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COMM.
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 27 septembre 2017
Rejet non spécialement motivé
M. X…, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10414 F
Pourvoi n° Z 16-21.453
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par Mme Silvana Y…, domiciliée […] ,
contre l’arrêt rendu le 21 octobre 2015 par la cour d’appel de Besançon (1re chambre civile et commerciale), dans le litige l’opposant :
1°/ à la Caisse d’épargne de Bourgogne-Franche-Comté, société anonyme, dont le siège est […] ,
2°/ à la Caisse fédérale de crédit mutuel, dont le siège est […] ,
défenderesses à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 11 juillet 2017, où étaient présents : M. X…, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Z…, conseiller rapporteur, M. Guérin, conseiller, Mme A…, avocat général référendaire, M. Graveline, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de Me D…, avocat de Mme Y…, de Me E… , avocat de la Caisse d’épargne de Bourgogne-Franche-Comté et de la Caisse fédérale de crédit mutuel ;
Sur le rapport de M. Z…, conseiller, l’avis de Mme A…, avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l’encontre de la décision attaquée, n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y… aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la Caisse d’épargne de Bourgogne-Franche-Comté et à la Caisse fédérale de crédit mutuel la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille dix-sept. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par Me D…, avocat aux Conseils, pour Mme Y….
Le moyen reproche à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté Mademoiselle Y… de sa demande tendant à voir le Crédit Mutuel et la Caisse d’Epargne condamnés in solidum au paiement de la somme de 18.741,90 euros à titre de dommages et intérêts outre intérêts au taux légal à compter de l’assignation ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « (
) Mme Silvana Y… a fait encaisser le chèque volé de 15.000 € à la deuxième présentation, le 13 juillet 2010. Elle a opéré des retraits d’argent les 13, 14, 15 et 16 juillet 2010. Le chèque étant revenu impayé suite au rejet de la Caisse d’Epargne de Bourgogne Franche-Comté, à la suite d’une contre-passation, la somme de 15.000 € a été portée au débit du compte de Mme Silvana Y… le 23 juillet 2010. Mme Silvana Y… invoque, à l’encontre de la Caisse Fédérale du Crédit Mutuel, banquier présentateur, un manquement à son obligation de vigilance en ce que le chèque présentait une anomalie apparente due au fait qu’il était rédigé de deux écritures différentes et en ce que, alors qu’elle avait des revenus modestes et qu’elle n’était pas avertie des pratiques bancaires, elle aurait dû être informée que le crédit de 15.000 € n’était que provisoire, sous réserve d’encaissement.
Or la rédaction du chèque litigieux en deux écritures différentes ne constituait pas une anomalie puisque la banque avait retourné le chèque à Mme Silvana Y… afin qu’elle complète la date et le lieu d’établissement, ce qu’elle a fait. Mme Silvana Y… disposait des conditions générales et particulières du contrat d’ouverture de compte, lesquelles précisent (article 2.7 des conditions générales) que l’inscription des chèques au crédit du compte n’a lieu que sous réserve de leur encaissement effectif et (article 2.8 des conditions générales) que la banque peut modifier l’inscription au compte. Il convient encore d’observer que Mme Silvana Y… a perçu une somme de 1.000 € de M Hamid B… pour encaisser ce chèque sur son compte, ce qui aurait dû éveiller ses soupçons, et qu’elle a opéré des retraits dès le lendemain de la remise du chèque sans s’assurer que son compte était provisionné. Au regard de ces éléments, il ne peut être retenu à l’encontre de la Caisse Fédérale du Crédit Mutuel aucun manquement à son obligation de vigilance et le jugement du 6 décembre 2013 sera confirmé en ce qu’il a débouté Mme Silvana Y… de sa demande de dommages-intérêts dirigée contre la Caisse Fédérale du Crédit Mutuel.
Mme Silvana Y… invoque la responsabilité de la Caisse d’Epargne (banquier tiré) en ce que, alors que le chèque litigieux avait été déposé le 12 juillet 2010, il a été présenté à l’encaissement15 juillet 2010, que la Caisse d’Epargne de Bourgogne Franche-Comté savait à cette date qu’il s’agissait d’un faux chèque, puisqu’elle avait la possibilité de comparer la signature figurant sur le chèque avec la signature de M Martin C… (qu’elle possédait) et qu’elle s’est abstenue de prévenir immédiatement la Caisse Fédérale du Crédit Mutuel. Selon elle, l’abstention de la Caisse d’Epargne constitue une faute car, si la Caisse Fédérale du Crédit Mutuel avait été prévenue dès le 15 juillet 2010, elle n’aurait pas procédé aux retraits d’argent. En application des dispositions de l’article L131-35 du Code Monétaire et Financier, il n’est admis d’opposition au paiement par chèque qu’en cas de perte, vol ou d’utilisation frauduleuse du chèque, de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire du porteur. Le tireur doit immédiatement confirmer son opposition par écrit, quel que soit le support de cet écrit.
La Caisse d’Epargne de Bourgogne Franche-Comté était donc tenue d’attendre l’opposition écrite de M Martin C… (qui l’a rédigée le 19 juillet 2010) pour rejeter le chèque. Elle ne pouvait agir avant cette date, sauf à encourir la peine prévue l’article L 163-1 du Code Monétaire et Financier. Par ailleurs, Mme Silvana Y… avait déjà opéré des retraits les 13 et 14 juillet 2010 et l’intervention de la Caisse d’Epargne le 15 juillet 2010 n’aurait pas empêché les premiers retraits. La Caisse d’Epargne n’a commis aucune faute dans le traitement du paiement du chèque litigieux et le jugement du 6 décembre 2013 sera confirmé en ce qu’il a débouté Mme Silvana Y… de sa demande de dommages-intérêts dirigée contre la Caisse d’Epargne» ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE : « Le Crédit Mutuel est le banquier présentateur et il lui appartenait donc de déceler les anomalies apparentes du chèque. Ce contrôle a été réalisé puisque le Crédit Mutuel a retourné le chèque à Silvana Y… au motif que les mentions relatives à la date et au lieu d’établissement du chèque n’étaient pas remplies. Après avoir elle-même rempli ces mentions, Silvana Y… a présenté une nouvelle fois ce chèque à rencaissement et le montant a été crédité sur son compte. Silvana Y… ne peut faire grief à la banque de ne pas avoir remarqué la présence de deux écritures différentes sur le chèque alors qu’elle-même le savait parfaitement pour avoir porté les indications manquantes. Silvana Y… reproche par ailleurs à la banque de ne pas l’avoir informée ce que la somme n’était créditée que sous réserve d’encaissement. Il est exact que la banque est débitrice, vis-à- vis de ses clients, d’un devoir général de prudence, de vigilance et de conseil, en particulier à l’égard d’une personne qui n’est pas avertie des pratiques bancaires. Il convient toutefois en premier lieu d’observer que les conditions générales d’ouverture du compte rappellent que les chèques ne sont portés au crédit du compte que sous réserve d’encaissement. Par ailleurs, même si le montant du chèque était important eu égard aux ressources de Silvana Y…, telles qu’elles peuvent être reconstituées au vu des décomptes, le simple fait de présenter à l’encaissement un chèque de 15.000 € et d’en retirer la somme de 10.000 € ne pouvait conduire la banque à envisager le risque d’existence d’un chèque falsifié d’autant plus qu’elle lui avait une première fois retourné et que Silvana Y… était donc censée avoir pris contact avec son émetteur pour qu’en soit complété les mentions. Il n’en résulte que la Caisse de Crédit Mutuel n’a commis aucune faute. (
) Silvana Y… reproche à la Caisse d’Epargne, en tant que banque tirée, d’avoir eu connaissance du caractère frauduleux du chèque dès le 15 juillet 2010 et de n’en avoir informé la Caisse de Crédit Mutuel que tardivement, postérieurement aux retraits qu’elle avait opérés sur son compte. Il résulte de l’audition de la mère de Martin C… qu’elle a reçu à une date non précisée un appel de sa conseillère bancaire l’informant qu’un chèque avait été présenté le 15 juillet 2010. Le courrier d’opposition au chèque a toutefois été rédigé par Martin C… le 19 juillet 2010. Or la banque ne pouvait rejeter le chèque qu’après avoir reçu la confirmation de l’opposition par écrit et ne pouvait se contenter d’une simple indication orale, et ce conformément aux dispositions de l’article L 131-35 du Code monétaire et financier. Dans ces conditions, elle ne peut avoir commis aucune faute en attendant le courrier de confirmation de Martin C… pour rejeter le chèque. La demande à l’égard de la Caisse d’Epargne et de Bourgogne Franche-Comté sera donc également rejetée» ;
ALORS QUE 1°) l’obligation du banquier présentateur de mettre en garde un client non averti quant à la pratique consistant à créditer les comptes du montant du chèque remis sous réserve de son encaissement effectif, ne saurait être considérée comme remplie par une simple mention dans les conditions générales portées à sa connaissance; qu’il n’est pas contesté, ainsi que le faisait valoir Mademoiselle Y… dans ses conclusions d’appel (p. 7 à 10), qu’elle était une cliente disposant de revenus modestes, non avertie des pratiques bancaires (jugement confirmé p. 3, § 4), que le montant du chèque litigieux était particulièrement important au regard des mouvements habituels sur son compte, et que les retraits effectués au guichet, correspondaient pratiquement au montant de la provision; qu’en déboutant dès lors Mademoiselle Y… de sa demande en dommages- intérêts à l’encontre du Crédit Mutuel, banquier présentateur, au motif qu’elle disposait des conditions générales et particulières du contrat d’ouverture de compte précisant que l’inscription des chèques au crédit du compte n’avait lieu que sous réserve de leur encaissement effectif (arrêt attaqué p. 4, § antépénultième), la Cour d’appel a violé les dispositions de l’article 1147 du Code civil, ensemble celles de l’article L. 131-67 du Code monétaire et financier;
ALORS QUE 2°) tenu de vérifier la régularité apparente du titre, et de contrôler la signature du tireur, son client, dont il détient un spécimen, le banquier tiré doit signaler les anomalies apparentes au banquier présentateur; qu’il résultait de l’enquête diligentée à la suite de l’encaissement du chèque litigieux, ainsi que le faisait valoir Mademoiselle Y… dans ses conclusions d’appel (p. 11, § 5), que le banquier tiré avait nécessairement eu connaissance du caractère frauduleux du chèque, dès le 15 juillet 2010; qu’en déboutant dès lors Mademoiselle Y… de sa demande de dommages et intérêts à l’encontre de la Caisse d’Epargne, banquier tiré, au motif qu’elle avait déjà opéré des retraits les 13 et 14 juillet 2010, de sorte que l’intervention de la Caisse d’Epargne n’aurait pas empêché les premiers retraits (arrêt attaqué p. 5, § 3), sans rechercher si son intervention n’aurait pu empêcher, à tout le moins, les retraits effectués les 15 et 16 juillet 2010, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l’article 1382 du Code civil ;
ALORS QUE 3°) tenu de vérifier la régularité apparente du titre, et de contrôler la signature du tireur, son client, dont il détient un spécimen, le banquier tiré doit signaler les anomalies apparentes au banquier présentateur; qu’il résultait de l’enquête diligentée à la suite de l’encaissement du chèque litigieux, ainsi que le faisait valoir Mademoiselle Y… dans ses conclusions d’appel (p. 11, § 5), que le banquier tiré avait nécessairement eu connaissance du caractère frauduleux du chèque, dès le 15 juillet 2010; qu’en déboutant dès lors Mademoiselle Y… de sa demande de dommages et intérêts à l’encontre de la Caisse d’Epargne, banquier tiré, au motif inopérant que ce dernier aurait été tenu d’attendre l’opposition écrite de Monsieur C… pour rejeter le chèque quand il appartenait au banquier tiré de prévenir sans délai le banquier présentateur du caractère frauduleux du chèque dont il avait connaissance, la Cour d’appel a violé les dispositions de l’article 1382 du Code civil.