Opposition à injonction de payer : 17 mai 2022 Cour d’appel de Rennes RG n° 22/02056

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Opposition à injonction de payer : 17 mai 2022 Cour d’appel de Rennes RG n° 22/02056
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Référés Civils

ORDONNANCE N°47/2022

N° RG 22/02056 – N° Portalis DBVL-V-B7G-STN6

S.A.R.L. FLA’BAT

C/

S.A.R.L. PRIMMORIAL

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DU 17 MAI 2022

Monsieur Fabrice ADAM, Premier Président de chambre délégué par ordonnance de Monsieur le Premier Président,

GREFFIER :

Mme Julie ROUET, lors des débats et Mme Marie-Claude COURQUIN, lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 03 Mai 2022

ORDONNANCE :

Contradictoire, prononcée publiquement le 17 Mai 2022, par mise à disposition date indiquée à l’issue des débats

****

Vu l’assignation en référé délivrée le 24 Mars 2022

ENTRE :

S.A.R.L. FLA’BAT, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 5]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Claude MEYER, avocat au barreau de NANTES, substitué par Me Emmanuel LECLER

ET :

La S.A.R.L. PRIMMORIAL, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Alexandre TESSIER de la SELARL BAZILLE, TESSIER, PRENEUX, , avocat au barreau de RENNES, substitué par Me Matthieu DABOUIS

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par ordonnance du 3 décembre 2019, le président du tribunal de commerce de Saint Nazaire a enjoint à la société Primmorial de régler à la société Fla’Bat une somme de 7 302 euros TTC. Cette ordonnance a été signifiée le 13 décembre 2019.

La société Primmorial a formé opposition à cette ordonnance par lettre du 2 janvier 2020 reçue au greffe du tribunal le 3 janvier.

Statuant sur cette opposition, le tribunal de commerce de Saint Nazaire a, par jugement du 23 février 2022, notamment condamné la société Fla’Bat à payer à la société Primmorial les sommes de 27’913,73 euros (après compensation) et de 7 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, rappelant que sa décision était exécutoire de plein droit.

La société Fla’Bat a interjeté appel de cette décision par déclaration du 11 mars 2022.

Par exploit du 24 mars 2022, elle a fait assigner, au visa de l’article 514 ancien du code de procédure civile, la société Primmorial aux fins d’arrêt de l’exécution provisoire.

Elle soutient, en premier lieu, qu’à tort le tribunal de commerce a considéré que sa décision était exécutoire de droit alors qu’en matière d’injonction de payer l’acte valant demande en justice est la signification de l’ordonnance. Or, en l’espèce l’ordonnance a été signifiée à la société Primmorial le 3 décembre 2019 de sorte que les dispositions nouvelles régissant l’exécution provisoire n’étaient pas applicables.

Elle s’oppose à la demande subsidiaire de son adversaire qui sollicite que l’exécution provisoire soit ordonnée.

Subsidiairement et sur le fondement de l’article 514-3 du code de procédure civile, elle sollicite l’arrêt de l’exécution provisoire faisant valoir qu’à tort le tribunal l’a condamnée payer une somme de 30 000 euros au titre de pénalités de retard de chantier dont elle n’est pas responsable et qui ne sont pas dus ni même justifiés.

Elle ajoute qu’elle n’est pas en capacité de régler la somme à laquelle elle a été condamnée.

La société Primmorial soulève l’irrecevabilité de la demande et reconventionnellement sollicite, le cas échéant, que l’exécution provisoire soit ordonnée. Subsidiairement, elle s’oppose à la demande. En tout état de cause, elle sollicite une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et sollicite la distraction des dépens au profit de son conseil.

Elle fait valoir que la société Fla’Bat qui a sollicité en première instance l’exécution provisoire, ne peut sans se contredire demander l’arrêt de celle-ci de sorte que sa demande est irrecevable.

Elle ajoute qu’il n’appartient pas au premier président de censurer les erreurs du premier juge sur le droit applicable, y compris en matière d’exécution provisoire. Très subsidiairement, il sollicite que la décision soit assortie de l’exécution provisoire.

Elle relève en tout état de cause que la société Fla’Bat n’a fait aucune observation devant le premier juge sur l’exécution provisoire et ne justifie d’aucune conséquence survenue postérieurement à la décision de sorte que sa demande d’arrêt de l’exécution est irrecevable. Elle l’estime à défaut mal fondée et s’y oppose.

SUR CE :

Sur la demande d’arrêt de l’exécution provisoire :

Le droit de l’exécution provisoire a été modifié par un décret du 11 décembre 2019. Les dispositions nouvelles sont, aux termes de l’article 55 de ce texte, applicables aux instances introduites devant le premier juge à compter du 1er janvier 2020.

Il suffit de rappeler que sous l’empire de l’ancien droit (article 514 ancien du code de procédure civile), l’exécution provisoire ne pouvait être poursuivie sans avoir été ordonnée si ce n’est pour les décisions qui en bénéficiaient de plein droit (ce qui n’était pas le cas des jugements rendus par les tribunaux de commerce). Au contraire, l’article 514 dans sa rédaction issu du décret précité dispose que «’les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement’».

Le tribunal de commerce de Rennes a considéré en l’espèce que sa décision était exécutoire de droit puisqu’il a précisé surabondamment dans son dispositif «’dit que le présent jugement est de droit exécutoire à titre provisoire’», mention inutile si tel était effectivement le cas, s’agissant d’un effet de la loi et non de la décision rendue.

Nonobstant cette mention, il convient de rechercher si tel est le cas afin de statuer les demandes aux fins d’arrêt de l’exécution provisoire ou tendant à assortir le jugement rendu de l’exécution provisoire, ce contentieux ressortant du seul premier président.

En premier lieu et pour définir le droit de l’exécution provisoire applicable, il convient de rechercher à quelle date l’instance a été introduite devant le premier juge.

La particularité de cette affaire tient au fait que le jugement a été rendu sur opposition à injonction de payer.

En l’espèce, la société Fla’Bat a présenté sa requête en injonction de payer le 5 novembre 2019, mais il est constant que cette diligence ne constitue pas une action en justice. La jurisprudence (1re Civ., 3 octobre 1995, Bull Civ I n° 343; 1re Civ., 13 février 2007, n° 05-19969; 2e Civ., 11 décembre 2008, n° 08-18095 et 1re Civ., 5 novembre 2009, n° 08-18095) considère que seule la signification présente cette caractéristique puisque c’est l’acte par lequel le demandeur porte à la connaissance du défendeur l’ordonnance qu’il a obtenue et permet à ce dernier d’en discuter contradictoirement en formant opposition. L’opposition effectuée par le débiteur n’a pas pour effet de modifier le rôle des parties au procès (demandeur / défendeur), mais ouvre seulement l’instance résultant de la signification.

En l’espèce, l’ordonnance portant injonction de payer a été signifiée le 13 décembre 2019, soit avant la date d’entrée en vigueur des nouvelles dispositions. Il s’ensuit que ce jugement était soumis, en matière d’exécution provisoire, au droit antérieur au décret précité et que c’est donc à tort que le tribunal a dit que sa décision était exécutoire de droit ce qu’elle n’était pas.

L’exécution provisoire n’ayant pas été ordonnée, le jugement critiqué n’est pas, nonobstant la mention erronée susvisée, exécutoire.

Il n’y a donc lieu d’arrêter l’exécution provisoire, mais dire seulement que le jugement n’est pas exécutoire de droit.

Sur la demande aux fins d’assortir le jugement du 23 février 2022 de l’exécution provisoire :

L’article 525-1 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable au présent litige (antérieure au 11 décembre 2019) dispose que «’lorsque l’exécution provisoire n’a pas été demandée ou si l’ayant été , le juge a omis de statuer, elle ne peut être demandée, en cas d’appel, qu’au premier président…’».

En l’occurrence, la société Primmorial n’avait pas sollicité devant le premier juge l’exécution provisoire (cf ses conclusions n° 3, sa pièce n° 15). Sa créance étant une créance de pénalités de retard, par nature sujette à discussion et à appréciation de la cour, il n’y a lieu de faire droit à sa demande tendant à ce que la décision rendue soit assortie de l’exécution provisoire.

Chaque partie conservera à sa charge les frais compris ou non dans les dépens par elle exposés.

La demande de la société Primmorial fondée sur l’article 700 du code de procédure civile sera rejetée.

PAR CES MOTIFS :

Statuant par ordonnance rendue contradictoirement :

Vu les articles 514 et 525-1 anciens du code de procédure civile :

Disons que le jugement rendu le 23 février 2022 par le tribunal de commerce de Rennes dans le litige opposant la société Fla’Bat à la société Primmorial n’est pas assorti de droit de l’exécution provisoire.

Disons en conséquence n’y avoir lieu à arrêter l’exécution provisoire de cette décision.

Déboutons la société Primmorial de sa demande tendant à ce que ce jugement soit assorti de l’exécution provisoire.

Disons que chaque partie conservera à sa charge les frais compris ou non dans les dépens par elle exposés.

Rejetons la demande de la société Primmorial fondée sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

 


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