Marchand de Biens : décision du 6 juillet 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/01698

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Marchand de Biens : décision du 6 juillet 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/01698
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7ème Ch Prud’homale

ARRÊT N°316/2023

N° RG 20/01698 – N° Portalis DBVL-V-B7E-QRTR

M. [R] [I]

C/

S.A.S. FONCIERE IMMOBILIERE DE MANCHE ATLANTIQUE SAS

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 06 JUILLET 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Hervé BALLEREAU, Président de chambre,

Assesseur : Madame Liliane LE MERLUS, Conseillère,

Assesseur : Madame Isabelle CHARPENTIER, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Françoise DELAUNAY, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 07 Février 2023 devant Madame Isabelle CHARPENTIER, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

En présence de Monsieur [L], médiateur judiciaire

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 06 Juillet 2023 par mise à disposition au greffe, date à laquelle a été prorogé le délibéré initialement fixé au 13 Avril 2023, au 25 Mai 2023 puis au 29 Juin 2023

****

APPELANT :

Monsieur [R] [I]

né le 25 Décembre 1968 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Localité 13]

Comparant en personne, assisté de Me Frédérick DANIEL, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de BREST

INTIMÉE :

FONCIERE IMMOBILIERE DE MANCHE ATLANTIQUE SAS (FIMA) Prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité au dit siège

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Christophe LHERMITTE de la SCP GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Françoise NGUYEN de la SELARL AMALYS, Plaidant, avocat au barreau de BREST

EXPOSÉ DU LITIGE

La SAS Foncière Immobilière de Manche Atlantique (FIMA) immatriculée le 22 décembre 2004 ayant son siège social à [Localité 6] ( 29) a pour objet social la maitrise d’oeuvre totale ou partielle d’opérations de lotissement en France et à l’étranger, toute prestation d’assistance à lotisseur, la réalisation en propre d’opérations de lotissement, la vente en l’état futur d’achèvement de maisons individuelles, la promotion immobilière et l’activité de marchand de biens.

Elle est l’une des filiales du groupe Tremafinances, société holding détenue par M. [M] [X] et sa famille à l’origine de la création de la société Trecobat spécialisée dans la construction de maisons individuelles.

La société FIMA était dirigée par M. [X], qui détenait initialement 80 % des parts sociales tandis que M. [R] [I] en était titulaire de 20%.

Le 1er octobre 2004, M. [R] [I] a été engagé par la SAS FIMA alors en cours de formation dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de Responsable Opérationnel, avec un statut de cadre dirigeant.

La relation de travail était régie par la convention collective nationale de la promotion immobilière.

En 2011, M.[I] est devenu associé à 44 % de la société FIMA, les autres parts sociales étant détenues majoritairement par la Société FMT, filiale du groupe Tremafinances.

Le 21 septembre 2017, Mme [A] [J], épouse commune en biens de M. [I], a fait immatriculer l’EURL Aménagement Foncier Breton (AFB), avec un siège social à [Localité 6], dont elle était la gérante. Cette société a pour objet social une activité de promotion immobilière, de marchand de biens, l’achat, la vente, le négoce, la construction, la rénovation de tous biens immobiliers, bâtis ou non bâtis, l’activité de lotisseur, l’activité de maîtrise d’oeuvre, l’aménagement foncier et la viabilisation.

Le 30 octobre 2017, M. [I] a été contacté par l’étude notariale de Maîtres [C] et [N] pour lui présenter un terrain à la vente sur la commune de [Localité 7].

Dans un courrier du 23 décembre 2017, le conseil de la société FIMA a informé qu’à l’issue de leurs entretiens, l’employeur entendait modifier les conditions de la rémunération de M. [I], afin de substituer au versement d’une prime annuelle discrétionnaire, le paiement d’une partie variable en fonction d’un pourcentage dégagé sur les affaires initiées et gérées par la société FIMA.

Le 17 janvier 2018, le compromis de vente du terrain de [Localité 7] a été signé avec la société AFB, laquelle était alors représentée par M. [I], en qualité de mandataire de la gérante Mme [J].

Quelques mois plus tard, M.[I] a refusé de signer l’avenant qui lui a été transmis le 13 avril 2018 par son employeur, considérant que les nouvelles modalités de calcul de sa rémunération variable étaient différentes et moins avantageuses que celles convenues en décembre 2017.

Le16 mai 2018, M. [I] a été convoqué à un entretien préalable à licenciement fixé au 25 mai et a été mis à pied le même jour à titre conservatoire.

Le 12 juin 2018, la société FIMA représentée par M.[X] a notifié à M. [I] son licenciement pour faute grave dans un courrier ainsi libellé :

‘ Le 1er octobre 2004, j’ai convenu de vous associer avec moi et vous détenez actuellement 44 % du capital de la société FIMA dont l’objet social se résume à : la maîtrise d’oeuvre et la réalisation d’opérations de lotissement, de prestation d’assistance à lotisseur, la vente en l’état futur d’achèvement de maisons individuelles, de promotion immobilière et de marchand de biens.’

Vous avez intégré cette structure en qualité de Chargé d’Opérations foncières relevant du statut de cadre vous permettant de développer des compétences en ce domaine.

Comme vous le savez, d’autres Sociétés que je contrôle, ont des liens étroits et complémentaires avec la société FIMA, prestataire de ces structures.

Ainsi, vous travaillez pour le compte exclusif de notre société et de sa Société mère ainsi que pour celui des autres Sociétés filiales du groupe. ( ..)

Plus particulièrement, vous êtes contacté directement et régulièrement par les Notaires ou par les particuliers en vue de l’acquisition au groupe de Sociétés précité, de terrains pour lesquels notre Société FIMA assure la prestation de viabilisation et d’implantation de lots pour ensuite les proposer à la vente.

J’ai découvert votre façon de procéder tendant à nuire aux intérêts desdites Sociétés. Pour l’illustrer, je détaille ci-après les conditions d’acquisition du terrain de M.[F] [V].

Précisément, l’étude de Me [C] et [N] m’a présenté à la vente un terrain appartenant à ce Monsieur, situé sur la commune de [Localité 7] au [Adresse 8] d’une superficie de 3 700 m².(..)

Vous avez pris contact avec ce notaire dans le cadre de l’exécution de vos fonctions de Chargé d’Opérations Foncières.

Avec le matériel mis à votre disposition, vous avez procédé à une esquisse de division en lots et à un bilan prévisionnel du coût de viabilisation de ce terrain ainsi qu’au découpage des parcelles.

Pour autant, c’est la Société Aménagement Foncier Breton qui s’en est portée acquéreuse en lieu et place de la Société FMT. Le siège social de cette structure est situé à [Localité 6] [Adresse 3]. La gérante est Mme [A] [J] votre conjointe que vous avez représentée lors de la signature de l’acte.

Or, votre attitude démontre que vous avez sciemment participé à une situation ayant pu faire naître une confusion dans l’esprit de la clientèle ayant permis de favoriser un membre de votre famille.

Sont constitutifs d’une faute grave les faits que je relève à votre encontre et qui se résument à avoir notamment détourné le terrain dont la Société FMT devait être bénéficiaire, au profit de celle constituée par votre épouse qui par votre intermédiaire, a pu s’en rendre acquéreur et à cet effet, vous avez réalisé les documents permettant cette vente avec les outils de la Société.

Vous avez ainsi sciemment violé l’obligation de loyauté qui lie la Société FIMA aux structures du groupe.

Lors de notre entrevue, vous avez évoqué l’importance des dossiers que vous avez menés au cours de votre période d’emploi laissant ainsi entendre que votre manquement n’a que peu de portée en comparaison avec votre investissement.

Je ne peux tolérer ce type de défense qui suppose que vous ne prenez pas en considération la portée de vos agissements. En conséquence, cette situation rendant impossible le maintien de nos relations contractuelles même pendant la durée d’un préavis, je vous notifie votre licenciement pour faute grave pour les motifs ci-dessus exposés.’

M. [I] a saisi le conseil de prud’hommes de Brest par requête du 18 juillet 2018 afin d’obtenir le paiement d’un rappel de salaire variable, de prime de 13ème mois, dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse, et voir condamner l’employeur au paiement des indemnités de rupture de son contrat de travail, ainsi que des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour licenciement abusif.

La SAS FIMA a demandé au conseil de prud’hommes de rejeter les demandes de M.[I] au titre du licenciement et des rappels de salaire variable et de primes, le salarié ayant été rempli de ses droits.

Par jugement en date du 07 février 2020, le conseil de prud’hommes de Brest a :

– Dit et jugé que le licenciement de M.[I] est justifié par une faute grave ;

– Débouté M.[I] de ses demandes en rappel de salaire au titre de la période de mise à pied, d’indemnité compensatrice de préavis, d’indemnité de licenciement, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de rappel de prime 13ème mois et des congés payés y afférents;

– Condamné la SAS FIMA à verser à M.[I] la somme nette de 4 000 euros au titre de rappel de salaire variable et 400 euros pour les congés payés y afférents ;

– Disposé que les sommes allouées seront porteuses des intérêts de droit à compter de la demande en justice pour les montants à caractère salarial (date de réception de la convocation devant le bureau de conciliation par la partie défenderesse, soit le 20/07/2018) ;

– Constaté que l’exécution provisoire est de droit pour une partie des condamnations qui précèdent (le salaire moyen mensuel pouvant valablement être fixé à la somme de 13 140,60 euros) ;

– Condamné la SAS Foncière immobilière de Manche Atlantique (FIMA) à remettre à Monsieur [R] [I] les documents sociaux rectifiés pour tenir compte de la présente décision ;

– Condamné la SAS Foncière immobilière de Manche Atlantique (FIMA) à verser à M.[R] [I] la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

– Condamné la SAS Foncière immobilière de Manche Atlantique (FIMA) aux dépens et y compris en cas d’exécution forcée, les éventuels honoraires et frais d’huissier (article 696 du code de procédure civile).

M. [I] a interjeté appel de la décision par déclaration au greffe en date du 10 mars 2020.

En l’état de ses dernières conclusions transmises par RPVA le 23 janvier 2023, M. [I] demande à la cour de :

– Infirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. [I] de ses demandes en rappel de salaire au titre de la période de mise à pied et des congés payés afférents, d’indemnité compensatrice de préavis et indemnités de congés payés associés, d’indemnité de licenciement, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de rappel de 13ème mois afférent et de l’indemnité de congés payés afférents ;

– Infirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. [I] de sa demande visant à obtenir un rappel de salaire variable pour’6’848,59’euros’nets, ainsi que 684,86’euros nets pour les congés payés y afférents ;

– Infirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. [I] de sa demande visant à obtenir les intérêts au taux légal sur l’ensemble des condamnations, à compter de la saisine de la juridiction de première instance ;

– Infirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. [I] de sa demande visant à obtenir 3’000’euros sur le fondement des frais irrépétibles engagés pour la première instance ;

Statuant à nouveau,

– Condamner la Société FIMA à lui payer :

– un rappel de salaire variable de’6’848,59’euros nets, et 684,86’euros’nets pour les congés payés y afférents ;

– le salaire de la mise à pied conservatoire pour 11’038,40’euros bruts, et 1’103,84’euros”bruts au titre des congés payés afférents ;

– une indemnité compensatrice de préavis de 37’057,10’euros’bruts’, et’3’705,71’euros’bruts’au titre des congés payés y afférents ;

– un rappel de salaire de 13 ème mois pour de 2’092,48’euros’bruts, ainsi que 209,25’euros’bruts au titre des congés payés y afférents ;

– une indemnité de licenciement de’51’091,89’euros nets ;

– 153’810,66’euros’nets’de dommages et intérêts résultant du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 130’000’euros’nets’de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du licenciement abusif et vexatoire ;

– 6’000’euros’ au titre de l’article 700 du code de procédure civile, tant au titre de la première instance que de l’instance d’appel ;

– Remise des documents sociaux rectifiés ;

– Assortir les condamnations des intérêts au taux légal à compter de la saisine et dire que les sommes à caractère indemnitaire produiront intérêt à compter du jugement, le tout avec capitalisation des intérêts ;

– Condamnation aux entiers dépens.

En l’état de ses dernières conclusions transmises par RPVA le 30 janvier 2023, la SAS Foncière immobilière de Manche Atlantique demande à la cour de :

– Infirmer le jugement en ce qu’il a condamné l’employeur à payer à M.[I]:

– 4 000 euros au titre de rappel de salaire variable outre les congés payés y afférents

– 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

– constater, dire et juger que M. [I] a été rempli de ses droits à rémunération, notamment variable.

– Débouter M. [I] de sa demande de rappel de salaire variable et de sa demande de congés payés afférents.

– Confirmer le jugement en ce qu’il a :

‘ Dit et jugé que le licenciement est justifié par une faute grave ;

‘ Débouté M. [I] de ses demandes financières à ce titre.

– Débouter M.[I] de sa demande de rappel de salaire de la mise à pied conservatoire, de sa demande à titre de congés payés afférents, de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de sa demande d’indemnité compensatrice de préavis, de sa demande à titre de congés payés afférents, de sa demande de rappel de 13ème mois afférente et de sa demande à titre de congés payés afférents, ainsi que de sa demande d’indemnité de licenciement.

– Débouter M.[I] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement intervenu dans des conditions vexatoires.

– Condamner M.[I] au paiement de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de la présente procédure.

***

La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance du 31 janvier 2023 avec fixation de l’affaire à l’audience du 7 février 2023.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour l’exposé des prétentions et moyens des parties, aux conclusions qu’elles ont déposées et soutenues à l’audience.

MOTIFS DE LA DÉCISION  

Sur le rappel de salaire variable

Les premiers juges ont alloué à M.[I] la somme de 4 000 euros net à titre de rappel sur la rémunération variable, outre les congés payés afférents, au motif que le courrier du 23 décembre 2017 de son employeur devait s’appliquer relatif aux conditions de rémunération variable prévoyant le versement de 200 euros par lot vendu; que l’employeur a appliqué à tort un coefficient de pondération minorateur figurant sur le projet d’avenant du 13 avril 2018 que le salarié a refusé de signer; que la société FIMA reste créancière d’un solde de rémunération variable de 4 000 euros en fonction des lots vendus durant la période couvrant le 1er janvier au 30 avril 2018.

La société FIMA conclut à l’infirmation du jugement au motif que :

– le courrier du 23 décembre 2017 évoquait seulement le principe d’une rémunération variable assise sur le résultat dégagé sur les affaires initiées et gérées par la société sans que les conditions de calcul de ce paramètre ne soient définis et le taux de 5 % est retenu.

– les modalités de calcul précises de l’intéressement n’étaient pas arrêtées de sorte que la rémunération variable ne pouvait pas être allouée en tout état de cause pour la première fois que sur la base des comptes arrêtés au 31 décembre 2018.

M.[I] demande la réformation du jugement uniquement sur le quantum de la rémunération variable restant due, à concurrence de la somme de 6 848,59 euros nets, outre les congés payés, en soutenant que la lettre du 23 décembre 2017 de son employeur consacrait les termes de leur accord contractuel, comportant un premier volet concernant le passé en ce que la commission forfaitaire de 200 euros brut était attribuée au salarié pour chaque lot enregistré durant l’année 2017 et un second volet pour l’avenir en ce que la salarié se voyait verser une avance sur commission sur la base d’un montant net de 200 euros par lot ; que s’agissant d’une avance, la régularisation devait s’opérer au terme de l’année civile 2018 et au plus tard le 31 mai 2019. Le salarié fait valoir qu’il n’a pas signé l’avenant soumis le 13 avril 2018 en ce que l’employeur avait modifié l’accord initial en imposant un coefficient de pondération de 0.5 pour 35 lots.

Le courrier transmis le 23 décembre 2017 au salarié par le conseil de la société FIMA est ainsi libellé :

‘ (…) Jusqu’à ce jour, vous avez bénéficié d’une prime exceptionnelle annuelle au montant aléatoire dès lors sans que ses conditions d’octroi n’aient été définies.

Vous vous êtes entendus avec [M] [X] pour qu’en sus de votre salaire de base fixe actuellement arrêté à la somme brute mensuelle de 6 736,43 euros , une partie variable vous soit allouée en application de critères précis et que votre rémunération soit globalement plus élevée.

De cette manière, vous pourrez apprécier le montant de la prime annuelle, qui serait susceptible de vous être servie et que traduirait votre travail en lieu et place d’une somme relevant de la seule décision discrétionnaire de votre employeur.

Précisément, l’activité de la société FIMA qui vous emploie se résulte à réaliser les études et à assurer la maîtrise d’oeuvre des opérations de lotissement ;

Vous avez élaboré un prévisionnel de cette activité en faisant ressortir les pourcentages de répartition de la marge selon que la réalisation de ces ouvrages s’effectue avec ou non le concours associé des structures FMT et Tremafinances que M.[X] contrôle aussi.(..)

Comme vous oeuvrez à la réussite de ces opérations, il importe de vous attribuer un pourcentage du résultat dégagé sur ces affaires initiées et gérées par la société FIMA qui vous emploie et ce pour le compte des structures visées ci-dessus. Ce pourcentage a été arrêté d’un commun accord à 5% brut de cette assiette.

Dans l’attente de la détermination de cet intéressement, il est convenu que vous perceviez une avance nette chaque mois égale à 200 euros par lot vendu, somme qui sera appréciée au 30 de cette périodicité retenue.

A l’issue de la tenue de l’Assemblée Générale approuvant les comptes clos, la part variable sera calculée sur la base des résultats enregistrés au 31 décembre de chaque année, déduction faite des avances allouées chaque mois et elle sera acquittée au titre de la paie arrêté ce mois concerné.

Au titre de l’exercice 2018, cette rémunération variable sera donc arrêtée au terme de l’année civile et le paiement interviendrait au plus tard le 31 mai 21019.

D’ores et déjà pour confirmer la volonté de M.[X] de rémunérer vos efforts ayant trait à cette année 2017, vous bénéficierez au titre de la paie de ce mois, de la somme brute de 47 400 euros correspondant à 200 euros bruts alloués pour chaque lotissement enregistré et qui sont au nombre de 237.

En outre, à compter du 1er janvier 2018, il a été convenu que votre salaire net mensuel sera porté non plus à la somme nette de 5 000 euros mais de 6 000 euros alloué sur 13 mois , soit la somme fixe annuelle nette de 78 000 euros.’

M.[I] a refusé de signer l’avenant qui lui a été soumis le 13 avril 2018 par l’employeur prévoyant de substituer à la prime annuelle exceptionnelle allouée en fin d’année le versement à effet au 1er janvier 2018, d’une prime variable nette mensuelle de 200 euros par lot enregistré par la société FIMA.

En l’absence de disposition contractuelle ou conventionnelle, la partie variable de la rémunération servie à M.[I] résulte d’un engagement unilatéral de son employeur sans qu’il soit possible au vu des éléments produits par les parties et sans que le salarié ne l’invoque lui-meme, de dégager les caractéristiques de généralité, de constance et de fixité d’un usage. Si la société FIMA admet avoir calculé la prime annuelle qualifiée d’exceptionnelle versée au titre de l’année 2017 à M.[I], à concurrence de 200 euros brut par lot commercialisé, elle n’a fourni aucune explication sur le mode de calcul de la Prime sur objectifs de 12 604.28 euros brut figurant sur le bulletin de salaire de janvier 2017.

Il résulte de ces éléments que le salarié qui ne peut pas se prévaloir d’un éventuel usage en l’absence de règles prédéfinies, constantes et objectives de détermination de la gratification, n’est pas fondé à remettre en cause le mode de calcul de la prime attribuée basée sur un montant unitaire de 200 euros brut. Il n’est pas contesté que M.[I] a perçu au mois de janvier 2018 la prime exceptionnelle annuelle de 47 400 euros brut correspondant aux 237 lots commercialisés au titre de l’année 2017.

Concernant l’année 2018, M.[I] ne peut pas revendiquer le paiement d’un rappel de prime sur la base d’un engagement contractuel sur la base d’une gratification de 200 euros net par lot vendu, alors qu’il a refusé de signer l’avenant transmis le 13 avril 2018 visant de manière expresse les modalités de calcul des composantes de sa rémunération appliquées à compter du 1er janvier 2018, se substituant à celles en vigueur jusqu’au 31 décembre 2017, à charge pour le salarié de retourner l’avenant signé (courrier d’accompagnement Pièce 7). Le fait que des avances sur commissions aient été versées au cours du premier trimestre 2018 sur la base de 200 euros net correspondant aux dispositions du projet d’avenant est indifférent et le salarié ne peut utilement s’en prévaloir faute d’avoir régularisé l’avenant.

C’est donc à tort que les premiers juges ont considéré que les modalités de calcul des primes de 200 euros net par lot résultaient de l’engagement contractuel pris par le mandataire de l’employeur dans le courrier du 23 décembre 2017, alors que l’octroi de cette gratification dépendait du pouvoir discrétionnaire de la société FIMA.

La demande de rappel de prime présenté par M.[I] n’est donc pas fondée et doit être rejetée par voie d’infirmation du jugement.

Sur le licenciement pour faute grave

La lettre de licenciement du 12 juin 2018 qui fixe les limites du litige, fait grief à M.[I] d’avoir sciemment violé l’obligation de loyauté liant la société FIMA aux autres structures du groupe dirigé par M.[X], se traduisant notamment lors d’une opération de vente d’un terrain à lotir faite au profit de la société AFB, dirigée par l’épouse de M.[I], alors que cette opération proposée à M.[I] en sa qualité de salarié de la société FIMA aurait dû être confiée à la société FMT, filiale du groupe Trécobat, et que le salarié a réalisé des documents ayant permis la vente du terrain litigieux avec les outils de la société FIMA pour le compte de la société AFB.

Sur le moyen tiré de l’annonce du licenciement avant la notification

M.[I] soutenant que ce moyen n’a pas été examiné par les premiers juges, soutient que la décision de le licencier a été annoncée par son employeur avant la notification de licenciement intervenue le 12 juin 2018, ce qui rend le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L’employeur soutient avoir respecté la procédure de licenciement en ce qu’il a organisé l’entretien préalable le 25 mai 2018 avant de notifier sa décision de licenciement le 12 juin 2018.

L’article L1232- 6 du code du travail dispose que lorsque l’employeur décide de licencier le salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception. Cette lettre comporte l’énoncé du ou des motifs invoqués par l’employeur.

Il appartient à celui qui se prétend licencié verbalement avant la notification écrite du licenciement d’en rapporter la preuve.

A l’appui , M.[I] verse aux débats :

– un échange de courriels des 28 et 29 mai 2018 entre Mme [S], salariée de la mairie de [Localité 10], et Me [O], notaire, faisant apparaître que ‘M.[I] aurait été licencié du groupe Fima-Trecobat il y a une dizaine de jours’.

– un constat d’huissier établi le 6 juin 2018 aux termes duquel il est répondu par le standard téléphonique de la société FIMA que ‘M.[I] n’est plus dans la société ‘ sans plus de précision sur sa situation.

Il est rappelé que M.[I] a fait l’objet d’une mesure de mise à pied à titre conservatoire dès le 16 mai 2018, qu’il s’est rendu le 25 mai 2018 à l’entretien préalable à licenciement avant la notification du 12 juin 2018 de son licenciement disciplinaire.

Les éléments produits par le salarié ne permettent pas de déterminer l’identité et le niveau d’information dont disposait l’interlocuteur ayant répondu le 6 juin 2018 à l’huissier de justice que ‘M.[I] n’était plus dans la société’ et celui ayant informé la salariée de la mairie d’un éventuel licenciement de M.[I]. Alors qu’un licenciement verbal suppose l’expression par l’employeur de sa décision irrévocable de rompre le contrat de travail avant la notification du licenciement, il ne se déduit pas de ces seuls éléments qu’un représentant de la société FIMA ayant le pouvoir de licencier ait manifesté sans équivoque sa décision irrévocable de rompre le contrat de travail antérieurement à la notification de la rupture au salarié.

En conséquence, le moyen soulevé par M.[I] tendant à voir constater que la décision de licenciement du salarié était annoncée avant la notification écrite n’est pas fondé et sera donc écarté.

Sur le moyen tiré de la prescription des faits fautifs

M.[I] soulève la prescription du fait fautif invoqué à son encontre en ce que le compromis de vente du terrain litigieux a été signé le 17 janvier 2018, que la préparation et la signature de cette vente au sein de l’étude notariale avec laquelle M.[X] indique être en relation étroite, ne pouvaient faire l’objet d’aucune dissimulation; que M.[X] confirme lui-même que le dossier était en libre accès sur le bureau de son salarié alors en congé; que l’employeur se prévaut tardivement de ce fait dès lors que le salarié refuse de signer l’avenant du 13 avril 2018 diminuant de manière drastique sa rémunération.

La société FIMA soutient que M.[X], son dirigeant, n’a découvert que le 24 avril 2018 les agissements reprochés à M.[I] pendant sa semaine de congés et que les faits reprochés ne sont pas prescrits.

L’article L 1332-4 du code du travail dispose qu’aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de 2 mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance. La charge de la preuve de ce qu’il n’a eu connaissance de faits antérieurs que dans le délai de deux mois précédant l’engagement des poursuites pèse sur l’employeur.

Pour soutenir que son dirigeant n’a découvert les faits que le 24 avril 2018, la société FIMA verse notamment aux débats:

– l’attestation de M. [X], président de la SAS FIMA, rapportant qu’en se rendant le 24 avril 2018 comme il le fait régulièrement au siège de la société, il a constaté sur le bureau de M.[I] , alors en congés, la présence d’un dossier d’une opération en cours à [Localité 7], alors qu’il avait lui-même initié ce projet à la demande de l’étude de Me [C] notaire à [Localité 7] en octobre 2017 et qu’il l’avait confié à M.[I]; qu’au vu de ce dossier dont il n’avait plus de nouvelle, il a appelé l’étude de Me [C] où il lui a été indiqué qu’un compromis avait été régularisé directement pour M.[I].

– l’attestation de Mme [T] secrétaire générale de la société Tremafinances, holding du groupe selon laquelle le 24 avril 2018, M.[X] l’a informée qu’il venait de découvrir qu’un compromis avait été signé en direct par M.[I] concernant l’opération Taron Gurun à [Localité 7]; qu’il lui a demandé si elle était au courant de ce dossier, ce à quoi, elle a répondu par la négative.

– l’attestation de M.[G], employé FIMA, chargé d’opérations immobilières, selon lequel il n’avait pas eu connaissance que la femme de M.[I] faisait des opérations de lotissements.

– l’échange de courriels du 14 mars 2018 ( pièce 23-1) de M.[I] avec le géomètre en charge du métrage du terrain selon lequel’ le maître d’ouvrage sera la Société FMT , holding de la Société FIMA’alors que le compromis de vente a été conclue depuis deux mois en dehors des projets immobiliers du groupe Tregobat.

Ces éléments sont suffisants pour établir que M.[X], dirigeant de la société FIMA, n’a eu connaissance que le 24 avril 2018 de la signature du compromis de vente du terrain intervenue plusieurs mois plus tôt -le 17 janvier 2018 – par M.[I] pour le compte de la société AFB, dont son épouse était l’unique associée. M.[I] qui avait été chargé par son employeur au mois d’octobre 2017 d’une mission de faisabilité d’un projet de lotissement sur le terrain situé à [Localité 7] ne justifie à aucun moment avoir l’avoir informé de l’acquisition ultérieure dudit terrain par la société dirigée par son épouse. Le fait qu’il ait averti deux de ses anciens collaborateurs, M.[Y], Responsable technique et Mme [H] assistante commerciale, de la création de la société AFB destinée à porter des opérations de lotissement ‘qui resteraient gérées par FIMA’, ne permet pas d’en déduire que le dirigeant de la société FIMA avait connaissance de la réalisation de l’opération litigieuse plus de deux mois avant l’engagement de la procédure disciplinaire du 16 mai 2018.

Il en résulte que la société FIMA n’a été informée de l’existence des faits reprochés à M.[I] que lors de sa visite du 24 avril 2018 dans les locaux de l’entreprise et qu’elle n’a pu prendre la mesure exacte des faits qu’après les avoir vérifiés auprès de l’étude notariale, de sorte que la procédure disciplinaire engagée le 16 mai 2018 l’a bien été dans le délai de deux mois prévu par l’article L 1332-4 du code du travail.

sur les motifs du licenciement

M.[I] conclut à l’infirmation du jugement qui a rejeté sa demande tendant à voir juger injustifié son licenciement pour faute grave, dans la mesure où :

– contacté par une étude notariale qui lui a signalé une opportunité d’opération de lotissement pour la société FIMA, il a traité cette information dans l’intérêt de la dite société et suivant l’objet social de celle-ci dans le cadre d’une opération de maîtrise d’oeuvre qui a donné lieu à une facturation.

– son activité de maîtrise d’oeuvre n’était pas restreinte et exclusivement destinées aux seules filiales du groupe TRECOBAT contrôlées par M.[X], malgré les affirmations de ce dernier dans le courrier de licenciement.

– il a parfaitement respecté le cadre de ses fonctions au sein de la société FIMA et n’a pas violé l’obligation de loyauté non-écrite envers la société FIMA.

– même si l’employeur a produit un prétendu courrier du 30 octobre 2017 entre M.[Z] de l’étude notariale et M.[M] [X] à propos de la présentation du terrain de [Localité 7], ce document anti-daté établi au printemps 2018 est sans intérêt sur le litige et ne fait que confirmer que la société FIMA est démunie pour justifier du véritable motif du licenciement de son salarié, à savoir le refus de ce dernier de signer l’avenant du 13 avril 2018.

La société FIMA soutient à l’inverse que M.[I] a été licencié pour avoir manqué à son obligation de loyauté en se rendant coupable d’activités concurrentielles, peu important que son contrat de travail ne comporte pas une clause d’exclusivité, et qu’il a effectué les pré-études de lotissement sans en informer son employeur, en ce que :

– alors qu’il a été chargé par M.[X] en octobre 2017 d’étudier la faisabilité du projet sur le terrain de [Localité 7], le salarié s’est gardé d’informer le dirigeant de la société FIMA de la signature du compromis de vente en janvier 2018 de ce terrain au profit de la société AFB, dont M.[I] était associé.

– M.[I] a usé de manoeuvre pour dissimuler son acte déloyal en indiquant au géomètre chargé du métrage que le maître d’ouvrage est la société FMT, filiale du groupe FMT, ce qui était faux,

– il a utilisé les outils mis à sa disposition au sein de la société FIMA pour mener à bien cette opération mais a supprimé les données informatiques avant son départ,

– il s’est gardé d’établir la facturation des actes réalisés pour le compte de la société FIMA au profit de la Société AFB.

– le salarié avait oeuvré de longue date afin de créer son propre bureau d’études, dès le mois de juillet 2017 avant de constituer la société AFB au nom de son épouse commune en biens, Mme [J].

– il a agi de manière fautive dans divers dossiers durant l’exécution de son contrat de travail, en provoquant à l’insu de son employeur qui l’a découvert ultérieurement, l’acquisition de terrains par des sociétés concurrentes de la société FIMA.

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. Il incombe à l’employeur d’en rapporter la preuve.

A titre liminaire, il convient de constater que seul le dossier du terrain de [Localité 7] est évoqué dans le courrier de licenciement. Les griefs articulés à l’encontre de M.[I] dans les conclusions de la société FIMA concernant lors des ventes d’autres terrains ( [Localité 13], [Localité 12], [Localité 9] [Localité 14]) au profit de sociétés concurrentes, sont situés hors des limites du litige et doivent donc être écartés.

La société FIMA verse aux débats :

– le contrat de travail du 1er octobre 2004, prévoyant une obligation de discrétion et de secret professionnel vis-à vis de toute personne étrangère à la Société, notamment sur les faits, documents, fichiers et tarifs internes à la Société et à ses clients, les méthodes et procédés techniques appliqués au sein de la société et ceux dont il aurait connaissance.

– l’extrait du registre de commerce de la société FIMA et ses statuts,

– l’organigramme des autres sociétés du groupe Tremafinances contrôlé par M.[X] et sa famille,

– les statuts de la société AFB immatriculée le 21 septembre 2017 par Mme [J], associéé unique et épouse commune en biens de M.[R] [I],

– le courriel transmis le 30 octobre 2017 par l’étude notariale sur la messagerie professionnelle de M.[I] ( [Courriel 5]) lui présentant un projet de terrain à lotir à [Localité 7].

– le compromis de vente du même terrain, signé le 17 janvier 2018 au profit de la société AFB représentée par M.[I] en qualité de mandataire de la dirigeante,

– les courriels échangés le 14 mars 2018 entre M.[I] et le cabinet de géomètre, aux termes desquels le salarié indique que le maître d’ouvrage concernant le terrain à lotir de [Localité 7] est la société FMT, filiale du groupe Tremafinances.

– l’attestation de Mme [T] Secrétaire Générale de la société FIMA précisant qu’aucune facture n’a été enregistrée pour une opération à [Localité 7], tant pour la société FIMA que pour la société FMT.

– l’attestation de l’expert-comptable de la société FIMA selon laquelle la société FIMA n’a fourni ses prestations qu’à des Sociétés dans lesquelles M.[X] avait des intérêts directs ou indirects.

– l’attestation de M.[K], Responsable informatique du groupe Tremafinances chargé de procéder à des investigations en juin 2018, selon lequel des données informatiques figurant sur les outils mis à disposition de M.[I] ( téléphone et ordinateur) et supprimées par ce dernier, ont pu être restaurées.

– des échanges de courriels et de sms de M.[I] via son téléphone portable et son ordinateur professionnel entre le 22 septembre 2017 et le 7 novembre 2017 avec sa banque personnelle la Caisse d’Epargne concernant le projet de création de la société AFB et sur la messagerie personnelle de son épouse Mme [J] ( [Courriel 11]) en y joignant un listing des opérations immobilières en cours de la société FIMA avec la société FMT.

Les explications fournies par M.[I] pour justifier la transmission du listing sur la messagerie personnelle de son épouse, qui serait commune au couple, et d’informations qu’il avait la possibilité de détenir en qualité d’actionnaire de la société FIMA, pour soutenir qu’il ne peut pas être tenu responsable après son licenciement de l’absence de facturation des prestations effectuées par la société FIMA au profit de la société AFB et pour rejeter toute notion de ‘détournement’ du terrain de [Localité 7] puisqu’il avait pris soin dans le compromis de vente du 17 janvier 2018 de faire inscrire une clause de substitution en vue précisément du retour de ce terrain à lotir au profit de la société FMT du groupe Tremafinances, ne sont pas crédibles et se heurtent aux éléments objectifs fournis par l’employeur démontrant que l’opération immobilière de [Localité 7] ne figurait pas dans les programmes fonciers prévus par la société FIMA et dans la société FMTdu groupe Tremafinances.

Il résulte des pièces produites que :

– l’objet social de la Société Aménagement Foncier Breton ( AFB), dirigées par Mme [J], épouse commune en biens de M.[I], correspond à des activités de promotion immobilière, de lotisseur, de maîtrise d’oeuvre, d’aménagement foncier, recouvrant celles de la société employeur FIMA de M.[I],

– le salarié a transmis le 13 octobre 2017 à son épouse ( pièce 35) une liste des opérations immobilières en cours avec la société FMT holding du groupe Tremafinances, comportant le nom de la commune, le nombre de lots, le CA prévisionnel, la marge prévisionnelle.

– l’appelant informé en sa qualité de salarié de la société FIMA par une étude notariale d’un projet et de la réalisation du permis d’aménager du terrain situé à [Localité 7], a signé deux mois plus tard le 17 janvier 2018 le compromis de vente du terrain en qualité de mandataire de son épouse dirigeante, pour le compte de la société AFB, exerçant une activité concurrente,

– le salarié a utilisé des moyens techniques du Bureau d’Etudes de la société FIMA pour élaborer notamment des documents destinés à la vente du terrain litigieux et à son aménagement, tels que le prévisionnel du projet de lotissement, l’esquisse de division et le plan cadastral.

– il a par ailleurs recouru aux services du cabinet de géomètre chargé du métrage du terrain, et en désignant comme le futur maître d’ouvrage la société FMT, société holding de Tremafinances alors que ce projet ne figurait pas dans les programmes fonciers de cette société.

– il n’a justifié d’aucune facturation des prestations réalisées par la société FIMA pour le compte de la société AFB.

Même si son contrat de travail ne comportait pas de clause d’exclusivité au profit des sociétés du groupe Tremafinances, le fait pour M.[I], salarié et cadre dirigeant de la société FIMA, de mettre à profit et d’utiliser les moyens obtenus dans le cadre de son travail pour concurrencer son employeur par le truchement d’une société dont son épouse commune en biens est la dirigeante de droit, constitue un manquement grave aux obligations générales de fidélité et de loyauté inhérentes au contrat de travail qu’il a conclu avec la société FIMA. Le fait que M.[I] soit devenu le 15 juillet 2020 l’associé majoritaire et le nouveau dirigeant de la société AFB, après le transfert des parts sociales de son épouse, ne fait que confirmer la forte implication de M.[I] au sein d’une société concurrente au stade de la création de la structure et dans sa gestion de fait, ainsi que le confirment les échanges avec sa banque lors de l’immatriculation de la société AFB et son intervention directe lors de la signature du compromis de vente du terrain de [Localité 7] le 17 janvier 2018. Le salarié admet lui-même qu’il avait pris soin lors de l’acquisition du terrain de faire inscrire certaines clauses dans le compromis, telle que celle de substitution de la société AFB, dans la perspective d’un transfert à la société FMT du groupe Tremafinances. ( page 47 conclusions appelant).

Ces éléments révélant la réalité et la gravité des manquements de M.[I] à son obligation de loyauté envers son employeur, de nature à rendre impossible son maintien dans l’entreprise, c’est à juste titre que les premiers juges ont débouté le salarié de ses demandes en paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d’indemnité de licenciement, d’indemnité compensatrice de préavis et de rappel de salaire durant la mise à pied conservatoire, le jugement étant confirmé de ces chefs.

Sur les dommages-intérêts pour licenciement abusif et vexatoire

M. [I] ne rapporte pas la preuve de circonstances de fait particulièrement abusives ou vexatoires dans lesquelles la relation de travail s’est exécutée ou a pris fin.Il sera en conséquence débouté de sa demande de dommages-intérêts, par voie de confirmation du jugement.

Sur les autres demandes et les dépens

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la société FIMAles frais non compris dans les dépens en cause d’appel. Le salarié devra verser à la société FIMA la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, le jugement déféré étant infirmé de ce chef.

M.[I] qui sera débouté de sa demande d’indemnité de procédure, sera condamné aux entiers dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

– Infirme le jugement entrepris en ses dispositions relatives au rappel de salaire variable, à la délivrance des documents sociaux rectifiés, à l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

– Confirme les autres dispositions du jugement.

Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :

– Déboute M.[I] de sa demande de rappel de salaire variable,

– Condamne M.[I] à payer à la SAS FIMA la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

– Rejette la demande de M.[I] fondée sur l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamne M.[I] aux dépens de première instance et d’appel.

Le Greffier Le Président

 


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