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Un contrat de collaboration commerciale renforcée qui prévoit la concession d’une marque en tant qu’enseigne de point de vente sur un territoire déterminé, pour une durée de 5 ans, avec en contrepartie notamment l’obligation pour le licencié de mettre son point de vente aux normes fixées dans un Book ou encore de respecter le plan annuel de communication, relève bien du régime de la Loi Doubin.
Le concédant n’a pas à fournir d’études de marché et de comptes prévisionnels, seul un état du marché devant être transmis. Toutefois sa responsabilité peut être engagée s’il transmet des comptes prévisionnels, établis par ses soins, présentant un caractère grossièrement erroné et induisant le souscripteur en erreur.
La victime de manquements à l’obligation d’information précontractuelle dispose de l’option i) soit de solliciter la nullité du contrat et des dommages et intérêts s’il y a faute, ii) soit de maintenir le contrat et solliciter uniquement des dommages et intérêts, la responsabilité du contractant fautif étant alors de nature délictuelle.
Il incombe au franchisé- licencié de démontrer la mauvaise exécution des obligations précontractuelles d’information ou de renseignement mais également l’existence d’un préjudice, lequel ne peut consister, en l’absence de demande de nullité, qu’en la réparation d’une perte de chance de contracter à des conditions plus avantageuses (la preuve du préjudice n’était pas rapporté en l’espèce).
Pour rappel, en vertu des dispositions de l’article L 330-3 du code de commerce, toute personne qui met à la disposition d’une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d’elle un engagement d’exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l’exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de toute contrat conclu dans l’intérêt commun des deux parties, de fournir à l’autre partie un document donnant des informations sincères qui lui permette de s’engager en connaissance de cause.
Ce document précise notamment, l’ancienneté, l’expérience de l’entreprise, l’état et les perspectives de développement du marché concerné, l’importance du réseau d’exploitants, la durée et les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession du contrat ainsi que le champ des exclusivité. Le document ainsi que le projet de contrat sont communiqués 20 jours, minimum avant la signature du contrat. L’article R 330-1 du code de commerce précise le contenu de cette information qui doit comprendre :
1° L’adresse du siège de l’entreprise et la nature de ses activités avec l’indication de sa forme juridique et de l’identité du chef d’entreprise s’il s’agit d’une personne physique ou des dirigeants s’il s’agit d’une personne morale ; le cas échéant, le montant du capital ;
2° Les mentions visées aux 1° et 2° de l’article R. 123-237 ou le numéro d’inscription au répertoire des métiers ainsi que la date et le numéro d’enregistrement ou du dépôt de la marque et, dans le cas où la marque qui doit faire l’objet du contrat a été acquise à la suite d’une cession ou d’une licence, la date et le numéro de l’inscription correspondante au registre national des marques avec, pour les contrats de licence, l’indication de la durée pour laquelle la licence a été consentie ;
3° La ou les domiciliations bancaires de l’entreprise. Cette information peut être limitée aux cinq principales domiciliations bancaires ;
4° La date de la création de l’entreprise avec un rappel des principales étapes de son évolution, y compris celle du réseau d’exploitants, s’il y a lieu, ainsi que toutes indications permettant d’apprécier l’expérience professionnelle acquise par l’exploitant ou par les dirigeants.
Les informations mentionnées peuvent ne porter que sur les cinq dernières années qui précèdent celle de la remise du document. Elles doivent être complétées par une présentation de l’état général et local du marché des produits ou services devant faire l’objet du contrat et des perspectives de développement de ce marché.
Doivent être annexés à cette partie du document les comptes annuels des deux derniers exercices ou, pour les sociétés dont les titres financiers sont admis aux négociations sur un marché réglementé, les rapports établis au titre des deux derniers exercices en application du III de l’article L. 451-1-2 du code monétaire et financier ;
5° Une présentation du réseau d’exploitants qui comporte :
a) La liste des entreprises qui en font partie avec l’indication pour chacune d’elles du mode d’exploitation convenu ;
b) L’adresse des entreprises établies en France avec lesquelles la personne qui propose le contrat est liée par des contrats de même nature que celui dont la conclusion est envisagée ; la date de conclusion ou de renouvellement de ces contrats est précisée ;
Lorsque le réseau compte plus de cinquante exploitants, les informations mentionnées ne sont exigées que pour les cinquante entreprises les plus proches du lieu de l’exploitation envisagée ;
c) Le nombre d’entreprises qui, étant liées au réseau par des contrats de même nature que celui dont la conclusion est envisagée, ont cessé de faire partie du réseau au cours de l’année précédant celle de la délivrance du document. Le document précise si le contrat est venu à expiration ou s’il a été résilié ou annulé ;
d) S’il y a lieu, la présence, dans la zone d’activité de l’implantation prévue par le contrat proposé, de tout établissement dans lequel sont offerts, avec l’accord exprès de la personne qui propose le contrat, les produits ou services faisant l’objet de celui-ci ;
6° L’indication de la durée du contrat proposé, des conditions de renouvellement, de résiliation et de cession, ainsi que le champ des exclusivités.
Le document précise enfin la nature et le montant des dépenses et investissements spécifiques à l’enseigne ou à la marque que la personne destinataire du projet de contrat engage avant de commencer l’exploitation.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 2
ARRÊT DU 06/06/2019
N° RG 17/02313
Jugement (N° 2015/01135 et 2015/1846) rendu le 15 mars 2017 par le tribunal de commerce d’Arras
APPELANTE
EURL Cochet agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
ayant son siège […]
[…]
représentée par Me Antoine Le Gentil, avocat au barreau d’Arras
assistée de Me Thomas Naudin, avocat au barreau de Rennes
INTIMÉS
Maître Z Y ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Logitec, prononcé par jugement du tribunal de commerce d’Arras en date du 08 janvier 2016 et maintenu en qualité de mandataire judiciaire le temps nécessaire à l’achèvement de la vérification des créances par jugement du tribunal de commerce d’Arras en date du 27 mai 2016 arrêtant le plan de redressement de la société Euronics France
demeurant 88-90 rue St Aubert – 2 Square St E
[…]
Maître E-F X ès qualités de commissaire à l’exécution du plan de la société Euronics France, nommé à cette fonction par jugement du tribunal de commerce d’Arras en date du 27 mai 2016 qui a arrêté le plan de redressement de la société
demeurant 2 square St E – Rue St Aubert
[…]
Société Gitem anciennement dénommée Euronics France agissant par son représentant légal domicilié de droit en cette qualité audit siège social
ayant son […]
[…]
SAS Logitec, en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce d’Arras en date du 08 janvier 2016
représentés par Me Samuel Willemetz, avocat au barreau d’Arras
assistés de Me Marc Dizier, avocat au barreau de Nantes, substitué à l’audience par
Me Florence Seychal, avocat au barreau de Nantes
DÉBATS à l’audience publique du 12 mars 2019 tenue par C D magistrat chargé d’instruire le dossier qui, après rapport oral de l’affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS :A B
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Marie-Laure Dallery, président de chambre
C D, conseiller
Agnès Fallenot, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 06 juin 2019 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Marie-Laure Dallery, président et A B, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 11 décembre 2018
***
FAITS ET PROCEDURE
L’EURL Cochet, constituée pour exploiter un commerce d’électroménager, initialement sous l’enseigne Gitem, était, en tant que membre du réseau GITEM ( GIE GITEM) adhérente à une coopérative de commerçants détaillants la société Cospreto, laquelle a absorbé la société Quatec, puis a adopté la dénomination Euronics France.
L’approvisionnement des adhérents du Groupe Euronics repose sur une centrale d’achat, la société Logitec, laquelle est filiale de la société Euronics France.
En août 2010, la société Cochet a signé avec la société Euronics France un contrat intitulé ‘contrat d’enseigne et de collaboration commerciale renforcée Euronics’.
La société Cochet a investi massivement, dans une nouvelle présentation, pour correspondre à l’enseigne Euronics et dans la possession d’un stock plus important, acquis auprès de la filiale
Logitec.
L’EURL Cochet a démissionné à effet de fin décembre 2014, estimant ne pas avoir obtenu les résultats promis et le soutien commercial annoncé et le groupe Euronics a exigé en conséquence le paiement immédiat des factures correspondant aux marchandises distribuées.
Par assignation en référé en date du 13 février 2015, soit un mois et demi après la fin effective du contrat, puis par exploit du 13 avril 2015 au fond, la société Logitec a sollicité le paiement d’une somme de 114 654,78 euros, prenant en parallèle une inscription de nantissement sur le fonds de commerce exploité par l’EURL Cochet.
Par jugements en date du 2 octobre 2015, le tribunal de commerce d’Arras a placé en redressement judiciaire les sociétés Euronics France et Logitec, désignant
Me X en qualité d’administrateur judiciaire et Me Y en qualité de mandataire judiciaire.
La société Cochet a déclaré ses créances aux passifs des deux sociétés le
17 novembre 2015.
Par jugement en date du 9 décembre 2015, la société Logitec a fait l’objet d’un plan de cession, cette société étant placée en liquidation judiciaire par jugement du
8 janvier 2016.
Par jugement en date du 27 mai 2016, le tribunal de commerce d’Arras a arrêté le plan de redressement de la société Euronics France, nommant Me X en qualité de commissaire à l’exécution du plan et maintenant Me Y en qualité de mandataire judiciaire.
Par jugement contradictoire et en premier ressort en date du 15 mars 2017, le tribunal de commerce d’Arras a :
— ordonné la jonction des instances référencées au rôle sous les numéros
2015 002421 et 2015 0049191,
— condamné l’EURL Cochet à payer à la SAS Logitec :
— la somme de 114 654,78 euros en principal avec intérêts au taux légal à compter du 30 janvier 2015,
— condamné la SAS Euronics France à payer à l’EURL Cochet :
— la somme de 14 992, 61 euros en restitution d’une partie du compte courant,
— débouté l’EURL Cochet de sa demande de délai de paiement,
— débouté l’EURL Cochet de ses autres demandes,
— condamné l’EURL Cochet à payer à la SAS Euronics France la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
— condamné l’EURL Cochet aux entiers frais et dépens de l’instance en ce compris les frais et débours
de greffe,
— ordonné l’exécution provisoire du présent jugement.
Par déclaration en date du 6 avril 2017, l’EURL Cochet a interjeté appel de la décision.
MOYENS ET PRETENTIONS
Par conclusions signifiées par voie électronique en date du 20 octobre 2017, l’EURL Cochet demande à la cour, au visa des dispositions des articles L.330-3 et R.330-1 du code de commerce, des articles 1108, 1134, 1147, 12444 et 1382 du code civil, de :
— dire et juger la société Cochet recevable et fondée en l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
— en conséquence,
— réformer le jugement rendu le 15 mars 2017 par le Tribunal de commerce d’Arras,
> Sur les demandes de la société Cochet :
— sur le compte courant :
— condamner in solidum les sociétés Euronics France et Logitec à verser une somme de 32 436,61 € à la société Cochet en restitution du compte courant, ladite somme étant productive d’intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 2015 et jusqu’à paiement,
— fixer une créance de 32 436,61 € aux passifs des sociétés Euronics France et Logitec,
— sur la responsabilité d’Euronics France et de Logitec :
— constater que la société Euronics France n’a pas délivré à la société Cochet l’obligation d’information prévue à l’article L.330-3 du code de commerce et, ce faisant, a engagé sa responsabilité,
— constater que la société Euronics France a manqué à son obligation d’information en transmettant un budget prévisionnel fantaisiste et, ce faisant, a engagé sa responsabilité,
— condamner la société Euronics France à verser à la société Cochet une somme de 320 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice résultant de la perte de chance de ne pas contracter,
— fixer une créance de 320 000 € au passif de la société Euronics France
— dire et juger que les sociétés Euronics France et Logitec ont soutenu abusivement la société Cochet,
— condamner in solidum les sociétés Euronics France et Logitec à verser à la société Cochet la somme de 114 654,78 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice résultant du soutien abusif,
— fixer une créance de 114 654,78 € aux passifs des sociétés Euronics France et Logitec,
— dire et juger que la société Euronics France n’a pas correctement exécuté les obligations mises à sa charge par le contrat signé le 5 août 2010,
— en conséquence, condamner la société Euronics France à verser à la société Cochet une somme de 10 000 € en exécution de l’obligation contractuelle de verser un budget de participation publicitaire,
— fixer une créance de 10 000 € au passif de la société Euronics France,
— condamner la société Euronics France à verser à la société Cochet une somme de 66 657 € a titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice résultant du paiement de cotisations au groupe,
— fixer une créance de 66 657 € au passif de la société Euronics France,
— condamner la société Euronics France à verser à la société Cochet une somme de 100 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice résultant des pertes accumulées sous l’enseigne Euronics,
— fixer une créance de 100 000 € au passif de la société Euronics France,
> Sur la compensation :
— ordonner la compensation entre, d’une part les sommes éventuellement mises à sa charge, et d’autre part les créances fixées aux passifs des sociétés Euronics France et Logitec,
> sur l’article 700 code de procédure civile et les dépens :
— condamner in solidum Me X, és qualités de commissaire à l’exécution du plan de la société Euronics France, Me Y, és qualités de mandataire judiciaire de la société Euronics France, Maitre Y, es qualités de liquidateur de la société Logitec, et les sociétés Euronics France et Logitec à verser à la société Cochef une somme de 5 000 € au titre des dispositions de l’article 700 code de procédure civile,
— les condamner aux entiers dépens, d’appel et de première instance.
Elle critique le jugement sommairement motivé.
Elle conteste pouvoir se voir imposer un règlement au terme des 10 ans de plan et estime que :
— n’ayant pas accepté ce fait, les dispositions du plan sont illégales,
— à supposer ce délai opposable, cela ne l’empêche aucunement de solliciter la fixation de sa créance au passif de la société et la compensation avec d’éventuelles créances réciproques.
Sur la restitution du compte courant, elle souligne que :
— à la date de rupture du contrat la somme immobilisée était de 32 436, 61 euros,
— l’article 11 vise à assurer la garantie de paiement de l’encours de marchandise, alors que l’article 7 concerne une garantie relative au SAV,
— ces articles sont contenus dans le règlement intérieur de la société Euronics, mais concerne des obligations de la société Logitec et la société Logitec ne peut les invoquer pour fonder la rétention,
— la société Euronics ne peut pas davantage s’en prévaloir n’étant pas elle même créancière des obligations censées être garanties par ces stipulations,
— il n’existe aucune précision pour déterminer les sommes retenues, ces dernières étant donc
contestables en leur quantum,
— quant aux dispositions sur le SAV, il n’envisage qu’une simple hypothèse, celle où le commerçant demeure redevable du service après vente, privant l’obligation de cause, ce qui justifie la nullité de la clause,
— la conservation de la somme n’a plus la moindre justification compte tenu de la liquidation judiciaire de la société Logitec qui ne pourra donc plus assurer le moindre SAV,
— faisant désormais partie du réseau Darty, elle est en mesure d’assurer le SAV et les garanties légales des différents produits doivent désormais être toutes expirées.
Sur la responsabilité d’Euronics France et de la société Logitec, elle fait valoir que :
— les demandes sont recevables et elle est parfaitement en droit d’invoquer des manquements délictuels et d’autres contractuels, dès lors que les préjudices et leurs faits générateurs sont parfaitement distincts,
— les demandes sont fondées en droit comme en fait.
Elle revient sur les obligations d’information pesant sur le concédant en matière de contrats de distribution et la responsabilité délictuelle qui en découle en cas de non respect, ou à tout le moins contractuel, en présence d’une obligation pré-contractuelle.
Elle souligne :
— ne pas avoir eu la moindre information, seul un dossier d’étude financière lui ayant été adressé par Euronics,
— le caractère d’ordre public de la loi Doubin et l’impossibilité pour la société Euronics de s’y soustraire, notamment en se pré-constituant une preuve déloyale de la remise d’un document, qui en réalité n’existe pas et n’a jamais existé,
— que le fait d’être administrateur d’une coopérative ne saurait entraîner une présomption de participation à la mise en place de la politique de développement de la coopérative,
— que le caractère purement fantaisiste de l’information pré-contractuelle se déduit du fait que les agencements du magasin ont été commandés avant même la date de signature du contrat d’enseigne,
— qu’elle a ainsi perdu une chance de ne pas contracter, fondant une demande indemnitaire,
— que les études prévisionnelles, et notamment le budget, étaient fantaisistes et l’objectif exclusif de ce prévisionnel était de convaincre le futur licencié de l’opportunité de passer sous enseigne Euronics en lui fournissant des chiffres le confortant dans cette idée.
Elle précise que pour répondre au standard du groupe Euronics, d’importants investissements ont été réalisés, investissements financés par des concours bancaires extrêmement lourds, d’environ 400 000 euros.
Elle se prévaut également du soutien abusif, aux motifs que :
— l’évolution de l’encours fournisseurs et du stock de marchandises démontre que le Groupe Euronics a laissé filer la dette de la société Cochet, fonctionnant ainsi comme une banque,
— d’importantes pertes ont été réalisées dès 2012.
Elle soutient que :
— la responsabilité contractuelle de la société Euronics est engagée,
— la situation du réseau résulte de l’inaction complète de la société Euronics qui n’a pas engagé d’action significative pour développer l’enseigne,
— l’absence de soutien commercial et publicitaire transparaît également à la lecture du contrat d’enseigne,
— l’ampleur de l’assistance, notamment commerciale et publicitaire mise en oeuvre afin de permettre le développement effectif de l’enseigne et la bonne exploitation n’est pas démontrée,
— faute d’avoir rempli les engagements contractuellement souscrits, la société Cochet est en droit de solliciter le remboursement des cotisations et des sommes diverses versées au groupe depuis 2010.
Par conclusions signifiées par voie électronique en date du 4 septembre 2017, la société Logitec représentée par Me Y és qualités de liquidateur de la société Logitec et la société Gitem anciennement dénommée Euronics France, outre Me Y, ès qualités de mandataire judiciaire de la société Euronics, et
Me X, en qualité de commissaire à l’exécution du plan de la société Euronics France, demandent à la cour, au visa des articles 1134, 1582 et suivants, 1650 et suivants du Code Civil ancien, des articles L 622-22, L 622-24, L 626-11 du Code de Commerce, des articles L 225-17 et L 225-35 du Code de Commerce, du principe Nemo auditur propriam turpitudinem allegans, de:
— confirmer le jugement du Tribunal de Commerce d’Arras du 15 mars 2017 sauf en ce qu’il a condamné les sociétés Euronics France et Logitec à payer à I’EURL Cochet la somme de 14 992,61€,
— réformer le jugement du Tribunal de Commerce d’Arras du 15 mars 2017 en ce qu’il a condamné les sociétés Euronics France et Logitec à payer à l’EURL Cochet la somme de 14 992,61€,
— dire et juger qu’aucune condamnation ne peut intervenir à l’encontre de la société Logitec et de la société Euronics France,
— dire et juger irrecevable la société Cochet en toutes ses demandes
— condamner l’EURL Cochet à payer à la société Logitec la somme de
114 654,78 € avec intérêts au taux légal à compter du 30 janvier 2015,
— subsidiairement.
— débouter la société Cochet de toutes ses demandes, fins et prétentions,
— plus subsidiairement et dans l’hypothèse où la Cour considère fondée la société Cochet en sa demande de dommages et intérêts,
— condamner la société Cochet à payer à la coopérative Euronics France la somme de 611.311,78 € à titre de dommages et intérêts,
— condamner la société Cochet à payer à la coopérative Euronics France des dommages et intérêts à
hauteur du même montant que ceux octroyés à la société Cochet,
— ordonner la compensation entre les dommages et intérêt ainsi octroyés,
— dans tous les cas,
— condamner l’EURL Cochet à payer à Me Y es qualités de liquidateur judiciaire de la société Logitec et à la société Euronics France la somme de 3.500 € en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile,
— condamner l’EURL Cochet aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Sur la demande de paiement des factures de la société Logitec, ils font valoir que :
— la société Cochet n’a plus payé les factures venant à échéance à compter du 20 septembre 2014,
— la société Cochet ne conteste pas avoir commandé les marchandises, les avoir reçues, et les avoir mises en vente,
— les délais de paiements ont été sollicités à plusieurs reprises et ceux accordés par le juge des référés n’ont pas été respectés.
Sur les demandes reconventionnelles, les intimés rappellent que seules des fixations de créances sont possibles au vu des procédures collectives en cours, les demandes de condamnations, notamment à raison du plan d’Euronics, ne pouvant prospérer.
Sur la restitution du compte courant, les intimés soulignent que :
— cette somme correspond à la consultation d’un compte non arrêté correspondant à des avances à titre de garantie prévues à l’article 11 du règlement intérieur Euronics, lequel prévoit un fond de réserve de service après vente destiné à faire face aux réclamations des consommateurs,
— ces sommes ne peuvent être perçues avant un délai de 5 ans, à compter du
31 décembre 2014,
— l’institution de ce fonds de garantie a une cause parfaitement licite et n’est pas plus soumis à l’arbitraire du conseil d’administration, des causes d’exonérations existent,
— il n’est pas démontré que la société sous enseigne Darty procède au SAV des produits acquis auprès de Logitec
— aucune compensation ne peut intervenir entre des créances qui ne sont pas connexes et encore moins exigibles puisque l’exécution des dites créances ont été reportées à l’issue du plan qui a une durée de 10 ans.
S’agissant de la responsabilité, les intimés plaident que :
— les demandes sont irrecevables en application du principe du non-cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle,
— aucune option entre ses deux responsabilités n’est faite aux termes du dispositif,
— sur l’information pré-contractuelle et les prévisionnels, la société Cochet ne pouvait ignorer la situation, étant avertie en qualité d’ adhérente antérieure au réseau et d’administrateur dudit réseau, participant à la fixation des politiques en la matière,
— elle avait les compétences pour apprécier les risques et tout vice du consentement est exclu,
— la licenciée est associée de la coopérative Euronics France depuis 1980 et connaît parfaitement les règles de fonctionnement de la coopérative,
— elle a indiqué avoir eu les informations et elle en connaissait au vu de sa compétence et de sa qualité parfaitement les termes.
— l’EURL était parfaitement informée depuis de nombreuses années de la vie de la coopérative, dont elle était adhérente et administrateur avant de signer ce contrat, qui s’analyse en un changement d’enseigne avec la même coopérative pour y participer activement.
— le contrat mentionne diverses conditions suspensives au bénéfice du concédant qui peut y renoncer, dont la validation par Euronics du prévisionnel, ce qui induit bien que le prévisionnel n’est pas établi par Euronics,
— les données contenues sont purement indicatives et doivent impérativement être validées par le candidat.
Sur le soutien abusif allégué, les intimés précisent que :
— l’examen du compte ne démontre aucune corrélation entre l’endettement fournisseur et les apports en compte courant au vu de l’augmentation significative en 2012 de certains postes comme celui des charges RSI du gérant,
— le montant de la dette fournisseur est à peu près constant,
— elle a cessé de payer les factures lors de son départ pour l’enseigne Darty, tout en continuant à vendre les biens reçus.
Ils estiment que les reproches sur l’inexécution contractuelle sont infondés aux motifs que:
— la société Cochet a été bénéficiaire du budget de participation financière prévu au contrat,
— elle a bénéficié des opérations de communications faites sous la marque Euronics;
— elle a bénéficié et utilisé le logiciel Dotsoft.
Ils soulignent que :
— si la société Cochet considère que la responsabilité de la coopérative Euronics France serait engagée pour violation des dispositions de la Loi Doubin, prévisionnel fantaisiste, soutien abusif ou encore inexécution contractuelle, elle ne peut invoquer, en tant qu’administrateur de la coopérative Cospreto devenue Euronics France à l’époque des faits allégués, aucune faute à l’encontre de la personne morale qu’elle a administré en application notamment du principe Nemo auditur propriam turpitudinem allegans,
— si la cour considère que la responsabilité de la coopérative est engagée vis à vis de la société Cochet
adhérente, elle condamnera la société Cochet, administrateur à payer à la coopérative Euronics des dommages et intérêts du même montant et ordonnera la compensation.
Ils contestent tout préjudice et toute possibilité de compensation.
MOTIVATION
Aucune critique en cause d’appel n’étant élevée à l’encontre des chefs du jugement relatif à l’exécution provisoire et au rejet de la demande de délai de paiement, ces derniers sont confirmés.
Sur la demande de la société Logitec
Aux termes des dispositions de l’article 1315 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.
Dans le cadre des relations contractuelles unissant les parties, et avant toute démission de la SARL Cochet de la coopérative, effective à compter du 31 décembre 2014, des marchandises, dont il n’est pas contesté qu’elles aient été commandées, acceptées et fournies à la société, qui en a pris livraison et n’a jamais élevé la moindre contestation, sont demeurées impayées, seules étant évoquées pour expliciter cette absence de règlement des difficultés financières.
En cause d’appel, aucune contestation n’est élevée par la société Cochet, laquelle se contente de solliciter la compensation.
Or, les pièces produites, et notamment le détail du solde dû, la communication des avis d’impayés, des différentes factures et avoirs établissent amplement l’obligation pesant sur la SARL Cochet à hauteur de 114 654, 78 euros, ce qui impose de confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la SARL Cochet à payer ladite somme à la société Logitec avec intérêts au taux légal à compter du 30 janvier 2015.
Sur les demandes reconventionnelles de la société Cochet
Aux termes de l’alinéa 1 de l’article L 622-7 du code de commerce, rendu applicable au redressement judiciaire par l’article L 631-14 du même code et à la liquidation judiciaire par l’article L641-3 du même code, le jugement ouvrant la procédure emporte de plein droit interdiction de payer toute créance née antérieurement au jugement d’ouverture à l’exception du paiement par compensation de créances connexes. Il emporte également de plein droit, interdiction de payer toute créance née après le jugement d’ouverture, non mentionnée au I de l’article L 622-17. Ces interdictions ne sont pas applicables au paiement des créances alimentaires.
L’article L 622-22 du code de commerce énonce que les instances qui sont reprises ne peuvent tendre qu’à la contestation des créances et à la fixation.
Aucune discussion n’existe quant à la nature des créances alléguées par la société Cochet qui ne peuvent qu’être des créances antérieures.
Il est donc, comme le soulignent justement les intimés, antinomique de solliciter à la fois la condamnation à la créance et sa fixation.
Une fois le principe de la créance reconnu, à supposer qu’elle soit établie, seule une fixation peut valablement intervenir pour une créance antérieure, justifiant de ce seul fait que la décision du tribunal de commerce déféré soit infirmée en ce qu’elle a condamné les sociétés Euronics France et Logitec au paiement d’une somme au titre de la restitution du compte courant.
La présentation maladroite du dispositif de l’appelant sera donc interprétée comme une demande de reconnaissance du principe de la créance en vue d’en obtenir la fixation, expressément sollicitée au titre du dispositif.
Quant aux développements consacrés par les parties relatifs à la teneur du plan, ces derniers sont sans objet, comme ne relevant pas de la saisine de la cour, étant observé qu’aucune des parties n’en tire de quelconques conséquences juridiques et que l’existence même d’un tel plan n’interdit pas à une partie de titrer sa créance.
Sur la demande de restitution du compte courant présentée in solidum à l’encontre des société Euronics et Logitec
‘ La SARL Cochet, adhérente de la société Cosprecto, qui a adopté la dénomination sociale Euronics, ne conteste pas être adhérente du groupement et ne conteste pas être soumise au règlement intérieur de la coopérative.
Les stipulations du règlement intérieur de la coopérative de commerçants détaillants Euronics France prévoient :
— des avances sur marchandises à titre de garantie au titre de l’article 11 selon lequel ‘afin de garantir les créances du groupement envers l’adhérent, l’adhérent est redevable du paiement à la coopérative Euronics France d’une avance sur marchandises. Cette avance à titre de garantie correspond à un pourcentage du CA H.T réalisé mensuellement par l’adhérent avec la société Logitec. Ce pourcentage est défini par le conseil d’administration de la coopérative Euronics France. Le montant global de cette avance sera plafonné par le conseil d’administration de la coopérative’ ;
— un fonds de réserve de service après vente institué par l’article 7 selon lequel ‘l’adhérent commercialise ses produits et marchandises sous une enseigne appartenant au groupement. À ce titre, il engage la notoriété de l’enseigne vis-à-vis des consommateurs. Ils attendent un service après vente que doit rendre le magasin indépendant suivant les règles de l’art. En cas de départ de l’adhérent quelque soit le motif ( redressement judiciaire, liquidation, cession du fonds, départ en retraite, etc.,), ce dernier reste entièrement responsable de la bonne exécution des garanties vis à vis du consommateur. Néanmoins il arrive parfois que des consommateurs s’adressent à la coopérative lorsqu’ils n’ont pas d’interlocuteurs face à eux. Pour garantir le règlement de ces litiges, l’adhérent partant se verra retenir sur les sommes qui lui sont dues par la coopérative un montant égal à 1.5 % de son dernier CA HT annuel magasin connu. Cette somme sera consignée pendant 5 années et le groupement prélèvera les montants relatifs aux réparations effectuées sous garanties pour les clients dudit adhérent qui n’aurait pas trouvé de solution directement en magasin. Au terme des 5 années, un décompte sera effectué et en cas de solde positif entre le montant retenu et les factures impayées, celui-ci sera restitué à l’adhérent. Pour s’exonérer de cette retenue, l’adhérent devra produire auprès du conseil d’administration tous les documents nécessaires pour prouver qu’aucun de ses consommateurs ne sera laissé pour compte avec un appareil sous garantie’.
‘ Des propres pièces de l’appelant, non contestées par les intimées, il ressort que la SARL Cochet dispose d’un compte ouvert auprès de l’entité ‘Euronics France’ sous l’intitulé avances mises à titre de garanties adhérents et abondé à hauteur de
32 436,31 euros au 15 décembre 2014.
Ce ne peut qu’être par abus de langage que la société Cochet use du terme ‘restitution’, alors que les deux sociétés Euronics France et Logitec sont en procédure collective et qu’aucune revendication en bonne et due forme n’a été réalisée.
Comme ci-dessus évoqué, il ne peut s’agir en outre que d’une fixation s’agissant nécessairement d’une créance antérieure.
Aucune condamnation ou fixation in solidum au passif des deux sociétés Euronics France et Logitec ne peut prospérer, la demande ne concernant tout au plus, à supposer la créance établie que la société Euronics, au vu des mentions non contestées apposées sur le relevé de compte produit.
‘ Or, la société Euronics, sur qui pèse la charge, ne démontre pas que les dispositions de l’article 11, dont la validité n’est pas contestée par la société Cochet, lui permettent de retenir un quelconque montant au titre de ‘l’avance à titre de garantie’.
En effet, ledit article précise clairement que l’avance correspond à un pourcentage du chiffre d’affaires hors taxes réalisé par l’adhérent, lequel doit être défini par le conseil d’administration d’Euronics.
Cependant, la délibération du conseil d’administration du 15 janvier 2009 établit uniquement la fixation d’un plafond à cette garantie, initialement fixé à 50 000 euros et porté à 70 000 euros, mais aucune détermination précise du pourcentage permettant de connaître le montant de la garantie avance marchandise n’est justifiée.
En conséquence, la retenue a été pratiquée de manière indue et la SARL Cochet dispose d’une créance à hauteur de ces sommes indûment retenues, les développements sur l’article 7 étant inopérants, puisque la retenue de garantie n’a pas été effectuée, au vu de la pièce produite, sur le fondement de cet article.
Il est observé, de manière superfétatoire et en tout état de cause, qu’aucune nullité de ladite clause n’aurait pu prospérer, puisque l’existence d’une cause dans l’instauration d’un fonds de réserve SAV pour faire face à la bonne exécution des garanties vis à vis des consommateurs ne peut être contestée, la coopérative disposant d’un intérêt et d’un motif pour assurer la poursuite des engagements susceptibles de nuire à sa notoriété en cas de disparition ou d’incapacité de l’adhérent, ce qui résulte parfaitement des termes du règlement intérieur, peu important qu’il ne s’agisse que d’une simple hypothèse et que l’adhérent demeure par principe tenu du service après-vente.
La décision des premiers juges ayant condamné la société Euronics et la société Logitec à la restitution de la somme de 14 992,61 euros à ce titre est donc infirmée et la créance de la SARL Cochet à la procédure collective de la société Euronics France, seule, est fixée à la somme de 32 436,31 euros.
Sur l’absence d’information précontractuelle et la fourniture d’un prévisionnel fantaisiste
En vertu des dispositions de l’article L 330-3 du code de commerce, toute personne qui met à la disposition d’une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d’elle un engagement d’exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l’exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de toute contrat conclu dans l’intérêt commun des deux parties, de fournir à l’autre partie un document donnant des informations sincères qui lui permette de s’engager en connaissance de cause. Ce document dont le contenu est fixé par décret, précise notamment, l’ancienneté, l’expérience de l’entreprise, l’état et les perspectives de développement du marché concerné, l’importance du réseau d’exploitants, la durée et les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession du contrat ainsi que le champ des exclusivité…. Le document prévu au premier alinéa ainsi que le projet de contrat sont communiqués 20 jours, minimum avant la signature du contrat.
L’article R 330-1 du code de commerce précise le contenu de cette information qui doit comprendre :
‘ 1° L’adresse du siège de l’entreprise et la nature de ses activités avec l’indication de sa forme juridique et de l’identité du chef d’entreprise s’il s’agit d’une personne physique ou des dirigeants s’il s’agit d’une personne morale ; le cas échéant, le montant du capital ;
2° Les mentions visées aux 1° et 2° de l’article R. 123-237 ou le numéro d’inscription au répertoire des métiers ainsi que la date et le numéro d’enregistrement ou du dépôt de la marque et, dans le cas où la marque qui doit faire l’objet du contrat a été acquise à la suite d’une cession ou d’une licence, la date et le numéro de l’inscription correspondante au registre national des marques avec, pour les contrats de licence, l’indication de la durée pour laquelle la licence a été consentie ;
3° La ou les domiciliations bancaires de l’entreprise. Cette information peut être limitée aux cinq principales domiciliations bancaires ;
4° La date de la création de l’entreprise avec un rappel des principales étapes de son évolution, y compris celle du réseau d’exploitants, s’il y a lieu, ainsi que toutes indications permettant d’apprécier l’expérience professionnelle acquise par l’exploitant ou par les dirigeants.
Les informations mentionnées à l’alinéa précédent peuvent ne porter que sur les cinq dernières années qui précèdent celle de la remise du document. Elles doivent être complétées par une présentation de l’état général et local du marché des produits ou services devant faire l’objet du contrat et des perspectives de développement de ce marché.
Doivent être annexés à cette partie du document les comptes annuels des deux derniers exercices ou, pour les sociétés dont les titres financiers sont admis aux négociations sur un marché réglementé, les rapports établis au titre des deux derniers exercices en application du III de l’article L. 451-1-2 du code monétaire et financier ;
5° Une présentation du réseau d’exploitants qui comporte :
Lorsque le réseau compte plus de cinquante exploitants, les informations mentionnées à l’alinéa précédent ne sont exigées que pour les cinquante entreprises les plus proches du lieu de l’exploitation envisagée ;
6° L’indication de la durée du contrat proposé, des conditions de renouvellement, de résiliation et de cession, ainsi que le champ des exclusivités.
Le document précise, en outre, la nature et le montant des dépenses et investissements spécifiques à l’enseigne ou à la marque que la personne destinataire du projet de contrat engage avant de commencer l’exploitation’.
‘ Le contrat régularisé le 5 août 2010 entre la société Euronics France et l’EURL Cochet est un contrat d’enseigne et de collaboration commerciale renforcée, lequel prévoit la concession de la marque Euronics en tant qu’enseigne de point de vente sur un territoire déterminé, pour une durée de 5 ans, avec en contrepartie notamment l’obligation pour le licencié de mettre son point de vente aux normes fixées dans le Book Euronics ou encore de respecter le plan annuel de communication.
Cette convention relève bien du régime de la Loi Doubin, et s’y réfère d’ailleurs expressément. Cependant, le simple fait de stipuler dans le contrat que le licencié a eu communication depuis vingt jours précédant la signature du contrat litigieux du document d’information ne constitue pas un élément de preuve suffisant, la nature précise des documents remis n’étant pas mentionnée.
Le concédant n’a pas à fournir d’études de marché et de comptes prévisionnels, seul un état du marché devant être transmis. Toutefois sa responsabilité peut être engagée s’il transmet des comptes prévisionnels, établis par ses soins, présentant un caractère grossièrement erroné et induisant le souscripteur en erreur.
‘ La victime de tels manquements dispose d’une option, soit solliciter la nullité du contrat et des dommages et intérêts s’il y a faute, soit maintenir le contrat et solliciter uniquement des dommages et intérêts, la responsabilité du contractant fautif étant alors de nature délictuelle.
Il incombe dès lors au franchisé- licencié de démontrer la mauvaise exécution de ces obligations précontractuelles d’information ou de renseignement mais également l’existence d’un préjudice, lequel ne peut consister, en l’absence de demande de nullité, qu’en la réparation d’une perte de chance de contracter à des conditions plus avantageuses.
La société Cochet se contente d’alléguer un préjudice constitué selon elle ‘ de la perte de chance de ne pas contracter qui ne saurait être inférieure à 80 %, au vu de la situation’.
Sans qu’il soit nécessaire de se prononcer plus avant sur l’existence d’une faute, la cour ne peut que constater qu’elle n’invoque ni n’allègue de faits concluants en vue de caractériser son préjudice au soutien de sa demande.
Aucune créance ne saurait être mise à la charge de la Société Euronics de ce chef.
Sur la responsabilité de la société Logitec et Euronics France pour soutien abusif
La société Cochet sollicite une indemnisation de son préjudice au titre du soutien abusif que lui auraient offert les sociétés Logitec et Euronics en laissant délibérément filer la dette, fonctionnant ainsi comme une banque ce qui permettait de facturer d’importants ‘agios’ au titre de l’encours fournisseur, sans dénoncer les encours ou inviter l’adhérent à trouver des solutions économiques durables.
Le fondement juridique de cette demande, qui n’est pas précisé expressément par la SARL Cochet, ne peut être qu’une responsabilité délictuelle fondée sur l’abus de droit, l’article L 650-1 du code de commerce supposant pour s’appliquer l’ouverture d’une procédure collective au bénéfice de celui se prévalant du caractère abusif du soutien et pouvant donc trouver application en l’espèce.
L’abus de droit est constitué par le dépassement des limites d’un droit par son titulaire, qui commet une faute délictuelle, caractérisée par une intention de nuire à autrui ou un détournement de la finalité du droit. L’abus doit causer un préjudice à autrui.
Ainsi, dans le domaine contractuel, l’abus peut provenir d’un comportement anormal du titulaire du droit, d’un usage sans motif légitime, voire inutile, de son droit.
La Société Cochet ne caractérise pas la faute ayant pu dégénérer en abus de la société Logitec ou l’enseigne Euronics, se contentant d’affirmer le caractère abusif du soutien en ‘laissant délibérément filer la dette’.
Le simple accroissement de la dette fournisseur sur plusieurs années ne permet pas de démontrer la volonté de nuire des différents protagonistes, ni le détournement d’un droit contractuellement envisagé par la création d’un compte et l’obtention ainsi d’un avantage hors de proportion avec l’engagement primitif, le fait que le fonctionnement du compte ait pu entraîner des agios de plus en plus importants étant insuffisant.
La cour observe d’ailleurs que les impayés de factures ne concernent que les factures les plus récentes, alors que la société Cochet avait décidé de quitter la coopérative pour rejoindre une nouvelle enseigne et ne sont pas la résultante comme elle l’affirme d’une incapacité de sa part à faire face à ses obligations maintenues abusivement par le fournisseur, l’encours fournisseur étant d’ailleurs à peu près constant sur la période 2011-2014.
Aucune créance ne saurait être reconnue de ce chef au profit de la société Cochet.
Sur la responsabilité pour inexécution contractuelle
Arguant de l’absence de soutien commercial et publicitaire, elle sollicite une indemnisation à hauteur de 10 000 euros correspondant à l’exécution complète de son engagement initial, 66 657 euros au titre du remboursement des sommes payées au groupement de 2010 à 2014, 100 000 euros correspondant aux pertes accumulées sous l’enseigne Euronics.
Malgré une formulation sujette à caution, notamment au titre de demandes tendant à la restitution des sommes payées au groupement laquelle s’assimile à une demande en remboursement d’indû, la société Cochet se place sous l’égide de l’article 1147 ancien du code civil.
Il lui appartient donc de démontrer une faute, un préjudice et un lien de causalité, ce qu’elle ne fait aucunement.
Sur l’exécution incomplète de l’engagement initial
Aucune faute ne saurait être reprochée raisonnablement à la société Euronics de ce chef, puisque si le contrat se réfère bien à un versement d’un budget publicitaire par le concédant au licencié, il résulte des propres écritures de l’EURL Cochet qu’elle ne conteste pas avoir reçu une somme à ce titre de 30 000 euros, somme qui se situe dans la fourchette contractuellement arrêtée entre les parties, les stipulations contractuelles prévoyant ‘un budget de participation publicitaire s’élevant à (entre 20 000 euros et 40 000 euros selon la taille de la zone du et du magasin)’.
La somme de 30 000 euros relevait d’un choix commercial et discrétionnaire d’Euronics, laquelle ne s’est jamais engagée à verser le plafond de cette fourchette à la société Cochet, qui se contente de demander des explications à la société Euronics et n’établit aucunement qu’à taille identique de la zone ou du magasin d’autres cocontractants aient perçu une indemnité différente.
Sur le non respect des obligations d’assistance et relatives à la communication
L’article 7-3-2 du contrat stipule que ‘Tout au long du contrat, le concédant proposera au licencié une assistance commerciale et technique notamment pour la mise en oeuvre du Savoir faire Euronics et pour permettre un suivi de l’activité du licencié, qui prendra l’une ou l’autre des formes suivantes :
(i) par des conseils pour l’élaboration et la stratégie du plan médiat propre au licencié,
(ii) par la mise en oeuvre d’actions publicitaires ou promotionnelles, tant au plan national que local. Pour ce faire, le concédant mettra à disposition du licencié des catalogues et/ou brochure publicitaire, qui pourront être commandés par le licencié au concédant, ou à tout autre organisme désigné par lui. Le concédant effectuera un suivi de ces actions sur le terrain par une équipe d’animateurs de réseau ;
(iii) en assurant des stages de formation permanente, soit obligatoires, soit facultatifs à la demande du licencié, pour lui-même ou son personnel. Cette formation sera assurée par des modules de formation, visites d’un conseiller commercial, ou technique ;
(iv) par la mise en place d’un prologiciel permettant la gestion commerciale et le service après-vente. Cet outil permet en outre une remontée d’information au concédant qui peut ainsi procéder au calcul de ratios standard d’exploitation au sein du réseau Euronics et les diffuser ensuite au sein du réseau sur une base agrégée et anonyme ( ce que le licencié accepte expressément). Il est important de rappeler que le fichier client reste l’entière propriété du licencié, et que son exploitation à des fins publicitaires par le concédant ne peut se faire qu’avec une autorisation écrite du licencié’.
Les obligations énoncées par le texte précité sont générales et non cumulatives. Il en est de même des obligations relatives à la communication expressément déclinées à l’article 8-4.
Le fait qu’en annexe n’aient pas été jointes des précisions quant au budget communication ne signifie pas de facto qu’il n’en existait pas ou qu’aucun plan de communication national n’ait été mis en oeuvre, étant observé d’ailleurs que les délibérations produites du conseil d’administration permettent de constater les discussions et projets réguliers sur ces points.
Les développements de la société Cochet sont consacrés essentiellement à un manquement à la politique de communication, puisque s’agissant de l’obligation d’assistance, aucun manquement précis n’est caractérisé.
Ainsi n’est il pas justifié d’une demande d’assistance, sous quelque forme que ce soit, sollicitée par le licencié et qui n’aurait pas été honorée par le concédant. Il n’est pas plus démontré que les outils invoqués dans l’article précité, notamment le prologiciel, n’aient pas été mis en place ou aient dysfonctionné.
S’agissant plus particulièrement de la politique de communication, s’il est évoqué un plan de communication national rythmé, les modalités précises de mise en oeuvre de ce plan n’ont pas été contractuellement arrêtées entre les parties.
Il ne ressort d’aucune stipulation que la société Euronics aurait dû engager une campagne publicitaire nationale sur un média majeur comme le soutient la société Cochet.
En outre la société Euronics produit des documents intitulés ‘plan de communication’ pour les années 2012, 2013, 2014 et 2015, présentant mois après mois les différentes opérations publicitaires ou marketing envisagées dont il n’est pas démontré qu’elles n’aient pas été mises en oeuvre avec l’appui de la société Euronics.
Il est au contraire justifié de la mise en oeuvre de ce plan de communication par la production d’un panel de prospectus sur la période de 2011 à 2014, étant observé que les plans de communications mentionnent l’usage d’autres techniques de communications, radio, banderole, affichage, envois de SMS et emailing, kit facebook…
Aucune faute ou inexécution grave des obligations n’étant établie, la demande consistant à obtenir le remboursement des sommes versées, sans que la nullité ou la résolution du contrat ne soit évoquée, ne peut prospérer.
Sur la prise en charge des pertes cumulées sous l’enseigne Euronics
Au soutien de cette demande de réparation spécifique, la société Cochet n’invoque pas expressément de faute distincte.
Or comme ci-dessus évoqué les griefs reprochés par la société Cochet relatif à la politique commerciale, publicitaire ou l’absence d’assistance de l’enseigne Euronics n’étant pas établis, cette demande ne peut qu’être rejetée, étant observé que le simple fait que soient apparues des pertes après le passage à l’enseigne litigieuse, ne saurait à lui seul être révélateur d’une faute.
Sur la demande subsidiaire de la coopérative Euronics
La demande de la société Euronics visant à la condamnation de la SARL Cochet à la somme de 611 311, 78 euros à titre de dommages et intérêts ou à hauteur du même montant que les sommes octroyées à la société Cochet est sans objet, cette demande n’étant liée qu’aux condamnations éventuelles de la coopérative pour violation des dispositions de la loi Doubin, prévisionnel fantaisiste, soutien abusif ou inexécution contractuelle et aucune condamnation n’étant intervenue de ce chef.
Sur la compensation
‘ L’article L 622-7 du code de commerce dispose que le jugement d’ouverture interdit tout paiement des créances nées antérieurement, sauf le paiement par compensation de dettes connexes, permettant ainsi à un créancier antérieur d’opposer à la demande en paiement formé par la procédure collective la compensation entre sa dette et la créance qu’il détient contre le débiteur.
La déclaration de créance au passif de la procédure doit être effective et porter sur l’intégralité de la créance, ce qui est le cas en l’espèce, une déclaration étant intervenue tant dans le cadre de la procédure collective de la société Euroncis que dans le cadre de la procédure collective de la société Logitec, pour l’intégralité des montants allégués.
Sont visées les créances où la compensation légale n’a pas pu jouer de plein droit avant le jugement d’ouverture, les conditions d’exigibilité, de certitude ou de liquidité faisant alors défaut.
Pour que puissent toutefois jouer la compensation au titre du lien de connexité, la réunion des conditions de liquidité ou d’exigibilité n’est pas forcément exigée à la différence du caractère certain de la créance.
Les créances sont connexes quand elles résultent d’un même contrat. Mais des créances nées de contrats distincts peuvent également être connexes lorsque ces contrats ont eux-mêmes été conclus en exécution d’un contrat cadre, ou lorsqu’ils relèvent d’un ensemble contractuel unique, soit parce qu’ils sont interdépendants soit parce qu’ils sont liés économiquement.
Il ne peut être contesté les liens unissant les différents protagonistes de ce dossier et les relations contractuelles existant entre d’une part la société Cochet, d’autre part la coopérative Euronics, à laquelle est affiliée la SARL Cochet, et la société Logitec, filiale de la société Euronics et centrale d’achat désignée par la coopérative pour fournir les adhérents et licenciés en marchandises.
Cela découle clairement de la convention souscrite le 5 août 2010 mais également du règlement intérieur de la Coopérative Euronics, la convention renvoyant audit règlement.
Ainsi, le contrat prévoit en son article 7-2 et 8-2 sur la fourniture de produits et de matériels, équipements et prestations, le lien entre les différentes entités puisque la fourniture doit se faire par l’intermédiaire des filiales du concédant, et notamment la société Logitec, le licencié s’engageant à respecter au niveau de ses achats un taux de fidélité minimum en achetant par la centrale d’approvisionnement désignée par le concédant (Logitec notamment).
Le règlement intérieur rappelle quant, à lui, les liens entre les différents protagonistes, l’approvisionnement par recours à la société Logitec (article 5), la passation de commandes soit directement à Euronics, soit à Logitec, et la création d’un compte afin de garantir les créances du groupement intitulé ‘avances sur marchandises à titre de garantie’, cette avance étant calculée sur un pourcentage du CA HT réalisé mensuellement par l’adhérent avec la société Logitec.
Toutefois, si les contrats se rattachent à une opération économique globale caractérisée par une unité, il s’agit de créanciers distincts.
En effet, le critère de la réciprocité des créances, entre d’une part la créance de la société Cochet auprès de la société Logitec au titre de la fourniture de marchandises à hauteur de 114 654, 78 euros avec intérêts au taux légal à compter du 30 janvier 2015, d’autre part la créance en compte au titre de l’avance marchandise de la SARL Cochet à l’encontre de la SARL Euronics, fait défaut.
Aucune compensation au titre des créances réciproques connexes ne peut donc trouver à s’appliquer.
Sur les dépens et accessoires
En application des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile, la société Cochet succombant principalement en ses prétentions, il convient de la condamner aux dépens.
Les chefs de la décision de première instance relatifs aux dépens et à l’indemnité procédurales sont confirmés.
Le sens du présent arrêt commande de condamner l’EURL Cochet à payer à
Me Y ès qualité de liquidateur judiciaire et à la société Euronics la somme globale de 3500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Les demandes d’indemnité procédurale de l’EURL Cochet sont rejetées.
PAR CES MOTIFS
La cour,
INFIRME le jugement du tribunal de commerce d’Arras en date du 15 mars 2017 en ce qu’il a condamné la SAS Euronics France et Logitec à payer à l’EURL Cochet la somme de 14 992,61 euros en restitution d’une partie du compte courant ;
Statuant à nouveau de ce chef,
FIXE la créance de la société EURL Cochet à la procédure collective de la société Euronics France à la somme de 32 436, 31 euros ;
DEBOUTE l’EURL Cochet de toute demande de fixation à la procédure collective de la société Logitec ;
CONFIRME le jugement du tribunal de commerce d’Arras pour le surplus ;
y ajoutant,
DEBOUTE la SAS Euronics de sa demande visant à la condamnation de la SARL Cochet à la somme de 611 311,78 euros à titre de dommages et intérêts ou à hauteur du même montant que les sommes octroyées à la société Cochet ;
REJETTE la demande de compensation présentée par la société EURL Cochet ;
CONDAMNE l’EURL Cochet à payer à Me Y ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Logitec et à la société Euronics la somme globale de 3 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
LA DEBOUTE de sa demande d’indemnité procédurale ;
LA CONDAMNE aux dépens d’appel.
Le greffier Le président