Prêt illicite de main d’oeuvre : 1 mars 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/01619

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Prêt illicite de main d’oeuvre : 1 mars 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/01619
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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 4

ARRET DU 01 MARS 2023

(n° 2023/94 , 14 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/01619 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBQDR

Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Janvier 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° F 18/07252

APPELANT

Monsieur [X] [B]

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représenté par Me Alexandra LE SERGENT, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 133

INTIMEES

S.A.S. ADYTON CONSULTING SAS ADYTON CONSULTING agissant poursuite et diligence de son représentant légal dûment domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Marie-béatrix BEGOUEN, avocat au barreau de PARIS, toque : D2080

S.N.C. EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION Prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié audit siège

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me François HUBERT, avocat au barreau de PARIS, toque : A0270

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président

Madame Anne-Ga’l BLANC, conseillère

Madame Florence MARQUES, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD

ARRET :

– Contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Justine FOURNIER, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

***

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

La société Adyton Consulting est une société de conseil en informatique, les technologies de l’information, l’application de ressources expertes notamment sur people soft nouvelles technologies, logiciels Erp.

Dans le cadre de son activité, la société Adyton Consulting offre une assistance technique à ses clients afin de résoudre les problèmes informatiques que ces derniers peuvent rencontrer.

La société Eiffage Systemes d’Information intervient dans le domaine du bâtiment des travaux publics de l’industrie et des opérations immobilières.

M. [X] [B] a été engagé par la SAS Adyton Consulting suivant contrat de travail à durée indéterminée dit de chantier à compter du 3 juillet 2017, pour une durée de 24 mois, en qualité de chef de projet, cadre, niveau 3.2, coefficient 220, moyennant une rémunération brute annuelle de 72’000 euros.

La SAS Adyton Consulting a affecté M. [X] [B] à une mission au sein de la SNC Eiffage Systèmes d’information.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils, dite «’SYNTEC’».

Par lettre en date du 18 septembre 2017, M. [X] [B] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 27 septembre 2017, avec mise à pied conservatoire.

M. [B] a ensuite été licencié pour faute grave par lettre datée du 4 octobre 2017.

M. [X] [B] a saisi, le 27 septembre 2018, le conseil de prud’hommes de Paris pour voir requalifier le contrat de chantier en CDD de 24 mois, reconnaître l’existence d’un co-emploi des sociétés Adyton Consulting et Eiffage Systèmes d’Information, et voir les sociétés condamnées solidairement à lui payer diverses sommes.

Par jugement en date du 20 janvier 2020, le conseil de prud’hommes de Paris a:

– Débouté Monsieur [X] [B] de l’ensemble de ses demandes.

– Débouté la société Adyton Consulting de l’intégralité de ses demandes.

– Débouté la société Eiffage Systèmes d’Information de l’intégralité de ses demandes.

– Condamné la partie demanderesse au paiement des entiers dépens.

Par déclaration au greffe du 24 février 2020, M. [X] [B] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions, adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 16 août 2022, M. [X] [B] demande à la cour d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’ a débouté de l’ensemble de ses demandes et, statuant à nouveau, de’:

-Requalifier le contrat de travail de Monsieur [B] en date du 30/06/2017 en contrat de travail à durée déterminée de 24 mois

-juger que les Sociétés Adyton Consulting et EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION étaient co-employeurs de Monsieur [B]

-juger que la rupture anticipée du contrat de travail de Monsieur [B] intervenue le 4 octobre 2017 est abusive,

-juger que les Sociétés Adyton Consulting et EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION ont agi frauduleusement et de concert pour contourner les règles sur le prêt de main d’oeuvre

En conséquence,

A titre principal :

Condamner solidairement les Sociétés Adyton Consulting et EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION à verser à Monsieur [B] les sommes suivantes :

– Dommages-intérêts au titre de la rupture anticipée abusive : 139.001,62euros ;

– Indemnité de fin de contrat : 16.006,00 euros ;

– Rappel de salaire de juillet à septembre 2017 : 5.273,67 euros ;

– Congés payés afférents : 527,36 euros ;

– Rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire : 3.784,72euros ;

– Congés payés afférents : 378,47 euros ;

– Dommages et intérêts pour préjudice moral : 10.000 euros ;

– Dommages et intérêts pour prêt de main d’oeuvre illicite : 20.000 euros ;

– Remise des bulletins de salaire, une attestation Pôle Emploi et un certificat de travail conformes au jugement et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document à compter de la saisine du Conseil de prud’hommes.

A titre subsidiaire :

Condamner solidairement les Sociétés Adyton Consulting et EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION à verser à Monsieur [B] les sommes suivantes:

– Rappel de salaires jusqu’à la fin des trois chantiers pour lesquels Monsieur [B] a été engagé: 305.166,08 euros

– Congés payés afférents: 30.516,60 euros

– Indemnité conventionnelle de préavis : 20.190 euros

– Rappels de salaire de juillet à septembre 2017 : 5.273,67 euros ;

– Congés payés afférents : 527,36 euros ;

– Rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire : 3.784,72 euros ;

– Congés payés afférents : 378,47 euros ;

– Dommages et intérêts pour préjudice moral : 10.000 euros ;

– Dommages et intérêts pour prêt de main d”uvre illicite : 20.000 euros ;

– Remise des bulletins de salaire, une attestation POLE EMPLOI et un certificat de travail conformes et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document à compter de la saisine du Conseil de prud’hommes.

A titre infiniment subsidiaire :

Condamner solidairement les Sociétés Adyton Consulting et EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION à verser à Monsieur [B] les sommes suivantes :

-Indemnité pour rupture abusive : 6.730 euros ;

-Indemnité conventionnelle de préavis : 20.190 euros ;

– Rappels de salaire de juillet à septembre 2017 : 5.273,67 euros ;

– Congés payés afférents : 527,36 euros ;

– Rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire : 3.784,72 euros ;

– Congés payés afférents : 378,47 euros ;

– Dommages et intérêts pour préjudice moral : 10.000 euros ;

– Dommages et intérêts pour prêt de main-d’oeuvre illicite : 20.000 euros ;

– Remise des bulletins de salaire, une attestation POLE EMPLOI et un certificat de travail conformes et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document à compter de la saisine du Conseil de prud’hommes.

En tout état de cause,

– Dire que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter de la saisine du Conseil de Prud’hommes avec capitalisation dans les termes de l’article 1154 du Code Civil,

– Condamner chacune des Sociétés Adyton Consulting et EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION à payer à Monsieur [B] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du CPC au titre de la première instance,

– Condamner chacune des Sociétés Adyton Consulting et EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION à payer à Monsieur [B] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du CPC au titre de l’instance d’appel, ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Alexandra LE SERGENT en application des dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 20 juin 2022, la SAS Adyton Consulting demande à la cour de’:

Infirmer le jugement déféré en ce qu’il :

– S’est déclaré compétent sur la demande de garantie de la société EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION ;

– A déclaré recevable les demandes nouvelles présentées en cours d’instance par Monsieur [B], ces demandes étant les suivantes :

« Dire et juger Monsieur [B] recevable et bien fondé en ses demandes ;

(‘)

Dire et juger que les sociétés Adyton Consulting et EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION ont agi frauduleusement et de concert pour contourner les règles sur le prêt de main d’oeuvre ;

(‘)

Condamner solidairement les sociétés Adyton Consulting et EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION à verser à Monsieur [B] les sommes suivantes :

– (‘)

– Dommages et intérêts pour préjudice moral ”’ 10.000,00 €

-Dommages et intérêts pour prêt de main d’oeuvre illicite ‘.20.000,00 €»

– A rejeté la demande de la société Adyton Consulting de condamnation de Monsieur [B] de la somme de 3 164,82 € au titre des salaires indûment versés sur la paie du mois d’août, alors que Monsieur [B] était absent pendant 3 semaines.

Statuant a nouveau,

– En ce qui concerne la demande de garantie de la société EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION à l’encontre de la société Adyton Consulting, se déclarer matériellement incompétente au profit du Tribunal de commerce de Paris ;

– Au visa des articles 58, 65 et 70 du Code de procédure civile, juger que les demandes nouvelles de Monsieur [B] présentées au cours de la première instance sont irrecevables :

« Dire et juger Monsieur [B] recevable et bien fondé en ses demandes ;

(‘)

Dire et juger que les sociétés Adyton Consulting et EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION ont agi frauduleusement et de concert pour contourner les règles sur le prêt de main d’oeuvre ;

(‘)

Condamner solidairement les sociétés Adyton Consulting et EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION à verser à Monsieur [B] les sommes suivantes :

– (‘)

– Dommages et intérêts pour préjudice moral ”””””””’.. 10.000,00 €

– Dommages et intérêts pour prêt de main d’oeuvre illicite ””””..20.000,00€»

– Condamner Monsieur [X] [B] à payer à la société Adyton Consulting la somme de 3 164,82 € à titre de remboursement du salaire indûment perçu au mois d’août 2017 ;

– Confirmer Le Jugement rendu par le Conseil de prud’hommes de PARIS le 20 janvier 2020 en ce qu’il a débouté Monsieur [X] [B] de l’ensemble de ses demandes ;

– Declarer irrecevables les demandes nouvelles présentées par Monsieur [B] en cause d’appel :

« A titre subsidiaire :

Condamner solidairement les sociétés Adyton Consulting et EIFFAGE SYSTEMES

D’INFORMATION à verser à Monsieur [B] les sommes suivantes :

– Rappel de salaires jusqu’à la fin des chantiers pour lesquels Monsieur [B]

a été engagé : 305 166,08 euros

– Congés payés afférents : 30 516,60 euros

– Indemnité conventionnelle de préavis : 20 190 €

– Rappel de salaire de juillet à septembre 2017 : 5 273,67 €

– Congés payés afférents : 527,36 €

– Rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire : 3 784,72 €

– Congés payés afférents : 378,47 €

– Dommages et intérêts pour préjudice moral : 10 000 €

– Dommages et intérêts pour prêt de main d’oeuvre illicite : 20 000 €

– Remise des bulletins de salaire, une attestation POLE EMPLOI et un certificat de

travail conformes et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document

à compter de la saisine du Conseil de prud’hommes

A titre infiniment subsidiaire,

Condamner solidairement les sociétés Adyton Consulting et EIFFAGE SYSTEMES

D’INFORMATION à verser à Monsieur [B] les sommes suivantes :

– Indemnité pour rupture abusive : 6 730 euros

– Indemnité conventionnelle de préavis : 20 190 €

– Rappel de salaire de juillet à septembre 2017 : 5 273,67 €

– Congés payés afférents : 527,36 €

– Rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire : 3 784,72 €

– Congés payés afférents : 378,47 €

– Dommages et intérêts pour préjudice moral : 10 000 €

– Dommages et intérêts pour prêt de main d’oeuvre illicite : 20 000 €

– Remise des bulletins de salaire, une attestation POLE EMPLOI et un certificat de travail conformes et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document à compter de la saisine du Conseil de prud’hommes. (‘) »

En tout etat de cause,

– Juger que le contrat de travail signé par Monsieur [X] [B] est un contrat de travail à durée indéterminée ;

– Juger que le licenciement notifié à Monsieur [X] [B] par lettre recommandée avec accusé de réception du 4 octobre 2017 est fondé ;

– Juger que Monsieur [X] [B] n’a pas fait l’objet d’un prêt de main d’oeuvre illicite, ni d’un délit de marchandage.

– Debouter la société EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION de sa demande de garantie à l’encontre de la société Adyton Consulting.

En conséquence,

– Debouter Monsieur [X] [B] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions;

– Condamner Monsieur [X] [B] à payer à la société Adyton Consulting la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– Condamner Monsieur [X] [B] aux éventuels dépens.

A titre infiniment subsidiaire :

– Juger que le salaire mensuel brut de Monsieur [X] [B] est de 6 000 €

– Juger que toute éventuelle indemnité compensatrice de préavis sera de 18 000 €

– Juger que toute éventuelle indemnité pour rupture abusive d’un CDI ne pourra être supérieure à 6 000 €.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 31 août 2022, la SNC Eiffage Systèmes d’information demande à la cour de’:

In Limine Litis,

– Juger la société Adyton Consulting irrecevable et, en tout état de cause, mal fondée en son appel incident à l’encontre de la société EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION,

– Confirmer les dispositions du jugement rendu le 20 janvier 2020 par le Conseil de prud’hommes de Paris, s’étant déclaré matériellement compétent pour statuer sur la demande en garantie de la société EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION à l’encontre de la société Adyton Consulting,

– Rejeter l’exception d’incompétence matérielle du juge prud’homal soulevée à ce titre par la société Adyton Consulting au stade de l’appel, et se déclarer matériellement compétente pour statuer sur la demande en garantie formée à en encontre par la société EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION,

– Débouter la société Adyton Consulting de l’ensemble ses demandes, fins et conclusions formées à l’encontre de la société EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION,

Sur le fond :

– Juger Monsieur [X] [B] irrecevable en ses demandes nouvelles formées tardivement en première instance et reprises en cause d’appel, au titre du « prêt de main d’oeuvre illicite » ou du « délit de marchandage » invoqués ;

– Juger Monsieur [X] [B] irrecevable en ses demandes nouvelles formées au stade de l’appel, à titre de « rappel de salaires » à hauteur de « 305.166,98 € », outre « les congés payés afférents » à hauteur de « 30.516,60 € »,

– Confirmer les dispositions du jugement rendu le 20 janvier 2020 par le Conseil de prud’hommes de Paris en ce qu’il a débouté Monsieur [X] [B] de l’ensemble de ses demandes,

– Juger que Monsieur [X] [B] n’a pas fait l’objet d’un « prêt de main d’oeuvre illicite », ni d’un « délit de marchandage »,

– Juger qu’il n’y a aucun lien de subordination entre Monsieur [X] [B] et la société EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION et, en conséquence, ni contrat de travail avec cette dernière,

– Juger que la société EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION n’a commis aucun manquement à l’égard de Monsieur [X] [B],

En conséquence :

– Débouter Monsieur [X] [B] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

– Condamner Monsieur [X] [B] à verser à la société EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

– Le condamner également aux dépens,

– Confirmer les dispositions du jugement du jugement rendu le 20 janvier 2020 par le Conseil de prud’hommes de Paris en ce qu’il a débouté la société Adyton Consulting de ses prétentions à l’égard de la société EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION,

– Juger la société Adyton Consulting mal fondée en son appel incident à l’encontre de la société EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION, et débouter la société Adyton Consulting de l’ensemble ses demandes, fins et conclusions formées à l’encontre de la société EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION,

En tout état de cause, si des condamnations devaient être prononcées au bénéfice de Monsieur [X] [B] :

– Condamner la société Adyton Consulting à garantir la société EIFFAGE SYSTEMES D’INFORMATION de l’ensemble des condamnations mises à sa charge, y compris celles relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 13 septembre 2022 et l’affaire a été fixée à l’audience du 4 octobre 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

1-Sur l’exception d’incompétence matérielle à l’égard de la demande en garantie formulée par la société Eiffage systèmes d’information

La juridiction prud’homale est parfaitement compétente pour connaître de cette demande dans la mesure ou elle découle de la demande du salarié de voir reconnaître l’existence d’un co-emploi et en conséquence la condamnation solidaire (en réalité in solidum) des deux sociétés à lui payer diverses sommes en exécution ou à raison de la rupture du contrat de travail.

2-Sur la recevabilité des demandes de dommages et intérêts au titre du prêt de main d”uvre illicite et du délit de marchandage

Les sociétés soulèvent l’irrecevabilité de ces demandes formées en cours de procédure devant le conseil de prud’hommes et reprises en cause d’appel.

Le salarié indique que ces demandes sont recevables en application de l’article 70 du code de procédure civile.

L’article 8 du décret n°2016-66 du 20 mai 2016 relatif à la justice prud’homale et au traitement judiciaire du contentieux du travail a implicitement abrogé l’article R.1452-6 du code du travail qui édictait la règle d’unicité des demandes, pour toutes les instances introduites devant le conseil de prud’hommes à compter du 1er août 2016, comme c’est le cas dans le présent litige.

Néanmoins, l’article 70 du code de procédure civile dispose que les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.

Au cas d’espèce, le salarié a saisi le conseil de prud’hommes d’une demande tendant à contester la légitimité de la rupture de son contrat de travail, contestant également le recours à un contrat de chantier.

Ses demandes au titre du prêt de main d”uvre illicite et du délit de marchandage se rattachent en conséquence aux demandes initiales par un lien suffisant.

Les demandes sont ainsi recevables.

3-Sur la recevabilité de la demande présentée à titre subsidiaire au titre du rappel de salaires jusqu’à la fin des chantiers et des congés payés afférents.

Les sociétés soulèvent l’irrecevabilité de ces demandes formées pour la première fois en cause d’appel.

Le salarié indique que ces demandes sont recevables en application de l’article 70 du code de procédure civile.

L’article 564 du code de procédure civile prévoit qu’ « à peine d’irrecevabilité soulevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait. »

Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises aux premiers juges, même si leur fondement juridique est différent, selon l’article 565 du code de procédure civile.

Il résulte de l’article 566 du code de procédure civile que « les parties peuvent aussi expliciter les prétentions qui étaient virtuellement comprises dans les demandes et défenses soumises au premier juge et ajouter à celles-ci toutes les demandes qui en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément. »

Tel est le cas en l’espèce. Les demandes sont recevables.

4-Sur la demande de requalification du contrat dit de chantier en contrat à durée déterminée de droit commun

Aux termes de l’article L 1223-8 du code du travail, issu de l’ordonnance du 22 septembre 2017′:

«Une convention ou un accord collectif de branche étendu fixe les conditions dans lesquelles il est possible de recourir à un contrat conclu pour la durée d’un chantier ou d’une opération.

A défaut d’un tel accord, ce contrat peut être conclu dans les secteurs où son usage est habituel et conforme à l’exercice régulier de la profession qui y recourt au 1er janvier 2017.

Ce contrat est conclu pour une durée indéterminée’»

La société Adyton Consulting est spécialisée dans les technologies et l’ingénierie informatique.

Elle est soumise à la convention collective Syntec qui prévoit en son avenant nº11 du 8 juillet 1993 que le contrat de chantier constitue un usage dans la profession.

Il est constant qu’un contrat de chantier, qui est par nature un contrat de travail à durée indéterminée, peut être conclu pour un ou plusieurs chantiers déterminés.

Au cas d’espèce, le contrat de travail, à effet du 1 er juillet 2017 , selon la demande expresse du salarié (mail du 2 juillet 2017 ), que celui-ci n’a finalement signé que le 29 juillet 2017, après plusieurs rappels de la société Adyton Consulting, mentionne à la rubrique durée «’CDI’: indéterminé lié à l’accomplissement d’une mission ( CDI d’usage dit de chantier ), 24 mois’».

La rubrique «’objet du contrat’» mentionne d’une part que le contrat de travail est conclu pour «une mission d’intégration de projets au sein de l’équipe en place au sein de la société Eiffage Systèmes d’information» et d’autre part qu’il «reprend l’application des clauses du contrat de prestations», dont il est justifié aux débats par la production du contrat cadre de prestation signé entre les deux sociétés. Il est également versé aux débats la commande spécifique de la société Eiffage Systemes d’information.

Le contrat de travail conclu est sans aucune ambiguïté un contrat de travail à durée indéterminée dit de chantier.

Le salarié est débouté de sa demande de requalification en contrat à durée déterminée et de l’ensemble de ses demandes financières subséquentes.

5-Sur l’existence d’une situation de co-emploi entre les sociétés Adyton Consulting et Eiffage Systèmes d’information

Hors l’existence d’un lien de subordination, une société faisant partie d’un groupe ne peut être considérée comme un co-employeur, à l’égard du personnel employé par une autre, que s’il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l’état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d’intérêts, d’activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de l’entreprise. Par ailleurs, sauf preuve contraire dont la charge incombe alors au salarié, le contrat de mise à disposition suppose le maintien du lien de subordination entre le salarié et celui qui concède la mise à disposition.

Au cas d’espèce, le salarié reconnaît que les deux sociétés n’appartiennent pas à un groupe.

Il soutient que le contrat cadre signé entre les deux sociétés «’manque totalement de précision, le seul objectif étant de tenter de couvrir les agissements illicites des parties signataires’». Il soutient qu’il a existé un lien de subordination entre la société Eiffage Systemes d’information et lui-même tout au long de la mission en ce qu’il a été recruté après accord des responsables de cette société, qu’il leur a rendu compte chaque jour de ses travaux et avancées et qu’il a été licencié lorsqu’ils l’ont décidé, ces derniers rédigeant la «’seule preuve’des fautes qui lui sont reprochées’» dans le cadre de son licenciement et lui adressant des reproches durant l’exécution de sa mission.

La société Adyton soutient qu’elle est le seul employeur de M. [X] [B].

La société Eiffage Systemes d’information nie tout lien de subordination entre M. [B] et elle-même.

Le salarié soutient de manière tout à fait péremptoire que le contrat cadre aurait été signé pour justifier de la conclusion du contrat à durée indéterminée de chantier.

Par ailleurs, la société Adyton Consulting justifie qu’elle a seule recruté le salarié, ce dernier négociant d’ailleurs son salaire avec celle-ci, qu’elle est la seule à avoir établi ses bulletins de paie et à avoir réglé son salaire.

Le contrat de travail rappelle d’ailleurs que le salarié doit respecter les procédures de la société et suivre les instructions qu’il reçoit de sa hiérarchie. Par ailleurs le contrat cadre en application duquel le contrat de travail a été conclu, mentionne expressément que «’le personnel du prestataire assurant la réalisation des prestations restera sous la subordination du prestataire’».

Il est bien évident que le salarié, dans le cadre de l’exécution de son contrat de travail, devait communiquer sur son travail avec la société Eiffage Systemes d’information auprès de qui il était mis à disposition, sans que cela ne caractérise un lien de subordination.

Par ailleurs, le salarié ne peut soutenir sérieusement que le fait de rendre compte de son travail à la société Eiffage Systemes d’information caractérise un lien de subordination alors que précisément, la société Adyton Consulting lui reproche d’avoir ignoré son pouvoir de direction.

Le salarié échoue à démontrer l’existence d’un lien de subordination avec la société Eiffage Systèmes d’information.

Il est débouté de sa demande de voir reconnaître l’existence d’un co-emploi.

Le jugement est confirmé de ce chef.

6-Sur la demande de dommage et intérêts pour prêt illicite de main d’oeuvre et le marchandage

La cour rappelle qu’en application de l’article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.

Au cas d’espèce, le dispositif des conclusions ne formule de demande de dommages et intérêts que du chef du seul prêt illicite de main-d”uvre.

Selon l’article L 8241-1 du code du travail, toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main-d’oeuvre est interdite.

Toutefois, ces dispositions ne s’appliquent pas aux opérations réalisées dans le cadre :

1° Des dispositions du présent code relatives au travail temporaire, aux entreprises de travail à temps partagé et à l’exploitation d’une agence de mannequins lorsque celle-ci est exercée par une personne titulaire de la licence d’agence de mannequin ;

2° Des dispositions de l’article L. 222-3 du code du sport relatives aux associations ou sociétés sportives ;

3° Des dispositions des articles L. 2135-7 et L. 2135-8 du présent code relatives à la mise à disposition des salariés auprès des organisations syndicales ou des associations d’employeurs mentionnées à l’article L. 2231-1.

Le prêt de main-d”uvre ne se confond pas avec la fourniture de main d”uvre laquelle ne transfère à l’entreprise utilisatrice qu’un droit sur le «’produit de la main d”uvre’»’, sans délégation du pouvoir de direction ( lié au lien de subordination).

Au cas d’espèce, il a été dit plus haut que le salarié avait conclu avec la société Adyton Consulting un CDI dit de chantier valable.

Il doit être relevé que la société Adyton Consulting a une activité de conseil en systèmes et logiciels informatiques et que la société Eiffage Systémes d’information a pour activité principale la «’gestion d’installations informatiques’» ( pièce 36 du salarié), ce qui ne se confond pas. La mise à disposition d’une main d”uvre extérieure est possible, la société pouvant ne pas avoir en interne la ressource nécessaire.

Les deux sociétés ont conclu un contrat cadre de prestation puis, en application de celui-ci, la société Eiffage Systemes d’information a passé commande auprès de la société Adyton Consulting, pour la mise à disposition d’un chef de projets applicatif, étant souligné que ce bon de commande ne désigne pas M. [B], moyennant un coût journalier hors taxe de 700 euros.

M. [X] [B] a été recherché en raison de ses compétences spécifiques comme le démontre les échanges de mails entre le salarié et la société Adyton Consulting. Il a bien été affecté à une tâche spécifique ( chef de projets), sa rémunération a été forfaitaire et il est resté sous l’autorité de la société Adyton Consulting.

Il résulte des éléments ci-dessus que le prêt de main-d’oeuvre illicite allégué n’est pas établi.

En conséquence, le jugement entrepris est confirmé en ce qu’il a débouté M. [X] [B] de sa demande de dommages-intérêts de ce chef.

7- sur la demande de rappel de salaire au titre des frais professionnels et au titre de la période du 1er au 18 septembre 2017

La société justifie avoir réglé les salaires du salarié sur la période concernée. En revanche, elle n’a pas réglé la somme forfaitaire de 730 euros dûes sur 11 mois prévue au contrat correspondant aux déplacements du salarié pour se rendre de son domicile à son lieu de travail, seuls les autres déplacements étant soumis à note de frais. Il est dû au salarié la somme de 1095 euros de ce chef (en congés en août 2017).

Le jugement est infirmé de ce chef.

8-Sur la rupture du contrat de travail

L’article L.1231-1 du code du travail dispose que le contrat à durée indéterminée peut être rompu à l’initiative de l’employeur ou du salarié. Aux termes de l’article L.1232-1 du même code, le licenciement par l’employeur pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

Il résulte par ailleurs des dispositions combinées des articles L 1232-1, L 1232-6, L 1234-1 et L 1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d’un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l’employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d’une part d’établir l’exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d’autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l’entreprise.

En l’espèce, la lettre de rupture a été rédigée comme suit’: «’le 15 septembre 2017, vous avez adressé un mail à la société EIFFAGE, en nous mettant en copie, ainsi que l’Inspection du Travail.

Aux termes de ce mail, j’ai appris qu’une réunion s’était tenue le même jour entre vous et EIFFAGE, à l’issue de laquelle des difficultés majeures ont été mises en exergue, et confirmées (puisque ces difficultés avaient déjà été évoquées par le passé, ce que j’ignorais totalement).

J’ai ainsi été mis devant le fait accompli de ces difficultés, en étant en copie de votre mail, ce qui est particulièrement inadmissible.

En effet, en faisant le point en urgence avec le client, j’ai appris que le mécontentement à votre égard de ce dernier n’était pas nouveau, et vous en aviez été informé à plusieurs reprises par le client, ce dont vous vous êtes délibérément abstenu de me faire part, considérant comme vous l’avez expliqué à deux reprises lors de notre entretien préalable que cela ne regardait en rien ADYTON !!

Ceci est particulièrement grave, dans la mesure où, si j’avais été informé des difficultés, j’aurais pu intervenir à la fois auprès d’EIFFAGE, et auprès de vous pour rechercher des solutions.

C’est d’autant plus grave qu’EIFFAGE est un client extrêmement important pour l’activité de la société ADYTON comme je vous l’avais expliqué.

En vous abstenant de me remonter ces informations et de me faire part du mécontentement du client, vous avez commis un manquement grave à l’égard de la société ADYTON, nous plaçant dans les difficultés importantes.

Par ailleurs, après échange avec mes interlocuteurs chez EIFFAGE au cours du week-end du 16 septembre, Monsieur [W], Responsable Département Applications Métiers Branche chez EIFFAGE, m’a fait part de l’ensemble de vos manquements et des difficultés rencontrées.

Ces manquements et fautes sont principalement les suivants :

– Plusieurs livrables fondamentaux et nécessaires à la bonne gestion des projets confiés n’ont pas été réalisés :

Monsieur [V] vous a demandé à de multiples reprises le planning de réalisation des activités MOE et d’e-MAT, sans jamais l’obtenir.

Vous n’avez pas émis de planning de réalisation et de livraison EXPERCITE.

Vous n’avez pas livré de support pour le prochain comité de pilotage EXPERCITE.

Vous n’avez pas effectué de compte-rendu des réunions hebdomadaires EXPERCITE tenues avec la MOA du projet.

-Plusieurs tâches qui vous ont été confiées n’ont pas été réalisées dans les délais escomptés et ont pu mettre en danger la tenue de jalons projets :

La planification et la réservation de ressources de la DSI EIFFAGE pour l’installation technique d’un composant de la solution IMAT.

La demande gestes techniques (création de comptes de services, de NAS, demande d’ouverture de flux), ces actions ont finalement été réalisées par Monsieur [V].

-Plusieurs activités relevant de votre mission de Chef de Projet n’ont pas été assumées :

La gestion budgétaire, en dépit de votre formation à OPUS, il a été constaté de votre part une absence de maîtrise de ce système.

Projet e-MAT, Monsieur [V] a dû reprendre la direction du pilotage du chantier en interface, dans la mesure où vous n’avez entrepris aucune action à cet égard.

Vous n’avez pas non plus proposé de plan d’action sur le pilotage du chantier RAPPORTS, pour répondre à des besoins changeants de la MOA.

Au surplus, des difficultés majeures sont intervenues dans le management des équipes en charge des rapports et de la communication avec la MOA, vos communications ayant suscité d’importantes frictions entre les équipes MOE et MOA.

-Il a également été constaté un non-respect des processus propres à la DSI d’EIFFAGE, pourtant, Monsieur [V] vous a rappelé à plusieurs reprises ces processus et le rôle du Chef de Projet dans ceux-ci.

Ainsi, par exemple, le Chef de Projet se charge de demander, coordonner et suivre la bonne réalisation des gestes techniques des différents intervenants techniques de la DSI. Cela n’a pas été fait pour le montage d’un environnement spécifique pour les formations d’e- MAT.

La conséquence est que l’environnement n’a pu être livré à la date annoncée. Vos manquements ont nécessité une intervention à plusieurs reprises de Monsieur [V] pour prendre en charge ce qui n’avait pas été réalisé par vos soins.

Le pire est qu’un rappel à l’ordre vous a été adressé lors d’une réunion avec les deux responsables du Département Intégration de la DSI, mais que vous n’avez pas cru devoir modifier votre comportement, et que vous vous êtes en outre abstenu de m’en informer.

L’ensemble de ces manquements n’est pas admissible, et a mis gravement en péril la mission au sein d’EIFFAGE.

Au surplus, une réunion a été tenue le 15 septembre 2017 au sein d’EIFFAGE, réunion à laquelle vous avez opposé votre désaccord formel à l’ensemble des griefs de mécontentement exposés par le client, ce qui a créé une situation de blocage, sur laquelle il est désormais impossible de revenir.

Lors de votre entretien préalable, vous avez maintenu votre désaccord, sans jamais vous remettre en cause, ni même sans reconnaître que vous auriez dû m’informer de cette situation bien avant le 15 septembre, et autrement qu’en mettant en copie d’un mail que vous avez pris la liberté d’adresser directement au client.

Outre votre contestation des faits, vous avez également indiqué que vous estimez être salarié de la société EIFFAGE :

D’une part, cela est particulièrement faux, puisque nous avons effectué une déclaration d’embauche en ce qui vous concerne, que nous vous avons réglé votre salaire et vous avons adressé des bulletins de paie, et que vous êtes dans un lien de subordination incontestable à notre égard.

D’autre part, vous m’avez expliqué qu’ADYTON n’avait pas à être mis au courant de cette situation, dans la mesure où ces difficultés rencontrées ne nous regardaient en rien. Ceci est particulièrement révélateur de votre état d’esprit à notre égard, et explique probablement en partie, la raison pour laquelle vous n’avez pas cru devoir nous informer de quoi que ce soit en ce qui concerne les difficultés rencontrées au sein d’EIFFAGE.

Cela renforce malheureusement d’autant plus le constat que nous sommes contraints d’effectuer, à savoir l’impossibilité de vous maintenir dans votre contrat de travail au sein de notre société, compte tenu de l’ensemble de vos agissements, et de votre position à cet égard.

Mais le pire était à venir, mettant encore plus, si besoin était, votre appréciation sur la dimension de votre rôle et vos responsabilités vis-à-vis de votre employeur.

En effet, vous ne m’avez adressé aucun compte-rendu d’activité et notamment, vous ne m’avez pas transmis vos feuilles de temps, pourtant nécessaires à la facturation comme vous ne pouvez pas l’ignorez.

J’ai donc dû les solliciter directement auprès du client après votre entretien préalable.

C’est alors que j’ai découvert, avec stupeur, que vous aviez été absent pendant 3 semaines en août, indiquant au client que vous étiez en congés.

Or, non seulement vous veniez d’être embauché début juillet, et vous n’étiez pas en mesure de poser des congés, mais surtout, vous n’avez en aucun cas sollicité une quelconque autorisation d’absence auprès de notre société.

Vous n’avez pas plus fait d’observation lorsque vous avez reçu votre bulletin de paie du mois d’août, sur lequel nous vous avions pourtant indûment payé un salaire pour un mois plein de travail effectif, alors que vous aviez été absent pendant 3 semaines.

Votre absence injustifiée, doublée de votre silence délibéré sur le sujet, notamment sur votre paie du mois d’août, est juste inadmissible.

Aussi, compte tenu de la perturbation du bon fonctionnement de notre société, vos agissements ne permettent pas la poursuite sereine de l’exécution de votre contrat de travail.

J’estime que ces agissements sont particulièrement graves et nécessitent la rupture immédiate de votre contrat de travail.’»

Il a été dit plus haut que M.[X] [B] était le salarié de la société Adyton Consulting uniquement. Pendant toute la durée de sa mission pour la société Eiffage Systemes informations, il est resté sous la subordination de l’entreprise Adyton Consulting. Il devait en conséquence informer la société de toute difficulté rencontrée dans l’exercice de ses missions, ce qu’il n’a pas fait, agissant à tort comme s’il était le salarié de la société Eiffage Systemes d’Information, ce qui était de nature à mettre en porte à faux son employeur à l’égard de la société Eiffage Systemes d’Information et de nuire à leurs relations commerciales.

Cet élément caractérise une insubordination grave.

Ce seul élément caractérise, sans qu’il ne soit nécessaire d’examiner les autres griefs, une violation des obligations résultant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rendait impossible le maintien M.[X] [B] dans l’entreprise pendant la durée du préavis sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l’employeur.

Le jugement est confirmé de ce chef et en ce qu’il a débouté le salarié de ses demandes financières subséquentes. Il est également débouté de ses demandes de rappel de salaires jusqu’à la fin des chantiers pour lesquels il a été engagé et des congés payés afférents. Il sera ajouté au jugement de ces derniers chefs.

9-Sur la demande de dommages-intérêts pour préjudice moral.

Le salarié fonde cette demande sur le caractère abusif et violent du licenciement dont il n’est pas rapporté la preuve.

Dès lors , le salarié ne peut qu’être débouté de sa demande de ce chef. Le jugement est confirmé.

10-Sur la demande de la société Adyton Consulting en remboursement du salaire perçu par le salarié en août 2017

Le CPH n’a pas statué sur ce point.

L’employeur ayant accepté que le salarié soit en congé en août 2017 ( une des conditions de la négociation), et en étant informé ( mail du 3 août 2017 de M. [J] ) il ne peut demander le remboursement du salaire versé, rien n’établissant qu’il s’agissait de congés sans solde.

La société est déboutée de ce chef.

Le jugement est complète en ce sens.

11-Sur les intérêts et leur capitalisation

En application de l’article 1231-7 du code civil, les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt.

La capitalisation des intérêts échus dus au moins pour une année entière sera ordonnée en application de l’article 1343-2 du code civil.

12-Sur les demandes accessoires

Le jugement est infirmé sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile sauf en ce qu’il a débouté les sociétés de leur demande respective au titre des frais irrépétibles. La société Adyton Consulting est condamnée à payer à M. [X] [B] la somme de 1000 euros au titre des frais irrépétibles.

La SAS Adyton Consulting est condamnée aux dépens d’appel.

L’équité commande de faire application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel au profit de M. [X] [B] ainsi qu’il sera dit au dispositif.

La SAS Adyton Consulting et la SNC Eiffage Systemes d’Information sont déboutées de leur demande au titre des frais irrépétibles en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Dit recevables les demandes nouvelles de M. [X] [B],

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu’il a débouté M. [X] [B] de sa demande au titre des frais de déplacements professionnels, de celle au titre de l’article 700 du code de procédure civile et sur les dépens.

Complète le jugement comme suit’:

Déboute la SAS Adyton Consulting de sa demande de remboursement du salaire de M. [X] [B] d’août 2017,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la SAS Adyton Consulting à payer à M. [X] [B] les sommes suivantes’:

-1095 euros au titre des frais de déplacements, cette somme portant intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

-1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Dit que les intérêts seront capitalisés dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil,

-Déboute le salarié de ses demandes de rappel de salaires jusqu’à la fin des chantiers pour lesquels il a été engagé et des congés payés afférents,

Condamne la SAS Adyton Consulting à payer à M. [X] [B] la somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, en cause d’appel,

Déboute la SAS Adyton Consulting et le SNC Eiffage Systemes d’Information de leur demande respective au titre des frais irrépétibles en cause d’appel.

Condamne la SAS Adyton Consulting aux dépens de première instance et d’appel.

La greffière Le président

 


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