Your cart is currently empty!
N° RG 22/00054 – N° Portalis DBVM-V-B7G-LLD3
N° Minute :
Copies délivrées le
Copie exécutoire
délivrée le
à
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
C O U R D ‘ A P P E L D E G R E N O B L E
JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT
ORDONNANCE DE REFERE DU 06 JUILLET 2022
ENTRE :
DEMANDERESSE suivant assignation du 29 avril 2022
S.C.I. PHASELIS agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège
3 rue de la Barbe aux Cannes
51170 AUBILLY
représentée par Me Anne-Sophie SAJOUS de la SCP BREMANT GOJON GLESSINGER SAJOUS, avocat au barreau d’ANNECY
ET :
DEFENDEUR
Monsieur [L] [Y] [V] [X]
né le 06 octobre 1965 à BAR-SUR-AUBE (10200)
de nationalité française
7 Chemin de l’Ile Germaine
10120 SAINT ANDRE LES VERGERS
représenté par Me Anaïs BERGER, avocat au barreau de BOURGOIN-JALLIEU substituant Me Laurent MAGUET de la SCP MAGUET & ASSOCIES, avocat au barreau de BOURGOIN-JALLIEU
DEBATS : A l’audience publique du 08 juin 2022 tenue par Pascale VERNAY, première présidente, assistée de Marie-Ange BARTHALAY, greffier
ORDONNANCE : contradictoire
prononcée publiquement le 06 JUILLET 2022 par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile
signée par Pascale VERNAY, première présidente et par Marie-Ange BARTHALAY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le 19/07/2007, la société civile immobilière Phaselis, constituée entre les époux [P] et [E] [T] et leur fille [C] [T] épouse [R], a acquis un bien immobilier constitué de deux bâtiments à usage d’habitation avec terrain et piscine, situé à Chimilin (38) au prix de 295.000 euros, les familles [T] et [R] occupant chacune une maison.
Le 29/08/2017, elle a cédé son bien à M. [X], au prix de 343.560 euros dans le cadre d’une vente à réméré, le vendeur ayant une faculté de rachat durant 24 mois, période durant laquelle la société civile immobilière Phaselis doit acquitter une indemnité d’occupation mensuelle de 3.915 euros, la somme de 1.815 euros par mois étant restituée en cas d’exercice de l’option de rachat.
Le 29/05/2018, M. [P] [T], gérant de la société civile immobilière, est décédé.
Par acte du 01/03/2019, sa veuve, la société civile immobilière Phaselis, et Mme [T] [R] ont assigné en nullité de la vente en réméré devant le tribunal de grande instance de Bourgoin-Jallieu M. [X] ainsi que la société Real, marchand de biens, en paiement de dommages-intérêts et de remboursement des honoraires de transaction.
La société civile immobilière Phaselis et les consorts [T] ont déposé plainte devant le procureur de la République de Bourgoin-Jallieu le 24/09/2018, les consorts [T] faisant valoir que leur signature avait été légalisée à la mairie d’Aoste, alors qu’eux-mêmes n’étaient pas présents, ce qui avait permis au notaire de passer la vente.
Dans une première ordonnance, du 06/08/2019, le juge de la mise en état a ordonné le sursis à statuer dans l’attente de l’issue de cette procédure pénale.
Le 23/08/2019, cette plainte a fait l’objet d’un classement sans suite.
Le 31/10/2019, les consorts [T] ont déposé plainte avec constitution de partie civile devant le doyen des juges d’instruction du tribunal de grande instance de Grenoble, une ordonnance de consignation de la somme de 1.500 euros étant rendue le 09/01/2020.
Par une deuxième ordonnance du 16/07/2020, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Bourgoin-Jallieu a ordonné un nouveau sursis à statuer dans l’attente de l’issue de l’instruction, et a débouté la société civile immobilière Phaselis et les consorts [T] de leur demande de suspension du versement de l’indemnité d’occupation, le sursis étant révoqué en cas de défaut de paiement de deux échéances courantes.
Saisi par M. [X] le 10/09/2020 d’une demande de liquidation judiciaire de la société civile immobilière Phaselis, le tribunal judiciaire de Reims a rejeté cette demande par jugement du 11/05/2021.
Le 28/06/2021, la société civile immobilière Phaselis a assigné devant le tribunal judiciaire de Bourgoin-Jallieu la société Real, M. [K], la SCP notariale Chabot Sicard [L] Bulteau Brosset et M. [X] en paiement de diverses sommes et en nullité de la vente.
Par arrêt du 04/01/2022, la cour d’appel de Reims a condamné la société civile immobilière Phaselis et les consorts [T] à payer au Crédit Logement les sommes de 128.168,15 euros et 136.077,16 euros outre intérêts, le paiement de ces sommes étant reporté à 24 mois.
Par jugement du 29/06/2021, le tribunal judiciaire de Bourgoin-Jallieu a accordé aux consorts [T] un délai supplémentaire de 18 mois pour prendre parti à la succession de M. [P] [T].
Par une troisième ordonnance du 18/01/2022, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Bourgoin-Jallieu a :
– rejeté la demande de révocation du sursis prononcé et dit qu’il sera sursis à statuer au fond dans l’attente de l’issue de l’instruction actuellement en cours au cabinet d’un juge d’instruction du tribunal judiciaire de Grenoble ;
– dit que l’affaire sera rappelée à la mise en état à l’initiative de la partie la plus diligente et en tout état de cause à la première mise en état utile suivant la date anniversaire de la présente décision ;
– condamné la société civile immobilière Phaselis à payer à M. [X] la somme de 20.000 euros à titre de provision à valoir sur les sommes qui seront définitivement dues au titre de l’arriéré d’indemnité d’occupation ;
– dit qu’à défaut de paiement d’une échéance courante, à compter de juillet 2021 et jusqu’à l’issue de la présente procédure, le sursis sera révoqué et l’affaire poursuivra son cours ;
– dit n’y avoir lieu à condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration du 21/03/2022, la société civile immobilière Phaselis a interjeté appel partiel de cette décision au titre du paiement de la somme provisionnelle de 20.000 euros et de la sanction de déchéance du terme.
Par acte du 29/04/2022, elle a assigné en référé devant la première présidente de la cour d’appel de Grenoble M. [X], demandant dans ses conclusions n° 1 de :
– la déclarer recevable en ses demandes ;
– juger que le juge de la mise en état a statué ultra petita et violé les dispositions de l’article 12 du code de procédure civile au sens de l’article 524 ancien du code de procédure civile ;
– juger que l’exécution provisoire de la décision déférée emporterait des conséquences manifestement excessives ;
– prononcer l’arrêt de l’exécution de la décision attaquée ;
– débouter M. [X] de ses demandes ;
– le condamner au paiement de la somme de 1.500 euros au titre des frais visés à l’article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir en substance que :
– dans ses conclusions n° 3 devant le juge de la mise en état, M. [X] a sollicité la condamnation des consorts [T] ‘au paiement de l’indemnité d’occupation due à M. [X] d’un montant équivalent à celui dû en vertu du contrat ‘ ;
– le juge de la mise en état a fixé de lui-même un montant de 20.000 euros ;
– or, les sommes dues ont été réglées et celles qui le seraient par l’effet du contrat ont été suspendues par l’ordonnance du 06/08/2019 qui a sursis à l’exécution du contrat de vente ;
– il y a donc violation manifeste de l’article 12 du code de procédure civile ;
– la société civile immobilière Phaselis n’a actuellement aucun patrimoine ni revenus et elle ne peut régler la somme de 20.000 euros ;
– cette demande n’est pas dilatoire, le juge d’instruction saisi ayant adressé à son homologue de la Roche-sur-Yon une commission rogatoire aux fins de comparaison d’écritures.
Pour s’opposer à la demande et réclamer reconventionnellement 5.000 euros au titre des frais visés à l’article 700 du code de procédure civile, M. [X] réplique que :
– l’indemnité d’occupation reste due tant que le bien sera occupé par les consorts [T] ;
– ceux-ci ne sont pas à jour de leurs versements, le dernier règlement étant de mars 2021 ;
– la condamnation au paiement d’une provision est ainsi fondée et aucune violation du principe du contradictoire n’a pu en résulter ;
– le risque de conséquences manifestement excessives n’est pas démontré, la société civile immobilière Phaselis étant in bonis et n’ayant fourni aucun justificatif sur sa situation.
MOTIFS DE LA DECISION :
La procédure au fond pendante devant le tribunal judiciaire de Bourgoin-Jallieu a été engagée avant le 01/01/2020. Dès lors, ce sont les dispositions des articles 514 et 524 anciens du code de procédure civile qui sont applicables.
Une ordonnance du juge de la mise en état accordant une provision étant exécutoire de droit, son exécution ne pouvait être suspendue qu’à la double condition, d’une part d’une violation manifeste du principe du contradictoire ou de l’article 12 et d’autre part, si l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.
Sur la violation du contradictoire ou de l’article 12 du code de procédure civile :
Selon l’article 4 du même code, l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties, le juge ne pouvant se prononcer que sur la demande, faute de quoi, le principe du contradictoire serait violé.
S’il est de principe qu’une demande en justice non chiffrée n’est pas de ce seul fait irrecevable, encore faut-il que les conclusions contiennent les éléments de nature à permettre au juge d’évaluer le montant de la somme due.
En l’espèce, M. [X] a demandé au juge de la mise en état dans ses conclusions du 28/06/2021 de ‘condamner par provision solidairement Mme veuve [T] et Mme [T] épouse [R], associées de la société civile immobilière Phaselis, au paiement de l’indemnité d’occupation qui lui est due d’un montant équivalent à celui dû en vertu du contrat’.
Or le juge de la mise en état a d’une part, condamné la société civile immobilière Phaselis et non les consorts [T] comme demandé, et d’autre part, fixé la provision en se fondant sur l’ordonnance initiale du 06/08/2019, qui avait fixé le montant de l’indemnité d’occupation à 2.100 euros, sans que M. [X] ait produit un décompte à ce sujet.
Dès lors, le juge de la mise en état a statué ultra petita, en condamnant une autre partie, à savoir la société civile immobilière elle-même, au lieu de ses associées seules visées dans les conclusions d’incident du 19/ 11 le tout, sans que M. [X] ait chiffré sa demande ou donné des éléments précis à ce titre.
En statuant ainsi, sans avoir invité au préalable M. [X] à chiffrer sa demande et en condamnant les associées de la société civile immobilière en lieu et place de cette dernière, le juge de la mise en état a violé le principe du contraditoire.
La première condition fixée par l’article 524 est ainsi remplie.
Sur le risque de conséquences manifestement excessives :
Il résulte du dossier que la société civile immobilière Phaselis n’avait comme patrimoine que le bien immobilier litigieux ayant fait l’objet de la vente à réméré, qu’elle n’a pas de revenus, et que ses associées ont été condamnées à rembourser au Crédit Logement des crédits dont elles s’étaient portées cautions.
Dès lors, une condamnation de la société civile immobilière Phaselis risquerait d’entraîner l’ouverture d’une procédure collective à son égard, ce qui est constitutif de conséquences manifestement excessives. Il en va de même pour ses associées qui se sont vu accorder deux ans de délai pour apurer la dette contractée auprès du Crédit Logement.
En conséquence, il y a lieu d’ordonner l’arrêt de l’exécution provisoire de l’ordonnance déférée concernant le paiement de la provision de 20.000 euros.
Enfin, à ce stade de la procédure, il n’y a pas lieu d’appliquer l’article 700 du code de procédure civile.
L’arrêt de l’exécution provisoire étant ordonné au seul bénéfice de la société civile immobilière Phaselis, les dépens seront laissés à sa charge.
PAR CES MOTIFS :
Nous, Pascale VERNAY, première présidente de la cour d’appel de Grenoble, statuant en référé, publiquement, par ordonnance contradictoire, mise à disposition au greffe :
Ordonnons l’arrêt de l’exécution provisoire de l’ordonnance déférée concernant le paiement de la provision de 20.000 euros ;
Disons n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamnons la société civile immobilière Phaselis aux dépens.
Le greffier,La première présidente,
M.A. BARTHALAYP. VERNAY