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N° 305
CG
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Copie exécutoire
délivrée à :
– Me Quinquis,
le 25.08.2023.
Copie authentique
délivrée à :
– Me Estines-Daviles,
le 25.08.2023.
REPUBLIQUE FRANCAISE
COUR D’APPEL DE PAPEETE
Chambre Civile
Audience du 24 août 2023
RG 22/00025 ;
Décision déférée à la cour : jugement n° 21/518, rg n° 20/00209 du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete du 19 novembre 2021 ;
Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d’appel le 24 janvier 2022 ;
Appelants :
Mme [S] [K] épouse [H], née le 8 novembre 1958 à [Localité 9], de nationalité française, et
M. [P] [H], né le 16 juin 1959 à [Localité 2], de nationalité française, demeurant à [Adresse 8] ;
La Sci ‘ Ibiscus Jambolana’ société civile immobilièire, au capital de 150.000 XPF, immatriculée au Rcs de Papeete sous le n° 4165 C dont le siège social est [Adresse 8], représentée par ses cogérants, Mme [S] [K] épouse [H], et M. [P] [H] ;
Ayant pour avocat la Selard Groupavoats, représentée par Me Vasanthi DAVILES-ESTINES, avocat au barreau de Papeete ;
Intimé :
M. [T] [A], né le 30 mai 1940 à [Localité 7], de nationalité française, demeurant à [Adresse 5] ;
Ayant pour avocat la Selarl Jurispol, représentée par Me François QUINQUIS, avocat au barreau de Papeete ;
Ordonnance de clôture du 9 juin 2023 ;
Composition de la Cour :
La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 22 juin 2023, devant Mme GUENGARD, président de chambre, Mme SZKLARZ, conseiller, Mme TEHEIURA, magistrat honoraire de l’ordre judiciaire aux fins d’exercer à la cour d’appel de Papeete en qualité d’assesseur dans une formation collégiale, qui ont délibéré conformément à la loi ;
Greffier lors des débats : Mme SUHAS-TEVERO ;
Arrêt contradictoire ;
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;
Signé par Mme GUENGARD, président et par Mme SUHAS-TEVERO, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
A R R E T,
EXPOSE DU LITIGE :
M. [T] [A] est propriétaire de la parcelle cadastrée BI [Cadastre 1] à [Localité 6], sur laquelle il a obtenu un permis de construire portant sur la réalisation d’un lotissement, selon arrété n° 1 631 MLA.AU du 09 mars 2017, l’autorisant à effectuer des travaux d’aménagement et de viabilisation.
M. [T] [A] a déclaré l’ouverture du chantier au service de l’urbanisme le 3 mai 2018, les travaux ayant effectivement démarré le 2 avril 2018.
Par acte d’huissier en date des 9 et 11 juin 2020, Mme [S] [K] épouse [H] et M. [P] [H] ont fait assigner M. [T] [A] et M. [L] [G] devant le tribunal civil de première instance de Papeete.
Le 23 juillet 2020, les époux [H] se sont désistés de leur action à l’encontre de M. [L] [G].
Par jugement en date du 19 novembre 2021 le tribunal de première instance de Papeete a :
– Donné acte à Mme [S] [K] épouse [H] et M. [P] [H] de leur désistement d’instance et d’action à l’égard de M. [L] [G],
– Déclaré irrecevables les appels en cause de M. le maire de la commune de [Localité 6], M. le chef du service de l’urbanisme, sous couvert de M. le Ministre de l’aménagement et du logement en charge des affaires foncières et de l’urbanisme de la Polynésie française, M. le chef du service du groupement d’études et de gestion du domaine public, sous couvert de M. le ministre des grands travaux de la Polynésie française, et de Mme la directrice du service de l’environnement, sous couvert de M. le ministre de la culture et de l’environnement de la Polynésie,
– Déclaré irrecevable l’intervention volontaire de la Polynésie française,
– Débouté Mme [S] [K] épouse [H] et M. [P] [H] de l’ensemble de leurs demandes,
– Condamné Mme [S] [K] épouse [H] et M. [P] [H] à payer à M. [T] [A] la somme de 150.000 F CFP sur le fondement de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française,
– Condamné Mme [S] [K] épouse [H] et M. [P] [H] aux dépens de l’instance, dont distraction au profit de la SELARL JURISPOL.
Par requête en date du 24 janvier 2022 Mme [S] [K] épouse [H] et M. [P] [H] et la SCI Ibiscus Jambola, représentée par ses cogérants Mme [S] [K] épouse [H] et M. [P] [H] ont relevé appel de cette décision en demandant à la cour de:
Recevoir le présent appel ;
Le dire bien fondé et par voie de conséquence ;
Infirmer le jugement rendu par le tribunal civil de première instance de Papeete, le 19 novembre 2021 (n° 21/518 – RG 20/00209) en toutes ses dispositions ;
Condamner M. [T] [A] à indemniser les demandeurs au titre de leurs préjudices du fait du trouble anormal du voisinage pour un montant total de 6 000 000 XPF, soit 100 000 XPF par mois, en raison du trouble qu’ils ont subi du 30 août 2012 au 9 mars 2017, soit durant cinq ans, en raison des travaux incessants, réalisés sur la parcelle de l’intimé, sans autorisation administrative aucune ;
Ordonner l’exécution provisoire du jugement à venir ;
Condamner M. [T] [A] à payer la somme de 150 000 XPF au titre de la procédure de première instance et 150 000 XPF au titre de celle de seconde instance au titre de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française, car il serait inéquitable de laisser les frais de ces deux instances à la charge des appelants ;
Condamner M. [T] [A] aux entiers dépens d’instance.
Par leurs conclusions en date du 4 novembre 2022 Mme [S] [K] épouse [H], M. [P] [H] et la SCI Ibiscus Jambola demandent à la cour de :
Recevoir le présent appel ;
Le dire bien fondé ;
Et, par voie de conséquence :
Condamner M. [T] [A] à indemniser les demandeurs au titre de leurs préjudices du fait du trouble anormal du voisinage pour un montant total de 6 000 000 XPF, soit 100 000 XPF par mois, en raison du trouble qu’ils ont subi du 30 août 2012 au 9 mars 2017, soit durant cinq ans, en raison des travaux incessants, réalisés sur la parcelle de l’intimé, sans autorisation administrative aucune ;
Ordonner l’exécution provisoire du jugement à venir ;
Condamner M. [T] [A] à payer la somme de 150 000 XPF au titre de la procédure de première instance et 150 000 XPF au titre de celle de seconde instance, au titre de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française, car il serait inéquitable de laisser les frais de ces deux instances à la charge des appelants ;
Rectifier la mention relative à la profession d’avocat du demandeur dans «l’en-tête» du jugement déféré ;
Condamner M. [T] [A] aux entiers dépens d’instance.
Par leurs dernières conclusions en date du 6 juin 2023 Mme [S] [K] épouse [H], M. [P] [H] et la SCI Ibiscus Jambola maintiennent les mêmes demandes ajoutant de voir infirmer le jugement querellé en toutes ses dispositions.
Par ses dernières conclusions en date du 6 avril 2023 M. [T] [A] demande à la cour de :
Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal civil de première instance de Papeete sous le numéro de rôle RG 20/00209, en date du 19 novembre 2021,
Declarer irrecevables les demandes présentées par les époux [H] et la société Ibiscus Jambolana,
En tout êtat de cause,
Débouter les époux [H] et la société Ibiscus Jambolana de l’ensernble de leurs fins, moyens et prétentions,
Condamner les époux [H] et la société Ibiscus Jambolana à verser à M. [T] [A] la somme de 500.000 francs CFP au titre des frais irrépétíbles de première instance et d’appel,
Condamner les époux [H] et la société Ibiscus Jambolana aux entiers dépens, dont distraction d’usage au profit de la SELARL JURISPOL.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 9 juin 2023.
M. [A] [T] a adressé le 13 juin 2023 au conseiller de la mise en état demandant de voir écarter des débats les dernières conclusions.
Il a déclarer lors de l’audience ne plus former aucune demande à ce titre.
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur la fin de non recevoir à l’encontre de la SCI Ibiscus Jambolana :
M. [A] soulève l’irrecevabilité de l’intervention de la SCI Ibiscus Jambolana au motif que celle-ci n’était pas intervenue en première instance.
Le droit d’appel appartient à toute partie qui y a intérêt ce qui suppose qu’elle ait succombé en ses demandes en première instance.
La SCI Ibiscus Jambolana n’était pas partie en première instance de sorte qu’elle ne saurait être recevable à en relever appel, ce qu’elle ne conteste au demeurant pas puisqu’elle développe dans ses conclusions le fait qu’elle intervient volontairement à la procédure sur le fondement des dispositions de l’article 343 du code de procédure civile de la Polynésie française.
Aux termes des dispositions de l’article 343 du code de procédure civile de la Polynésie française peuvent intervenir en cause d’appel dès lors qu’elles y ont intérêt les personnes qui n’ont été ni parties, ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité.
La sci Ibiscus Jambolana déclare être propriétaire ‘de la parcelle occupée par les appelants’ sans cependant en justifier.
En tout état de cause, contrairement à ce qu’elle développe, elle n’agit, aux termes des dernières conclusions, qu’en qualité d’appelante de sorte qu’elle est à ce titre irrecevable tant en son appel et en ses demandes subséquentes.
Sur la fin de non recevoir à l’égard de M. [P] [H] et Mme [S] [K] :
Aux termes des dispositions de l’article 1382 du code civil tout fait de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
L’action en responsabilité pour trouble anormal de voisinage peut être exercée non seulement par le propriétaire qui est voisin et victime de ces troubles, mais également par tout occupant des lieux.
En conséquence, le fait que les appelants ont reconnu ne pas être propriétaires de la parcelle qu’ils déclarent occuper ne saurait pour autant les priver du droit à solliciter l’indemnisation d’un préjudice qu’ils déclarent subir du fait d’un trouble anormal du voisinage.
La fin de non recevoir élevée à leur égard sera rejetée.
Sur le trouble subi :
C’est à juste titre que le premier juge a déclaré qu’afin d’engager la responsabilité de M. [A] il appartient aux époux [H] de démontrer l’existence d’un trouble anormal, s’inscrivant dans un rapport de voisinage et créant un préjudice .
Les appelants font valoir que si des travaux de terrassement, en eux-mêmes bruyants, ne peuvent être considéré comme excessifs dès lors qu’ils sont limités dans le temps ce qui relève des aléas de la vie en communauté, raison pour laquelle ils se sont désistés de leur action à l’encontre des consorts [G] et [C] tel n’est pas le cas dès lors que ces travaux sont d’une durée tout à fait anormale.
Les appelants produisent un rapport de constatation de la police de [Localité 6] en date du 30 août 2012 constatant la présence d’une drague effectuant des travaux de terrassement sur la [Localité 10] 4, appartenant à M. [A] qui avait déclarer procéder à des travaux sans être titulaire d’une autorisation de terrassement. Le 9 mars 2017 M. [A] a obtenu un arreté l’autorisant à réaliser des travaux de viabilisation du lotissement Te Ora Hau en deux tranches pour un nombre total de 17 lots sur la terre [Localité 10] 4, parcelle cadastrée section BI n° [Cadastre 1] à [Localité 6].
Les appelants exposent que leur action a pour objet de faire constater l’abus qui a été commis, antérieurement à la délivrance de l’autorisation administrative et que leur demande de réparation est fondée sur le préjudice qu’ils ont subi du fait des travaux réalisés illégalement durant cinq années, ce qui constitue une durée manifestement importante dans ce contexte illégal.
S’ils énoncent en page 9 de leurs conclusions que c’est la durée de onze ans qui caractérise à elle seule l’anormalité du trouble leur seule demande reprise aux termes du dispositif de leurs conclusions vise la période de cinq ans entre le 30 août 2012 et le 9 mars 2017.
Ils versent aux débats un plan en pièce n° 2 sur lequel ils ont matérialisé l’emprise de la terre [Localité 10] en légende A et porté en légende B ‘propriété des demandeurs’ ainsi qu’un procès verbal de constat en date du 3 juin 2020 établi par Me [O] selon lequel celui-ci a pu constater les travaux réalisés sur la terre [Localité 10] à partir du [Adresse 4] commune de [Localité 6] ayant été décliné par les époux [H] comme étant leur propriété.
M. [A] fait valoir qu’ils ne justifient pas d’une occupation dudit immeuble au cours de laquelle ils auraient souffert du trouble allégué.
Aucun élément ne permet de justifier qu’à la date du rapport de constatation de la police de [Localité 6], le 30 août 2012, ils habitaient sur les lieux.
Le courrier adressé par M. [H] au maire de [Localité 6] le 28 avril 2020 déclarant que ‘nous souffrons, depuis plusieurs années, du flux continu de camions transportant des pierres d’enrochement’ ne permet pas de définir la durée depuis laquelle ils occupent le [Adresse 4].
L’attestation établie le 12 janvier 2021 par M. [D], qui demeure [Adresse 3] à [Localité 6] relate que : ‘Je travaille tous les jours de la semaine y compris le dimanche et jusque tard le soir. La gêne au niveau sonore : raisonne dans toute la vallée (cassage des rochers et des cailloux). Allées et venues incessants des camions et divers engins de chantier. Poussières et terres dans l’air ambiant’ est , ainsi que l’a relevé le premier juge, particulièrement imprécise s’agissant des circonstances de temps et de lieux des évènements constatés. Aucun élément de durée n’y est mentionné.
Si lors de son constat Me [O] a constaté d’importants bruits générés par des engins de chantier et un marteau piqueur provenant de la terre [Localité 10], située à l’arrière de la propriété [H] et dont elle est la voisine immédiate, la présence d’une pelle mécanique avec un marteau piqueur monté sur son bras et une seconde pelle extrayant la roche, en contrebas de la propriété [H] un bruit continu et d’une intensité importante émis par ces engins et, sur l’autre versant de la terre [Localité 10], en hauteur, plusieurs engins de chantier de type pelle mécanique, ces constatations effectuées le 3 juin 2020 sont insuffisantes à établir que les appelants ont subi ces nuisances sonores durant les périodes où ils considèrent que celles-ci relevaient d’un trouble anormal du voisinage à savoir entre 2012 et 2017.
Dès lors ainsi que le fait valoir M. [A], aucune précision n’est donnée sur la date à laquelle ils ont occupé les lieux étant ajouté que rien ne permet d’établir que les travaux ont perduré de façon continue durant la période qu’ils invoquent à savoir entre 2012 et 2017.
A défaut pour les époux [H] de justifier du préjudice qu’ils ont pu subir du 30 août 2012 au 9 mars 2017, c’est à juste titre qu’ils ont été déboutés de leur demande.
Le jugement attaqué sera confirmé de ce chef.
Sur la demande de rectification de la mention relative à la profession du demandeur au jugement :
M. [H] se plaint de la présentation faite dans l’en tête du jugement attaqué qui a porté mention de sa profession en gras et juste après son nom.
Sans émettre d’autre critique que le caractère regrettable de la conjonction de coordination liant le nom et la profession et le caractère gras dans lequel cette dernière a été portée, il en demande la rectification.
Aucune erreur n’entachant le jugement de ce chef il n’appartient nullement à la cour de modifier la typographie des mentions des parties et la demande formée de ce chef sera rejetée.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Mme [S] [K] épouse [H], M. [P] [H] seront condamnés aux dépens et il n’est pas inéquitable d’allouer à M. [T] [A] la somme de 150 000 XPF au titre des dispositions de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française.
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Déclare la SCI Ibiscus Jambolana irrecevable tant en son appel et en ses demandes subséquentes,
Confirme le jugement attaqué,
Rejette le surplus des demandes,
Condamne Mme [S] [K] épouse [H], M. [P] [H] à payer à M. [T] [A] la somme de 150 000 XPF au titre des dispositions de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française,
Condamne Mme [S] [K] épouse [H], M. [P] [H] aux dépens d’appel dont distraction d’usage au profit de la SELARL JURISPOL.
Prononcé à Papeete, le 24 août 2023.
Le Greffier, Le Président,
signé : M. SUHAS-TEVERO signé : C. GUENGARD