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L’associé d’un cabinet d’avocat n’est pas en droit, sans l’autorisation du juge judiciaire, de consulter et utiliser à titre de preuve les emails (supposés insultants) de collaborateurs/trices, dès lors que les messageries en cause ne sont pas mis à la disposition par le cabinet (messagerie Gmail). L’arrêté du conseil de discipline de l’ordre des avocats du barreau de Paris a retenu que l’avocat associé avait manqué au principe de délicatesse et a en conséquence violé les dispositions de l’article 1.3 du règlement intérieur national, a été confirmé.
Dans cette affaire, après avoir pris connaissance de mails échangés entre ses deux collaboratrices sur leurs messageries électroniques privées, maître L. a mis fin à leurs contrats de collaboration libérale. Celles-ci se sont adressées à la commission d’arbitrage et dans le cadre de cette instance, l’ avocate de l’une d’entre elles, a saisi la commission de déontologie à propos de la production desdits mails effectuée par maître L. lors de la phase de conciliation. La commission de déontologie a émis un avis en demandant le retrait des correspondances en cause. L’autorité de poursuite a décidé d’ouvrir une procédure disciplinaire à l’encontre de maître L. en ce qu’il aurait manqué aux principes essentiels de la profession d’avocat par violation du secret des correspondances privées et utilisation de celles-ci et en ce qu’il n’aurait pas respecté l’avis de la commission de déontologie en maintenant les courriers litigieux dans le cadre de l’instance d’arbitrage.
Par ailleurs, l’utilisation des pièces litigieuses est susceptible de constituer une faute déontologique, quel que soit le sort réservé à la procédure dans laquelle celle-ci a été effectuée, la nullité éventuelle de la procédure d’arbitrage ayant pour conséquence de dénuer de tout effet la production de ces pièces mais n’est pas susceptible de faire disparaître l’acte matériel d’usage reproché à maître L. Ainsi le maintien des mails au cours de la procédure d’arbitrage peut également être examiné sans qu’il soit nécessaire de connaître l’issue du recours en nullité de cette procédure.
Il n’était pas allégué que les messages en cause figuraient dans des fichiers conservés dans le disque dur de l’ordinateur de l’une ou l’autre des deux collaboratrices. Ainsi ces messages se situaient uniquement sur leurs boites aux lettres privées accessibles à des adresses gmail.
En l’espèce, les messageries utilisées par les deux collaboratrices – qui n’avaient pas le statut de salarié- étaient des messageries privées qui correspondent à des espaces personnels que la société Google, s’agissant d’adresses gmail, met à la disposition des internautes sur ses serveurs et elles n’étaient pas mises à leur disposition par maître L. Le fait que l’accès au serveur de l’opérateur Internet sur lequel se trouvent stockés les messages en cause, s’effectue par le moyen de l’ordinateur professionnel, est sans incidence sur le caractère privé de la boîte aux lettres électroniques. Ainsi si maître L. estimait qu’il avait un intérêt légitime à connaître un message stocké dans cette boîte aux lettres, en ce qu’il aurait présenté un caractère professionnel, il lui appartenait de solliciter l’autorisation du juge, selon les règles de l’article 145 du code de procédure civile. Par ailleurs, le droit à la preuve n’est pas un droit absolu et il suppose que celle-ci soit obtenue loyalement.