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SOC.
LG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 29 septembre 2021
Rejet
Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 1091 F-D
Pourvoi n° A 20-18.802
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 29 SEPTEMBRE 2021
M. [W] [K], domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° A 20-18.802 contre l’arrêt rendu le 5 février 2020 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 8), dans le litige l’opposant :
1°/ à la société Apple France, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4],
2°/ à la société Apple Sales International, dont le siège est [Adresse 6] (Irlande)
3°/ à la société Apple Distribution International, dont le siège est [Adresse 5] (Irlande)
4°/ à la société Mandataires judiciaires associés (MJA), société d’exercice libéral à forme anonyme, dont le siège est [Adresse 1], prise en la personne de Mme [C] [R], en sa qualité de liquidateur de la société Ebizcuss.com SA,
5°/ à l’AGS CGEA Ile-de-France Ouest, dont le siège est [Adresse 2],
défenderesses à la cassation.
La société Mandataires judiciaires associés, prise en la personne de Mme [R], ès qualités, a formé un pourvoi provoqué contre le même arrêt.
Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l’appui de son recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
La demanderesse au pourvoi provoqué, invoque, à l’appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Le Corre, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de M. [K], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat des sociétés Apple France, Apple Sales International et Apple Distribution International, de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Mandataires judiciaires associés, prise en la personne de Mme [R],ès qualités, les observations orales de Mes Uzan-Sarano, Célice et Boucard, et l’avis oral de Mme Laulom, avocat général, après débats en l’audience publique du 6 juillet 2021 où étaient présents Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Le Corre, conseiller référendaire rapporteur, Mme Mariette, conseiller, Mme Laulom, avocat général, et Mme Lavigne, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 5 février 2020), la société Ebizcuss.com a conclu le 1er janvier 2002 avec le groupe Apple un contrat de distribution des produits de cette marque par lequel elle est devenue revendeur de type “Apple authorised reseller agreement” (AAR) puis, le 20 mai 2008, un avenant par lequel elle est devenue revendeur de type “Apple premium reseller” (APR).
2. Par jugement du 31 mai 2012, le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire de la société Ebizcuss.com, avec maintien d’activité pendant trois mois, et a désigné la société MJA, prise en la personne de Mme [R], en qualité de liquidateur.
3. M. [K], salarié de la société Ebizcuss.com, s’est vu notifier son licenciement pour motif économique en août 2012.
4. Il a saisi courant juin 2012 la juridiction prud’homale de demandes tendant en leur dernier état au paiement de dommages-intérêts à l’encontre des sociétés Apple France, Apple Sales International et Apple Distribution International, en invoquant à titre principal la qualité de coemployeurs de celles-ci, à titre subsidiaire la fraude aux dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail relatives au transfert des contrats de travail, et à titre encore plus subsidiaire la responsabilité extra-contractuelle de ces trois sociétés.
5. En cours d’instance, le liquidateur de la société Ebizcuss.com a demandé à la juridiction prud’homale de voir constater l’existence d’un coemploi entre les sociétés Apple France, Apple Sales International et Apple Distribution International et la société Ebizcuss.com.
Examen des moyens
Sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié, pris en ses première et quatrième branches, et le moyen du pourvoi provoqué du liquidateur, ci-après annexés
6. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié, pris en ses deuxième et troisième branches
Enoncé du moyen
7. Le salarié fait grief à l’arrêt de le débouter de sa demande tendant à voir constater la qualité de coemployeurs des sociétés Apple France, Apple Sales International et Apple Distribution International, et, en conséquence, de le débouter de ses demandes en annulation de son licenciement pour défaut de plan de sauvegarde de l’emploi et en condamnation des sociétés Apple France, Apple Sales International et Apple Distribution International solidairement à lui verser une certaine somme à titre d’indemnité pour licenciement nul et une autre somme à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral, et, subsidiairement, de le débouter de ses demandes en requalification de son licenciement en licenciement dénué de cause réelle et sérieuse pour non-respect de l’obligation de reclassement et en condamnation des sociétés Apple France, Apple Sales International et Apple Distribution International solidairement à lui verser une certaine somme à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et une autre somme à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral, alors :
« 2°/ subsidiairement, que, hors l’existence d’un lien de subordination, une société ne peut être qualifiée de coemployeur du personnel employé par une autre que s’il existe, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe économique et de l’état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une immixtion permanente de cette société dans la gestion économique et sociale de la société employeur, conduisant à la perte totale d’autonomie d’action de cette dernière ; qu’en écartant la qualité de coemployeurs des sociétés Apple France, Apple Sales International et Apple Distribution International, cependant qu’elle constatait que la société Ebizcuss.com était tenue de commercialiser quasi-exclusivement leurs produits, aux prix fixés par elles, selon un taux de marge prédéfini, en des lieux choisis par celles-ci et dans des magasins meublés et agencés conformément à leurs standards, à l’aide de salariés formés spécifiquement pour les produits Apple et dont le nombre par point de vente était imposé par les fournisseurs, à peine de retrait du label de qualité du distributeur et de réduction significative de son taux de marge, mais également que les sociétés Apple France, Apple Sales International et Apple Distribution International imposaient les événements marketing que devait mener la société Ebizcuss.com, procédaient à des contrôles dans les établissements de celle-ci par le biais de clients mystères, réalisaient des audits sur le positionnement des produits dans les vitrines, voire donnaient directement à l’employeur des directives sur ce dernier point, contrôlaient le degré de formation des vendeurs et les résultats des magasins, ce qui pouvait également avoir des conséquences sur le taux de marge des appareils qui pouvait être significativement diminué, ce dont il résultait une immixtion permanente des sociétés Apple France, Apple Sales International et Apple Distribution International dans la gestion économique et sociale que la société Ebizcuss.com, conduisant à la perte totale d’autonomie d’action de cette dernière, ce qui commandait la qualification de coemployeurs de ces sociétés, la cour d’appel a violé l’article L. 1221-1 du code du travail ;
3°/ que, pour statuer comme elle a fait, la cour d’appel a encore relevé que “le fait que la société Ebizcuss.com avait développé une activité autre que celle de revendeur des produits Apple, ses catalogues révélant la commercialisation de matériel informatique d’une autre marque (Sony Vaio) et l’appelant ne contestant pas l’existence de produits de sa propre marque sous le nom “Energy”, comprenant des composants et accessoires” et qu’ “il apparaît donc que la société Ebizcuss.com ne dépendait pas entièrement et anormalement des sociétés Apple France, Apple Sales International et Apple Distribution International, continuait de disposer d’une autonomie de gestion et d’une clientèle propre” ; qu’en statuant ainsi, cependant qu’elle constatait elle-même que “les extraits du contrat en cause et son annexe 1 permettent de constater qu’au-delà du contrat de revendeur agréé, la société Ebizcuss.com a accepté des conditions supplémentaires tenant à des critères d’admissibilité relativement aux sites d’implantation et portant aussi bien sur le lieu d’implantation des magasins que sur leur superficie, leur visibilité, leur agencement, l’enseigne mais aussi sur le fait que les unités centrales de la marque Apple devaient représenter en permanence au moins 75 % des unités centrales vendues, une interdiction d’exposer d’autres unités centrales étant prévue sauf pour des démonstrations d’interopérabilité, et les conditions dans lesquelles des accessoires de tiers pouvaient ou devaient être exposés”, ce dont il résultait que cette commercialisation d’équipements tiers -qui devait demeurer sous-exposée et ne pouvait que rester marginale- ne remettait nullement en cause l’état de dépendance économique totale dans lequel se trouvait la société Ebizcuss.com vis-à-vis des sociétés Apple France, Apple Sales International et Apple Distribution International, la cour d’appel a derechef violé l’article L. 1221-1 du code du travail. »