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ARRÊT N° /2023
PH
DU 11 MAI 2023
N° RG 22/00775 – N° Portalis DBVR-V-B7G-E6N6
Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de SAINT DIE DES VOSGES
19/00031
24 mars 2022
COUR D’APPEL DE NANCY
CHAMBRE SOCIALE – SECTION 2
APPELANTE :
Madame [M] [R]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Sophie GIRAUD substituée par Me NURY de la SCP GIRAUD-NURY, avocats au barreau de CLERMONT-FERRAND
INTIMÉS :
SAS LES MANDATAIRES, venant aux droits de Maître [T] [Z] ès qualité de liquidateur judiciaire de la SARLU SFN CONCEPT CORNER OUEST, nommé en cette qualité par jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 9 mai 2018.
[Adresse 4]
[Adresse 4]
Représenté par Me Joëlle FONTAINE de l’AARPI MILLOT-LOGIER, FONTAINE & THIRY, avocat au barreau de NANCY
S.A.R.L. VOSGES représentée par son Gérant domicilié en cette qualité audit siège pris en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par Me Joëlle FONTAINE de l’AARPI MILLOT-LOGIER, FONTAINE & THIRY, avocat au barreau de NANCY
Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS (CGEA DE [Localité 5]) Représentée par sa Directrice nationale, Madame [N] [E]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Eric SEGAUD de la SELARL FILOR AVOCATS, avocat au barreau de NANCY
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats et du délibéré,
Président : WEISSMANN Raphaël,
Conseiller : STANEK Stéphane
Greffier lors des débats : RIVORY Laurène
Lors du délibéré,
En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue en audience publique du 02 mars 2023 tenue par Raphaël WEISSMANN, Président, et Stéphane STANEK conseiller, qui ont entendu les plaidoiries, les avocats ne s’y étant pas opposés, et en ont rendu compte à la Cour composée de Raphaël WEISSMANN, président, Dominique BRUNEAU, Stéphane STANEK, conseillers, dans leur délibéré pour l’arrêt être rendu le 11 mai 2023;
Le 11 mai 2023, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l’arrêt dont la teneur suit :
EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES
Mme [M] [R] a été engagée sous contrat de travail à durée déterminée, par la société Sarl Vosges, société franchisée NOZ, à compter du 19 septembre 2011 jusqu’au 24 septembre 2011, en qualité d’employée de magasin débutante.
La relation contractuelle s’est poursuivie suivants 5 contrats à durée déterminée successifs, pour la période globale du 28 septembre 2011au 24 décembre 2011.
La salariée a finalement été embauchée sous contrat de travail à durée indéterminée à compter du 09 janvier 2012, affectée à un magasin NOZ situé à [Localité 6].
A compter du 01 décembre 2013, le contrat de travail de Mme [M] [R] a été transféré à la société Sarl SFN Concept Corner Ouest, exerçant une activité de conseil et de gestion de concept spécifiques pour les commerces de détail, suivant un accord de transfert du 22 novembre 2013, avec reprise de son ancienneté.
Par jugement du tribunal de commerce de Marseille rendu le 09 mai 2018, la société Sarlu SFN Concept Corner Ouest a été placée en liquidation judiciaire, avec la désignation de Maitre [Z] en qualité de liquidateur judiciaire.
Par courrier du 14 mai 2018, Mme [M] [R] a été convoquée à un entretien préalable au licenciement fixé au 22 mai 2018 au siège de la société à [Localité 5].
Par courrier du 23 mai 2018, Mme [M] [R] a été licenciée pour motif économique, avec acceptation du contrat de sécurisation professionnelle et fin de la relation contractuelle le 13 juin 2018.
Par requête du 23 mai 2019, Mme [M] [R] a saisi le conseil de prud’hommes de Saint-Dié-des-Vosges, aux fins :
Sur la situation de co-emploi :
– de juger qu’elle a fait l’objet de prêt de main d”uvre illicite et de marchandage commis par la société Sarl Vosges et la société Sarl SFN Concept Corner Ouest, et a été placée en situation de co-emploi,
– de condamner solidairement la Sarl Vosges à lui verser, et Maitre [Z] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Sarl SFN Concept Corner Ouest à inscrire sur le relevé des créances à son bénéfice, la somme de 10 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour prêt de main d”uvre illicite, marchandage et co-emploi,
– subsidiairement, sur ce point, de faire application de l’article 203 du code de procédure civile, et de procéder par voie d’enquête à l’audition de M. [P],
Sur le licenciement :
A titre principal, si la situation de co-emploi est retenue :
– de juger que les sociétés Sarl Vosges et Sarl SFN Concept Corner Ouest ont manqué à leur obligation de reclassement,
– de déclarer son licenciement sans cause réelle et sérieuse et particulièrement abusif,
– de condamner solidairement la société Sarl Vosges à lui verser, et Maitre [Z] en qualité de liquidateur judiciaire de la société SarlU SFN Concept Corner Ouest à inscrire sur le relevé des créances à son bénéfice, les sommes suivantes :
– 3 188,00 euros à titre d’indemnité de préavis, outre 318,80 euros au titre des congés payés afférents,
– 2 723,08 euros à titre d’indemnité de licenciement,
– 38 256,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 2 000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
A titre subsidiaire,
– de condamner solidairement la société Sarl Vosges à lui verser, et Maitre [Z] en qualité de liquidateur judiciaire de la société SarlU SFN Concept Corner Ouest à inscrire sur le relevé des créances à son bénéfice, les sommes suivantes :
– 3 188,00 euros à titre d’indemnité de préavis, outre 318,80 euros au titre des congés payés afférents,
– 2 723,08 euros à titre d’indemnité de licenciement,
– 11 158,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 8 000,00 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral,
– 2 000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
En tout état de cause :
– d’ordonner la remise à Mme [M] [R] des documents administratifs conformes à l’arrêt à intervenir, sous astreinte de 10,00 euros par jour de retard passé le délai d’un mois à la suite de la notification de la décision,
– de déclarer l’arrêt à intervenir commun et opposable au CGEA-AGS de [Localité 5].
Dans l’hypothèse où la situation de co-emploi n’est pas retenue, la salariée a formulé les demandes suivantes :
– de juger que Maitre [Z], en qualité de liquidateur judiciaire de la société SarlU SFN Concept Corner Ouest, a manqué à son obligation de reclassement,
– de déclarer le licenciement de Mme [M] [R] sans cause réelle et sérieuse et particulièrement abusif,
– de condamner Maitre [Z], en qualité de liquidateur judiciaire de la société SarlU SFN Concept Corner Ouest, à inscrire sur le relevé de créances à son bénéficie, les sommes suivantes :
– 3 188,00 euros à titre d’indemnité de préavis, outre 318,80 euros au titre des congés payés afférents,
– 2 723,08 euros à titre d’indemnité de licenciement,
– 38 256,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 2 000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
A titre subsidiaire,
– de condamner Maitre [Z] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Sarl SFN Concept Corner Ouest à inscrire sur le relevé des créances à son bénéfice, les sommes suivantes :
– 3 188,00 euros à titre d’indemnité de préavis, outre 318,80 euros au titre des congés payés afférents,
– 2 723,08 euros à titre d’indemnité de licenciement,
– 11 158,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 8 000,00 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral,
– 2 000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Vu le jugement du conseil de prud’hommes de Saint-Dié-des-Vosges rendu le 24 mars 2022, lequel a :
– débouté Mme [M] [R] de l’intégralité de ses demandes,
– condamné Mme [M] [R] aux dépens,
– dit n’y avoir lieu à faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Vu l’appel formé par Mme [M] [R] le 30 mars 2022,
Vu l’article 455 du code de procédure civile,
Vu les conclusions de Mme [M] [R] déposées sur le RPVA le 18 janvier 2022, celles de la société Les Mandataires ès-qualités, venant aux droits de Maitre [Z] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Sarl SFN Concept Corner Ouest déposées sur le RPVA le 05 janvier 2023, celles de la société Sarl Vosges déposées sur le RPVA le 26 septembre 2022, et celles de l’association UNEDIC CGEA-AGS de [Localité 5] déposées sur le RPVA le 27 septembre 2022,
Vu l’ordonnance de clôture rendue le 11 janvier 2023 fixant l’affaire à l’audience du 09 février 2023,
Vu l’ordonnance rendue le 12 janvier 2023 défixant l’affaire et la renvoyant à l’audience du 02 mars 2023,
Mme [M] [R] demande à la cour:
* Sur la situation de co-emploi avec prêt de main d”uvre et marchandage :
– de juger que Mme [M] [R] a fait l’objet de prêt de main d”uvre illicite et de marchandage commis par la société Sarl Vosges et la société Sarl SFN Concept Corner Ouest, et a été placée en situation de co-emploi,
– de condamner solidairement la société Sarl Vosges à lui verser, et Maitre [Z] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Sarl SFN Concept Corner Ouest à inscrire sur le relevé des créances à son bénéfice, la somme de 10 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour prêt de main d”uvre illicite, marchandage et co-emploi,
– subsidiairement, sur ce point, de faire application de l’article 203 du code de procédure civile, et de procéder par voie d’enquête à l’audition de M. [P],
* Sur le licenciement :
A titre principal, si la situation de co-emploi est retenue :
– de juger que les sociétés Sarl Vosges et Sarl SFN Concept Corner Ouest ont manqué à leur obligation de reclassement,
– de déclarer le licenciement sans cause réelle et sérieuse et particulièrement abusif,
– de condamner solidairement la société Sarl Vosges à lui verser, et Maitre [Z] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Sarl SFN Concept Corner Ouest à inscrire sur le relevé des créances à son bénéfice, les sommes de :
– 3 188,00 euros à titre d’indemnité de préavis,
– 318,80 euros au titre des congés payés afférents sur préavis,
– 2 723,08 euros à titre d’indemnité de licenciement,
– 9 297,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 4 000,00 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral,
– 3 000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– d’ordonner à Maitre [Z] en qualité de liquidateur judiciaire de la société SarlU SFN Concept Corner Ouest d’établir un relevé de créances à son bénéfice pour les sommes susvisées,
– de mettre les dépens à la charge solidaire de la société Sarl Vosges à lui verser, et Maitre [Z] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Sarl SFN Concept Corner Ouest,
*
A titre subsidiaire, si la situation de co-emploi n’est pas retenue :
– de juger que Maitre [Z], en qualité de liquidateur judiciaire de la société SarlU SFN Concept Corner Ouest, a manqué à son obligation de reclassement,
– de déclarer le licenciement sans cause réelle et sérieuse et particulièrement abusif,
– de condamner Maitre [Z], en qualité de liquidateur judiciaire de la société SarlU SFN Concept Corner Ouest, à inscrire sur le relevé de créances à son bénéfice les sommes de:
– 3 188,00 euros à titre d’indemnité de préavis,
– 318,80 euros au titre des congés payés afférents sur préavis,
– 2 723,08 euros à titre d’indemnité de licenciement,
– 9 297,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 4 000,00 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral,
– 3 000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– d’ordonner à Maitre [Z] en qualité de liquidateur judiciaire de la société SarlU SFN Concept Corner Ouest d’établir un relevé de créances à son bénéfice pour les sommes susvisées,
– de mettre les dépens à la charge de la liquidation judiciaire de la société Sarl SFN Concept Corner Ouest,
*
En tout état de cause :
-d’ordonner la remise à Mme [M] [R] des documents administratifs conformes à l’arrêt à intervenir, sous astreinte de 10,00 euros par jour de retard passé le délai d’un mois à la suite de la notification de la décision,
– de déclarer l’arrêt à intervenir commun et opposable au CGEA-AGS de [Localité 5].
La société Les Mandataires ès-qualités, venant aux droits de Maitre [Z], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Sarl SFN Concept Corner Ouest, demande :
A titre principal :
– de confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Saint-Dié-des-Vosges en toutes ses dispositions,
– en conséquence, de débouter Mme [M] [R] de toutes ses demandes,
*
A titre subsidiaire :
– de limiter à 3 mois de salaire la créance à inscrire au passif de la liquidation judiciaire de la société SarlU SFN Concept Corner Ouest, représentée par la société Les Mandataires ès-qualités venant aux droits de Maitre [Z], liquidateur, au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
*
En état de cause :
– de condamner Mme [M] [R] à verser à la société, venant aux droits de Maitre [Z], liquidateur judiciaire de la société SarlU SFN Concept Corner Ouest, la somme de 2000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– de condamner Mme [M] [R] aux entiers dépens dont le montant pourra être recouvré directement par Maître Joëlle Fontaine, Avocat, aux offres de droit.
La société Sarl Vosges demande à la cour:
– de confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Saint-Dié-des-Vosges en toutes ses dispositions,
– en conséquence, de débouter Mme [M] [R] de toutes ses demandes, à l’encontre de la société Vosges,
– de condamner Mme [M] [R] à lui verser, la somme de 2 000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– de condamner Mme [M] [R] aux entiers dépens dont le montant pourra être recouvré directement par Maître Joëlle Fontaine, Avocat, aux offres de droit.
L’association UNEDIC CGEA-AGS de [Localité 5] demande à la cour:
– de confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Saint-Dié-des-Vosges,
* A titre principal :
– de débouter Mme [M] [R] de l’ensemble de ses demandes,
* A titre subsidiaire :
– de mettre hors de cause le CGEA-AGS de [Localité 5] en cas de constatation d’une situation de co-emploi,
– de condamner la société Sarl Vosges à restituer au CGEA-AGS de [Localité 5] les avances effectuées pour un montant de 10 917,17 euros,
* A titre infiniment subsidiaire :
– de donner acte au CGEA-AGS de [Localité 5] des limites légales et jurisprudentielles de sa garantie.
SUR CE, LA COUR ;
La cour renvoie pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties aux conclusions déposées sur le RPVA par Mme [M] [R] le 18 janvier 2022, par la société Les Mandataires ès-qualités, venant aux droits de Maitre [Z] en qualité de liquidateur judiciaire de la société SFN Concept Corner Ouest, le 05 janvier 2023, par la Sarl Vosges déposées le 26 septembre 2022, et par l’association UNEDIC CGEA-AGS de [Localité 5] sur le RPVA le 27 septembre 2022.
– Sur les délits de marchandage et de prêt de main d’oeuvre illicite.
L’article L 8231-1 du code du travail dispose que le marchandage, défini comme toute opération à but lucratif de fourniture de main-d’oeuvre qui a pour effet de causer un préjudice au salarié qu’elle concerne ou d’éluder l’application de dispositions légales ou de stipulations d’une convention ou d’un accord collectif de travail, est interdit ;
L’article L 8241-1 du même code prévoit que toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main-d’oeuvre est interdite.
Toutefois, ces dispositions ne s’appliquent pas aux opérations réalisées dans le cadre :
1° Des dispositions du présent code relatives au travail temporaire, aux entreprises de travail à temps partagé et à l’exploitation d’une agence de mannequins lorsque celle-ci est exercée par une personne titulaire de la licence d’agence de mannequin ;
2° Des dispositions de l’article L. 222-3 du code du sport relatives aux associations ou sociétés sportives ;
3° Des dispositions des articles L. 2135-7 et L. 2135-8 du présent code relatives à la mise à disposition des salariés auprès des organisations syndicales ou des associations d’employeurs mentionnées à l’article L. 2231-1.
Une opération de prêt de main-d”uvre ne poursuit pas de but lucratif lorsque l’entreprise prêteuse ne facture à l’entreprise utilisatrice, pendant la mise à disposition, que les salaires versés au salarié, les charges sociales afférentes et les frais professionnels remboursés à l’intéressé au titre de la mise à disposition.
Mme [M] [R] expose que les sociétés NOZ et la société SFN Concept Corner Ouest se sont livrés à une opération de prêt illégal de main d’oeuvre en ce que, malgré un transfert de contrat de travail de la première société à la seconde, elle est restée sur le même poste et a été amenée à exercer ses fonctions sous la direction de la société NOZ ;
La SARLVosges et Les Mandataires ès-qualités soutiennent que Mme [R] n’apporte aucun élément démontrant les agissements qu’elle allègue.
Il convient de relever qu’il n’est pas contesté que Mme [R] a continué à exercer les mêmes fonctions après le transfert de son contrat de travail à la société SFN Concept Corner Ouest ; qu’il ressort de l’attestation, régulière en la forme, établie par M. [L] [P] que, postérieurement au transfert de contrat, en plus de son activité au titre du ‘corner NOZ boutique’ pour laquelle elle était affectée au magasin de [Localité 6] par son nouvel employeur, elle a été amené à effectuer au sein du magasin des tâches relevant du personnel de la société Vosges tels que du rangement, de la mise en place dans d’autres rayons, du réassort, et que dans ces activités elle était nécessairement soumise à l’autorité de la hiérarchie de ladite société.
Par ailleurs, les sociétés Vosges et Les Mandataires ès-qualités ne démontrent pas quel était le savoir faire spécifique apporté par Mme [M] [R] dans l’activité de vente par rapport aux salariés de la société Vosges.
Enfin, les sociétés Vosges et Les Mandataires ès-qualités n’apportent aucun élément sur les conditions financières concernant la mise à disposition de Mme [M] [R] auprès de la société Vosges, et donc que les sommes reçues par la société SFN Concept Corner Ouest ne correspondaient qu’au seul coût pour l’employeur de l’emploi de Mme [M] [R].
Dès lors, il y a lieu de retenir l’existence d’un prêt de main d’oeuvre illicite.
S’agissant de l’incrimination de marchandage, Mme [M] [R] ne démontre pas l’existence d’un préjudice distinct de celui réparé au titre du prêt illicite de main d’oeuvre, ni de ce que cette opération a eu pour objet ou pour effet d’éluder l’application de dispositions légales ou de stipulations d’une convention ou d’un accord collectif de travail.
Dès lors, au regard des éléments évoqués précédemment, il sera fait droit à la demande présentée par Mme [M] [R] à hauteur de 7500 euros, et la décision entreprise sera infirmée sur ce point.
– Sur l’existence d’un co-emploi.
Mme [M] [R] expose qu’elle se trouvait dans une situation de co-emploi dans la mesure où elle devait appliquer les dispositions du ‘guide NOZ’ dans l’exercice de son activité, qu’elle continuait à bénéficier de la mutuelle ‘AXA NOZ’, que la Sarl SFN et la société Vosges avaient le même gérant et que la gestion du personnel de la société SFN était opérée par la société Vosges.
Toutefois, la situation de co-emploi est caractérisée par une immixtion permanente de la société dominante dans la gestion de la société dominée, une communauté de gérant ou une centralisation des fonctions de support administratif au niveau de la société dominée n’étant pas suffisants pour établir le co-emploi.
C’est par une exacte appréciation des éléments de la cause, notamment les échanges de courriels entre les services RH des sociétés Vosges et SFN Concept Corner Ouest (pièces n° 61 et 62 du dossier de Mme [R]) et les documents d’évaluation de la salariée (pièce n° 70 id), et par une motivation que la cour adopte que les premiers juges ont estimé que n’était pas caractérisée en l’espèce une situation de co-emploi.
Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.
– Sur le licenciement.
Mme [M] [R] expose que son licenciement est sans cause réelle est sérieuse en ce que l’employeur n’a pas respecté son obligation de reclassement, le liquidateur n’ayant pas recherché au sein du ‘groupe NOZ’ les possibilités d’un reclassement.
Toutefois, il ressort du procès verbal de l’assemblée générale de la société SFN Concept Cornet Ouest du 20 septembre 2016 (pièce n° 12 du dossier des sociétés Vosges et Les Mandataires) que la société SFN Franchise NOZ et la société RA Expansion ont cédé l’intégralité de leurs parts sociales à M. [V] [O] ; qu’en conséquence Mme [M] [R] ne démontre pas que la société faisait partie, postérieurement à cette date, d’un ‘groupe NOZ’ répondant aux conditions des dispositions de l’article L 1233-4 du code du travail.
La demande sera donc rejetée et la décision entreprise sera confirmée sur ce point.
Il convient de donner acte à l’UNEDIC CGEA-AGS de [Localité 5] des limites légales et réglementaires de sa garantie.
Les dépens de l’instance seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de Mme [M] [R] l’intégralité des frais irrépétibles qu’elle a exposés ; il sera fait droit à la demande sur ce point à hauteur de 1500 euros.
PAR CES MOTIFS;
La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe et après débats en audience publique et après en avoir délibéré,
INFIRME le jugement rendu le 24 mars 2022 par le conseil de prud’hommes de Saint-Dié-des-Vosges en ce qu’il a débouté Mme [M] [R] de sa demande relative à l’indemnité pour prêt illégal de main d’oeuvre ;
STATUANT A NOUVEAU sur ce point ;
FIXE à la somme de 7500 euros (sept mille cinq cents euros) l’indemnisation due à Mme [M] [R] au titre du prêt illégal de main d’oeuvre commis par la Sarl SFN Concept Corner Ouest ;
DIT que la créance de Mme [M] [R] sera inscrite au passif de la Sarl SFN Concept Corner Ouest ;
DIT que le Centre d’études et de gestion de l’AGS de [Localité 5] ne devra procéder à l’avance des créances visées aux articles L. 3253-8 du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-15, L. 3253-19, L. 3253-20, L. 3253-21, L. 3253-17 et D. 3253-5 du même code ;
DIT qu’il ne devra s’exécuter, toutes créances confondues, qu’à titre subsidiaire en l’absence de fonds disponibles et sur présentation d’un relevé présenté par le mandataire judiciaire ;
DIT que la garantie du Centre d’études et de gestion de l’AGS de [Localité 5] est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, à un des trois plafonds définis à l’article D.3253-5 du code du travail ;
CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus ;
Y ajoutant:
DIT que les dépens de première instance et d’appel seront employés en frais de procédure collective ;
CONDAMNE la Sarl Vosges à payer à Mme [M] [R] une somme de 1500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Ainsi prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.
LE GREFFIER LE PRESIDENT DE CHAMBRE
Minute en dix pages