Nuisances sonores : décision du 15 septembre 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/17172

·

·

Nuisances sonores : décision du 15 septembre 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/17172
Ce point juridique est utile ?

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-6

ARRÊT AU FOND

DU 15 SEPTEMBRE 2023

N° 2023/ 228

Rôle N° RG 19/17172 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BFEGS

[G] [I]

C/

Syndic. de copro. [Adresse 2]

Copie exécutoire délivrée

le :15/09/2023

à :

Me Jean Raphaël FERNANDEZ de la SELARL FERNANDEZ GUIBERT & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Laetitia LUNARDELLI, avocat au barreau de TOULON substitué par Me Estelle VALENTI, avocat au barreau de TOULON

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULON en date du 09 Septembre 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 17/00960.

APPELANT

Monsieur [G] [I], demeurant [Adresse 1]/FRANCE

représenté par Me Jean Raphaël FERNANDEZ de la SELARL FERNANDEZ GUIBERT & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE et par Me Philippe GOMAR, avocat plaidant du barreau de PARIS

INTIMEE

Syndic. de copro. [Adresse 2] représenté par son syndic en exercice : la Société par actions simplifiée FONCIA TOULON, sise [Adresse 2]

représentée par Me Laetitia LUNARDELLI, avocat au barreau de TOULON substitué par Me Estelle VALENTI, avocat au barreau de TOULON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 15 Juin 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Philippe SILVAN, Président de chambre, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Philippe SILVAN, Président de chambre

Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre

Madame Estelle de REVEL, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Suzie BRETER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Septembre 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 Septembre 2023

Signé par M. Philippe SILVAN, Président de chambre et Mme Suzie BRETER, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

A compter du 31 janvier 2003, M. [I] a été recruté en qualité de gardien d’immeuble par le syndicat des copropriétaires du «'[Adresse 2]» (la copropriété de [Adresse 2]). Il relevait de la catégorie B, niveau 2, coefficient 255.

Le 7 septembre 2017, le médecin du travail a déclaré M. [I] inapte à son poste. Le 10 octobre 2017, M. [I] a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le 28 décembre 2017, M. [I] a saisi le conseil de prud’hommes de Toulon d’une contestation de son licenciement.

Par jugement du 9 septembre 2019, le conseil de prud’hommes de Toulon a’:

– débouté M. [I] de ses demandes,

– débouté la copropriété de [Adresse 2] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné M. [I] aux aux entiers dépens..

Le 8 novembre 2019, M. [I] a fait appel de ce jugement.

A l’issue de ses conclusions du 17 janvier 2020, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions, M. [I] demande de’:

– infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Toulon le 9 septembre 2019, en ce qu’il l’a débouté de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions et l’a condamné aux dépens, statuant à nouveau’:

– dire et juger qu’il a été victime, dans le cadre de l’exécution de ses fonctions de gardien d’immeuble de catégorie B pour le compte de la copropriété de [Adresse 2], de harcèlement moral’;

– condamner la copropriété de [Adresse 2], à lui verser une somme de 30.000’euros, à titre d’indemnisation, en réparation de son préjudice subi du fait du harcèlement moral dont il est victime’;

– condamner la copropriété de [Adresse 2] à lui verser une somme de 10.000’euros, à titre d’indemnisation en réparation de son préjudice subi du fait de la violation par l’employeur de l’obligation de résultat de sécurité et d’absence de prévention des actes de harcèlement moral dont il est victime’;

– condamner la copropriété de [Adresse 2] à lui verser une somme de 110.409,84’euros, à titre d’indemnisation en réparation de son préjudice subi du fait de la nullité de son licenciement et subsidiairement de son licenciement sans cause réelle et sérieuse’;

– condamner la copropriété de [Adresse 2] à lui verser une somme de 5.000’euros, à titre d’indemnisation, en réparation de son préjudice subi du fait de l’absence totale de rénovation de son logement de fonction nonobstant l’insalubrité manifeste de celui-ci, pendant près de 15 ans’;

le tout avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement à intervenir’;

– condamner la copropriété de [Adresse 2] à lui verser une somme de 1.170,39’euros, au titre du remboursement des sommes prélevées mensuellement sur ses bulletins de salaire à titre d’avantage en nature logement’;

– condamner la copropriété de [Adresse 2] à lui verser une somme de 3.334,52’euros, à titre de rappels de salaire d’heures supplémentaires, du fait du dépassement de l’amplitude hebdomadaire de travail’;

– condamner la copropriété de [Adresse 2] à lui verser une somme de 333,45’euros, au titre des congés payés afférents’;

avec intérêts au taux légal à compter du 28 décembre 2017, date de saisine du conseil de prud’hommes’;

– débouter la copropriété de [Adresse 2] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions’;

– condamner la copropriété de [Adresse 2] à lui verser la somme de 4.000’euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile’;

– condamner la copropriété de [Adresse 2] aux entiers dépens, tant de première instance, que d’appel, distraits pour les seconds au profit de la Selarl Fernandez & Guibert, avocat, en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

M. [I] soutient qu’il a fait l’objet, depuis plusieurs années, de faits de harcèlement moral commis par divers copropriétaires, caractérisés par des mensonges et rumeurs diverses faisant allusion à des vols imaginaires de courriers, tentatives de sabotage sur les installations de la piscine et autres allégations ayant entrainé de nombreux arrêts de travail, notamment pendant l’année 2017, ainsi qu’une dégradation notable de son état de santé psychologique et de ses conditions de travail, justifiant ainsi sa demande en dommages-intérêts pour harcèlement moral.

Il expose qu’il avait informé la copropriété de [Adresse 2] de ces faits de harcèlement moral selon deux lettres recommandées avec accusé de réception des 23 mai 2013 et 13 juillet 2014 qui n’ont entraîné aucune réaction suffisante de la part de son employeur lequel a ainsi manqué à son égard à son obligation de sécurité

Il soutient que son inaptitude physique trouve sa cause dans les faits de harcèlement moral qu’il a subi.

Il reproche à la copropriété de [Adresse 2] de ne pas avoir assuré la réfection de son logement de fonction en violation de l’article 20 de la Convention Collective des gardiens, concierges et employés d’immeubles selon lequel la réfection des embellissements et de lui avoir délivré un logement insalubre.

Il s’estime fondé à solliciter le remboursement des sommes prélevées au titre de l’avantage en nature logement aux motifs que contrairement aux stipulations de son contrat de travail et en violation de la convention collective applicable, il ne disposiait, en raison de la configuration des lieux, d’aucune pièce exclusivement réservée à l’habitation puisqu’aucune loge n’était mise à sa disposition et qu’il était donc contraint de travailler à l’intérieur de son logement de fonction.

Il expose enfin que son contrat de travail prévoyait une amplitude horaire de 49’h, que, depuis le 26 novembre 2014, la convention collective applicable prévoit une amplitude hebdomadaire de 47 h 30, que la copropriété de [Adresse 2] ne lui a adressé aucun avenant à son contrat de travail réduisant son amplitude hebdomadaire de travail à 47H30, qu’il a a donc travaillé, sans percevoir de rémunération, pendant 1h30 par semaine depuis le 28 décembre 2014 et qu’il est donc fondé à sollicité un rappel de salaire de ce chef.

Au terme de ses conclusions du 17 mars 2020, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions, la copropriété de [Adresse 2] demande de’:

”confirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions’;

par conséquent’;

”déclarer, dire et juger que M. [I] n’a jamais été victime de harcèlement moral’;

”déclarer, dire et juger que l’employeur n’a pas violé son obligation de sécurité de résultat’;

”déclarer, dire et juger que le licenciement de M. [I] n’est pas nul’;

”déclarer, dire et juger que le licenciement de M. [I] est parfaitement justifié’;

”déclarer, dire et juger que le logement de M. [I] n’a jamais été insalubre et a subi les réfections nécessaires’;

”déclarer, dire et juger que M. [I] n’a jamais eu à travailler dans son logement de fonction’;

”déclarer, dire et juger que l’amplitude hebdomadaire de travail n’a jamais été dépassée et qu’il a été rempli de ses droits en matière de rémunération’;

”déclarer, dire et juger que M. [I] n’a jamais effectué d’heures supplémentaires qui ne lui auraient pas été réglées’;

en conséquence’;

”débouter M. [I] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions’;

”condamner M. [I] à lui verser la somme de 2500’euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;

”condamner M. [I] aux entiers dépens.

La copropriété de [Adresse 2] conteste les faits de harcèlement moral invoqués par M. [I] aux motifs qu’il ne rapporte pas la preuve des faits qu’il invoque, que les faits relatés par M. [I] dans ses courriers des 25 mai 2013 et 13 juillet 2014 sont contestables et ne sont pas assimilables à du harcèlement et que dans ses courriers M. [I], placé en arrêt de travail le 17 février 2017, ne vise que des faits commis par une copropriétaire décédée en novembre 2015.

La copropriété de [Adresse 2] conteste en outre l’existence d’un lien entre les faits de harcèlement moral allégués par M. [I] et la dégradation de son état de santé aux motifs que seul le médecin du travail est fondé à constater l’existence de conditions de travail harcelantes entraînant une dégradation de l’état de santé d’un salarié, que le conseil syndical était constitué de propriétaires très courtois et bienveillants, et d’un président du conseil syndical à l’écoute et protecteur, qu’une mesure de médiation a été organisée entre M. [I] et la copropriétaire qu’il incriminait afin de régler leur différend et que M. [I] a bénéficié d’un certain nombre de formations spécialisées pour les gardiens d’immeuble, liées entre autres à la gestion des conflits.

La copropriété de [Adresse 2] conteste les griefs formés par M. [I] portant sur la réfection de son logement de fonction et son insalubrité aux motifs que des travaux ont été effectués en 2008, 2016 et 2017 dans ce dernier, que M. [I] ne rapporte pas la preuve du caractère insalubre de son logement et qu’il n’a jamais évoqué la moindre anomalie avant le mois de mai 2016,

Concernant le remboursement de l’avantage en nature logement, la copropriété de [Adresse 2] fait valoir que le logement de M. [I] comprenait une loge distincte de la partie habitation et que M. [I] n’a jamais eu à travailler à l’intérieur de son logement de fonction.

Enfin, elle expose que, suite à l’avenant n°84 à la Convention Collective des gardiens, concierges et employés d’immeuble, entré en vigueur le 26 novembre 2014, un avenant au contrat de travail réduisant l’amplitude de travail de M. [I] de 30 minutes par jour lui a été transmis pour signature, que M. [I] ne l’a jamais retourné à son syndic, que M. [I] a été rémunéré sur la base d’une amplitude horaire de 47’h’30 et qu’il n’a jamais travaillé 1’h’30 supplémentaire par semaine, sans percevoir de rémunération.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 12 mai 2023. Pour un plus ample exposé de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère expressément à la décision déférée et aux dernières conclusions déposées par les parties.

SUR CE’:

Sur le harcèlement moral’:

L’article L.’1152-1 du code du travail prévoit qu’aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L’article L.1154-1 du même code précise que lorsque survient un litige relatif à l’application des articles L.’1152-1 à L.1152-3 et L.1153-1 à L.’1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement, qu’au vu de ces éléments, pris dans leur ensemble, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement et que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

M. [I] verse aux débats le témoignage de Mme [M], ayant résidé à deux reprises au sein de la copropriété de [Adresse 2], qui atteste que, courant juin 2010, elle a assisté à une scène à l’occasion de laquelle deux propriétaires d’appartements discutaient fort, proféraient des propos calomnieux envers M. [I] et lui reprochaient de ne pas être intervenu suite au passage de deux véhicules qui avaient emprunté la voie publique traversant la copropriété pour se rendre à la plage. Mme [M] relate en outre que, courant juin 2015, elle avait entendu la même copropriétaire s’adresser avec agressivité et véhémence à M. [I], lui reprochant de ne pas avoir réagi suite à des nuisances sonores nocturnes sur la plage publique. Ce témoin expose que «’dans ce petit coin de paradis, l’ambiance était malheureusement délétère et malsaine’» et qu’elle avait eu l’impression d’un acharnement orchestré à l’encontre de M. [I] pour lui nuire. Enfin, ce témoin conclut en indiquant avoir rencontré M. [I] en février 2018 et que ce dernier lui avait expliqué ses problèmes de santé liés aux maltraitances psychologiques subies pendant toutes ces années ayant abouti à son licenciement.

M. [I] produit en outre aux débats’:

– la justification de la prescription d’un traitement médicamenteux par un neurologue le 29 octobre 2010, étant précisé que l’ordonnance, illisible, ne permet pas d’identifier le médicament prescrit et que les conclusions de M. [I] n’apportent aucune précision de ce chef,

– la justification de la prescription par un neuropsychiatre d’Imiject en octobre 2010, janvier 2011 et juillet 2011,

– la justification de la prescription par le docteur [O], psychiatre, d’anxiolytique, anti-dépresseur et somnifère (Seroplex, Noctomide et Lexomil) entre le 8 juin 2016 et le 11 juillet 2017,

‘ un courrier de la médecine du travail du 27 octobre 2017 résumant son dossier médical et dont il ressort notamment un traitement en 2010 et 2011 pour une algie vasculaire de la face (équivalent migraineux hyperalgique, de nature psycho-somatique notoire), la prescription de Xanax en 2013 en raison d’un signalement de harcèlement permanent par un propriétaire, un traitement par Alprazolam en 2015 en raison d’un harcèlement par certains co-propriétaires, un état de dépression profonde réactionnelle à une souffrance au travail en juillet 2017, invoquant des difficultés avec des propriétaires (mensonges, rumeurs, vols de courriers,’) et qui conclut que, bien qu’il soit aléatoire d’établir un lien de causalité entre les conditions de travail et l’affection ayant conduit à l’inaptitude, la souffrance au travail et les somatisations étaient réelles.

En l’état de ces éléments médicaux, il apparaît clairement que M. [I] bénéficie d’un traitement médical destiné en premier lieu, en 2010 et 2011, à traiter une algie vasculaire de la face puis, à compter de l’année 2013 à traiter d’abord des troubles anxieux, puis des troubles du sommeil et, enfin, une dépression profonde.

Cependant, il convient de relever que le témoignage de Mme [M], seul élément de preuve produit aux débats pour établir les faits de harcèlement moral invoqués par M. [I] ne relatent que deux faits précis, survenus en juin 2010 et juin 2015.

En outre, il ne peut être tiré aucune conséquence utile du surplus de l’attestation de ce témoin qui indique avoir eu l’impression d’un acharnement orchestré à l’encontre de M. [I] pour lui nuire et relate que, courant février 2018, M. [I] lui avait exposé ses problèmes de santé liés aux maltraitances psychologiques subies pendant plusieurs années. En effet, Mme [M] se contente ainsi de donner son interprétation des altercations de 2010 et 2015 ou à retranscrire les déclarations de M. [I] sans témoigner d’aucun fait auquel elle aurait personnellement assisté.

Compte tenu du temps écoulé entre les deux incidents de juin 2010 et juin 2015, et faute de tout élément de preuve, il n’en résulte pas la démonstration que M. [I] a fait l’objet, pendant plusieurs années, de mensonges ou rumeurs diverses de la part des copropriétaires de la copropriété de [Adresse 2] et, par voie de conséquence, d’établir un lien entre les deux altercations précitées et la dégradation de l’état de santé de ce salarié.

M. [I] est ainsi défaillant dans l’exécution de son obligation de présentation d’éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement. Le jugement déféré, qui l’a débouté de sa demande en dommages-intérêts de ce chef, sera confirmé.

sur le respect par l’employeur de son obligation de sécurité’:

Selon l’article L. 4121-1 du code du travail, l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. L’article L.’4121-2 du même code décline les principes généraux de prévention sur la base desquels l’employeur met en ‘uvre ces mesures.

Conformément à l’article L.’4121-2, 7° du code du travail, il incombe notamment à l’employeur de planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral.

Il est de principe que respecte l’obligation de sécurité qui lui incombe, l’employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures de prévention prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail (actions de prévention, d’information, de formation’) et qui, informé de l’existence de faits susceptibles de constituer un harcèlement moral, a pris les mesures immédiates propres à le faire cesser.

Conformément à l’article L.’4121-2, 7° du code du travail, il incombe notamment à l’employeur de planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral.

La copropriété de [Adresse 2] ne justifie pas de la mise en place de mesures destinées à prévenir le risque de harcèlement moral.

Par ailleurs, selon lettre recommandée avec accusé de réception du 23 mai 2013, M. [I] s’est plaint auprès de la copropriété de [Adresse 2] de pressions, remarques désobligeantes, propos dévalorisants et demandes contradictoires subis dans l’exercice de ses fonctions de concierge et a relaté un évènement précis subi le 11 mai 2013 à l’occasion duquel il aurait été interpellé par Mme [R], copropriétaire. Ce faisant, malgré l’absence d’emploi du mot «’harcèlement’», M. [I] a décrit des faits susceptibles d’être qualifiés de harcèlement moral. En outre, selon lettre recommandée avec accusé de réception du 13 juillet 2014, a signalé à la copropriété de [Adresse 2] qu’il avait été harcelé par Mme [R], en présence du président de la copropriété.

La copropriété de [Adresse 2], à qui il incombait de diligenter les mesures d’investigations nécessaires pour établir la réalité des griefs formés par M. [I] et d’adopter, dans l’affirmative, les mesures immédiates propres à faire cesser les faits de harcèlement moral allégués, ne justifie pas de la mise en ‘uvre d’une enquête pour se prononcer sur l’existence des faits invoqués. Elle a ainsi manqué à son obligation légale de sécurité et ne peut, dès lors, exciper d’une médiation organisée entre M. [I] et Mme [R] ou des formations professionnelles suivies par M. [I].

Il est de principe que ne cause pas nécessairement un préjudice au salarié le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.

M.[I] ne rapporte pas la preuve de l’existence du préjudice qu’il a subi à raison du manquement de la copropriété à son obligation légale de sécurité. Le jugement déféré, qui l’a débouté de sa demande en dommages-intérêts de ce chef, sera confirmé.

sur le licenciement de M. [I]’:

Il est de jurisprudence constante qu’est nul le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement lorsque cette inaptitude trouve sa cause dans des faits de harcèlement moral subi par le salarié.

D’autre part, le licenciement pour inaptitude est dépourvu de cause réelle et sérieuse lorsqu’il est démontré que l’inaptitude était consécutive à un manquement préalable de l’employeur qui l’a provoquée.

Il a été retenu qu’il n’était pas établi que M. [I] avait fait l’objet de faits de harcèlement moral. M. [I] ne peut en conséquence conclure à la nullité de son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Par ailleurs, M. [I], qui conclut à titre subsidiaire à l’absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement n’invoque ni ne prouve aucun manquement de la part de la copropriété de [Adresse 2] à l’origine de son inaptitude. Il ne peut en conséquence demander de juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

sur le logement de fonction de M. [I]’:

L’article 20 de la convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d’immeubles (la convention collective applicable) prévoit que le contrat de travail peut prévoir l’attribution d’un logement de fonction lorsque le salarié est classé catégorie A, que ce logement est obligatoire lorsque le salarié est classé catégorie B et que la réfection des embellissements (peintures, revêtements muraux) dans le logement de fonction, incombant à l’employeur, interviendra tous les 5 ans si nécessaire, et au plus tard tous les 7 ans lorsque le logement comprend une pièce unique et tous les 10 ans dans les autres cas. La réfection des revêtements de sol interviendra si nécessaire.

Par ailleurs, le décret n°2002-120 du 30 janvier 2002 définis les caractéristiques d’un logement décent.

En l’espèce, M. [I] a pris possession de son logement de fonction, composé de plusieurs pièces, au début de l’année 2003. Il ne ressort pas des pièces produites aux débats par M. [I] que l’état de son logement rendait nécessaire, dans le délai de 5 ans à compter de son entrée dans les lieux, les travaux d’embellissement prévus par l’article 20 de la convention collective applicable. En revanche, la copropriété de [Adresse 2] ne rapporte pas la preuve de la réalisation de tels travaux dans un délai de 10 ans à compter de cette date. La copropriété de [Adresse 2] a ainsi manqué à ses obligations conventionnelles.

Selon lettre recommandée avec accusé de réception du 9 mai 2016, M. [I] a signalé à la copropriété de [Adresse 2] divers problèmes d’insalubrité affectant son logement’: écoulement d’eaux usées et d’excréments dans le vide sanitaire, carreaux dans la douche tombant au sol, développement de moisissure et de champignons, présence d’odeurs et de salpêtre entraînant des irritations et des quintes de toux et a joint à ce courrier diverses photographies attestant de la réalité des termes de ce courrier.

S’il est acquis qu’à cette date M. [I] avait informé la copropriété de [Adresse 2] des problèmes d’insalubrité affectant son logement de fonction, il n’est pas démontré par le salarié que cette situation était connue depuis plusieurs années par la copropriété de [Adresse 2].

La copropriété de [Adresse 2] verse aux débats des ordres de service et factures ainsi qu’un procès-verbal de constat amiable de dégâts des eaux démontrant la réparation en septembre 2016 des canalisations de l’appartement de M. [I] et la désinfection de son vide-sanitaire ainsi que la réfection de l’appartement en question en juillet 2017.

Il en résulte que la copropriété de [Adresse 2] a fait preuve de diligence pour régler les problèmes d’insalubrité affectant l’appartement de fonction de M. [I]. En revanche, ce salarié n’a pas bénéficié des travaux d’embellissement conventionnellement prévus et la reprise des dégradations affectant l’appartement n’a été réalisée que plus d’un an après le courrier de M. [I] du 9 mai 2016. Le préjudice subi par M. [I], qui n’a pu bénéficier des travaux d’embellissement conventionnellement prévus ni jouir d’un logement décent, sera indemnisé en lui allouant 2 500 euros à titre de dommages-intérêts.

sur l’avantage en nature au titre du logement’:

L’article 23 de la la convention collective applicable, dans sa version en vigueur à l’époque de la relation de travail, prévoit que le montant du salaire en nature représenté par la disposition d’un logement de fonction sera évalué en appliquant à la surface exclusivement réservée à l’habitation (sans que la surface retenue puisse excéder 60 mètres carrés) le prix au mètre carré défini en annexe II pour la catégorie à laquelle se rattache ledit logement de fonction.

Il ne résulte pas de ces dispositions conventionnelles que la partie du logement de fonction utilisée par le concierge à des fins professionnelles, et donc nécessairement exclue du périmètre de calcul de l’avantage en nature au titre du logement, doit être physiquement séparée des parties exclusivement réservées à l’habitation.

Il ressort de l’attestation de surfaces privatives du 30 mars 2018, produite aux débats par la copropriété de [Adresse 2], que le logement de fonctions du concierge de la copropriété se compose d’une loge de 6,14’m², d’un séjour/cuisine de 16,16’m², d’une chambre de 9,52’m² et d’une salle d’eau WC de 3,88’m² soit un total de 35,70’m² et une superficie destinée à l’habitation de 26,18’m².

Les photographies et le plan versés à l’instance ne permettent pas de se convaincre que la partie strictement destinée à l’habitation du logement de fonction de M. [I] était d’une superficie moindre. Le jugement déféré, qui a débouté ce salarié de sa demande en rappel de salaire sur avantage en nature au titre du logement sera donc confirmé.

sur le rappel de salaire’:

Selon le contrat de travail de M. [I] du 31 janvier 2003, l’amplitude hebdomadaire de travail de ce salarié était de 49’h’00.

En exécution d’un avenant n°84 du 23 mai 2014, l’amplitude hebdomadaire des concierges a été fixée à 47’h’30. L’article 18.3 de la convention collective applicable prévoit que, pour les contrats antérieurs au 26 novembre 2014 (date de l’entrée en vigueur de l’avenant n° 84), dont la période visée ci-dessus était supérieure à 47 h 30, la répartition de la réduction de la période d’exécution des tâches et de permanence sur la journée de travail est fixée à 1 demi-heure par jour du lundi au vendredi sauf dispositions contractuelles entre salarié et employeur.

La copropriété de [Adresse 2], qui soutient qu’un avenant formalisant la réduction du temps de travail a vainement été adressé à M. [I] n’en rapporte pas la preuve.

M. [I] soutient avoir travaillé au deçà de la durée hebdomadaire conventionnelle de travail et sollicite un rappel de salaire de ce chef. Une telle prétention s’avère constitutive d’une demande en rappel de salaire sur heures supplémentaires.

Aux termes de l’article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l’employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Enfin, selon l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre’d’heures’de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des’heures’de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre’d’heures’de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux’heures’non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des’heures’de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence’d’heures’supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

M. [I] expose avoir travaillé chaque semaine à raison de 49’h.

Ce faisant, il présente des éléments suffisamment précis quant aux’heures’non rémunérées dont le paiement est réclamé permettant à son ex-employeur, chargé d’assurer le contrôle des’heures’de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

En revanche, il ne produit aucun élément de preuve au soutien d’une telle affirmation.

De son côté, la copropriété de [Adresse 2] ne justifie pas de l’établissement des documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective concernant M. [I]. Elle ne verse en outre à l’instance aucun élement de preuve suffisamment pertinent de nature à contester les allégations de M. [I].

En considération de ces éléments, il ne ressort pas de l’appréciation de la cour que M. [I] a travaillé pour le compte de la copropriété de [Adresse 2] au-delà des 47’h’30 conventionnellement prévues.

sur le surplus des demandes’:

Il a été partiellement fait droit aux demandes de M. [I]. La copropriété de [Adresse 2], partie perdante qui sera condamnée aux dépens et sera déboutée de sa demande au titre de ses frais irrépétibles, devra payer à M. [I] la somme de 3’000’euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS’;

LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement’;

INFIRME le jugement du conseil de prud’hommes de Toulon du 9 septembre 2019 en ce qu’il a’:

– débouté M. [I] de sa demande en dommages-intérêts au titre de l’absence de mise en ‘uvre des travaux d’embellissement conventionnellement prévus et de la délivrance d’un logement décent,

– condamné M. [I] aux dépens’;

LE CONFIRME pour le surplus’;

STATUANT à nouveau sur les chefs d’infirmation et y ajoutant’;

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires du «'[Adresse 2]’» à payer à M. [I] les sommes suivantes’:

– 2 500 euros à titre de dommages-intérêts pour le défaut de mise en ‘uvre des travaux d’embellissement conventionnellement prévus et de délivrance d’un logement décent,

– 3’000’euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes’;

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires du «'[Adresse 2]’» aux dépens de première instance et d’appel, dont distraction de ceux dont il a fait l’avance sans en recevoir provision au profit de la SELARL Fernandez-Guibert’&’associés, avocats au barreau de Marseille.

Le Greffier Le Président

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x