insu des organes de surveillance, près de 100.000€,
– après la mise en place du compte épargne temps, Mr [N] a continué de le dissimuler au conseil de surveillance jusqu’à la date de son départ en retraite,
– Mr [N] ne peut valablement prétendre que les jours épargnés sur le CET ont fait l’objet d’un suivi mensuel dès lors que certains salariés ont accumulé des montants très conséquents de jours sur leur CET sans qu’aucune indication à purger leur compte ne leur ait été adressée, ni qu’aucune dissimulation n’aurait eu lieu compte tenu de la liquidation totale ou partielle en argent des CET sollicitée par les salariés dès lors que la mise en place du CET a été dénoncée en 2017 et que cette dénonciation a été acceptée par tous les salariés de sorte qu’il est manifeste qu’il ne profitait qu’aux plus hauts dirigeants de la société, à savoir, Mr [N] et Mr [O].
De son côté, Mr [N] expose que des négociations préalables avec les représentants syndicaux relativement à la mise en place d’un compte épargne temps se sont ouvertes en mai 2007, que le comité d’entreprise a été consulté le 17 juillet 2007, qu’à la suite de l’échec des négociations, il a décidé en sa qualité de président du directoire d’instituer un compte épargne temps par le biais d’un engagement unilatéral, que la mise en place de ce dispositif qui avait pour objet de permettre une présence accrue des commerciaux et techniciens auprès des clients et prospects a engendré une croissance d’activité ainsi qu’en atteste la progression du chiffre d’affaire et des capitaux propres de la société [5] pour l’exercice 2016 et que la provision compte épargne temps étant une provision sur charge fiscalement déductible, la société [5] a bénéficié d’une économie d’impôt sur les sociétés.
Il fait valoir que :
– le régime du compte épargne temps n’a pas été mis en oeuvre sous forme d’une convention et dés lors que les propositions faites aux délégués syndicaux de mise en place d’un compte épargne temps avaient été un échec, il lui était possible en sa qualité de président du directoire responsable de la direction générale et opérationnelle de la société [5] de conclure des conventions portant sur des opérations courantes et conclues à des conditions normales et donc de mettre en place un tel système sous la forme d’un engagement unilatéral de sorte que cet engagement ne relevait pas de la procédure de contrôle des conventions réglementées,
– même s’il était considéré que cet engagement doit être requalifié en convention, la mise en place d’un tel régime ne peut s’analyser autrement que comme une opération courante inhérente à la gestion sociale et des ressources humaines, de l’entreprise, opération pour laquelle il était compétent en vertu de sa qualité de président du directoire, et n’avait pas à être approuvé par le conseil de surveillance,
– en outre, la mise en place du compte épargne temps n’a pas été dissimulée au conseil de surveillance,
– les sommes provisionnées au titre du régime du compte épargne temps étaient contrôlées lors de chaque exercice comptable par le commissaire aux comptes,
– le régime du CET a reçu application et a été mis en oeuvre pour l’ensemble des salariés pendant dix années consécutives sans aucune dissimulation au plan social et au plan comptable et d’autres salariés ont également sollicité la liquidation en tout ou partie de leur compte épargne temps et sans que la société [5] n’émette aucune réserve ou objection,
– la somme qui lui a été versée à l’occasion de son départ à la retraite correspond à une rémunération résultant de la seule poursuite normale de l’exécution de son contrat de travail tel que cela avait été prévu lors de sa désignation en qualité de président du directoire et elle n’est pas indue dès lors qu’elle correspond à une indemnité compensatrice de congés payés acquise au fur et à mesure de l’exécution de son contrat de travail.
Sur ce :
Il appartient à la société [5] qui fonde ses prétentions indemnitaires non pas sur la nullité de la convention du 27 septembre 2007 mais sur un comportement fautif de son mandataire, Mr [N], en sa qualité de président du directoire de rapporter la preuve d’une faute de sa part en relation avec un préjudice.
La société [5] reproche donc à Mr [N] la mise en place dans l’entreprise d’un régime de compte épargne temps de façon dissimulée, sans avoir recueilli l’accord du conseil de surveillance, et d’avoir personnellement profité de ce système jusqu’à sa retraite, tout en continuant à le dissimuler, et ce au préjudice de la société.
Aux termes d’un document intitulé ‘accord collectif instituant un régime de compte épargne temps’ il est mentionné qu’après consultation du comité d’entreprise en date du 17 juillet 2017, la direction a décidé de mettre en place par décision unilatérale, le régime du compte épargne temps dans le cadre de l’article L 227-1 du code du travail et des articles 11.1 et 11.2 de l’accord national métallurgie du 28 juillet 1998 modifié sur l’organisation du travail dans la métallurgie et dont l’objectif est de permettre aux salariés et à l’entreprise de gérer leur temps de travail sur l’ensemble de la carrière et qu’il est convenu de mettre en place ce régime de compte épargne-temps, afin de permettre aux salariés qui le souhaitent de capitaliser une partie de leurs repos convertibles.
L’article 11.1 de l’accord national de branche de la métallurgie du 28 juillet 1998 dispose que
‘La mise en oeuvre au profit du salarié, d’un régime de compte épargne-temps dans une entreprise ou dans un établissement est négociée avec les délégués syndicaux dans le cadre de l’article L. 132-27 du code du travail, en vue d’aboutir à un accord collectif prévoyant un régime adapté à la situation particulière de tout ou partie de l’entreprise ou de l’établissement.
Toutefois, à l’issue de cette négociation, les entreprises ou établissements n’ayant pas conclu d’accord pourront, après consultation du comité d’entreprise ou, à défaut des délégués du personnel, mettre en place, au profit de leurs salariés, des comptes épargne selon le régime ci-dessous.
En l’absence de délégués syndicaux, le régime ci-dessous peut être mis en place après consultation du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel…’
Il est versé aux débats un compte-rendu du comité d’entreprise du 17 juillet 2007 mentionnant qu’à la demande des cadres, la direction annonce l’application prochainement de la mise en place d’un compte épargne temps et un ‘procès-verbal de désaccord du 17 juillet 2007″ daté du même jour et établi et signé par Mr [N] le 9 août 2017.
Il est notamment mentionné dans ce dernier document qu’une négociation a été ouverte en mai 2007 avec les délégués syndicaux sur la mise en place du compte épargne temps, qu’un projet d’accord leur a été présenté ayant pour objet la mise en place de ce compte épargne temps, qu’après plusieurs réunions, les délégués syndicaux n’ont pas répondu au projet d’accord, manifestant leur désintérêt à la mise en place de celui-ci, que de ce fait la négociation n’a pu aboutir, que ce procès-verbal de désaccord fait suite à l’échec de cette négociation et qu’à cette issue, et après consultation du comité d’entreprise en date du 17 juillet 2007, la direction a décidé de mettre en place, par décision unilatérale, le régime de compte épargne temps prévu par l’accord de branche de la métallurgie, et ce dans un but de ne pas pénaliser un grand nombre de salariés de la société [5].
Si ces documents ne portent que la signature de Mr [N], aucun élément versé aux débats ne permet de constater qu’ils constituent des faux , qu’aucune négociation n’aurait été effectivement mise en place avec les représentants du personnel et que les salariés ont été tenus dans l’ignorance totale de cet ‘accord’.
La cour relève que le document intitulé ‘accord collectif instituant un régime de compte épargne temps (CET)’ par lequel la société [5] représentée par Mr [N] décide de mettre en place le régime du compte épargne temps dans le cadre de l’article L 227-1 du code du travail et des articles 11.1 et 11.2 de l’accord national métallurgie du 28 juillet 1998 au profit de tous les salariés, en contrat à durée indéterminée justifiant d’une ancienneté minimale de 12 mois aurait du faire l’objet d’une autorisation préalable du conseil de surveillance et ce par application de l’article L 225-86 du code du commerce.
En effet, si cet ‘accord’ ne mentionne pas personnellement Mr [N], il n’est pas contestable qu’en sa double qualité de cadre salarié et de mandataire dirigeant, celui-ci était indirectement intéressé à sa mise en place.
Par ailleurs, il engageait pour l’avenir et de façon durable l’entreprise vis à vis des salariés désormais autorisés à capitaliser une partie de leur repos convertibles et il ne peut ainsi être considéré qu’il s’agissait d’une convention portant sur des opérations courantes et conclues à des conditions normales relevant des dispositions de l’article L 225-87 du code du commerce.
Il est constant que Mr [N] n’a pas demandé, et par voie de conséquence obtenu, une autorisation du conseil de surveillance.
Toutefois, en l’absence d’éléments permettant de caractériser une dissimulation par l’appelant vis à vis des organes dirigeants de la société [5] de la mise en place de ce compte épargne temps, cette absence de demande d’autorisation du conseil de surveillance ne suffit pas à caractériser un comportement fautif de Mr [N] au détriment de la société [5].
En effet, ainsi que rappelé ci-dessus la preuve que Mr [N] aurait mis en place en dehors de toute concertation avec les représentants du personnel n’est pas rapportée.
La direction a régulièrement tenu informée l’inspection du travail de la mise en place du compte épargne temps ainsi qu’il ressort d’un courrier de l’inspecteur du travail qui confirme qu’après consultation du comité d’entreprise, la procédure de mise en place du comité d’entreprise a été respectée.
Les éléments comptables produits par la société [5] ne permettent pas davantage de caractériser une dissimulation.
Mr [O], ancien directeur financier de l’entreprise, atteste qu’il n’avait pas la possibilité de créer des comptes et décrit le process de création des comptes dont il résulte qu’elle nécessitait un accord de son interlocuteur de la maison mère en Allemagne.
Si la sincérité de ce témoin est remise en cause par la société [5] au motif que ce dernier aurait fait l’objet d’un licenciement pour faute lourde et qu’une plainte notamment pour escroquerie a été déposée ayant donné lieu à une information judiciaire, force est de constater que le contenu factuel de cette attestation n’est pas discuté.
La mention du versement d’un compte épargne temps figurait sur les bulletins de salaire y compris sur ceux de Mr [N] ainsi qu’il ressort des fiches de paye produites aux débats.
Les pièces de comptabilité produites par la société [5] n’établissent pas non plus une volonté de dissimuler l’existence d’un compte épargne temps au sein de l’entreprise.
Selon un courrier de la société [6], commissaire aux comptes, le contrôle des montants comptabilisés au titre du compte épargne temps a été inscrit dans leur programme de travail au même titre que ceux relatifs aux congés payés et elle a conclu que les contrôles de cohérence effectués ont été effectués ce qui vient contredire la thèse de la société [5] sur la dissimulation de ce compte épargne temps.
La cour note enfin que la mise en place du compte épargne temps était par principe destiné à tous les salariés de l’entreprise, que Mr [N] et son directeur financier, Mr [O], n’ont pas été les seuls à en bénéficier et que cela est confirmé par un courriel de membres du comité d’entreprise qui rappelle que le compte épargne temps a été créé il y a dix ans afin de permettre aux salariés n’ayant pas pu prendre leur congés à cause de leur charge de travail de conserver ces journées.
Au vu de ces éléments, la cour relève que les conditions d’une action en responsabilité à l’encontre de Mr [N] du fait d’une perception frauduleuse de rémunérations au titre d’un compte épargne temps qui aurait été dissimulé ne sont pas réunies et infirmant le jugement, déboute la société [5] de l’ensemble de ses demandes.
3° sur les demandes reconventionnelles de Mr [N] :
Le présent arrêt infirmatif emporte de plein droit obligation de restitution des sommes versées dans le cadre de l’exécution provisoire attachée au jugement déféré et constitue le titre exécutoire ouvrant droit à cette restitution, les sommes ainsi restituées portant intérêt au taux légal à compter de la signification, valant mise en demeure, du dit l’arrêt.
Il n’y a donc pas lieu de statuer sur la demande en remboursement présentée à ce titre par Mr [N].
Par ailleurs, il ne peut être considéré que l’engagement de la présente procédure par la société [5] qui a obtenu satisfaction en première instance, caractérise un abus du droit d’agir et le jugement est confirmé en ce qu’il a débouté Mr [N] de sa demande de dommages et intérêts à ce titre.
4° sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :
Les dépens de première instance et d’appel sont à la charge des sociétés intimées qui succombent en leurs prétentions
La cour estime que l’équité commande de faire application de l’article 700 du code de procédure civile au profit de Mr [N] et lui alloue à ce titre la somme de 3.000 €.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
statuant dans les limites de l’appel,
Confirme le jugement déféré en ce qu’il a débouté Mr [N] de sa demande de dommages et intérêts;
L’infirme en toutes ses autres dispositions.
Statuant de nouveau et y ajoutant,
Déboute la société [5] de l’intégralité de ses prétentions ;
Dit que la demande de restitution des sommes au titre de l’exécution provisoire est sans objet ;
Condamne la société [5] à payer à Mr [V] [N] la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Condamne la société [5] aux dépens de première instance et d’appel et accorde à Maître Laffly, Lexavoué, le bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile.
La greffière, Le Président,