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COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
1ère chambre 1ère section
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
Code nac : 70E
DU 12 SEPTEMBRE 2023
N° RG 21/01600
N° Portalis DBV3-V-B7F-ULYR
AFFAIRE :
[B] [C]
…
C/
[Y], [A], [V] [R]
…
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 30 Septembre 2020 par le Tribunal Judiciaire de CHARTRES
N° Chambre :
N° Section :
N° RG : 11-19-625
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
-la SCP IMAGINE BROSSOLETTE,
-la SELARL GIBIER FESTIVI RIVIERRE GUEPIN
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DOUZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dont le délibéré a été prorogé le 11 juillet 2023, les parties en ayant été avisées, dans l’affaire entre :
Monsieur [B] [C]
né le 30 Novembre 1972 à [Localité 7]
de nationalité Française
et
Madame [S] [N]
née le 08 Avril 1973 à [Localité 3]
de nationalité Française
demeurant tous deux [Adresse 1]
[Localité 2]
représentés par Me Valérie RIVIERE-DUPUY de la SCP IMAGINE BROSSOLETTE, avocat – barreau de CHARTRES, vestiaire : 000034 – N° du dossier 2017255
APPELANTS
****************
Monsieur [Y], [A], [V] [R]
né le 14 Juillet 1968 à [Localité 5]
de nationalité Française
et
Madame [K], [I] [D]
née le 20 Juin 1965 à [Localité 6]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentés par Me Antoine GUEPIN de la SELARL GIBIER FESTIVI RIVIERRE GUEPIN, avocat – barreau de CHARTRES, vestiaire : 000021 – N° du dossier 170065
INTIMÉS
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 25 Mai 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Pascale CARIOU, Conseiller chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anna MANES, Présidente,
Madame Pascale CARIOU, Conseiller,
Madame Sixtine DU CREST, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,
FAITS ET PROCÉDURE
M. [R] et Mme [D] sont propriétaires d’un bien immobilier sis à [Adresse 4]. Leur parcelle est contigüe à celle appartenant à M. [C] et Mme [N].
Suite à un conflit de voisinage notamment relatif à l’élagage des végétaux et l’empiétement d’une toiture, les consorts [R]/[D] ont, par acte d’huissier de justice délivré le 16 mai 2019, fait assigner les consorts [C]/ [N] devant le tribunal d’instance de Chartres devenu le tribunal judiciaire.
Par jugement contradictoire rendu le 30 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Chartres a :
– Déclaré recevable la demande des consorts [R]/[D] devant le tribunal judiciaire,
– Condamné M. [C] et Mme [N] à :
– procéder à la démolition de la partie de la toiture empiétant sur leur propriété.
– procéder à la remise en état du mur mitoyen et à leur frais,
– payer à Mme [D] et M. [R] une somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral,
– à procéder à l’élagage des branches empiétant sur le fond des consorts [R]/[D] et ce chaque année, avant le 30 avril et pour la première fois avant le 30 avril 2021, sous astreinte selon les modalités ‘xées au dispositif
– procéder à l’élagage de la haie de lierre située en limite séparative des deux fonds qui empiète sur le fonds de M. [R] et de Mme [D],
Et ce, dans le délai de 5 mois suivant la signification du présent jugement, et chaque armée, pour l’élagage, des arbres et végétaux, avant le 30 juin et pour la première fois avant le 30 juin 2021,
– Dit que, faute pour les consorts [C]/[N] d’avoir procédé ou fait procéder à l’élagage de la haie et des arbres, à la démolition de la partie de la toiture, et à la remise en état du mur, passé ce délai, ces derniers seront redevables d’une astreinte dont le montant sera provisoirement fixé à la somme de 50 euros par jour de retard, à compter du 30 juin, le présent tribunal se réservant la compétence de liquider l’astreinte,
– Condamné M. [R] et Mme [D] à :
– payer à Mme [N] et à M. [C] une somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation, du préjudice moral,
– procéder à l’élagage de son laurier et de sa rangée d’arbres située en limite séparative des deux fonds et dont les branches empiètent sur le fonds de M. [C] et de M. [N]
Et ce, dans le délai de 5 mois suivant la signification du présent jugement, et chaque année, avant le 30 juin, et pour la première fois avant le 30 juin 2021,
– Dit que, faute pour les consorts [R]/[D] d’avoir procédé ou fait procéder à l’élagage des arbres et de la taille du laurier passé ce délai, ces derniers seront redevables d’une astreinte dont le montant sera provisoirement fixé à la somme de 50 euros par jour de retard, à compter du 30 juin, le présent tribunal se réservant la compétence de liquider l’astreinte,
– Rejeté tous les autres chefs de demandes, additionnels ou complémentaires,
– Dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens,
– Ordonné l’exécution provisoire de l’ensemble du présent jugement.
M. [C] et Mme [N] ont interjeté appel de ce jugement le 9 mars 2021 à l’encontre de M. [R] et de Mme [D].
Par dernières conclusions notifiées le 11 octobre 2022, ils demandent à la cour de :
– Infirmer la décision du tribunal judiciaire de Chartres du 30 septembre 2020 en ce qu’elle a :
– Déclaré recevable les demandes de M. [R] et Mme [D] devant le tribunal judiciaire,
– Les a condamnés à procéder à la démolition d’une partie de la toiture empiétant sur la propriété voisine,
-Les a condamnés à procéder à la remise en état du mur mitoyen et à leurs frais,
– Les a condamnés à payer la somme de 1 000 euros en réparation du préjudice moral,
– Dit que faute pour eux d’avoir procéder à l’élagage des haies et des arbres, à la démolition d’une partie de la toiture et à la remise en état du mur, passé ce délai, ils seront redevables d’une astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 30 juin,
– Rejeté tous les autres chefs de demandes additionnelles ou complémentaires. A titre principal,
– Dire que les demandes formulées par M. [R] et Mme [D] relèvent de la compétence exclusive de l’ex tribunal de grande instance, aujourd’hui tribunal judiciaire,
– En conséquence, constater la nullité de l’assignation du 16 mai 2017 pour vice de fond.
A titre subsidiaire,
– Constater la nature privative du mur en brique érigé sur leur fonds,
– Condamner M. [R] et Mme [D] à effectuer les réparations du mur mitoyen effondré par le laurier,
– Débouter M. [R] et Mme [D] de l’intégralité de leurs demandes,
– Condamner solidairement M. [R] et Mme [D] au paiement de la somme de 2 000 euros en réparation trouble anormal de voisinage subi,
– Condamner solidairement M. [R] et Mme [D] au versement de la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de l’atteinte à la vie privée subie, et ordonner le démontage des caméras sur le fonds de M. [R] et Mme [D] qui se situent dans l’axe de leur propriété,
En tout état de cause,
– Condamner solidairement M. [R] et Mme [D] à leur verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Par dernières conclusions notifiées le 17 mars 2023, M. [R] et Mme [D] demandent à la cour de :
– Confirmer le jugement en ce qu’il a :
– déclaré recevable leur demande devant le tribunal judiciaire
– condamné M. [C] et Mme [N] à :
– procéder à la démolition de la partie de la toiture empiétant sur leur propriété,
– procéder à la remise en état du mur mitoyen et à leurs frais,
– payer à Mme [D] et M. [R] une somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts, en réparation du préjudice moral,
– Dire n’y avoir lieu à statuer, en l’absence d’effet dévolutif, sur les demandes de M. [C] et Mme [N] tendant à voir infirmer le jugement en ce qu’il les a condamnés à :
– procéder à l’élagage des branches empiétant sur le fond des consorts [R]/[D] et ce chaque année, avant le 30 avril et pour la première fois avant le 30 avril 2021, sous astreinte selon les modalités fixées au dispositif,
– procéder à l’élagage de la haie de lierre située en limite séparative des deux fonds qui empiète sur le fonds de M. [R] et de Mme [D] et ce, dans le délai de 5 mois suivant la signification du présent jugement, et chaque année, pour l’élagage, des arbres et végétaux, avant le 30 juin et pour la première fois avant le 30 juin 2021,
– A titre subsidiaire, confirmer le jugement en ce qu’il a condamné M. [C] et Mme [N] à :
– procéder à l’élagage des branches empiétant sur le fond des consorts [R]/[D] et ce chaque année, avant le 30 avril et pour la première fois avant le 30 avril 2021, sous astreinte selon les modalités fixées au dispositif,
– procéder à l’élagage de la haie de lierre située en limite séparative des deux fonds qui empiète sur le fonds de M. [R] et de Mme [D] et ce, dans le délai de 5 mois suivant la signification du présent jugement, et chaque année, pour l’élagage, des arbres et végétaux, avant le 30 juin et pour la première fois avant le 30 juin 2021,
– dit que faute pour les consorts [C]/[N] d’avoir procédé ou fait procéder à l’élagage de la haie et des arbres, à la démolition de la partie de la toiture, et à la remise en état du mur, passé ce délai, ces derniers seront redevables d’une astreinte dont le montant sera provisoirement fixé à la somme de 50 euros par jour de retard, à compter du 30 juin, le présent Tribunal se réservant la compétence de liquider l’astreinte,
– Déclarer irrecevable la demande de M. [C] et Mme [N] tendant à les voir condamner à effectuer les réparations du mur mitoyen effondré par le laurier en ce que cette demande est nouvelle ;
A titre subsidiaire, les en débouter ; Y ajoutant,
– Condamner solidairement M. [C] et Mme [N] à leur verser la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;
– Les condamner solidairement aux entiers dépens.
La clôture de l’instruction a été ordonnée le 6 avril 2020
SUR CE, LA COUR,
A titre liminaire et sur les limites de l’appel
La cour rappelle que, conformément aux dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.
La cour observe que si dans le corps de leurs conclusions, les consorts [C]/[N] demandent à la cour d’infirmer la décision du 30 septembre 2020 en ce qu’elle a :
‘ Condamné M. [C] et Mme [N] à procéder à l’élagage des branches empiétant sur le fond des consorts [R]/[D] et ce chaque année, avant le 30 avril et pour la première fois le 30 avril 2021 et ce sous astreinte de 50 € par jour de retard,
– condamné à procéder à l’élagage de la haie de lierre située en limite séparative des deux fonds qui empiète sur le fonds de M. [R] et de Mme [D] et ce dans le délai de 5 mois suivant la signification du présent jugement, et chaque année, pour l’élagage, des arbres et végétaux, avant le 30 juin et pour la première fois avant le 30 juin 2021 et ce sous astreinte de 50 € par jour de retard ‘,
cette demande d’infirmation ne figure pas au dispositif de leurs conclusions. Elle ne figurait pas non plus dans la déclaration d’appel au rang des dispositions critiquées.
En effet, tant la déclaration d’appel que le dispositif des conclusions est ainsi rédigé (souligné par la cour ):
– Infirmer la décision du tribunal judiciaire de Chartres du 30 septembre 2020 en ce qu’elle a :
–
Déclaré recevable les demandes de M. [R] et Mme [D] devant le tribunal judiciaire,
– Les a condamnés à procéder à la démolition d’une partie de la toiture empiétant sur la propriété voisine,
-Les a condamnés à procéder à la remise en état du mur mitoyen et à leurs frais,
– Les a condamnés à payer la somme de 1 000 euros en réparation du préjudice moral,
– Dit que faute pour eux d’avoir procéder à l’élagage des haies et des arbres, à la démolition d’une partie de la toiture et à la remise en état du mur, passé ce délai, ils seront redevables d’une astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 30 juin,
– Rejeté tous les autres chefs de demandes additionnelles ou complémentaires.
La cour n’est donc pas saisie de la question de l’élagage des arbres et de la haie par M. [C] et Mme [N].
La demande d’infirmation porte donc uniquement sur la fixation d’une astreinte, qui est une condamnation accessoire à la condamnation principale. Elle n’emporte pas pour autant la saisine de la cour sur la question de fond principale.
La condamnation de M. [C] et Mme [N] à procéder à l’élagage des branches empiétant sur le fond des consorts [R]/[D] et à l’élagage de la haie de lierre située en limite séparative des deux fonds qui empiète sur le fonds de M. [R] et de Mme [D] est donc devenue irrévocable et la cour ne statuera pas sur ce point.
En tout état de cause, la cour observe que M. [C] et Mme [N] affirment entretenir régulièrement leurs plantations et avoir continué de le faire durant le temps de la procédure. Ils ne contestent donc pas sur le fond le principe de leur obligation d’élaguer leurs arbres afin qu’aucune branche n’empiète sur la parcelle voisine.
De même, les consorts [R]/[D] ne demandent pas l’infirmation du jugement en ce qu’il les a condamnés sous astreinte à procéder à l’élagage de leur laurier et de la rangée d’arbres située en limite de propriété, ni en ce qu’il les a condamnés à payer à leurs adversaires la somme de 1 000 euros au titre du préjudice moral.
Les dispositions suivantes du jugement sont donc également devenues irrévocables :
‘ Condamne M. [R] et Mme [D] à :
– payer à Mme [N] et à M. [C] une somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation, du préjudice moral,
– procéder à l’élagage de son laurier et de sa rangée d’arbres située en limite séparative des deux fonds, et dont les branches empiètent sur le fonds de M. [C] et de M. [N],
Et ce, dans le délai de 5 mois suivant la signification du présent jugement, et chaque année, avant le 30 juin, et pour la première fois avant le 30 juin 2021″
Sur la compétence du tribunal d’instance
Moyens des parties
Les consorts [C]/[N] contestent le jugement en ce que le tribunal d’instance saisi par les consorts [R]/[D] s’est déclaré compétent pour statuer sur des demandes relatives à l’empiétement et à la mitoyenneté alors que selon eux ces questions relevaient de la compétence exclusive du tribunal de grande instance.
Ils en déduisent que l’assignation qui leur a été délivrée est nulle faute de présenter les mentions obligatoires relatives à l’assignation devant cette juridiction.
Les consorts [R] /[D] répliquent qu’au jour où le tribunal a statué, il était compétent du fait du transfert des procédures en cours devant les anciens tribunaux d’instance aux nouveaux tribunaux judiciaires. Ils soulignent surtout que ce moyen n’a aucun intérêt puisque même si la cour devait infirmer le jugement du chef de la compétence, elle devrait statuer sur le fond du litige.
Appréciation de la cour
La loi du 23 mars 2019, entrée en vigueur le 1er janvier 2020, a fusionné les tribunaux d’instance et les tribunaux de grande instance et créé le tribunal judiciaire.
En application de l’article ’40 IV et V du décret n°’2019-912 du 30’août 2019, les procédures en cours devant le tribunal d’instance ont été immédiatement transférées au tribunal judiciaire territorialement compétent.
Si les consorts [R] / [D] avaient initialement saisi le tribunal d’instance le 16 mai 2019, c’est bien le tribunal judiciaire qui a statué, avec la compétence dévolue à celui-ci.
Or en application de l’article R 211-3-26 5°du code de l’organisation judiciaire « Le tribunal judiciaire a compétence exclusive dans les matières déterminées par les lois et règlements, au nombre desquelles figurent les matières suivantes : 5° Actions immobilières pétitoires ».
C’est donc à bon droit que le tribunal judiciaire s’est déclaré compétent pour statuer sur les demandes présentées par les consorts [R]/[D].
Le jugement sera confirmé sur ce point.
La régularité de l’assignation
Moyens des parties
Les consorts [C]/[N] allèguent que l’assignation du 16 mai 2019 qui leur a été délivrée est nulle en ce qu’elle ne comportait pas les mentions obligatoires pour une assignation devant le tribunal de grande instance, notamment sur la nécessité de constituer avocat.
Appréciation de la cour
C’est toutefois de façon tout à fait pertinente que les consorts [R]/[D] font valoir que la régularité de l’assignation s’apprécie au regard des textes applicables à la juridiction saisie, fut-elle in fine incompétente.
En l’espèce, les demandeurs ont saisi le tribunal d’instance et l’assignation qu’ils ont fait délivrer n’avait pas à comporter les mentions prévues aux anciens articles 751 et 752 du code de procédure civile quant à la constitution d’avocat applicables aux procédures devant le tribunal de grande instance.
M. [C] et Mme [N] seront donc déboutés de leur demande tendant à voir prononcer la nullité de l’assignation.
Sur les demandes de M. [R] et Mme [D]
Sur l’empiétement des constructions
Le tribunal a considéré qu’il était établi par le PV de constat de la SCP Deruelle [O] du 15 novembre 2016 qu’une partie de la toiture des consorts [C]/[D] empiétait sur la propriété voisine et les a condamnés à procéder à sa démolition.
Les consorts [C]/[N] sollicitent l’infirmation du jugement sur ce point sans invoquer le moindre moyen de fait ou de droit. Ils indiquent seulement avoir procédé aux travaux de reprise sur leur toiture et que toute demande à ce titre est sans objet.
Les photos qu’ils produisent et qu’ils ont eux-même réalisées sont toutefois insuffisantes à établir que les travaux auxquels ils ont été condamnés ont bien été réalisés.
Le jugement sera donc confirmé sur ce point.
Sur le mur mitoyen
Moyens des parties
Les consorts [C]/[N] soutiennent pour l’essentiel que le lien de causalité entre la présence d’un talus sur leur propriété et les infiltrations et fissurations du mur mitoyen n’est pas établi.
Les intimés concluent à la confirmation du jugement en se fondant sur les photographies et le constat d’huissier de justice du 15 mars 2018.
Appréciation de la cour
La cour constate que pour démontrer que les infiltrations et fissurations du mur mitoyen sont dues à la présence d’un talus sur le terrain de leurs voisins, les consorts [R]/[D] versent uniquement deux procès-verbaux de constat réalisés par un huissier de justice et quelques photographies.
Ces documents confirment que le mur litigieux présente des traces d’humidité et des fissures.
Si la présence de ce talus n’est pas contestée par les consorts [C]/[N], en revanche rien ne démontre, comme l’affirment péremptoirement les intimés que ‘ un talus d’une certaine importance et humide prend appui sur le mur mitoyen ce qui cause des infiltrations et des fissurations compromettant la solidité du mur ‘.
Comme le soulignent à juste titre les appelants, le seul constat de l’existence de remontées capillaires ne peut suffire à démontrer qu’elles sont exclusivement à l’origine des désordres, ni même que ces remontées capillaires sont en lien direct et unique avec la présence du talus.
De plus, la cour observe que la demande tendant à la ‘ remise en état ‘ du mur mitoyen est particulièrement imprécise, en ce qu’elle ne permet pas de déterminer la nature et l’ampleur des travaux à accomplir : démolition et reconstruction ‘ simples travaux pour reboucher les fissures ‘ ..
Faute d’éléments suffisamment probants sur les causes des désordres, le jugement sera infirmé en ce qu’il a condamné M. [C] et Mme [N] à procéder à la remise en état du mur mitoyen et à leurs frais.
Sur l’élagage des arbres
Ainsi qu’il a été vu précédemment, seule la condamnation au paiement d’une astreinte est valablement critiquée. Compte tenu de l’ancienneté du conflit et du fait que les consorts [C]/[N] contestent vigoureusement les manquements qui leur sont reprochés, à savoir le manque d’entretien de leurs végétaux, le prononcé d’une astreinte apparaît nécessaire et justifié.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a dit que faute pour les consorts [C]/[N] d’avoir procédé ou fait procéder à 1’élagage de la haie et des arbres, à la démolition de la partie de la toiture, et à la remise en état du mur, passé ce délai, ces derniers seront redevables d’une astreinte dont le montant sera provisoirement fixé à la somme de 50 euros par jour de retard, à compter du 30 juin, le présent tribunal se réservant la compétence de liquider l’astreinte.
Il sera ajouté que si les consorts [C]/[N] soutiennent qu’ils ont taillé leur haie et leurs arbres en 2022, les photos produites qu’ils ont prises eux-même ne permettent pas de s’en assurer avec toute la certitude requise.
Sur le préjudice moral de Mme [D]
Le tribunal a condamné les consorts [C]/[N] à verser à M. [R] et Mme [N] la somme de 1 000 euros en réparation du préjudice moral.
Moyens des parties
Les consorts [C]/[N] contestent la mauvaise foi et les agissements malhonnêtes qui leur sont imputés par leurs voisins et concluent à l’infirmation du jugement sur ce point.
M. [R] et Mme [D] soutiennent au contraire que ces agissements malhonnêtes de la partie adverse ont causé une insomnie et un épisode anxio-dépressif à Mme [D].
Appréciation de la cour
Il ressort des documents produits que la présente procédure s’inscrit dans le contexte d’un conflit du voisinage qui s’amplifie d’année en année, mais dont l’origine est difficile à déterminer.
Cependant, il est établi que les consorts [C]/[N] n’ont à tout le moins pas procédé à un élagage régulier de leurs arbres et que leur toiture empiétait sur la propriété voisine, ce qui est constitutif d’une faute ayant contribué à la naissance du conflit et ayant abouti à la présente procédure.
Il est en outre versé un certificat médical attestant du retentissement de ce conflit sur la santé de Mme [D].
Le jugement sera donc confirmé sur ce point.
Sur les demandes reconventionnelles des consorts [C]/[N]
Sur les nuisances sonores
Pas plus qu’en première instance, les consorts [C]/[N] ne démontrent l’anormalité des bruits en provenance de la propriété de leurs voisins.
Le tribunal a parfaitement analysé les témoignages versés et au terme d’une motivation pertinente, adoptée par la cour, estimé que les bruits dénoncés n’étaient pas constitutifs d’un trouble anormal de voisinage.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur l’atteinte à la vie privée
Le tribunal a rejeté la demande estimant que selon les constatations de M. [O], les deux caméras litigieuses filmaient uniquement la propriété intérieure du couple.
Moyens des parties
M. [C] et Mme [N] affirment que les caméras litigieuses sont placées dans l’axe de leur propriété et qu’il est aisé pour leurs voisins de changer l’angle de la caméra.
M. [R] et Mme [D] soulignent que les caméras sont orientées uniquement vers leur propriété et que leurs adversaires se plaignent d’une atteinte purement éventuelle à leur vie privée si les caméras étaient ré-orientées.
Appréciation de la cour
Il ressort du constat établi par M. [O] qu’en l’état actuel, les caméras filment et surveillent la propriété privée des consorts [R]/[D].
Rien ne démontre que le champ de vision de ces caméras pourrait être facilement modifiable, de telle sorte que l’atteinte à la vie privée est en l’état actuel purement virtuelle.
Par ailleurs, les consorts [C]/[N] ne se prévalent pas d’une infraction à un texte quelconque qui rendrait la pose de ces caméras illégale, dès lors qu’elles se limitent à filmer leur propriété privée.
Le jugement sera par conséquent confirmé sur ce point.
Sur la demande de réparation du mur mitoyen effondré par le laurier et sur le mur en brique rouge
Devant la cour, M. [C] et Mme [N] sollicitent la condamnation de M. [R] et Mme [D] à réparer le mur mitoyen effondré par le laurier.
M. [R] et Mme [D] leur opposent le caractère nouveau de leur demande.
Néanmoins, M. [C] et Mme [N] étaient défendeurs en première instance. Les demandes qu’ils présentent sont donc des demandes reconventionnelles qui ne sont pas soumises à l’interdiction posée par l’article 564 du code de procédure civile de présenter des nouvelles demandes en cause d’appel.
Elles relèvent de l’article 567 du même code qui exige que ces demandes se rattachent par un lien suffisant aux demandes initiales.
Tel est bien le cas en l’espèce.
Néanmoins, pas plus que les consorts [R]/[D] ne démontrent que le talus est responsables des infiltrations sur le mur mitoyen les consorts [C]/[N] ne démontrent que l’effondrement de la partie ‘D’ du mur est imputable au laurier planté sur la propriété voisine.
Il en va de même de la demande de tendant à ‘ constater la nature privative du mur en brique érigé sur leur fonds ‘ qui ne repose sur aucun document véritablement probant, l’attestation de Mme [W] étant insuffisante à cet égard, cette dernière se contentant d’affirmer que ‘ le mur était mitoyen ‘ sans pour autant le démontrer.
En outre cette demande est ambigüe car il n’est pas précisé qui des consorts [C]/[N] ou [R]/[D] serait le propriétaire de ce mur.
Les demandes seront donc déclarées recevables mais infondées.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Le sens du présent arrêt commande de confirmer les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.
Comme en première instance, chaque partie conservera la charge de ses dépens.
Les demandes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile seront rejetées.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par arrêt contradictoire, dans les limites de l’appel, par mise à disposition,
INFIRME le jugement en ce qu’il a condamné M. [C] et Mme [N] à procéder à la remise en état du mur mitoyen et à leur frais,
Le CONFIRME pour le surplus,
Y ajoutant,
DÉBOUTE M. [C] et Mme [N] de leur demande tendant à voir prononcer la nullité de l’assignation.
DÉBOUTE M. [C] et Mme [N] de leur demande de remise en état de la partie ‘D’ du mur mitoyen,
DÉBOUTE M. [R] et Mme [D] de leur demande tendant à condamner M. [C] et Mme [N] à remettre à leur frais le mur mitoyen,
DIT que chaque partie conservera à sa charge les dépens exposés pour la procédure d’appel,
REJETTE les demandes présentées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
– signé par Madame Anna MANES, présidente, et par Madame Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, La Présidente,