Nuisances sonores : décision du 11 octobre 2022 Cour d’appel de Colmar RG n° 21/01496

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Nuisances sonores : décision du 11 octobre 2022 Cour d’appel de Colmar RG n° 21/01496
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SA/KG

MINUTE N° 22/790

NOTIFICATION :

Pôle emploi Alsace ( )

Clause exécutoire aux :

– avocats

– délégués syndicaux

– parties non représentées

Le

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE – SECTION A

ARRET DU 11 Octobre 2022

Numéro d’inscription au répertoire général : 4 A N° RG 21/01496

N° Portalis DBVW-V-B7F-HRBV

Décision déférée à la Cour : 23 Février 2021 par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE STRASBOURG

APPELANTE :

Madame [K] [D] épouse [I]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Valérie SPIESER, avocat à la Cour

INTIMEE :

S.A. ALTRAN TECHNOLOGIES

prise en la personne de ses représentants légaux

N° SIRET : 702 01 2 9 56

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Vincent LOQUET, avocat au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 17 Mai 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme DORSCH, Président de Chambre

M. EL IDRISSI, Conseiller

Mme ARNOUX, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme THOMAS

ARRET :

– contradictoire

– prononcé par mise à disposition au greffe par Mme DORSCH, Président de Chambre,

– signé par Mme DORSCH, Président de Chambre et Mme THOMAS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Mme [K] [I] née le 24 décembre 1979 a été engagée par la SAS Altran Technologies à compter du 10 mars 2008 en qualité d’ingénieur consultant statut cadre en contrepartie d’une rémunération annuelle brute de 37.000€, la convention collective applicable étant celle des bureaux d’études techniques, cabinets d’ingénieurs conseils et des sociétés de conseils (Syntec).

Suite à l’avis d’inaptitude rendu le 22 janvier 2018, Mme [K] [I] a été convoquée par courrier en date du 06 mars 2018 à un entretien préalable fixé au 14 mars 2018, puis licenciée le 19 mars 2018.

Elle a saisi le conseil de prud’hommes de Strasbourg le 28 janvier 2019 aux fins de nullité du licenciement pour harcèlement moral et sexuel, subsidiairement pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et sollicite à ce titre le règlement d’indemnités.

Suivant jugement en date du 23 février 2021, le conseil de prud’hommes de Strasbourg a :

-dit que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

-dit que l’inaptitude de Mme [K] [I] est d’origine professionnelle sans pour autant résulter d’un comportement fautif de l’employeur,

-condamné la SAS Altran Technologies à payer à Mme [K] [I] les sommes suivantes :

*9.500,01€ au titre de l’indemnité de préavis,

*7.246,45€ à titre de rappel de l’indemnité de licenciement,

*2.721,58€ à titre de rappel de salaire,

*1.000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-débouté Mme [K] [I] du surplus de ses demandes,

-ordonné l’exécution provisoire du jugement sur les éléments de salaire,

-condamné la SAS Altran Technologies aux frais et dépens.

Mme [K] [I] a interjeté appel le 09 mars 2021.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 25 octobre 2021, Mme [K] [I] demande :

-d’infirmer le jugement en ce qu’il a dit que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse, dit que l’inaptitude est d’origine professionnelle sans pour autant résulter d’un comportement fautif de l’employeur, débouté de ses demandes à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul, subsidiairement sans cause réelle et sérieuse, pour préjudice distinct, solde de primes,

-déclarer au besoin dire et juger que Mme [K] [I] a été victime d’agissements constitutifs d’un harcèlement tant moral que sexuel,

-déclarer au besoin dire et juger que l’employeur a manqué à son obligation de sécurité de résultat et que l’inaptitude de Mme [K] [I] est d’origine professionnelle,

-déclarer au besoin dire et juger que l’employeur a manqué à son obligation de reclassement en matière de licenciement pour cause d’inaptitude médicalement constatée,

-déclarer au besoin dire et juger que le licenciement est nul,

-subsidiairement qu’il est dénué de cause réelle et sérieuse,

En conséquence

A titre principal

-condamner la SAS Altran Technologies à lui verser la somme de 70.000€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

Subsidiairement

-écarter l’application des dispositions de l’article L1235-8’du code du travail et condamner la SAS Altran Technologies à lui verser la somme de 70.000€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

A titre infiniment subsidiaire

-condamner la SAS Altran Technologies à lui verser la somme de 31.666,70€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

En tous les cas

-condamner la SAS Altran Technologies à lui verser les sommes suivantes’:

*20.000€ de dommages et intérêts en réparation du préjudice distinct,

*5.136,33 € bruts à titre de solde de primes sur objectifs,

-condamner la SAS Altran Technologies à lui délivrer les bulletins de paie rectifiés et comportant règlement des cotisations sociales dues pour les mois de juin 2016, octobre 2016, novembre 2016, décembre 2016 et janvier 2017 sous astreinte de 100€ par jour de retard à compter de la décision à intervenir,

Pour le surplus confirmer la décision entreprise,

En toute hypothèse

-déclarer l’appel incident recevable mais non fondé et le rejeter,

-débouter la SAS Altran Technologies de l’ensemble de ses fins moyens et prétentions,

-assortir l’ensemble des condamnations à intervenir des intérêts au taux légal à compter de la demande,

-condamner la SAS Altran Technologies aux entiers frais et dépens outre le versement d’une somme de 7.000€ par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 16 août 2021, la SAS Altran Technologies demande :

-d’infirmer le jugement en ce qu’il a dit que l’inaptitude est d’origine professionnelle et l’a condamnée au règlement des indemnités de préavis, licenciement, rappels de salaire et article 700 du code de procédure civile,

-de débouter Mme [K] [I] de l’intégralité de ses demandes,

-de confirmer pour le surplus,

-de condamner Mme [K] [I] à lui régler 3.000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendu le 11 mars 2022.

L’affaire a été fixée à l’audience du 25 mars 2022 et renvoyée à l’audience du 17 mai 2022.

Pour l’exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux dernières conclusions précédemment visées en application de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

I) Sur la nullité du licenciement

Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des articles L1152-1 et L1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul.

Au cas d’espèce, Mme [K] [I] sollicite la nullité du licenciement, car l’inaptitude trouve sa cause dans des actes de harcèlement à travers les pratiques managériales de la direction.

A cet effet, Mme [K] [I] évoque les faits suivants’:

*Elle a été contrainte de cumuler deux postes à temps plein et deux missions distinctes à savoir responsable commerciale en charge de la formation professionnelle externe et responsable de la formation professionnelle interne. Elle a exercé ces fonctions jusqu’au 1er mai 2015. Durant cette période, elle n’a cessé d’alerter la direction (courriels des 30 avril 2014, 08 septembre 2014, 06 janvier 2015)’; elle ne sera déchargée qu’au mois de mai 2015. Au mois de juin 2015, elle a dû s’engager sur des objectifs en formation externe couvrant toute l’année 2015 et n’a cessé d’alerter sa hiérarchie sur sa situation. Elle a été arrêtée pour cause d’épuisement professionnel et a continué à travailler durant son arrêt de travail au mois de décembre 2015.

*A compter de l’été 2015, elle a été mise au placard (changement de bureau, disparition des plannings congés, refus de participer à une formation sur la prévention des risques psychosociaux), et prise en grippe par Mme [N] [Z] responsable du développement RH et victime d’une agression verbale le 09/11/2015 de la part de Mme [L]. Début 2016, la direction a refusé de lui verser ses primes 2016.

*Elle dénonce également un climat de sexisme ordinaire de la part de M. [P] business manager désigné comme coach et d’autres collègues et fait part d’une agression sexuelle en date du 17 novembre 2015 commise par un collègue’: M.[G]

*De retour de congés maladie, elle a «’craqué’» le 22/03/2016 et a été arrêtée jusqu’à son inaptitude deux ans plus tard. Durant son arrêt de travail, elle a été traitée avec mépris’: privée de tous accès à ses outils de travail, elle a dû restituer son véhicule de fonction, l’employeur n’a pas activé dans les délais son dossier de prise en charge auprès de la prévoyance, ce qui au eu pour conséquence qu’aucunes cotisations sociales n’apparaissent sur ses derniers bulletins de salaire

*Les certificats médicaux attestent de la souffrance au travail.

***

Les faits invoqués par la salariée étant antérieurs et postérieurs à la loi du 8 août 2016, il lui appartient, pour les premiers, d’établir des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement et pour les seconds, de présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement.

Il revient au juge d’apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer et supposer l’existence d’un harcèlement moral et, dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Ces éléments font présumer l’existence d’un harcèlement moral, il appartient à la société de renverser cette présomption.

1°)Tout d’abord Mme [K] [I] fait état de conditions de travail générant un épuisement professionnel consécutif à la surcharge de travail, une mise au «’placard’» et le comportement agressif de collègues

*Concernant la surcharge de travail, l’employeur rappelle que la salariée ne travaille pas seule étant en contact avec l’ensemble des business managers eux-mêmes en relations avec les clients. Les courriels sur lesquels se basent Mme [K] [I] ne sont pas des messages d’alerte mais des explications quant aux situations d’urgence à traiter.

Ainsi, dans le cadre du courriel du 30 avril 2014 adressé à M.[F], directeur division Altran grand Est, Mme [K] [I] lui demande de pouvoir faire le point sur ses activités internes et externes ainsi que sur son rôle sur la formation interne au sein d’Altran suite à l’absence de [Z]. Elle y rappelle que sa charge de travail est passée à 100% sur la formation interne, la formation externe ayant été réduite à son strict minimum pour pouvoir assurer toutes les demandes urgentes sur l’interne. Suite à son retour d’expérience sur deux mois, il faut au minimum une personne à temps plein sur la formation interne. Elle aimerait connaître ses conclusions quant à son activité.

Dans un second mail en date du 08 septembre 2014 ayant pour objet «’bande passante’», Mme [K] [I] indique que la formation interne nécessite plus qu’un 100%’; elle sollicite une réflexion de la part du directeur «’sur le fait qu’un stagiaire à mes côtés serait le bienvenu’» pour l’aider sur l’interne et l’externe.

Le 06 janvier 2015, elle présente ses v’ux et sollicite un stagiaire en vue de l’aider dans son activité, celle-ci démarrant fort sur les deux domaines de formation.

Pour autant, il ne ressort pas de ces messages que Mme [K] [I] a demandé à être déchargée de ses activités ou fait part d’une surcharge de travail impactant sur sa santé.

En 2015, les objectifs de la salariée sont adaptés et mesurés selon l’évolution de celle-ci et l’avenant a été signé sans aucune réserve. Il est produit les objectifs 2014 et 2015 relatifs à la rémunération variable signés par la salariée et qui n’ont pas fait l’objet de contestation de sa part. En 2015, Mme [K] [I] a perçu une prime de 5.497€.

Les échanges afférents au reporting des mois de décembre 2015, février 2016 et mars 2016 ne comportent aucun élément quant à la charge de travail de Mme [K] [I], qui interroge son supérieur quant à la mise à disposition temporaire d’un assistant sans mettre l’accent sur sa surcharge de travail impactant sur sa santé, étant observé qu’il n’apparaît pas que durant son arrêt maladie du 30/11/2015 au 04/12/2015, il lui a été imposé de travailler.

Il sera relevé que le 25 janvier 2016, elle a été déclarée apte sans réserve par la médecine du travail, qui n’a pas été avisée tant de la surcharge de travail que des conditions.

*Sur la mise à l’écart, Mme [K] [I] affirme qu’elle n’apparaît plus sur les congés d’été 2015, cependant elle a été en mesure de les poser et ceux-ci lui ont été accordés.

A compter du mois de novembre, elle dit être exclue des réunions, or aucun planning n’est produit par les parties démontrant cette éviction.

Quant au changement de bureau début 2016, selon l’employeur la réorganisation des équipes de travail l’exigeait et Mme [K] [I] ne l’ignorait pas ayant interrogé un collègue (M.[X]) le 11 janvier 2016 et lui proposant de partager le même bureau. Au demeurant aucun élément n’est produit aux débats attestant l’isolement dont fait état la salariée.

S’agissant du refus de formation, il sera rappelé que l’employeur dispose d’un pouvoir de contrôle et de direction et que le 15 janvier 2016, n’ayant pas d’équipe de management direct, il lui a été opposé un refus de participer à la formation «’manager, prévenir les risques psychosociaux de vos équipes’»’, auquel elle a répondu que «’n’étant pas leur manager au quotidien je suis en mesure d’avoir une approche et des discussions différentes avec eux justement. De plus au regard du programme et ayant fait moi-même un burn out en décembre, le contenu de la formation est pour moi très intéressant'[…]».

Pour autant, l’employeur n’est pas revenu sur sa décision au regard des critères de participation qu’il avait établi et pour lesquels Mme [K] [I] ne correspondait pas.

*Concernant l’agression verbale en date du 09/11/2015 avec Mme [L]’; il sera tout d’abord relevé qu’aucun témoignage n’est produit par Mme [K] [I]. Toutefois, l’employeur produit les échanges de mails entre Mme [K] [I] et Mme [L] sur le thème «’impression en grande quantité’» ainsi que l’attestation d’une salariée indiquant que suite à une demande de photocopies importantes générant des nuisances sonores et blocages des imprimantes, des échanges ont eu lieu entre Mme [K] [I] et Mme [L] sans générer d’agression telle qu’affirmée par Mme [K] [I]’; de plus les échanges de mails produits sur cette journée entre les deux protagonistes ne caractérisent pas l’existence d’une agression verbale.

Par rapport aux relations avec sa responsable Mme [N], Mme [K] [I] produit l’attestation d’une ancienne collègue Mme [C] (pièce 56) qui a travaillé à l’agence d’Illkirch jusqu’à fin 2014 et occasionnellement venue en 2015. Cette attestation est établie en des termes généraux reprenant des propos rapportés ou insuffisamment précis par une élue DP/CE et CHSCT, Mme [C] affirmant que Mme [K] [I] venait la voir dans le bureau du CE «’pour décharger un peu le trop de pression’». Or, cette élue n’a mis en place aucune action pour soutenir la salariée ou encore fait état des difficultés auprès des autorités compétentes.

Mme [K] [I] produit un mail en date du 19/01/2015 intitulé «’une fois de plus’» adressé à la direction et aux termes duquel elle fait état du manque de respect et de considération professionnelle que peut avoir Mme [N] à son égard. Toutefois, il ressort des échanges de mails effectués par la suite au cours de l’année 2015 que ceux-ci sont courtois et n’établissent pas que Mme [N] a «’pris en grippe’» Mme [K] [I].

2°) Ensuite, Mme [K] [I] fait état d’un harcèlement à caractère sexuel’: propos sexistes et agression sexuelle

*Sur les propos sexistes tenus par les collègues de la salariée dans les échanges de mails’: les échanges de courriels produits par les parties s’inscrivent dans le cadre de propos se voulant humoristiques auxquels Mme [K] [I] participe et y répond sans s’en offusquer. Il n’est versé aux débats aucun autre élément de nature à établir que les propos ou comportements des collègues de Mme [K] [I] ont présenté un caractère humiliant.

*Quant aux faits d’agression sexuelle en date du 17/11/2015, force est de constater que l’employeur n’en a pas eu connaissance. En effet, il ne ressort pas des éléments produits que Mme [K] [I] a avisé formellement tant sa direction, qu’un représentant des salariés ou encore la médecine du travail. De surcroît, aucune plainte ou main courante n’a été déposée.

3°) Puis, Mme [K] [I] reproche à l’employeur d’avoir adopté un comportement méprisant à son encontre en lui retirant son véhicule et ne lui réglant pas les indemnités complémentaires durant son arrêt maladie.

Sans conteste, il lui a été demandé la restitution du véhicule au mois de mai 2016, en raison de son arrêt de travail et afin de le réaffecter conformément à l’article 11 du contrat de travail de Mme [K] [I] précisant que la documentation et le matériel que la société serait amenée à lui confier demeureront la propriété de la société et devront être restitués sur simple demande. Par ailleurs, cette demande ne présente aucun caractère de mépris vis-à-vis de la salariée.

Le salaire de Mme [K] [I] a été maintenu jusqu’au 28 mai 2016 inclus, puis elle a perçu les indemnités journalières de la sécurité sociale, ainsi que les prestations versées par l’organisme de prévoyance à compter de 2017, l’employeur suite à la demande du conseil de Mme [K] [I] opérant une avance en février 2017. Pour autant, il ne peut pas être reproché à la SAS Altran Technologies d’avoir eu une attitude méprisante en agissant de la sorte.

Sur ce,

Si les certificat médicaux attestent de la souffrance au travail, alléguée par la salariée hormis ces constatations, Mme [K] [I] n’établit pas la matérialité des faits. Par conséquent les éléments pris en leur ensemble ne permettent pas de supposer ou présumer l’existence d’un harcèlement.

Il s’ensuit que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a débouté Mme [K] [I] de sa demande de nullité du licenciement et paiement des indemnités afférentes.

II) Sur le licenciement

Lorsque à l’issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, l’emploi proposé est aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en ‘uvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.

C’est à l’employeur qu’il incombe de démontrer qu’il s’est acquitté de cette obligation, laquelle doit s’apprécier à l’intérieur du groupe auquel appartient l’employeur concerné, parmi les entreprises dont les activités, l’organisation ou le lieu d’exploitation lui permettent d’effectuer la permutation de tout ou partie du personnel.

La méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte consécutivement à un accident ou une maladie d’origine professionnelle ou non professionnelle, dont celle imposant à l’employeur de consulter les représentants du personnel, prive le licenciement de cause réelle et sérieuse.

En l’espèce, les conclusions et indications relatives au reclassement mentionnées dans l’avis d’inaptitude rendu le 22 janvier 2018 sont les suivantes’: «’Mme [I] est médicalement inapte à son poste de travail ainsi qu’à tout autre poste dans l’entité ALTRAN EST. Un reclassement pourrait être envisagé au sein d’une autre unité du groupe ALTRAN sur un poste nécessitant des compétences équivalentes à celles mises en ‘uvre dans ses précédentes fonctions, par exemple sur des missions commerciales ou des fonctions support’».

La lettre de licenciement en date du 19 mars 2018 indique que «’nous sommes contraints de vous licencier en raison de l’impossibilité de vous reclasser à un poste compatible avec les recommandations de la médecine du travail au sein de notre établissement et du groupe Altran dans le cadre de votre inaptitude physique définitive’».

Mme [K] [I] affirme que l’employeur a manqué à son obligation de reclassement au regard de l’absence de justification de consultation des élus et des démarches faites au sein du groupe. A cet effet, elle produit 20 offres d’emploi pour des postes en adéquation avec ses compétences et les préconisations de la médecine du travail. Ces annonces sont en effet éditées le 07 mars 2018 soit avant le licenciement du 19 mars 2018.

Pour sa part, l’employeur affirme que les recherches ont été faites et soutient que les offres présentées par Mme [K] [I] ne répondent pas aux préconisations du médecin du travail.

A cet effet, la SAS Altran Technologies produit le mail adressé le 1er février 2018 auprès des responsables du groupe ALTRAN ainsi que leurs réponses négatives.

Cependant l’employeur ne produit aucun organigramme du groupe démontrant que l’ensemble des entreprises du groupe ayant des activités lui permettant d’effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ait été consulté. L’employeur affirme avoir consulté les délégués du personnel le 23 février 2018. Cependant, il n’en justifie pas.

La méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte consécutivement à un accident ou une maladie d’origine professionnelle ou non professionnelle, dont celle imposant à l’employeur de consulter les représentants du personnel, est de nature à priver le licenciement de cause réelle et sérieuse.

En l’absence d’élément attestant d’une part que la société Altran a procédé à la consultation des représentants du personnel, et d’autre part en l’absence de preuve que l’ensemble des sociétés du groupe ait été consulté, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse. Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a dit que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse.

III) Sur les demandes indemnitaires

Le licenciement étant sans cause réelle et sérieuse, Mme [K] [I] est fondée à solliciter les indemnités afférentes.

Préalablement, Mme [K] [I] demande de déclarer inconventionnel le barème mentionné à l’article L1235-3 du code du travail au regard des dispositions de la convention n°158 de l’OIT et de l’article 24 de la charte sociale européenne du 3 mai 1996. Or, il est constant d’une part que les dispositions de l’article 24 de la charte sociale européenne’ ne sont pas d’effet direct en droit interne dans un litige entre particulier.

D’autre part, les dispositions de l’article L1235-3 du code du travail, en ce qu’elles prévoient un barème qui lorsqu’il n’est pas écarté pour motif de nullité du licenciement, conduit le juge à fixer une indemnité dans les limites de montants minimaux et maximaux, laissent au juge une marge d’appréciation qui participe de la détermination d’une indemnité adéquate.

Par conséquent, les dispositions précitées du code du travail ne sont pas inconventionnelles.

Le licenciement étant dépourvu de cause réelle et sérieuse, Mme [K] [I] est fondée à solliciter une indemnité sur le fondement de l’article L1235-3. Au regard de son ancienneté (10 ans), de son salaire moyen (3.483,41€), l’indemnité à laquelle peut prétendre Mme [K] [I] est entre 3 et 10 mois.

L’allocation d’une somme de 30.000 € indemnisera justement le préjudice subit.

Par conséquent, la SAS Altran Technologies sera condamnée à lui verser la somme de 30.000€.

Les premiers juges seront confirmés en ce que tenant compte de la situation de Mme [K] [I], ils lui ont alloué la somme de 7.246,45€ à titre de rappel d’indemnité de licenciement étant relevé que l’indemnité de licenciement s’élevait à la somme de 17.422,04€ et qu’elle a perçu 10.175,60€, ainsi qu’une indemnité de préavis fixée à la somme de 9.500,01€ bruts.

Concernant les demandes présentées à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice distinct, en l’absence d’éléments justifiant le préjudice allégué, les premiers juges seront confirmés en ce qu’ils ont rejeté cette demande. Tout comme, ils seront confirmés en ce que la demande de solde de prime sur objectif a été rejetée, faute d’éléments probants.

Au titre du rappel de salaire, les premiers juges ont à juste titre condamné l’employeur à régler la somme de 2.721,58€ bruts correspondant au salaire dû postérieurement à la déclaration d’inaptitude à savoir entre le 23 février 2018 et le 19 mars 2018.

IV) Sur les demandes accessoires

Concernant les bulletins de paie rectifiés, les premiers juges seront confirmés en ce qu’ils ont rejeté ce chef de demande.

V) Sur les frais et dépens et les frais irrépétibles

A hauteur d’appel, la SAS Altran Technologies sera condamnée aux dépens, et sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile rejetées par voie de conséquence. Les premiers juges seront confirmés en ce qu’ils ont condamné la SAS Altran Technologies à régler 1.000€ à ce titre.

A hauteur d’appel l’équité commande de condamner la société à payer à Mme [K] [I] la somme de 2000 € au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile

 


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