Nuisances sonores : décision du 6 juillet 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 19/00681

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Nuisances sonores : décision du 6 juillet 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 19/00681
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délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

3e chambre civile

ARRET DU 06 JUILLET 2023

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 19/00681 – N° Portalis DBVK-V-B7D-N73W

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 10 JANVIER 2019

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NARBONNE

N° RG 16/01716

APPELANTE :

S.A.S. SODILANG

SOCIETE DE DISTRIBUTION LANGUEDOC représentée par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 20]

[Adresse 20]

[Localité 1]

Représentée par Me Gilles ARGELLIES de la SCP GILLES ARGELLIES, EMILY APOLLIS – AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué à l’audience par Me Isabelle DELMAS, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMES :

Monsieur [Z] [M]

né le 23 Janvier 1945 à [Localité 17]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 1]

et

Madame [I] [M]

née le 03 Juin 1946 à [Localité 15]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 1]

et

Madame [X] [B] veuve [S]

née le 30 Novembre 1950 à [Localité 1]

de nationalité Française

[Adresse 7]

[Localité 1]

et

Madame [U] [S] épouse [K]

née le 18 Juin 1973 à [Localité 1]

de nationalité Française

[Adresse 16]

[Localité 3]

et

Monsieur [A] [S]

né le 26 Octobre 1984 à [Localité 1]

de nationalité Française

[Adresse 4]

G2B4H8 QUEBEC

CANADA

et

Madame [Y] [E] veuve [H]

née le 30 Mars 1946 à [Localité 1]

de nationalité Française

[Adresse 13]

[Localité 1]

et

Monsieur [J] [H]

né le 25 Avril 1977 à [Localité 1]

de nationalité Française

[Adresse 14]

[Localité 2]

Représentés par Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL & ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué sur l’audience par Me Patrick DAHAN, avocat au barreau de PERPIGNAN

Ordonnance de clôture du 21 Mars 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 09 mai 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Gilles SAINATI, président de chambre

Monsieur Thierry CARLIER, Conseiller

Mme Emmanuelle WATTRAINT, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Sabine MICHEL

ARRET :

– contradictoire

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par M. Gilles SAINATI, président de chambre, et par Mme Sabine MICHEL, Greffière.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

Les consorts [M], [S] et [H] sont propriétaires à [Adresse 18], de maisons d’habitation édifiées sur des parcelles de terrain acquises en 1970, 1977 et 1978 et sur lesquelles avaient été édifiées des villas agrémentées par la suite de piscines.

Pendant longtemps, ces biens jouxtaient une parcelle de 4 000 m2 en état de pinède tandis que de l’autre côté se trouvait un supermarché à l’enseigne « E. Leclerc » exploité par la SA Sodilang.

En 2007, le centre Leclerc, après avoir obtenu les autorisations administratives nécessaires, a fait procéder à des travaux d’extension de sa surface commerciale sur la pinède achetée à la commune de [Localité 1] ce qui a eu pour effet de créer, à proximité des pavillons d’habitation, un mur en bardage de plusieurs mètres de hauteur.

Par ordonnance de référé du 21 avril 2009 a été instituée une mesure d’expertise afin de rechercher l’existence de troubles liés à cette situation.

En raison des difficultés d’exécution de cette mesure, le juge, par décision du 7 février 2013, a invité l’expert à déposer son rapport en l’état et a désigné pour poursuivre la mission monsieur [L], monsieur [V] et madame [P], lesquels ont déposé leurs rapports les 3 septembre 2013 ( perte de valeur vénale des biens), 30 septembre 2013 (bruits) et 3 mars 2015 (vues et ensoleillement).

Par acte du 6 décembre 2016, les consorts [M], [S] et [H] ont fait assigner la SA Sodilang afin d’obtenir indemnisation de leurs préjudices.

Par un jugement contradictoire du 10 janvier 2019, le tribunal de grande instance de Narbonne a notamment :

– dit que la construction réalisée par la SAS Sodilang sur sa parcelle située à [Localité 1] et cadastrée DR n°[Cadastre 8], [Cadastre 9] et [Cadastre 10] cause à la propriété des consorts [M], [S] et [H] cadastrées DR n°[Cadastre 6], [Cadastre 11] et [Cadastre 12] un trouble anormal de voisinage dont elle doit les indemniser,

– condamné la SAS Sodilang à payer aux demandeurs au titre des préjudices subis :

– au époux [M] la somme de 56 700 euros au titre de la perte de valeur vénale de leur immeuble et la somme de 10 000 euros au titre du préjudice complémentaire,

– aux consorts [S] la somme de 82 500 euros au titre de la perte de valeur vénale de leur immeuble et la somme de 30 000 euros au titre du préjudice complémentaire,

– aux consorts [H] la somme de 66 000 euros au titre de la perte de valeur vénale de leur immeuble et la somme de 30 000 euros au titre du préjudice complémentaire,

– condamné la SAS Sodilang à payer aux consorts [M], [S] et [H] la somme de 2 800 euros pour chaque immeuble par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la SAS Sodilang aux dépens comprenant les frais des expertises, à l’exclusion de ceux du rapport de monsieur [O].

Le 28 janvier 2019, la SAS Sodilang a régulièrement interjeté appel de ce jugement.

Par ses conclusions enregistrées au greffe le 4 novembre 2021, la SAS Sodilang sollicite la réformation du jugement, sauf en ce qu’il a laissé à la charge des consorts [M], [S] et [H] les frais de l’expertise initiale.

Elle demande à voir débouter les consorts [M], [S] et [H] de leurs demandes et leur condamnation :

– aux dépens de première instance,

– au paiement d’une indemnité de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance,

– au paiement d’une indemnité de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d’appel,

– aux dépens de l’appel dont distraction au profit de la SCP Argelies-Apollis, sur leur affirmation de droits conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Par leurs conclusions enregistrées au greffe le 23 mars 2021, les consorts [M], [S] et [H] sollicitent la confirmation du jugement en ce qu’il a constaté le trouble anormal de voisinage et condamné la SAS Sodilang à réparer leur préjudice et la réformation partielle du jugement s’agissant du quantum desdits préjudices.

Ils demandent la condamnation de la SAS Sodilang au paiement des sommes de :

– aux consorts [M] 56 700 euros en réparation de la perte de valeur vénale de leur propriété, ainsi que la somme de 50 000 euros en réparation de leur préjudice de jouissance et préjudice moral ;

– aux consorts [H] 66 000 euros en réparation de la perte de valeur vénale subie par leur propriété, ainsi que la somme de 50 000 euros en réparation de leur préjudice de jouissance et de leur préjudice moral ;

– aux consorts [S] 82 500 euros en réparation de la perte de valeur vénale subie par leur propriété, ainsi que la somme de 50 000 euros en réparation de leur préjudice de jouissance et préjudice moral.

Enfin, ils sollicitent la condamnation de la société Sodilang aux dépens et au paiement de la somme de 3 000 euros à chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La clôture de la procédure a été prononcée 21 mars 2023.

Pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties et au jugement déféré.

MOTIFS

Sur les troubles anormaux du voisinage

Le tribunal a retenu l’existence de troubles anormaux de voisinage, du fait de la vue sur le bardage de huit mètres de hauteur et des nuisances sonores perceptibles. Il a, de plus, relevé que si la perte d’ensoleillement était limitée voire nulle en été, la ‘masse métallique’ projetait une ombre incomparable à celle portée antérieurement par la végétation.

La société Sodilang conteste pour sa part l’existence de troubles anormaux de voisinage, faisant valoir que :

– s’agissant des vues : d’une part, l’obstruction d’une vue ne constitue pas à elle seule un trouble anormal de voisinage, d’autant que le projet n’a pas été réalisé à la limite des possibilités d’urbanisme en ce que la construction n’est pas anormale (ouvrage construit en deçà de la limite en hauteur autorisée), d’autre part, un dispositif occultant le bardage a été mis en ‘uvre (par des plantations notamment), une végétalisation plus importante ayant été refusée par les consorts [S], [M] et [H],

– s’agissant de la perte d’intimité alléguée :

– la propriété [M] ne subit pas ce trouble étant trop éloignée de la construction litigieuse,

– les fenêtres donnant sur les propriétés [H] et [S] sont équipées de systèmes de fermeture oscillo-battant,

– s’agissant des nuisances sonores alléguées, des réparations ont été faites au niveau des ventilateurs de la boulangerie, et aucun trouble anormal lié à des nuisances imputables au centre Leclerc n’est démontré,

– s’agissant de la perte d’ensoleillement, elle n’est en l’espèce pas démontrée.

Les consorts [S], [M] et [H] soulignent l’absence de prévisibilité de la construction d’une ZAC, le fait que les nuisances sonores ont bien été constatées et la réalité des vues, les fenêtres peuvent être ouvertes par les salariés. Ils ajoutent n’avoir été destinataires d’aucune démarche personnalisée ou concrète s’agissant de la végétalisation.

La nature des troubles

Le trouble visuel

Alors que la vue depuis les maisons des consorts [S] et [M] ne rencontrait, antérieurement aux travaux d’extension de l’hypermarché, aucun obstacle, les photographies (pièce 2, 6, 6bis, 10, 10bis, 10ter des intimés) et le procès verbal d’huissier (pièce 32 des intimés) versés aux débats laissent clairement apparaître qu’actuellement, ladite vue donne, depuis le jardin des maisons, sur un bardage gris de plusieurs mètres de hauteur (8 mètres). La question des démarches préalables de la SAS Sodilang envers les riverains en vue d’une éventuelle végétalisation est sans incidence puisque les troubles éventuels découlent de la construction existante et non de ce qu’elle aurait pu être, notamment du fait d’une végétalisation qui, de fait, n’a pas été réalisée.

Si la construction nouvelle d’une part se trouve en conformité avec les règles de construction, d’urbanisme (rapport d’expertise de monsieur [V], pièce 49 des intimés, pièces 5 et 6 de l’appelante) et de droit civil, et se situe en zone UC, c’est à dire une zone d’habitat de densité moyenne (pièces 16, 17, 33 de l’appelante), donc susceptible d’accueillir de nouvelles constructions, et non de densité faible et ne pouvant accueillir de commerces, d’autre part n’a pas atteint les limites admises par le PLU (8 mètres de hauteur alors que le PLU autorise 12 mètres), pour autant la réalité du trouble existe en ce que le bardage se trouve en limite séparative, et donc à proximité immédiate des jardins et que sa hauteur est particulièrement importante (autour de 8 mètres).

S’agissant de la propriété des consorts [M], le trouble visuel existe mais est relativement modéré du fait du parking existant entre le fonds des consorts [M] et la construction du centre Leclerc d’une part, et de la présence d’arbres et arbustes dissimulant en partie le bardage d’autre part (pièces 26 et 27 de l’appelante).

Le trouble lié à la perte d’intimité

Les fenêtres de la construction nouvelle sont munies d’ouvertures à soufflet et de films opaques.

Néanmoins, eu égard à leur proximité immédiate de la maison des consorts [S] et [H], ces fenêtres sont de nature à créer pour les occupants de ces propriétés une sensation de surveillance et un sentiment d’atteinte à l’intimité constitutifs d’un véritable trouble (pièces , 6bis, 10, 10bis et 10ter des intimés).

Le trouble lié à la perte d’ensoleillement

Aux termes du rapport d’expertise de monsieur [R] [V] (pièce 49 des intimés) dont les parties ne remettent pas sérieusement en cause les conclusions techniques, si le nouveau bâtiment ne permet pas un ensoleillement l’hiver sur les propriétés [H] et [S], l’ensoleillement en été reste inchangé.

Dans ces conditions, le trouble lié à la perte d’ensoleillement n’est pas démontré en dépit, ainsi que l’a relevé le tribunal, de l’existence d’une ombre projeté par le bâtiment qui diffère de l’ombre des arbres qui existaient auparavant.

Le trouble sonore

L’expert [G] [L] a constaté que le magasin respectait les émergences sonores réglementaires. Il a toutefois relevé un bruit anormal provenant d’une soufflerie des ventilateurs de la pâtisserie le 29 avril 2013 (1ere note d’expertise) alors qu’une mesure réalisée par la mairie de [Localité 1] laissait selon l’expert planer un doute sur la gêne par le bruit produite par le groupe électrogène (pièce 46 des intimés).

Alors qu’un procès-verbal de constat dressé par huissier les 18 novembre, 2 décembre, 9 décembre, 11 décembre, 12 décembre, 16 décembre, 17 décembre et 18 décembre 2013 fait état d’une gêne acoustique importante au sein même de l’habitation des époux [M] (pièce 47 des intimés), les procès verbaux de constat d’huissier versés aux débats par l’appelante (pièce 41 et 42 de l’appelante) laissent apparaître une absence totale d’un quelconque bruit provenant de la salle des machines ou de la toiture du centre Leclerc depuis le parking situé face à la propriété [M] ou depuis la [Adresse 19], à proximité immédiate des maisons des consorts [H] et [S] (mesures prises le 20 novembre 2020 à 9h30, le 21 novembre 2020 à 9h30, 15h45 et 22h30, le 3 décembre 2020 et le 7 décembre 2020 à 14h30).

Par conséquent, il apparaît que la gêne acoustique qui a pu exister à un certain moment, peut être du fait de la défectuosité du matériel à cette époque comme le prétend la société Sodilang, a disparu.

Dans ces conditions, l’existence d’un trouble sonore n’est pas démontré.

Le caractère des troubles

Du fait de la hauteur particulièrement importante du bardage qui jouxte désormais les parcelles appartenant aux consorts [H] et [S] et qui obstrue totalement la vue, et de la présence de fenêtres à proximité immédiate de ladite propriété, les troubles de voisinage ne peuvent être considérés comme ceux susceptibles de découler habituellement de relations de voisinage, y compris en zone UC, et doivent par conséquent être qualifiés d’anormaux, ainsi que justement analysé par le tribunal.

S’agissant de la propriété [M], seul un trouble visuel est démontré. Or, du fait du parking existant entre le fonds des consorts [M] et la construction du centre Leclerc d’une part, et de la présence d’arbres et arbustes dissimulant en partie le bardage d’autre part, ce trouble est modéré. Il n’excède,par conséquent, pas les inconvénients normaux du voisinage.

Le jugement sera dès lors infirmé en ce qu’il a retenu l’existence de troubles anormaux de voisinage s’agissant de la propriété des consorts [M] et a en conséquence condamné la SA Sodilang à réparer les préjudices subis à ce titre.

Sur l’indemnisation des troubles subis par les consorts [H] et [S]

Le tribunal a retenu que les troubles anormaux de voisinage avaient entraîné deux types de préjudice :

– une perte de valeur vénale des immeubles à hauteur de 30%,

– l’obligation de vivre dans un univers qui ne possède plus le même agrément qu’auparavant.

La société Sodilang conteste l’existence des préjudices et d’un lien de causalité entre les troubles et les préjudices allégués. Selon elle, la preuve de la perte de valeur vénale des immeubles n’est pas rapportée, l’expert ayant surévalué les propriétés en valeur avant 2007. Par ailleurs, elle fait valoir que a fait l’objet ne résulte pas du trouble de voisinage. Elle ajoute que la perte de valeur vénale ne résulterait pas en l’espèce du trouble anormal de voisinage, et qu’en tout état de cause elle constituerait un préjudice hypothétique, et donc non indemnisable.

sur la perte de valeur des immeubles

L’expert, madame [N] [P], a évalué la valeur des immeubles des consorts [S] et [H] en 2007 et après 2007 après une étude documentée et après avoir pris en compte les arguments techniques que les parties lui ont communiqués par dires (pièce 44 des intimés).

Les éléments versés aux débats par la SAS Sodilang portent soit sur quelques biens, dont il n’est pas démontré qu’ils soient représentatifs de l’ensemble des biens immobiliers du secteur (pièce 23 de l’appelante), soit sur des biens vendus à compter de 2011, soit bien après 2007 (pièce 23 de l’appelante), soit sur des biens dont on ignore la date de vente (pièce 31). Ils ne sont dès lors pas de nature à venir utilement contredire les appréciations de l’expert judiciaire.

La SAS Sodilang verse également aux débats un rapport amiable établi en 2021 par monsieur [C] [D], expert immobilier (pièce 43 de l’appelante). Du fait du caractère non contradictoire de l’expertise réalisée, et de ce que l’expert a procédé à une évaluation sans avoir visité les biens (page 2 du rapport), ce rapport n’est pas non plus de nature à contredire les conclusions de l’expert judiciaire.

Il sera dans ces conditions retenu qu’en 2007, la valeur de la parcelle DR [Cadastre 11] ([S]) est de 275 000 euros et celle de la parcelle DR [Cadastre 12] ([H]) de 220 000 euros (page 27 du rapport d’expertise judiciaire de madame [N] [P])

Si l’expert retient une perte de valeur vénale de ces propriétés de 30 %, cette perte n’est pas liée uniquement à la construction du centre Leclerc, puisque les prix de l’immobilier ont baissé globalement de 8 % (pièce 31 de l’appelante).

Dans ces conditions, la perte de la valeur vénale liée à la construction du centre Leclerc, réelle et non hypothétique comme le soutient la SAS Sodilang, apparaît s’élever à 22 % de la valeur vénale des biens (valeur 2007), soit pour la parcelle des consorts [S] 275 000 euros x 22% = 60 500 euros et pour la parcelle des consorts [H] 220 000 euros x 22% = 48 400 euros.

Sur le préjudice de jouissance et le préjudice moral

Le tribunal a retenu l’obligation pour les consorts [H] et [S], de vivre dans un univers ne possédant plus le même agrément, du fait notamment du bardage jouxtant leurs fonds et de la perte d’intimité liée aux fenêtres donnant sur leurs fonds.

Les consorts [H] et [S] estiment que le tribunal a sous-évalué ces préjudices, la SAS Sodilang soutenant au contraire qu’ils auraient été sur-évalués.

Eu égard à la durée des troubles subis (presque 15 ans) et de leur intensité (bardage particulièrement haut et disgracieux jouxtant leurs fonds, et fenêtres donnant sur leurs fonds au niveau des piscines), il apparaît que le tribunal a fait une juste évaluation du préjudice ‘complémentaire’ (préjudice de jouissance et préjudice moral) subi par les consorts [H] et [S] eu égard.

Le jugement sera dès lors confirmé.

Sur les demandes accessoires

La SAS Sodilang succombant pour l’essentiel, la décision de première instance sera confirmée concernant l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, y compris concernant les consorts [M] qui ont pu croire de bonne foi au succès de leurs prétentions.

La procédure d’appel ayant permis de revoir à de plus justes proportions les montants alloués aux consorts [H] et [S], et les consorts [M], qui ont pu croire de bonne foi au succès de leurs prétentions, étant par ailleurs déboutés de leurs demandes, les parties seront déboutées de leurs demandes au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

S’agissant des dépens, aucun élément du dossier ne laissant apparaître que les difficultés liées à l’intervention du premier expert, monsieur [O], seraient imputables aux intimés et la SAS Sodilang succombant pour l’essentiel, ils seront intégralement mis à la charge de la SAS Sodilang.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement rendu le 10 janvier 2019 par le tribunal de grande instance de Narbonne sauf en ce qu’il a dit n’y avoir lieu à transport sur les lieux, dit que la construction réalisée par la SAS Sodilang cause à la propriété des consorts [S] et [H] un trouble anormal de voisinage dont elle doit les indemniser, ainsi que concernant l’indemnisation des consorts [H] et [S] au titre du préjudice complémentaire et l’application de l’article 700 du code de procédure civile de première instance  ;

Statuant des chefs infirmés,

Dit qu’il n’est pas démontré que la construction réalisée par la SAS Sodilang cause à la propriété des consorts [M] un trouble anormal de voisinage ;

Déboute monsieur [Z] [M] et madame [I] [M] de leurs demandes au titre de la perte de valeur vénale de leur immeuble, de leur préjudice de jouissance et de leur préjudice moral ;

Fixe à la somme de 60 500 euros le montant que la SAS Sodilang est condamnée à payer à madame [X] [B] veuve [S], madame [U] [S] épouse [K] et monsieur [A] [S], créanciers solidaires, au titre de la perte de valeur vénale de leur immeuble ;

Fixe à la somme de 48 400 euros la montant que la SAS Sodilang est condamnée à payer à madame [Y] [E] veuve [H] et monsieur [J] [H], créanciers solidaires, au titre de la perte de valeur vénale de leur immeuble ;

Déboute les parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SAS Sodilang aux entiers dépens de première instance et d’appel, dépens qui comprendront notamment le coût des expertises judiciaires de monsieur [O], monsieur [L], monsieur [V] et madame [P].

Le greffier, Le président,

 


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