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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 9
ARRÊT DU 14 DÉCEMBRE 2022
(n° , 11 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/11020 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CA4UN
Décision déférée à la Cour : Jugement du 2 Octobre 2019 – Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de PARIS – RG n°F 17/01278
APPELANT
Monsieur [H] [Y]
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représenté par Me Jonathan BELLAICHE, avocat au barreau de PARIS, toque : K103
INTIMÉES
SELAFA MJA prise en la personne de Me [U] [D] ès qualités de mandataire liquidateur de la Société SLR
[Adresse 1]
[Localité 6]
Sans avocat constitué, signifié à personne morale le 12 Septembre 2022
SASU UBER FRANCE
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée par Me Cyril GAILLARD, avocat au barreau de PARIS, toque : T12
INTERVENANTE
ASSOCIATION UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF EST
[Adresse 2]
[Localité 8]
Représenté par Me Florence ROBERT DU GARDIER, avocat au barreau de PARIS, toque : P0061
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le19 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Stéphane MEYER, président, et Mme Valérie BLANCHET, conseillère, chargé du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Stéphane MEYER, président de chambre
Mme Valérie BLANCHET, conseillère
M. Fabrice MORILLO, conseiller
Greffier : Mme Julie CORFMAT, lors des débats
ARRÊT :
– Réputé contradictoire
– mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.
– signé par Monsieur Stéphane MEYER, président de chambre, et par Madame Pauline BOULIN, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Suivant contrat verbal à durée indéterminée, M. [Y] a été engagé à compter du 12 septembre 2016 par la société SLR, en qualité de chauffeur, sur la base d’une rémunération mensuelle de 1 466, 65 euros pour une durée de travail de 151, 68 heures mensuelles.
La société SLR compte moins de onze salariés et applique la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950.
Se prévalant d’une relation de co-emploi avec les sociétés SLR et Uber France et s’estimant insuffisamment rempli de ses droits, M. [Y] a saisi le 20 février 2017 la juridiction prud’homale d’une demande de résiliation de son contrat de travail aux torts de l’employeur.
Le 18 avril 2017, le salarié a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement le 2 mai 2017.
Le 10 mai 2017, il a été licencié pour absence injustifiée depuis le 23 novembre 2016 ayant perturbé gravement le fonctionnement de l’entreprise et absence de réponse à la mise en demeure de se présenter au travail du 6 avril 2017.
Par jugement du 2 octobre 2019, le conseil de prud’hommes de Paris, en formation de départage, a rejeté la demande de résiliation judiciaire, a considéré le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et condamné la société SLR à verser à M. [Y] la somme de 1 466,65 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre 146,66 euros au titre des congés payés afférents, a débouté le salarié du surplus de ses demandes en reconnaissance d’un co-emploi, d’un prêt main d’oeuvre, de rappel de salaire de décembre 2016 au 10 mai 2017, de rappel d’heures supplémentaires, d’indemnités pour non respect de la durée quotidienne et hebdomadaire de travail, de dommages et intérêts pour défaut de visite médicale, pour non respect de l’obligation de sécurité, pour absence de repos compensateur relatif au travail de nuit, d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé. Il a débouté les sociétés de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile et a condamné la société SLR à verser au salarié la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Par déclaration du 3 novembre 2019, M. [Y] a interjeté appel du jugement notifié le 4 octobre 2019.
Par jugement du 22 janvier 2020, le tribunal de commerce de Bobigny a prononcé la liquidation judiciaire de la société SLR et a désigné la société MJA, en la personne de Maître [D], en qualité de mandataire liquidateur.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 8 septembre 2022, M. [Y] demande à la cour d’infirmer le jugement sauf en ce qu’il a débouté la société Uber de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et statuant à nouveau :
A titre principal,
– dire que la société SLR et la société Uber France sont co-employeurs,
– prononcer la résiliation de son contrat de travail aux torts exclusifs des sociétés SLR et Uber France,
-fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société SLR et condamner in solidum la société Uber France à lui verser la somme de 2 280, 56 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre 228, 05 euros au titre des congés payés afférents,
A titre subsidiaire,
– fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société SLR aux sommes allouées par le jugement, soit 1 466, 65 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 146, 66 euros au titre des congés payés afférents,
– infirmer le jugement pour le surplus, et statuant à nouveau,
– fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société SLR et condamner in solidum la société Uber France à lui verser les sommes suivantes :
– 8 191, 41 euros à titre de rappel de salaires pour les mois de novembre 2016 à mai 2017 outre 819, 14 euros au titre des congés payés afférents,
– 2 124, 40 euros au titre des heures supplémentaires outre 212, 44 euros au titre des congés payés afférents,
– 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non -respect de la durée quotidienne de travail,
– 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la durée hebdomadaire de travail,
– 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de visite médicale d’embauche,
– 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect par l’employeur de l’obligation de sécurité,
– 4 408, 43 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de repos compensateur relatif au travail de nuit, outre 440, 80 euros au titre des congés payés afférents,
– 13 683, 36 euros au titre de l’indemnité pour travail dissimulé,
– 3 000 euros au titre du recours au prêt de main d’oeuvre illicite et au délit de marchandage,
– 378,90 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés non versées lors du solde de tout compte,
– 13 683, 36 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Il demande à la cour d’assortir les condamnations de l’intérêt au taux légal, de lui accorder le bénéfice de l’anatocisme, de déclarer la décision opposable à l’Unedic AGS CGEA France Est, de débouter les intimées de leurs demandes.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 19 septembre 2022, la société Uber France demande à la cour de confirmer le jugement, de la mettre hors de cause, de débouter M. [Y] de ses demandes et de le condamner à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 8 octobre 2020, l’AGS Ile de France Est demande à la cour d’infirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société SLR à payer à M. [Y] diverses sommes au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents et de le confirmer en ce qu’il l’a débouté du surplus de ses demandes, statuant à nouveau, de le débouter de ses demandes et, en tout état de cause, de limiter sa garantie aux assiettes et plafonds légalement prévus et statuer sur les dépens sans les mettre à sa charge.
La société MJA, prise en la personne de Maître [D] en sa qualité de mandataire liquidateur de la société SLR, n’a pas constitué avocat.
L’instruction a été clôturée le 20 septembre 2022 et l’affaire fixée à l’audience du 19 octobre 2022.
MOTIFS
Aux termes de l’article 954 du code de procédure civile, la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.
La société MJA, prise en la personne de Maître [D] en sa qualité de mandataire liquidateur de la société SLR, qui n’a pas constitué avocat, est réputée s’approprier les motifs du jugement.
Lorsque le juge est saisi à la fois d’une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et d’une contestation du licenciement intervenu postérieurement, il doit d’abord statuer sur la demande de résiliation.
Sur la qualité pour défendre de la société Uber France
La société Uber France soutient que M. [Y] ne justifie pas d’un intérêt à agir à son encontre dès lors qu’elle n’est pas l’éditeur de l’application Uber qui est exploitée par la société Uber BV. Depuis depuis juillet 2013, son activité se limite à fournir des services d’assistance, de support et de marketing à l’ensemble des filiales du gourpe Uber et seule la société Uber BV contracte exclusivement avec les professionnels de transport et ceux qui utilisent l’application à titre de passager.
L’appelant soutient qu’elle a qualité pour défendre.
Le conseil de prud’hommes a mis hors de cause la société Uber France.
En l’espèce, l’extrait kbis de la société Uber France mentionne qu’elle a pour activité la fourniture de services d’assistance, de support et de marketing à l’ensemble des filiales du groupe Uber.
Le contrat de partenariat a été conclu entre la société partenaire et Uber ” désigné au paragraphe 1-1 de la convention comme “Uber BV, société à responsabilité limitée constituée en vertu de la loi néerlandaise, au siège situé à Amsterdam, aux Pays-Bas”.
Il s’en déduit que la société Uber France n’a pas qualité pour défendre.
La cour accueille la fin de non recevoir soulevée par la société Uber France et déclare irrecevables les demandes formées à son encontre.
Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur
La résiliation judiciaire du contrat de travail est prononcée à l’initiative du salarié aux torts de l’employeur lorsque sont établis des manquements de ce dernier à ses obligations suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail. Dans ce cas, la résiliation judiciaire produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Au soutien de sa demande, M. [Y] fait grief à son employeur de lui avoir demandé d’accomplir des transports individuels de personne alors qu’il n’était pas VTC, de ne pas avoir souscrit de mutuelle et de régime de prévoyance, d’être à l’origine d’un prêt illicite de main d’oeuvre au profit de la société Uber ou d’avoir commis un délit de marchandage, de ne pas lui avoir payé des heures supplémentaires, des heures de nuit, de ne pas avoir respecté la durée quotidienne et hebdomadaire de travail, de ne pas lui avoir accordé de repos compensateur, de ne pas avoir respecté les règles en matière de visite médicale, d’avoir manqué à son obligation de sécurité, d’avoir commis du travail dissimulé et de ne pas lui avoir remis ses bulletins de salaire.
Il convient d’examiner successivement ces griefs.
-Sur le caractère illégal de l’activité de transport individuel
L’appelant soutient que l’employeur l’a contraint à accomplir des transports individuels.
Il ne produit aucun élément au soutien de ses allégations. Ce grief n’est pas retenu.
-Sur l’existence d’un prêt de main d’oeuvre illicite entre les deux sociétés SLR et Uber ou de marchandage
Aux termes de l’article L. 8231-1 et L. 8241-1 du code du travail, toute opération à but lucratif de fourniture de main d’oeuvre qui a pour effet de causer un préjudice au salarié qu’elle concerne ou d’éluder les dispositions de la loi ou du règlement ou de conventions ou accords collectifs du travail est un marchandage; toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main d’oeuvre à but lucratif effectué en dehors des dispositions légales relatives au travail temporaire est illicite.
La cour ayant mis hors de cause la société Uber France, ce grief n’est pas retenu.
– Sur l’absence de prise en compte par l’employeur de son droit de retrait
Selon l’article L.4131 du code du travail, le travailleur alerte immédiatement l’employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé. Il peut se retirer d’une telle situation.
L’appelant reproche à l’employeur de ne pas lui avoir versé son salaire après le 26 novembre 2016, date à laquelle il affirme avoir exercé son droit de retrait en raison de ses conditions de travail. Il indique que son retrait est fondé sur le fait que l’employeur ne lui a pas fait signer un contrat de travail, qu’il n’a pas bénéficié d’une visite d’embauche et d’une surveillance médicale renforcée, n’a pas souscrit de mutuelle et ne lui payait pas d’heures supplémentaires.
Toutefois, les éléments invoqués par le salarié ne sont pas de nature à caractériser un motif raisonnable de penser qu’il existe un danger grave et imminent de natre à justifier l’exercice de son droit de retrait.
Ce grief n’est pas retenu.
-Sur le rappel d’heures supplémentaires
Le salarié soutient avoir accompli des heures supplémentaires au delà des 35 heures hebdomadaires accomplies que l’employeur n’a pas rémunérées.
Il sollicite la somme de 2 124, 40 euros à titre de rappel d’heures supplémentaires.
L’article L.3171-4 du code du travail énonce qu’ en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par le salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Il résulte de ces dispositions qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
Le salarié peut prétendre au paiement des heures supplémentaires accomplies soit avec l’accord au moins implicite de l’employeur, soit s’il établit que la réalité de telles heures a été rendue nécessaire par les tâches qui lui ont été confiées.
En l’espèce, le salarié affirme qu’il effectuait entre 14 heures et 27 heures d’heures supplémentaires par semaine et présente à l’appui de sa demande un bon de commande à son nom du 24 novembre 2016 qui mentionne qu’il est “hors ligne”, des historiques de courses qui ne sont pas à son nom et ne comportent aucun numéro de véhicule, ainsi qu’ un document établi sur la base de ses affirmations mentionnant, par semaine, les heures travaillées et des heures supplémentaires par semaine.
Le salarié apporte ainsi des éléments suffisamment précis sur les heures qu’il prétend avoir accomplies.
L’employeur ne produit aucun élément en réponse de contrôle de la durée du travail.
Au regard de l’ensemble de ses éléments et des pièces produites dont il n’est pas établi, pour une partie d’entre elles qu’elles concernent de manière certaine le salarié, la cour retient que des heures supplémentaires ont été accomplies sans être rémunérées, dans une moindre mesure cependant que celle alléguée et alloue au salarié la somme de 700 euros au titre des heures supplémentaires accomplies pour la période du 12 septembre 2016 au 21 novembre 2016, outre la somme de 70 euros au titre des congés payés afférents, par infirmation du jugement.
Elle retient ce grief.
– Sur le non-respect par l’employeur de la durée quotidienne de travail
Le salarié sollicite la somme de 3 000 euros.
Il soutient qu’il n’a pas bénéficié d’un repos quotidien d’une durée minimale de onze heures consécutives.
Selon l’article L. 3131-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, tout salarié bénéficie d’un repos quotidien d’une durée minimale de onze heures consécutives, sauf dans les cas prévus aux articles L. 3131-2 et L. 3131-3 ou en cas d’urgence, dans des conditions déterminées par décret.
La preuve que le salarié a respecté le repos quotidien incombe à l’employeur.
L’employeur ne produit aucun élément.
En conséquence, la cour, par infirmation du jugement, alloue au salarié la somme de 300 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect des règles de durée quotidienne de travail.
Ce grief est établi.
-Sur le non-respect par l’employeur de la durée hebdomadaire de travail
Le salarié sollicite la somme de 3 000 euros.
Selon l’article L. 3121-35, alinéa 1er, du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi nº 2016-1088 du 8 août 2016, interprété à la lumière de l’article 6 b) de la directive nº 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 5. Aux termes du texte susvisé, au cours d’une même semaine, la durée du travail ne peut dépasser quarante-huit heures. Le dépassement de la durée moyenne maximale de travail hebdomadaire fixée à l’article 6, sous b), de la directive 2003/88 constitue, en tant que tel, une violation de cette disposition, sans qu’il soit besoin de démontrer en outre l’existence d’un préjudice spécifique.
Il incombe à l’employeur de prouver le respect des seuils et plafonds relatifs à la durée du travail.
Il ne produit aucun élément.
En conséquence, la cour par infirmation du jugement alloue au salarié la somme de 300 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la durée hebdomadaire de travail.
Ce grief est retenu.
– Sur la demande de repos compensateur au titre du travail de nuit
Le salarié sollicite 4 408, 43 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de repos compensateur pour chaque heure de travail de nuit qu’il affirme avoir accomplies pour un total de 454 heures 01 entre le 14 septembre 2016 et le 24 novembre 2016.
L’article L. 3122-1 du code du travail énonce que le recours au travail de nuit est exceptionnel.
Selon l’article L.3122-5 du code du travail, le travailleur de nuit est un salarié qui accomplit :
– soit au moins 2 fois par semaine, selon son horaire de travail habituel, au moins 3 heures de travail de nuit quotidiennes ;
– soit au cours d’une période de référence, un nombre minimal d’heures de travail de nuit. Ce nombre d’heures et cette période de référence sont fixés par convention ou accord collectif étendu. À défaut, est considéré comme travailleur de nuit le salarié qui accomplit au moins 270 heures de travail de nuit sur une période de 12 mois consécutifs.
Il appartient à celui qui soutient que l’employeur a recours au travail de nuit en violation de ces dispositions d’en rapporter la preuve.
En l’espèce, les fiches de transport produites ne sont pas au nom du salarié et aucun autre élément n’est produit par l’intéressé pour établir qu’il accomplissait un travail de nuit.
En outre, la cour a retenu un faible nombre d’heures supplémentaires.
En conséquence, la cour confirme le jugement en ce qu’il a débouté le salarié de sa demande.
Ce grief n’est pas retenu.
Sur l’absence de visite médicale d’embauche et de suivi et le non-respect de l’obligation de sécurité
Le salarié fait valoir qu’il a été privé de visite médicale d’embauche et de surveillance médicale renforcée liée à son statut de travailleur de nuit et que l’employeur a manqué à son obligation de sécurité.
L’AGS conteste l’existence d’un manquement de l’employeur à son obligation et soutient que l’existence d’un préjudice n’est pas rapportée.
Tenu d’une obligation de sécurité, l’employeur doit en assurer l’effectivité en prenant les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Il ne méconnaît pas son obligation en la matière lorsqu’il justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L.4121-1 et L.4121-2 du code du travail.
En l’espèce, la cour n’a pas retenu que le salarié était un travailleur de nuit.
L’employeur ne justifie pas avoir sollicité une visite médicale d’embauche pour le salarié dont les fonctions nécessitent notamment une bonne acuité visuelle et un bon niveau d’audition.
En conséquence, la cour, par infirmation du jugement, alloue au salarié la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts.
Ce grief est retenu.
Sur la demande au titre du travail dissimulé
Conformément à l’article L.8221-5 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, est constitutif de travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour l’employeur de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie.
Le salarié ne démontre pas que l’employeur se serait volontairement soustrait à cette obligation.
En conséquence, la cour confirme le jugement en ce qu’il a débouté le salarié de sa demande.
Ce grief n’est pas retenu.
Sur l’absence de remise des bulletins de salaire
Le salarié affirme que l’employeur ne lui a pas remis ses bulletins de salaire.
L’employeur ne justifie pas de leur remise.
Ce grief est retenu.
Sur la demande de résiliation judiciaire
Compte tenu des heures supplémentaires accomplies par le salarié, du non-respect de la durée de travail, du manquement de l’employeur dans la remise des bulletins de salaires, de l’absence d’organisation d’une visite médicale d’embauche, la cour considère que les manquements retenus à l’encontre de l’employeur sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail.
En conséquence, la cour, par infirmation du jugement, prononce la résiliation du contrat de travail laquelle produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec effet au 10 mai 2017, date du licenciement.
Sur les conséquences financières de la rupture
Le salarié est fondé à obtenir la somme de 8 191, 41 euros à titre de rappel de salaires pour les mois de novembre 2016 à mai 2017 outre 819, 14 euros au titre des congés payés afférents.
Aux termes de l’article L.1235-5 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, si un licenciement intervient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, il est octroyé au salarié ayant moins de deux ans d’ancienneté, une indemnisation qui ne peut être inférieure au préjudice subi.
Au regard des éléments produits, de l’ancienneté du salarié, de sa rémunération, de son expérience professionnelle, la cour évalue à la somme de 2 000 euros le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, par infirmation du jugement.
Le salarié est fondé à obtenir la somme de 1 481 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 148, 10 euros au titre des congés payés afférents, par infirmation du jugement sur le quantum.
Aux termes de l’article L.3151-28 du code du travail, lorsque le contrat de travail est rompu, le salarié perçoit une indemnité compensatrice de congés payés.
Compte tenu des congés payés acquis et non pris, le salarié est fondé à obtenir la somme de 378, 90 euros.
Sur les autres demandes
En application de l’article L.622-28 du code de commerce, le jugement du tribunal de commerce qui a prononcé l’ouverture de la procédure collective à l’encontre de la société SLR a arrêté le cours des intérêts légaux.
Les créances du salarié doivent être garanties par l’association UNEDIC délégation AGS CGEA d’Ile-de-France Est, à qui le présent arrêt est déclaré opposable, dans la limite des plafonds applicables, conformément aux articles L 3253-6 et suivants du code du travail.
Il convient d’ordonner la remise par le mandataire judiciaire d’un bulletin de salaire rectificatif, d’un certificat de travail et d’une attestation destinée à Pôle Emploi rectifiés, sans qu’il apparaisse nécessaire d’assortir cette décision d’une mesure d’astreinte.
La société MJA, prise en la personne de Maître [D], en sa qualité de mandataire liquidateur de la société SLR, qui succombe, est condamnée aux dépens d’instance et d’appel.
Aucune considération ne justifie l’application de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Infirme le jugement sauf en ce qu’il a débouté la société Uber France de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
– Déclare irrecevables les demandes à l’encontre de la société Uber France ;
– Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [Y] au 10 mai 2017 ;
-Fixe les sommes suivantes au passif de la société SLR :
-700 euros au titre des heures supplémentaires accomplies pour la période du 12 septembre 2016 au 21 novembre 2016,
– 70 euros au titre des congés payés afférents,
-300 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la durée quotidienne de travail,
-300 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la durée hebdomadaire de travail,
-500 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement de l’employeur à l’obligation de sécurité et au titre de l’ absence de visite médicale d’embauche,
-8 191, 41 euros à titre de rappel de salaires pour les mois de novembre 2016 à mai 2017 ,
– 819, 14 euros au titre des congés payés afférents,
– 1 481 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,
– 148,10 euros au titre des congés payés y afférents,
– 378, 90 euros au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés,
– 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– Déboute M. [Y] du surplus de ses demandes,
– Rappelle qu’en application de l’article L. 622-28 du code de commerce le jugement du tribunal de commerce qui a prononcé l’ouverture de la procédure collective à l’encontre de la société SLR a arrêté le cours des intérêts légaux ;
– Dit que les créances de M. [Y] seront garanties par l’association UNEDIC délégation AGS CGEA d’Ile-de-France Est, à qui le présent arrêt est déclaré opposable, dans la limite des plafonds applicables, conformément aux articles L. 3253-6 et suivants du code du travail ;
– Ordonne la remise par la société MJA, prise en la personne de Maître [D], en sa qualité de mandataire liquidateur de la société SLR, d’un bulletin de salaire rectificatif, d’un certificat de travail et d’une attestation destinée à Pôle Emploi rectifiés ;
– Rejette la demande d’astreinte ;
– Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.
– Condamne la société MJA, prise en la personne de Maitre [D], en sa qualité de mandataire liquidateur de la société SLR, aux dépens d’instance et d’appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT