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09/06/2023
ARRÊT N°2023/269
N° RG 21/03138 – N° Portalis DBVI-V-B7F-OI4O
FCC/AR
Décision déférée du 10 Juin 2021 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULOUSE ( 19/01222)
GUICHAUD
[N] [W]
C/
S.A.S. CASOXIA HOLDING
S.A.R.L. CAP ASSOCIES
S.A.R.L. CASOXIA CONSEIL
S.A.S. CASOXIA INVESTS
CONFIRMATION PARTIELLE
Grosse délivrée
le 9 juin 2023
à Me BELLINI,
Me ATTYE,
Me PICHON,
CCC POLE EMPLOI
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
4eme Chambre Section 2
***
ARRÊT DU NEUF JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS
***
APPELANT
Monsieur [N] [W]
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représenté par Me Laura BELLINI, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIM”E
S.A.S. CASOXIA HOLDING
prise en la personne de son représentant légal, domicilié ès qualité au dit siège sis [Adresse 3]
Représentée par Me Maher ATTYE, avocat au barreau de TOULOUSE
S.A.R.L. CAP ASSOCIES
prise en la personne de son représentant légal, domicilié ès qualité au dit siège sis [Adresse 2]
Représentée par Me Marc PICHON de la SCP CAMILLE ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE
S.A.R.L. CASOXIA CONSEIL
prise en la personne de son représentant légal, domicilié ès qualité au dit siège sis [Adresse 1]
Représentée par Me Maher ATTYE, avocat au barreau de TOULOUSE
S.A.S. CASOXIA INVESTS
prise en la personne de son représentant légal, domicilié ès qualité au dit siège sis [Adresse 3]
Représentée par Me Maher ATTYE, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 20 Avril 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant C.BRISSET, présidente et F. CROISILLE-CABROL, conseillère, chargées du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
C. BRISSET, présidente
A. PIERRE-BLANCHARD, conseillère
F. CROISILLE-CABROL, conseillère
Greffier, lors des débats : A. RAVEANE
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
– signé par C. BRISSET, présidente, et par A. RAVEANE, greffière de chambre
EXPOSÉ DU LITIGE
La SAS Casoxia Holding, la SARL Casoxia Conseil et la SAS Casoxia Invests font partie du groupe Casoxia ayant une activité de courtage en assurance.
Le 2 juillet 2018, la SAS Casoxia Holding a confié à la SARL Cap Associés un mandat non exclusif aux fins de proposer aux prospects des contrats d’assurance vie et capitalisation de Casoxia Holding, ainsi que les services s’y rattachant. Par avenant du 1er février 2019, les missions de la SARL Cap Associés ont été étendues, notamment à la formation et à l’assistance au recrutement.
M. [N] [W] a été embauché selon un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet à compter du 10 septembre 2018 par la SAS Casoxia Holding, en qualité de directeur des ressources humaines, statut cadre. Ce contrat de travail stipulait une période d’essai de 4 mois, expirant au 9 janvier 2019.
La SAS Casoxia Holding a rompu la période d’essai par lettre remise en main propre du 9 janvier 2019. La relation de travail a pris fin le même jour.
M. [W] a alors été embauché selon un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel (25 heures par semaine) à compter du 14 janvier 2019 par la SARL Cap Associés, en qualité de chargé de recrutement, catégorie employé. La relation de travail était soumise à la convention collective nationale des opérations de courtage d’assurance et/ou de réassurance.
Parallèlement, M. [W] a conclu avec la SARL Cap Associés un contrat de mandat non exclusif du 15 janvier 2019 ayant pour objet de proposer à ses prospects des contrats d’assurance vie et de capitalisation de Cap Associés ainsi que les services s’y rattachant.
M. [W] et la SARL Cap Associés ont conclu une rupture conventionnelle et la relation de travail a pris fin au 18 mai 2019.
Le 2 août 2019, M. [W] a saisi le conseil de prud’hommes de Toulouse d’une action à l’encontre de la SAS Casoxia Holding, de la SARL Casoxia Conseil, de la SAS Casoxia Invests et de la SARL Cap Associés, aux fins de notamment de reconnaissance d’un co-emploi entre ces quatre sociétés, de requalification du mandat conclu avec la SARL Cap Associés en contrat de travail, de requalification du contrat de travail à temps partiel conclu avec la SARL Cap Associés en contrat de travail à temps plein, de nullité de la rupture conventionnelle avec la SARL Cap Associés, et de condamnation solidaire à des dommages et intérêts pour déloyauté, une indemnité pour non-respect du délai de prévenance de rupture de la période d’essai, des rappels de rémunérations, une indemnité pour travail dissimulé, une indemnité compensatrice de préavis, une indemnité de licenciement, et des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que la remise sous astreinte des documents de fin de contrat conformes.
La SARL Cap Associés a soulevé l’incompétence du conseil de prud’hommes au profit du tribunal de commerce sur la demande de commissions formée par M. [W].
Par jugement du 10 juin 2021, le conseil de prud’hommes de Toulouse :
– a dit que :
* il n’existe pas de situation de co-emploi entre les sociétés Casoxia Holding, Casoxia Conseil, Casoxia Invests gérées par M. [U] et la société Cap Associés,
* il n’y a pas lieu de procéder à la condamnation solidaire des sociétés Casoxia Holding, Casoxia Conseil, Casoxia Invests et Cap Associés,
* la rupture de la période d’essai de M. [W] le 9 janvier 2019 n’est pas abusive,
* le contrat de travail de M. [W] n’a pas été exécuté de façon déloyale et fautive par ses employeurs,
* il n’y a pas lieu de requalifier le contrat de mandat conclu par M. [W] avec la société Cap Associés en contrat de travail,
* la demande de requalification du contrat de travail à temps partiel de M. [W] en contrat de travail à temps complet est infondée,
* la durée du travail de M. [W] n’a pas été portée à plusieurs reprises au niveau de la durée légale du travail,
* la demande de paiement des journées du 19 au 22 février 2019 de M. [W] est infondée,
* la demande de M. [W] de prononcer la nullité de la rupture conventionnelle contractée avec la société Cap Associés est infondée,
* la société Cap Associés ne s’est pas rendue coupable de travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié,
* la SAS Casoxia Holding n’a pas respecté le délai de prévenance de la rupture de la période d’essai de M. [W],
* la demande de M. [W] de paiement des primes de résultat sur la période de septembre-décembre 2018 est fondée,
– s’est déclaré incompétent pour en connaître dans le litige qui oppose M. [W] avec la société Cap Associés au titre de l’exécution de son contrat de mandat et de sa demande de paiement de commissions de 2.400 €,
– a désigné le tribunal de commerce de Toulouse comme étant compétent dans le litige opposant M. [W] à la société Cap Associés au titre de l’exécution de son contrat de mandat,
– a condamné la société Casoxia Holding à payer à M. [W] les sommes suivantes :
* 1.639,93 € au titre du non-respect du délai de prévenance de la période d’essai,
* 1.100 € au titre des primes de résultat,
* 110 € au titre des congés payés y afférents,
* 1.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– a ordonné à la société Casoxia Holding de remettre à M. [W] les documents sociaux rectifiés conformes au présent jugement,
– a débouté M. [W] du surplus de ses demandes,
– a dit n’y avoir lieu à exécution provisoire autre que de droit,
– a fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à 1.639,93 € bruts pour l’exécution provisoire de droit,
– a condamné la société Casoxia Holding aux entiers dépens de l’instance.
M. [W] a relevé appel de ce jugement le 12 juillet 2021, dans des conditions de forme et de délai non discutées, en énonçant dans sa déclaration d’appel les chefs critiqués.
Par conclusions n° 2 notifiées par voie électronique le 7 avril 2022, auxquelles il est expressément fait référence, M. [W] demande à la cour de :
– infirmer le jugement en ce qu’il :
– a dit que :
* il n’existe pas de situation de co-emploi entre les sociétés Casoxia Holding, Casoxia Conseil, Casoxia Invests gérées par M. [U] et la société Cap Associés,
* il n’y a pas lieu de procéder à la condamnation solidaire des sociétés Casoxia Holding, Casoxia Conseil, Casoxia Invests et Cap Associés,
* la rupture de la période d’essai de M. [W] le 9 janvier 2019 n’est pas abusive,
* le contrat de travail de M. [W] n’a pas été exécuté de façon déloyale et fautive par ses employeurs,
* il n’y a pas lieu de requalifier le contrat de mandat conclu par M. [W] avec la société Cap Associés en contrat de travail,
* la demande de requalification du contrat de travail à temps partiel de M. [W] en contrat de travail à temps complet est infondée,
* la durée du travail de M. [W] n’a pas été portée à plusieurs reprises au niveau de la durée légale du travail,
* la demande de paiement des journées du 19 au 22 février 2019 de M. [W] est infondée,
* la demande de M. [W] de prononcer la nullité de la rupture conventionnelle contractée avec la société Cap Associés est infondée,
* la société Cap Associés ne s’est pas rendue coupable de travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié,
– s’est déclaré incompétent pour en connaître dans le litige qui oppose M. [W] avec la société Cap Associés au titre de l’exécution de son contrat de mandat et de sa demande de paiement de commissions de 2.400 €,
– a désigné le tribunal de commerce de Toulouse comme étant compétent dans le litige opposant M. [W] à la société Cap Associés au titre de l’exécution de son contrat de mandat,
– a condamné la société Casoxia Holding à payer à M. [W] les sommes suivantes :
* 1.639,93 € au titre du non-respect du délai de prévenance de la période d’essai,
* 1.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– a débouté M. [W] du surplus de ses demandes,
– confirmer le jugement en ce qu’il a :
– condamné la société Casoxia Holding au titre du non-respect du délai de prévenance,
– condamné la société Casoxia Holding à payer à M. [W] les sommes de 1.100 € au titre des primes de résultat et 110 € au titre des congés payés y afférents,
– condamné la société Casoxia Holding au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,
Statuant à nouveau :
– dire et juger que :
* la rupture de la période d’essai de M. [W] le 9 janvier 2019 est abusive,
* le contrat de travail de M. [W] a été exécuté de façon déloyale et fautive,
* les sociétés Casoxia Holding, Casoxia Conseil, Casoxia Invests et Cap Associés se sont rendues coupables de travail dissimulé ;
– requalifier le contrat de travail à temps partiel du 14 janvier 2019 de M. [W] en contrat de travail à temps complet,
– requalifier le contrat de mandat conclu le 15 janvier 2019 entre M. [W] et la société Cap Associés en un contrat de travail,
– prononcer la nullité de la rupture conventionnelle conclue entre M. [W] et la société Cap Associés, celle-ci produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– constater l’existence d’un coemploi entre les sociétés Casoxia gérées par M. [U] (Casoxia Holding, Casoxia Conseil, Casoxia Invests) et la société Cap Associés,
– constater qu’il y a lieu de procéder à la condamnation solidaire des sociétés Casoxia Holding, Casoxia Conseil, Casoxia Invests et Cap Associés,
– condamner la société Casoxia Holding à payer à M. [W] la somme de 2.185,80 € au titre du non-respect du délai de prévenance,
– condamner solidairement les sociétés Casoxia Holding, Casoxia Conseil, Casoxia Invests et Cap Associés, et à défaut de condamnation solidaire, condamner la société Casoxia Holding, à payer à M. [W] la somme de 6.557,40 € à titre de dommages-intérêts pour l’exécution déloyale et fautive de son contrat de travail,
– condamner solidairement les sociétés Casoxia Holding, Casoxia Conseil, Casoxia Invests et Cap Associés, et à défaut de condamnation solidaire, condamner la société Cap Associés, à payer à M. [W] les sommes suivantes :
* 2.937,60 € à titre de rappels de salaires (pour un contrat de travail à temps complet),
* 214,30 € au titre des heures supplémentaires,
* 315,20 € de congés payés afférents à ces sommes,
* 383,66 €, outre 38,36 € de congés payés, correspondant au paiement de la semaine du 19 février au 22 février 2019,
* 2.400 € au titre des commissions, outre 240 € au titre des congés payés,
* 2.185,80 € au titre de l’indemnité de préavis,
* 218,58 € au titre des congés payés afférents à l’indemnité de préavis,
* 96,72 € au titre de l’indemnité légale de licenciement (144,37 € déjà réglés au titre de l’indemnité de rupture conventionnelle),
* 2.185,80 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– condamner solidairement les sociétés Casoxia Holding, Casoxia Conseil, Casoxia Invests et Cap Associés à payer à M. [W] l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé à hauteur de 13.114,80 €,
– ordonner à la société Casoxia Holding et la société Cap Associés la remise des documents de fin de contrat conformes (reçu pour solde de tout compte, attestation pôle emploi, certificat de travail) et bulletins de paie rectifiés sous astreinte de 100 € par jour,
– condamner solidairement les sociétés Casoxia Holding, Casoxia Conseil, Casoxia Invests et Cap Associés à payer à M. [W] la somme de 2.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance et 2.500 € au titre de l’appel,
– condamner solidairement les sociétés Casoxia Holding, Casoxia Conseil, Casoxia Invests et Cap Associés aux entiers dépens.
Par conclusions n° 1 notifiées par voie électronique le 7 janvier 2022, auxquelles il est expressément fait référence, les sociétés Casoxia Holding, Casoxia Conseil et Casoxia Invests demandent à la cour de :
– confirmer le jugement en ce qu’il :
– a dit et jugé que :
* il n’existe pas de situation de co-emploi entre les sociétés Casoxia gérées par M. [U] (Casoxia Holding, Casoxia Conseil, Casoxia Invests) et la société Cap Associés,
* il n’y a pas lieu de procéder à la condamnation solidaire des sociétés Casoxia Holding, Casoxia Conseil, Casoxia Invests et Cap Associés,
* la rupture de la période d’essai de M. [W] le 9 janvier 2019 n’est pas abusive,
* le contrat de travail de M. [W] n’a pas été exécuté de façon déloyale et fautive par ses employeurs,
* il n’y a pas lieu à requalifier le contrat de mandat conclu par M. [W] et la société Cap Associés en un contrat de travail,
* la demande de requalification du contrat de travail à temps partiel de M. [W] en contrat de travail à temps complet est infondée,
* la durée du travail de M. [W] n’a pas été portée à plusieurs reprises au niveau de la durée légale du travail,
* la demande de paiement des journées du 19 février au 22 février 2019 de M. [W] est infondée,
* la demande de M. [W] de prononcer la nullité de la rupture conventionnelle contractée avec la société Cap Associés est infondée,
* la société Cap Associés ne s’est pas rendue coupable de travail dissimulé par dissimulation d’emploi,
– s’est déclaré incompétent pour en connaître dans le litige qui oppose M. [W] avec la société Cap Associés au titre de l’exécution de son contrat de mandat et de sa demande de paiement de commissions de 2.400 €,
– a désigné le tribunal de commerce de Toulouse comme étant compétent dans le litige opposant M. [W] à la société Cap Associés au titre de l’exécution de son contrat de mandat,
– a débouté M. [W] du surplus de ses demandes, notamment au titre du non-respect du délai de prévenance, des dommages-intérêts pour l’exécution déloyale et fautive de son contrat de travail, des rappels de salaires, heures supplémentaires, commissions, de l’indemnité pour travail dissimulé, de l’indemnité compensatrice de préavis, de l’indemnité de licenciement, des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– réformer le jugement en ce qu’il a condamné la société Casoxia Holding à payer à M. [W] les sommes de 1.639,93 € au titre du non-respect du délai de prévenance, 1.100 € au titre des primes de résultat, outre 110 € au titre des congés payés y afférents, et 1.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– statuer à nouveau en déboutant M. [W] de ces demandes,
En tout état de cause :
– condamner M. [W] à payer à la société Casoxia Holding la somme de 2.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Par conclusions n° 2 notifiées par voie électronique le 14 mars 2023, auxquelles il est expressément fait référence, la société Cap Associés demande à la cour de :
– confirmer le jugement, sauf en ce qu’il a débouté la société Cap Associés de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile,
– juger qu’aucune situation de co-emploi n’est caractérisée,
– juger que le contrat de mandat conclu entre M. [W] et la société Cap Associés ne revêt pas la nature d’un contrat de travail,
– débouter M. [W] de sa demande de requalification du contrat de mandat en contrat de travail et de ses demandes formulées à ce titre,
– juger que les commissions réclamées par M. [W] relèvent de la compétence exclusive du tribunal de commerce eu égard à leur nature commerciale,
– se déclarer incompétent et, en conséquence, renvoyer M. [W] à mieux se pourvoir,
– juger que les primes de résultat réclamées par M. [W] ne découlent pas de sa relation de travail avec la société Cap Associés,
– débouter M. [W] de sa demande de paiement de primes de résultat,
– juger que M. [W] n’établit pas que sa durée du travail a atteint la durée légale du travail,
– débouter M. [W] de sa demande de requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet,
– débouter M. [W] de ses demandes de rappels de salaire au titre de la requalification,
– juger que l’infraction de travail dissimulée n’est nullement caractérisée,
– débouter M. [W] de sa demande au titre de l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,
– juger que la rupture conventionnelle du contrat de travail de M. [W] n’est entachée d’aucun vice du consentement, ni sur le principe de la rupture, ni sur les conditions de cette rupture,
– débouter M. [W] de sa prétention tendant à voir prononcer la nullité de la rupture conventionnelle de son contrat de travail,
En toutes hypothèses :
– débouter M. [W] de l’ensemble de ses prétentions,
Y ajoutant :
– condamner M. [W] au paiement de la somme de 3.000 € à la société Cap Associés sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– mettre à la charge de M. [W] les entiers dépens de l’instance.
MOTIFS
1 – Sur le co-emploi :
Le contrat de travail est une convention par laquelle une personne s’engage à travailler pour le compte d’une autre et sous sa subordination et moyennant une rémunération ; l’existence du contrat de travail nécessite ainsi la réunion de trois conditions cumulatives : la fourniture d’un travail, le paiement d’une rémunération et l’existence d’un lien de subordination juridique caractérisé par l’exécution du travail sous l’autorité de l’employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. L’existence d’une relation de travail salariée ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité des travailleurs. C’est à la personne qui entend se prévaloir de l’existence d’un contrat de travail, d’en apporter la preuve.
Hors l’existence d’un lien de subordination, une société faisant partie d’un groupe ne peut être qualifiée de co-employeur que s’il existe, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l’état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une immixtion permanente de cette société dans la gestion économique et sociale de la société employeur conduisant à la perte totale d’autonomie d’action de cette dernière.
Il est rappelé que M. [W] disposait d’un contrat de travail signé avec la SAS Casoxia Holding sur la période du 10 septembre 2018 au 9 janvier 2019 et d’un contrat de travail signé avec la SARL Cap Associés sur la période du 14 janvier au 18 mai 2019.
M. [W] soutient qu’en réalité, à compter du 14 janvier 2019, il était en situation de co-emploi avec la SAS Casoxia Holding, la SARL Casoxia Conseil, la SAS Casoxia Invests et la SARL Cap Associés. Il affirme que la SARL Cap Associés fait partie du groupe Casoxia, que ses conditions de travail n’ont pas changé après le 14 janvier 2019 et qu’il est resté sous la subordination de ‘son ancien employeur M. [U] le dirigeant des sociétés Casoxia’ à qui il continuait à rendre des comptes et qui s’immiscait de manière permanente dans la gestion de la SARL Cap Associés. Il ajoute qu’il existait entre les quatre sociétés une confusion d’intérêts, d’activités et de direction.
Sur ce, il ressort des extraits Kbis versés et des débats que :
– la SAS Casoxia Holding avait pour activité la prise de tous intérêts ou participations dans toutes entités juridiques, la vente de contrats d’assurance et le courtage en assurance, et pour président M. [U] ;
– la SARL Casoxia Conseil avait pour activité le courtage, le conseil et l’audit en matière d’assurances, et pour gérant M. [U] ;
– la SAS Casoxia Invests avait pour activité les transactions sur biens immobiliers et fonds de commerce et la commercialisation de tous produits de défiscalisation, et pour président M. [F] ;
– la SARL Cap Associés avait pour activité le courtage en assurance et pour gérant M. [I], M. [F] détenant également des parts sociales ;
de sorte que les quatre sociétés n’avaient pas toutes le même dirigeant de droit.
Il n’est pas contesté que la SAS Casoxia Holding, la SARL Casoxia Conseil et la SAS Casoxia Invests faisaient toutes trois partie du groupe Casoxia ; pour autant, la seule appartenance à un même groupe ne caractérise pas le co-emploi et M. [W] ne donne strictement aucun élément sur une immixtion permanente de la SAS Casoxia Holding dans la gestion économique et sociale de la SARL Casoxia Conseil et de la SAS Casoxia Invests, conduisant à la perte totale d’autonomie d’action de ces dernières.
Quant à la SARL Cap Associés, son appartenance au groupe Casoxia est contestée par les intimés ; M. [W] ne fournissant aucun élément sur des liens capitalistiques entre la SARL Cap Associés d’une part, et la SAS Casoxia Holding, la SARL Casoxia Conseil et la SAS Casoxia Invests d’autre part, cette appartenance au groupe ne peut pas être retenue. Par ailleurs, M. [W] ne démontre pas que M. [U] était le dirigeant de fait de la SARL Cap Associés. Il n’établit pas non plus la persistance, à compter du 14 janvier 2019, du lien de subordination avec la SAS Casoxia Holding, les pièces qu’il produit étant insuffisantes :
– le mail qu’il a envoyé à M. [U] le 17 janvier 2019 demandant à discuter de son salaire et de son contrat de travail n’établit pas que c’est M. [U] qui a rédigé le contrat de travail du 14 janvier 2019 avec la SARL Cap Associés, d’ailleurs la réponse de M. [U] n’est pas produite ;
– le mail qu’il a envoyé à M. [U] le 4 avril 2019 faisant ‘le bilan de la journée’ est insuffisamment précis pour prouver qu’il rendait des comptes à M. [U] en qualité de salarié de ce dernier, étant rappelé que son employeur la SARL Cap Associés était bénéficiaire d’un mandat pour commercialiser les produits Casoxia, et que nécessairement M. [W] devait échanger avec M. [U] ;
– les attestations de M. [C], stagiaire, disant que MM. [W], [I] et [F] étaient ‘sous la direction de M. [U] directeur de Casoxia’, de Mme [P], embauchée en qualité de directrice financière du groupe Casoxia en février 2019, affirmant que M. [W] a procédé à son recrutement en qualité de DRH de Casoxia, et de M. [S], client, disant que, le 23 janvier 2019, M. [W] lui a été présenté comme le DRH, sont vagues et ne décrivent pas de situations postérieures au 14 janvier 2019 où M. [U] aurait donné à M. [W] des directives ou aurait contrôlé l’exécution de son travail ;
– le mail de M. [W] du 28 juin 2019 disant que sa rupture conventionnelle avec la SARL Cap Associés a été traitée par M. [I] et par M. [U] ne fait ressortir que les propres dires de l’appelant et aucune pièce ne corrobore le fait que M. [U] aurait pris des décisions relatives à la rupture conventionnelle ;
– le fait que M. [W] ait continué à utiliser un agenda, une adresse mail et des cartes de visite Casoxia, qu’il ait été formateur pour Casoxia en 2019 et que Casoxia ait payé l’abonnement Linkedin de M. [W], ne caractérisent pas la persistance d’un lien de subordination, d’autant que la SAS Casoxia Holding et la SARL Cap Associés étaient liées par un mandat concernant notamment la commercialisation et la formation.
De leur côté, les intimés produisent les attestations de deux anciens mandataires en intermédiaire d’assurances indépendants mandatés par les sociétés Casoxia et Cap Associés, M. [D] et Mme [B], affirmant qu’à partir de janvier 2019, mois où M. [W] a été embauché par la SARL Cap Associés, ils n’ont plus vu M. [U] diriger M. [W] qui en référait à MM. [I] et [F].
Par suite, aucun co-emploi ne sera retenu, et aucune condamnation solidaire ne pourra être prononcée, le jugement étant confirmé sur ce point.
2 – Sur la prime de résultat dans le cadre du contrat de travail conclu avec la SAS Casoxia Holding le 10 septembre 2018 :
En première instance, M. [W] demandait la condamnation des quatre sociétés à une prime de résultat de 1.100 €, outre congés payés de 110 €.
Le conseil de prud’hommes a fait droit à cette demande mais uniquement contre la SAS Casoxia Holding, laquelle était muette sur cette prime.
En cause d’appel, dans les motifs de ses conclusions, M. [W] demande la condamnation des quatre sociétés, mais dans le dispositif qui seul saisit la cour, il demande la confirmation du jugement qui a condamné la SAS Casoxia Holding.
Toutefois, le contrat de travail conclu avec la SAS Casoxia Holding ne mentionnait pas de prime de résultat, et M. [W] ne produit aucun document contractuel relatif à cette prime. Il ne produit que son propre mail du 28 juin 2019 dans lequel il se disait créancier de primes de résultat de 1.100 € sur la période de septembre à décembre 2018, mais qui ne fait pas la preuve de l’obligation de la SAS Casoxia Holding.
Infirmant le jugement, la cour déboutera M. [W] de sa demande.
3 – Sur la rupture du 9 janvier 2019 de la période d’essai du contrat de travail conclu entre M. [W] et la SAS Casoxia Holding :
En application des articles L 1221-19 et L 1221-20 du code du travail, le contrat à durée indéterminée peut comporter une période d’essai dont la durée maximale est, pour les cadres, de 4 mois ; elle permet à l’employeur d’évaluer les compétences du salarié dans son travail, notamment au regard de son expérience. Les articles L 1221-21 et L 1221-23 prévoient la possibilité de renouveler la période d’essai si un accord de branche et le contrat de travail le stipulent.
L’article L 1221-25 dispose que, lorsqu’il est mis fin par l’employeur au contrat en cours ou au terme d’une période d’essai sans respect du délai de prévenance qui est d’un mois après 3 mois de présence, l’inexécution ouvre droit pour le salarié, sauf faute grave, à une indemnité compensatrice égale au montant des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s’il avait accompli son travail jusqu’à l’expiration du délai de prévenance, indemnité compensatrice de congés payés comprise.
L’employeur est libre de rompre la période d’essai, sans avoir à justifier d’un motif, sauf abus de droit dont la preuve incombe au salarié ; ainsi, la rupture de la période d’essai est considérée comme abusive lorsque les véritables motifs de l’employeur sont sans relation avec les compétences du salarié. En cas d’abus de droit, le salarié peut prétendre à des dommages-intérêts pour rupture abusive de la période d’essai.
Il incombe au salarié qui affirme que la rupture de la période d’essai était abusive de le prouver.
L’article II du contrat de travail conclu avec la SAS Casoxia Holding stipulait une période d’essai de 4 mois, expirant au 9 janvier 2019, pouvant être rompue par LRAR et moyennant un délai de prévenance d’un mois au-delà de 3 mois de présence dans l’entreprise.
M. [W] affirme que la rupture de la période d’essai par la SAS Casoxia Holding le 9 janvier 2019 est abusive car elle est survenue le dernier jour, dans le seul but de transférer le contrat de travail pour les mêmes fonctions au sein d’une autre société du groupe, la SARL Cap Associés, et de lui faire perdre son statut cadre, son temps plein et son ancienneté, M. [U] restant son employeur, sans lien avec les compétences du salarié, et sans respect du délai de prévenance d’un mois et du formalisme requis.
Il vient d’être dit que la SARL Cap Associés ne faisait pas partie du groupe Casoxia et qu’à compter du 14 janvier 2019, le seul employeur de M. [W] était la SARL Cap Associés et non les sociétés Casoxia Holding, Casoxia Conseil et Casoxia Invests, ni M. [U].
Dans son courrier du 9 janvier 2019, la SAS Casoxia Holding indiquait à M. [W] que l’essai n’avait pas donné entière satisfaction. Dans ses conclusions, elle explique qu’il avait été convenu que M. [W] recrute au minimum 5 personnes par mois, et qu’en réalité il n’en a recruté que 6 en tout et pour tout de septembre 2018 à janvier 2019. Elle verse aux débats les attestations de formation des 6 stagiaires, ainsi que l’attestation de Mme [Y], chargée de recrutement au sein de la SAS Casoxia Holding avant l’embauche de M. [W], qui indique avoir recruté 15 candidats en 2 mois.
M. [W] réplique qu’aucun objectif n’a été formalisé dans le contrat de travail et qu’il n’a jamais reçu de sanction ni de reproche préalable. Pour autant, il ne remet pas en cause la réalité d’un objectif verbal de 5 personnes par mois, et l’absence de mention de cet objectif dans un écrit n’empêche pas l’employeur de s’en prévaloir.
A compter du 14 janvier 2019, M. [W] n’avait ni les mêmes fonctions que précédemment ni le même employeur, de sorte que le fait qu’il ne donne pas satisfaction à la SAS Casoxia Holding en qualité de DRH ne signifiait pas qu’il ne pouvait pas donner satisfaction à la SARL Cap Associés, société juridiquement indépendante, en qualité de chargé de recrutement.
Ainsi, M. [W] ne démontre pas le détournement de la part de la SAS Casoxia Holding dans le cadre de la rupture de la période d’essai.
Par ailleurs, le fait que la rupture ait été notifiée par lettre remise en main propre et non par LRAR et que la SAS Casoxia Holding n’ait pas respecté le délai de prévenance d’un mois, ne rendait pas cette rupture abusive. M. [W] sera donc débouté de sa demande de dommages et intérêts de 6.557,40 € qu’il rattache à la rupture abusive de la période d’essai tout en la qualifiant de demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale et fautive du contrat de travail.
Il demeure que le non-respect du délai de prévenance ouvre droit pour le salarié à l’indemnité prévue par l’article L 1221-25. D’ailleurs, même si, dans le dispositif de ses conclusions, la SAS Casoxia Holding demande le débouté de M. [W] de sa demande d’indemnité pour non-respect du délai de prévenance, dans les motifs de ses conclusions elle indique ne pas être opposée à cette indemnité et elle ne formule aucune critique du jugement à ce sujet.
Le jugement a alloué au salarié une indemnité de 1.639,93 € sans détailler son calcul. M. [W] réclame la somme de 2.185,80 €, en retenant la moyenne de ses salaires bruts de septembre 2018 à mai 2019 versés par la SAS Casoxia Holding puis la SARL Cap Associés, en ce compris les heures complémentaires et heures supplémentaires réclamées. Or, il convient de prendre en compte les seuls salaires versés par la SAS Casoxia Holding qui a rompu la période d’essai ; le contrat de travail et l’attestation Pôle Emploi établis par la SAS Casoxia Holding mentionnant un salaire brut mensuel de 1.830 €, la cour condamnera la SAS Casoxia Holding au paiement d’une indemnité de 1.830 €, par infirmation du jugement.
4 – Sur les rappels de salaires au titre du contrat de travail conclu entre M. [W] et la SARL Cap Associés le 14 janvier 2019 :
Aux termes de l’article L 3123-9 du code du travail, les heures complémentaires ne peuvent avoir pour effet de porter la durée de travail accomplie par un salarié à temps partiel au niveau de la durée légale du travail ou, si elle est inférieure, au niveau de la durée de travail fixée conventionnellement.
A défaut, le contrat de travail à temps partiel est requalifié en contrat de travail à temps plein à compter de la première irrégularité.
Aux termes de l’article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
Il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
Le contrat de travail conclu avec la SARL Cap Associés était à temps partiel (25 heures par semaine). M. [W] demande sa requalification à temps plein aux motifs que, dès la première semaine du 14 janvier 2019, il a travaillé 35,50 heures, et que d’autres dépassements ont ensuite eu lieu. Il verse aux débats son agenda 2019, entourant pour chaque jour l’heure de début et l’heure de fin de travail, avec le total hebdomadaire, et un tableau récapitulatif de son temps de travail sur les semaines 3 à 20 de l’année 2019, mentionnant sur chaque semaine les heures réellement effectuées (entre 24 et 40 heures), les heures dues au titre d’un temps plein (total 180 heures) et les heures au-delà de 35 heures (total 10,50 heures). Il ajoute que le bulletin de paie de février 2019 mentionnait un congé sans solde du 18 au 22 février 2019, mais qu’en réalité il a travaillé du 19 au 22 février de sorte que la retenue au titre de ces 4 jours est injustifiée. Il réclame des rappels de salaires, sur la période du 14 janvier au 18 mai 2019, de :
– 2.937,60 € pour la requalification à temps plein,
– 214,30 € pour les heures au-delà de 35 heures,
– 383,66 € du 19 au 22 février 2019,
soit un total de 3.535,56 €,
outre congés payés afférents.
Ainsi, M. [W] fournit des éléments suffisamment précis sur son temps de travail, de nature à justifier une requalification à temps plein et des rappels de salaires sur la base d’un temps plein de 35 heures voire sur la base des heures excédant les 35 heures les trois semaines concernées (semaines 3, 4 et 10). Il appartient à la SARL Cap Associés de fournir ses propres éléments.
La SARL Cap Associés reproche à M. [W] de ne pas préciser ses horaires quotidiens et ses pauses ; or les horaires figurent sur les agendas et M. [W] dit avoir déduit les pauses.
La société indique également que les fonctions de M. [W] ne justifiaient pas une telle durée de travail car les entretiens n’excédaient pas 30 minutes par candidat, mais elle ne produit pas d’éléments relatifs au temps de travail que selon elle le salarié aurait effectué.
Enfin, s’agissant des 19, 20, 21 et 22 février 2019, M. [W] a inscrit sur son agenda ‘AFPR’ ou ‘prépa formation’, de sorte que la cour considère qu’il a bien travaillé et n’était pas en congé sans solde.
Infirmant le jugement, la cour condamnera donc la SARL Cap Associés au paiement des sommes réclamées.
5 – Sur la requalification du contrat de mandat conclu le 15 janvier 2019 entre M. [W] et la SARL Cap Associés en contrat de travail :
M. [W] et la SARL Cap Associés ont signé un contrat de mandat le 15 janvier 2019 et M. [W] a, le 15 février 2019, déclaré auprès de l’URSSAF une activité de profession libérale en qualité de micro-entrepreneur, avec un début au 1er janvier 2019, puis il s’est inscrit au registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance le 12 mars 2019.
M. [W], qui demande la requalification du mandat en contrat de travail et le paiement des commissions en application de ce contrat de 2.400 € outre congés payés de 240 €, affirme qu’en réalité, sous couvert d’un mandat, il a exercé ses fonctions sous un lien de subordination, sans indépendance.
Au vu de la définition de la relation de travail qui a été rappelée ci avant, et de l’article L 8221-6 du code du travail qui instaure une présomption de non-salariat pour les personnes inscrites au registre du commerce et des sociétés, il appartient à celui qui se prévaut d’un contrat de travail d’en établir la réalité.
M. [W] rappelle en premier lieu le contexte de la signature du mandat, juste après la rupture du contrat de travail à temps plein avec la SAS Casoxia Holding et la conclusion du contrat de travail à temps partiel avec la SARL Cap Associés, et il soutient qu’il a été contraint de s’enregistrer à l’URSSAF et de signer le mandat, et qu’il a continué à travailler dans les mêmes conditions comme DRH sous la subordination de MM. [U], [I] et [F]. Il a toutefois été jugé que M. [W] avait été salarié successivement de deux entités juridiques distinctes et à deux postes différents, sans situation de co-emploi. Par ailleurs, M. [W] ne démontre pas une contrainte exercée par la SARL Cap Associés pour qu’il se déclare micro-entrepreneur ni pour qu’il signe le mandat.
En second lieu, M. [W] affirme qu’il exerçait sa prétendue activité de mandataire pendant ses horaires de travail et que les deux contrats de vente conclus l’ont été le 23 janvier 2019, sous le contrôle de M. [F]. Toutefois, le contrat de travail à temps partiel fixait les horaires de travail afin de permettre à M. [W] d’exercer son mandat le reste du temps. Le fait que M. [F] ait accompagné M. [W] au rendez-vous du 23 janvier 2019 ne caractérisait pas un lien de subordination, d’autant que M. [D], M. [L] et Mme [B], anciens mandataires, attestent qu’il était d’usage pour les managers de la SARL Cap Associés d’accompagner les nouveaux mandataires à leurs premiers rendez-vous avec les clients afin de les aider à démarrer leur activité.
Il n’y a donc pas lieu à requalifier le mandat en contrat de travail.
Par suite, la demande en paiement des commissions en application d’un contrat qui est un mandat commercial et non un contrat de travail ne relève pas de la compétence du conseil de prud’hommes. C’est à juste titre que le conseil de prud’hommes de Toulouse s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Toulouse.
6 – Sur l’indemnité pour travail dissimulé :
En vertu de l’article L 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement des formalités de déclaration préalable à l’embauche, ou de délivrance des bulletins de paie, ou de mentionner sur les bulletins de paie d’un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, ou de se soustraire intentionnellement aux déclarations de salaires et cotisations sociales auprès des organismes de recouvrement des cotisations sociales.
En application de l’article L 8223-1, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel l’employeur a eu recours en commettant les faits prévus à l’article L 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaire.
M. [W] réclame aux quatre sociétés intimées une indemnité pour travail dissimulé en soutenant :
– que le mandat conclu avec la SARL Cap Associés était en réalité un contrat de travail ;
– qu’il y a eu un prêt illicite de main d’oeuvre ;
– que les heures au-delà du temps partiel de 25 heures n’ont pas été déclarées.
Toutefois :
– le mandat n’a pas été requalifié en contrat de travail ;
– M. [W] ne fournit aucun élément établissant qu’il aurait travaillé pour la SARL Casoxia Conseil et la SAS Casoxia Invests ; ses prestations de travail ne sont établies qu’au profit de la SAS Casoxia Holding puis de la SARL Cap Associés dans le cadre des contrats de travail conclus ;
– les rappels de salaires mis à la charge de la SARL Cap Associés au titre de la requalification du contrat à temps plein, des heures supplémentaires et du congé sans solde ne caractérisent pas l’intention de dissimulation de celle-ci ;
de sorte que la demande d’indemnité pour travail dissimulé sera rejetée, par confirmation du jugement.
7 – Sur la nullité de la rupture conventionnelle du contrat de travail conclu entre M. [W] et la SARL Cap Associés le 14 janvier 2019 :
En application des articles L 1237-12 et L 1237-13 du code du travail, les parties peuvent convenir d’une rupture conventionnelle lors d’un ou plusieurs entretiens ; à compter du jour de la signature, chacune dispose d’un délai de 15 jours calendaires pour exercer son droit de rétractation.
Il est versé aux débats :
– un document du 1er avril 2019 signé par les deux parties, M. [W] disant engager une procédure de rupture conventionnelle en accord avec la SARL Cap Associés, une date de réunion étant prévue au 8 avril 2019 à 10h ;
– une convention de rupture du 8 avril 2019 signée par les deux parties, mentionnant un entretien du 8 avril 2019, avec une fin de délai de rétractation au 23 avril 2019 ;
– une convocation du salarié par mail du 16 avril 2019 à 15h34 à un entretien du même jour à 17h ‘visant à mettre en place une rupture conventionnelle’ ;
– l’attestation de la Direccte du 10 septembre 2019 certifiant que l’homologation a été prononcée le 15 mai 2019.
M. [W] soutient que les documents de rupture ont été antidatés au 8 avril 2019 au vu de la convocation à un entretien du 16 avril 2019, de sorte que le salarié a été privé de son droit à un entretien préalable à la rupture et de son droit de rétractation de 15 jours.
Néanmoins, M. [W] a bien signé le document du 1er avril 2019 fixant un entretien au 8 avril 2019 et il ne produit aucune pièce démontrant qu’aucun entretien ne se serait tenu le 8 avril 2019, ni que les documents auraient en réalité été signés le 16 avril 2019 ; rien n’empêchait les parties, après la signature du document de rupture conventionnelle qui laissait au salarié un délai de rétractation de 15 jours, d’échanger à nouveau ce qui explique un nouvel entretien du 16 avril 2019, mais cet entretien n’a pas donné lieu à une modification de la convention.
Confirmant le jugement, la cour rejettera donc les demandes de nullité de la rupture conventionnelle et les demandes afférentes (indemnité compensatrice de préavis et dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse).
Par ailleurs, M. [W] réclame un rappel d’indemnité de licenciement légale de 96,72 € compte tenu d’une indemnité de rupture conventionnelle déjà versée de 144,37 €, mais il n’explicite pas son calcul, et de surcroît l’indemnité de licenciement légale n’est due qu’à partir de 8 mois d’ancienneté ce qui n’est pas le cas de M. [W] qui était été embauché le 14 janvier 2019 par la SARL Cap Associés. Il sera donc également débouté de sa demande de ce chef.
8 – Sur le surplus :
Compte tenu de l’indemnité pour non-respect du délai de prévenance mise à la charge de la SAS Casoxia Holding et des rappels de salaires mis à la charge de la SARL Cap Associés, chacun de ces sociétés devra remettre à M. [W] un bulletin de paie, un reçu pour solde de tout compte et une attestation Pôle Emploi rectifiés, sans qu’il y ait lieu de fixer une astreinte.
Ces deux sociétés supporteront in solidum les entiers dépens de première instance et d’appel, ainsi que leurs frais irrépétibles, et ceux engagés par M. [W] à hauteur de 2.000 €.
PAR CES MOTIFS,
Confirme le jugement en ce qu’il a :
– jugé qu’il n’existait pas de co-emploi entre la SAS Casoxia Holding, la SARL Casoxia Conseil, la SAS Casoxia Invests et la SARL Cap Associés,
– jugé que la rupture conventionnelle de la période d’essai par la SAS Casoxia Holding n’était pas abusive,
– débouté M. [N] [W] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale et fautive du contrat de travail,
– jugé qu’il n’y avait pas lieu à requalifier le mandat conclu entre M. [N] [W] et la SARL Cap Associés en contrat de travail,
– jugé que le conseil de prud’hommes de Toulouse était incompétent pour statuer sur la demande de rappels de commissions au profit du tribunal de commerce de Toulouse,
– débouté M. [N] [W] de sa demande d’indemnité pour travail dissimulé,
– débouté M. [N] [W] de ses demandes de nullité de la rupture conventionnelle conclue avec la SARL Cap Associés et de ses demandes au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, de l’indemnité de licenciement et des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Infirme le jugement pour le surplus,
Statuant à nouveau sur les dispositions infirmées et y ajourant,
Déboute M. [N] [W] de sa demande de prime de résultat outre congés payés afférents,
Condamne la SAS Casoxia Holding à payer à M. [N] [W] la somme de 1.830 € pour non-respect du délai de prévenance de rupture de la période d’essai,
Condamne la SARL Cap Associés à payer à M. [N] [W] la somme de 3.535,56 € bruts de rappels de salaires, outre congés payés de 353,56 € bruts,
Ordonne à la SAS Casoxia Holding et à la SARL Cap Associés de délivrer à M. [N] [W], chacune en ce qui la concerne, un bulletin de paie, une attestation Pôle Emploi et un reçu pour solde de tout compte conformes au présent arrêt, sans astreinte,
Condamne in solidum la SAS Casoxia Holding et la SARL Cap Associés à payer à M. [N] [W] la somme de 2.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,
Déboute la SAS Casoxia Holding et la SARL Cap Associés de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne in solidum la SAS Casoxia Holding et la SARL Cap Associés aux dépens de première instance et d’appel.
Le présent arrêt a été signé par Catherine Brisset, présidente, et par Arielle Raveane, greffière.
La greffière La présidente
A. Raveane C. Brisset
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