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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 22/00079 – N°Portalis DBVH-V-B7G-IJUR
ID
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D’ALES
09 décembre 2021 RG:20/00444
[V]
[H]
C/
S.A.S. FONCIER COTE SUD
S.C.I. MAZALEX
Grosse délivrée
le 19/10/2023
à Me Jean paul CHABANNES
à Me Emmanuelle VAJOU
COUR D’APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
1ère chambre
ARRÊT DU 19 OCTOBRE 2023
Décision déférée à la cour : jugement du tribunal judiciaire d’ALES hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP en date du 09 décembre 2021, N°20/00444
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Isabelle DEFARGE, présidente de chambre, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Marie-Pierre FOURNIER, présidente de chambre
Mme Isabelle DEFARGE, présidente de chambre
Mme Séverine LEGER, conseillère
GREFFIER :
Mme Audrey BACHIMONT, greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l’audience publique du 14 septembre 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 19 octobre 2023.
Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.
APPELANTS :
M. [Y] [V]
né le 23 mai 1947 à [Localité 9]
[Adresse 6]
[Localité 4]
Représenté par Me Jean-Paul CHABANNES de la SELARL CHABANNES-RECHE-BANULS, postulant, avocat au barreau de NIMES et par Me Philippe SENMARTIN de la SELARL CSA, plaidant, avocat au barreau de MONTPELLIER
Mme [B] [H] épouse [V]
née le 26 janvier 1959 à [Localité 9]
[Adresse 6]
[Localité 4]
Représentée par Me Jean-Paul CHABANNES de la SELARL CHABANNES-RECHE-BANULS, postulant, avocat au barreau de NIMES et par Me Philippe SENMARTIN de la SELARL CSA, plaidant, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMÉES :
La SAS FONCIER COTÉ SUD, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, postulant, avocat au barreau de NIMES et par Me Alain DE BELENET de la SELARL LEXCASE SOCIETE D’AVOCATS, plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE
La SCI MAZALEX, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, postulant, avocat au barreau de NIMES et par Me Alain DE BELENET de la SELARL LEXCASE SOCIETE D’AVOCATS, plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Marie-Pierre FOURNIER, présidente de chambre, le 19 octobre 2023, par mise à disposition au greffe de la cour
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Le 29 avril 2005 la SARL FONCIER CÔTÉ SUD a consenti à M.et Mme [V] une promesse de vente portant sur une maison d’habitation [Adresse 6] à [Localité 4] élevée d’un étage avec terrain attenant de 250m² clos au prix de 120 000€uros.
Le 25 octobre 2005 la SARL FONCIER CÔTÉ SUD a déposé un permis de construire valant division sur la parcelle cadastrée section BE n°[Cadastre 3] à [Localité 4] aux fins de réalisation de deux logements ‘reliés au bâtiment déjà existant par deux abris couverts.’
Par acte authentique du 9 décembre 2005 M. [Y] [V] et Mme [B] [H] épouse [V] ont acquis auprès de la SARL FONCIER CÔTÉ SUD une maison d’habitation avec terrain attenant ‘le tout d’une superficie de 281m² à détacher d’un plus grand corps ce dernier figurant au cadastre section BE n° [Cadastre 3] [Adresse 6] d’une contenance de 6ares 30 centiares’, au prix de 120 000€uros.
Le 16 décembre 2005 cet acte a été complété au vu d’un document d’arpentage daté du 17 novembre 2005 visé par le service du cadastre le 13 décembre 2005, en ce qui concerne la désignation de l’immeuble objet de la vente figurant désormais au cadastre :
– section BE n° [Cadastre 7] pour une contenance cadastrale de 2ares 81 centiares faisant l’objet de la vente du 9 décembre 2005,
– section BE n° [Cadastre 8] pour une contenance cadastrale de 3 ares 49 centiares restant la propriété de la SARL FONCIER CÔTÉ SUD.
Par acte notarié du 7 novembre 2008 la SARL FONCIER CÔTÉ SUD a transféré la propriété de la parcelle cadastrée BE n°[Cadastre 8] à la SCI MAZALEX.
Le 3 juillet 2017 M.et Mme [V] ont mis en demeure cette dernière de faire cesser les troubles de voisinage olfactifs et sonores causés par ses locataires M.et Mme [E] puis les 26 février et 6 avril 2018 ils ont assigné la SCI MAZALEX, la SARL FONCIER CÔTÉ SUD et M.et Mme [E] devant le juge des référés du tribunal de grande instance d’Alès qui a ordonné une mesure d’expertise pour déterminer les éventuels troubles du voisinage subis.
L’expert a déposé son rapport le 7 janvier 2019.
Le 12 juillet 2019 M.et Mme [V] ont saisi le tribunal de grande instance d’Alès qui par jugement du 9 décembre 2021 :
– a dit irrecevable au titre de la prescription leur action à l’encontre de la SARL FONCIER CÔTÉ SUD tant au titre de la résiliation de la vente du 5 décembre 2009 qu’au titre de la nullité de cette vente et au titre de la perte de valeur de leur bien immobilier,
– a en conséquence rejeté leurs demandes en restitution du prix de cette vente et d’expertise judiciaire,
– a dit irrecevable pour défaut de qualité à agir leur action à l’encontre de la SCI MAZALEX au titre de l’enlèvement du mobilier de ses locataires,
– les a déboutés de leur demande en réparation au titre du préjudice moral et du préjudice de jouissance,
– les a condamnés au paiement des entiers dépens,
– les a condamnés solidairement à payer à la SCI MAZALEX et à la SARL FONCIER CÔTÉ SUD chacune la somme de 2 000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– a dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.
M.et Mme [V] ont interjeté appel de ce jugement par déclaration du 6 janvier 2022.
La proposition de médiation, acceptée par les appelants, a été conditionnée par les intimées à l’appel en cause de M.et Mme [E] et n’a pu aboutir.
La clôture de la procédure a été prononcée le 17 mars 2023 à effet au 31 août 2023 et l’affaire renvoyée pour être plaidée à l’audience du 14 septembre 2023.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET DES MOYENS
Au terme de leurs conclusions notifiées le 29 septembre 2022 par RPVA M.et Mme [V] demandent à la cour
A titre principal,
Vu les articles 544, 651, 1103, 1224, 1626 et suivants du code civil ;
Vu la théorie des troubles anormaux du voisinage et la jurisprudence y afférente,
– d’infirmer la décision du 9 décembre 2021 en ce qu’elle a :
– dit irrecevables, au titre de la prescription, leurs actions à l’encontre de la SARL FONCIER CÔTÉ SUD au titre de la résiliation et au titre de la nullité de la vente du 5 décembre 2009,
– rejeté en conséquence la demande en restitution du prix de cette vente,
– dit irrecevable, au titre de la prescription, leur action à l’encontre de la SARL FONCIER CÔTÉ SUD au titre de la perte de valeur de leur bien immobilier,
– les a déboutés de leur demande d’expertise judiciaire à ce titre,
– dit irrecevable pour défaut de qualité à agir leur action à l’encontre de la SCI MAZALEX au titre de l’enlèvement du mobilier de ses locataires,
– les a déboutés de leur demande en réparation au titre du préjudice moral et du préjudice de jouissance,
– les a condamnés solidairement au paiement des dépens, à payer la somme de 2 000 euros à la SCI MAZALEX et la somme de 2 000 euros à la SARL FONCIER CÔTÉ SUD au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Ce faisant, rejetant toutes conclusions contraires,
Vu les mains courantes d’avril 2017 et juillet 2017
– de juger qu’ils n’ont eu connaissance des irrégularités de construction et du PV de bornage de délimitation qu’à compter de cette date, que ce faisant le délai de prescription a couru à compter de cette date,
– de déclarer leur action recevable
Ce faisant,
– de prononcer la résiliation de la vente immobilière intervenue le 9 décembre 2005 et sa nullité du chef de dol ;
– de condamner la SARL FONCIER CÔTÉ SUD à leur verser la somme de 120 000 € au titre de la restitution du prix de vente ;
– de condamner la SCI MAZALEX à leur verser les sommes suivantes :
‘ 50 000,00 € au titre du préjudice de jouissance subi du fait des troubles anormaux de voisinage causés par ses locataires ;
– 30 000,00 € au titre du préjudice moral subi du fait des troubles anormaux de voisinage causés par ses locataires ;
Si la cour ne retenait pas la résiliation de la vente immobilière et sa
nullité du chef de dol il y aurait lieu :
– de juger :
– que les éléments manifestement faux qui leur ont été cachés et fournis en 2017 et dans tous les cas postérieurement à l’achat sont tels qu’ils auraient été de nature à les amener à ne pas contracter s’ils en avaient eu connaissance,
– que la prescription de cinq ans est inapplicable à une telle action en responsabilité consécutive à un dol,
– qu’il s’agit d’une perte de chance de ne pas contracter que l’on peut fixer à 90 % et dans ces conditions,
– de condamner la société FONCIER CÔTÉ SUD au paiement de la somme de 108 000,00€uros à ce titre,
A titre subsidiaire
Vu la théorie des troubles anormaux de voisinage ; Vu les articles 651 et 1240 du code civil;
– de condamner solidairement la SARL FONCIER CÔTÉ SUD et la SCI MAZALEX à leur verser la somme de 80 000,00 € au titre de la perte de valeur de leur bien immobilier ;
– de condamner la SCI MAZALEX à procéder au retrait de la cuisine installée par M.et Mme [E] sur la terrasse jouxtant leur propriété sous astreinte de 150 euros par jour de retard dans le délai d’un mois suivant le prononcé de la décision ;
A titre infiniment subsidiaire
– d’ordonner une expertise judiciaire et désigner à cet effet tel expert qu’il conviendra avec comme mission notamment :
‘ de déterminer la valeur du bien immobilier au regard des troubles causés notamment du fait de la perte de jouissance du premier étage de l’immeuble leur appartenant ainsi que de la perte d’ensoleillement et de la proximité de la construction appartenant à la SCI MAZALEX,
Dans tous les cas,
– de condamner solidairement, en cause d’appel, la SARL FONCIER CÔTÉ SUD et la SCI MAZALEX à leur verser la somme de 4.000,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– de condamner solidairement la SARL FONCIER CÔTÉ SUD et la SCI MAZALEX aux entiers dépens lesquels comprendront les frais d’expertise et le coût de l’assistance à expertise;
Au terme de leurs conclusions signifiées le 1er août 2023 par le RPVA la SAS FONCIER CÔTÉ SUD et la SCI MAZALEX demandent à la cour :
In limine litis :
– de constater que la demande des époux [V] tendant à voir la société FONCIER CÔTÉ SUD condamnée à leur verser une somme de 108 000 € au titre d’une prétendue « perte de chance de ne pas contracter » fondée sur le dol est une prétention nouvelle qui n’a pas été formulée dans les premières écritures des appelants ;
– de constater que cette demande ne peut pas être regardée comme une prétention destinée à répliquer aux conclusions de FONCIER CÔTÉ SUD ou à faire juger une question née de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait ;
– de déclarer cette demande irrecevable ;
En conséquence :
– de rejeter comme irrecevable la demande des époux [V] tendant à voir la FONCIER CÔTÉ SUD condamnée à leur verser une somme de 108 000 € au titre d’une prétendue « perte de chance de ne pas contracter » fondée sur le dol.
À titre principal :
– de constater
– que l’action engagée par les époux [V] à l’encontre de FONCIER CÔTÉ SUD se fonde exclusivement sur de prétendus préjudices résultant de la proximité entre leur parcelle BE n°[Cadastre 7] et le projet immobilier réalisé sur la parcelle cadastrée BE n°[Cadastre 8] ;
– que les époux [V] ont été informés dès la réitération de la vente en 2009 que FONCIER CÔTÉ SUD n’avait acquis définitivement la parcelle BE n°[Cadastre 7] qu’après avoir conclu avec eux le compromis de vente portant sur cette dernière ;
– que le fait que FONCIER CÔTÉ SUD n’ait acquis définitivement la parcelle BE n°[Cadastre 7] qu’après avoir conclu un compromis de vente portant sur cette dernière avec les époux [V] n’a pu leur causer aucun préjudice ;
– de juger que la date (à laquelle) les époux [V] ont été informés de cette situation ne peut pas constituer le point de départ de la prescription applicable à leur action ;
– de constater
– que la version du document d’arpentage numérotée par les services du cadastre annexé à l’avenant du 16 décembre 2005 a été signé par Mme [F] [I], conformément à la procuration qui lui avait été donnée par les époux [V] dans le cadre de l’acte de vente signé le 9 décembre 2005 ;
– qu’une première version du document d’arpentage, antérieure à la numération par le service du cadastre, a été signée par les époux [V] et annexée à l’acte de vente du 9 décembre 2005.
– que la limite de propriété entre les parcelles BE n°[Cadastre 8] et BE n°[Cadastre 7] est matérialisée par un mur ;
– que la construction édifiée sur la parcelle cadastrée BE n°[Cadastre 8] est achevée au moins depuis le 1er décembre 2009 ;
– que les époux [V], qui résident à titre permanent sur la parcelle voisine cadastrée section BE n°[Cadastre 7] ont nécessairement été informés de l’achèvement de cette construction dès le 1er décembre 2009 ;
– qu’à la date où ils ont introduit leur action, les époux [V] avaient nécessairement connaissance depuis beaucoup plus de 5 ans de la limite entre leur parcelle BE n°[Cadastre 7] et la parcelle BE n°[Cadastre 8], ainsi que du projet réalisé sur cette dernière ;
– que les époux [V] n’ont engagé aucune action à l’encontre de la société FONCIER CÔTÉ SUD dans le délai de 5 ans suivant l’achèvement de la construction édifiée sur la parcelle BE n°[Cadastre 8];
– de juger que les actions en lien avec les limites de propriété entre les parcelles BE n°[Cadastre 7] et BE n°[Cadastre 8] et/ou avec l’existence ou l’irrégularité de la construction réalisée sur la parcelle BE n°[Cadastre 8] et fondées sur la garantie d’éviction, le dol, ou la responsabilité délictuelle étaient prescrites lorsque les époux [V] ont assigné la société FONCIER CÔTÉ SUD devant le tribunal de céans ;
– de constater en outre que les époux [V] ne justifient pas de la publication de leur assignation auprès du service chargé de la publicité foncière de la situation des immeubles ;
En conséquence :
– de confirmer le jugement tribunal judiciaire d’Alès n°21/00234 en date du 9 décembre 2021 en tant qu’il rejette comme irrecevables l’ensemble des conclusions présentées par les époux [V] à l’encontre de la société FONCIER CÔTÉ SUD et les condamne à payer à cette société une somme de 2 000€uors au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
À titre subsidiaire :
– de constater
– que les époux [V] ne font état d’aucune situation antérieure à la vente de nature à révéler un défaut dans le droit de propriété de la société FONCIER CÔTÉ SUD sur le bien vendu ;
– que le trouble allégué par les époux [V] pour justifier leur action est un trouble de fait apparu postérieurement à la vente, résultant de l’occupation de la parcelle voisine par les locataires de la société MAZALEX, et ne portant pas atteinte à leur droit de propriété sur le bien vendu ;
– que les époux [V] ne rapportent pas la preuve qu’ils ne pourraient pas posséder paisiblement l’étage de leur maison d’habitation sise sur la parcelle cadastrée BE n°[Cadastre 7] du fait de la proximité de la construction édifiée sur la parcelle BE n°[Cadastre 8] ;
– de dire et juger en conséquence que les époux [V] ne justifient pas d’une éviction de nature à permettre la résiliation de la vente conclue avec la société FONCIER CÔTÉ SUD le 9 décembre 2005
– de rejeter en conséquence comme infondée la demande tendant à la résiliation de la vente conclue le 9 décembre 2005 avec la société FONCIER CÔTÉ SUD ;
– de constater
– que les époux [V] se sont définitivement engagés auprès de la société FONCIER CÔTÉ SUD à acquérir la maison d’habitation désormais sise sur la parcelle BE n°[Cadastre 7] dans le cadre d’un avant-contrat signé le 29 août 2005 ;
– qu’ils n’ont pas fait jouer leur droit de rétractation dans le délai de 7 jours suivant la signature de cet avant-contrat ;
– qu’à la date (à laquelle) ils se sont définitivement engagés auprès de la société FONCIER CÔTÉ SUD, cette dernière n’avait ni déposé ni obtenu de permis de construire sur la parcelle cadastrée BE n°[Cadastre 8] ;
– que les époux [V] ne justifient absolument pas que la société FONCIER CÔTÉ SUD leur aurait intentionnellement dissimulé l’existence d’un projet immobilier sur la parcelle BE n°[Cadastre 8] en vue d’obtenir leur consentement dans le cadre de la vente régularisée le 9 décembre 2005 ;
– que la construction réalisée sur la parcelle BE n°[Cadastre 8] est achevée depuis au moins le 1er décembre 2009 et que les époux [V] ne se sont plaints de l’existence et de la proximité de cette construction pour la première fois que le 3 juillet 2017, soit plus de 7 ans après sa réalisation ;
– que les époux [V] ont été informés lors de la réitération de la vente que FONCIER CÔTÉ SUD n’avait acquis définitivement la parcelle BE n°[Cadastre 7] qu’après avoir conclu avec eux le compromis de vente portant sur cette dernière et n’apportent pas la preuve d’une quelconque dissimulation volontaire de Foncier Côté Sud sur cette question. ;
– que cette situation n’a pu leur causer aucun préjudice ;
– de rejeter en conséquence comme infondée la demande d’annulation de la vente conclue le 9 décembre 2005 fondée sur l’existence de prétendus dols commis par la société FONCIER CÔTÉ SUD
– de constater que les époux [V] ne justifient pas de la réalité d’un préjudice en lien avec les non-conformités de la construction édifiée sur la parcelle cadastrée BE n°[Cadastre 8] relevées dans le cadre du rapport d’expertise ;
– de rejeter en conséquence comme infondées les conclusions tendant à voir condamner la société FONCIER CÔTÉ SUD à leur verser une somme de 80 000 € en réparation du préjudice tiré de la perte de la valeur vénale de leur habitation.
– de constater que les époux [V] ne démontrent pas qu’ils auraient refusé de conclure la vente s’ils avaient eu connaissance du projet immobilier porté par FONCIER CÔTÉ SUD sur la parcelle cadastrée BE n°[Cadastre 8] ou du fait que FONCIER CÔTÉ SUD n’était pas encore propriétaire du bien vendu aux époux [V] lors de la conclusion de l’avant contrat de vente signé avec ces derniers le 29 août 2005 ;
– de juger en conséquence que les époux [V] n’ont pas perdu une chance de ne pas conclure la vente ;
– de constater que le montant de l’indemnisation du préjudice demandé par les époux [V] au titre d’une perte de chance de ne pas conclure la vente n’est pas justifié, alors qu’il correspond à 90% du prix de vente payé par les époux [V] à la société FONCIER CÔTÉ SUD ;
– de rejeter en conséquence comme infondées les conclusions tendant à voir condamner la société FONCIER CÔTÉ SUD à leur verser une somme de 108 000€uros en réparation d’un préjudice tiré d’une perte de chance de ne pas conclure la vente.
En tout état de cause :
– de débouter M.[Y] [V] et Mme [B] [H] de toutes leurs demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires.
– de confirmer le jugement de première instance en tant qu’il condamne les époux [V] à payer à la société FONCIER CÔTÉ SUD une somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
– de condamner in solidum M. [Y] [V] et Mme [B] [H] épouse [V] à verser à la société FONCIER CÔTÉ SUD la somme de 6 000€uros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens au titre de l’article 696 du code de procédure civile.
La clôture des débats a été prononcée le 17 mars 2023 à effet au 31 août 2023 et l’affaire renvoyée pour être plaidée à l’audience du 14 septembre 2023.
En application de l’article 455 du code de procédure civile il est expressément référé aux dernières écritures des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
*action en nullité et/en résiliation de la vente pour dol
Selon l’article 1116 du code civil en vigueur jusqu’au 6 août 2014 ici applicable en raison de la date de conclusions de la vente litigieuse, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man’uvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces man’uvres, l’autre partie n’aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé.
Selon les articles 1626 et 1628 du même code, quoique lors de la vente il n’ait été fait aucune stipulation sur la garantie, le vendeur est obligé de droit à garantir l’acquéreur de l’éviction qu’il souffre dans la totalité ou partie de l’objet vendu, ou des charges prétendues sur cet objet, et non déclarées lors de la vente. Quoiqu’il soit dit que le vendeur ne sera soumis à aucune garantie, il demeure cependant tenu de celle qui résulte d’un fait qui lui est personnel : toute convention contraire est nulle.
Selon l’article 2224 du même code en vigueur depuis le 19 juin 2008 tel que modifié par la loi n°2008-561 du 17 juin 2008 – art. 1, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
Pour voir dire que leur action en nullité pour dol n’est pas prescrite, les appelants soutiennent qu’ils n’ont eu connaissance du procès-verbal de division et de bornage de la parcelle objet de la vente du 9 décembre 2005 qu’en 2017 à l’occasion des plaintes qu’ils ont déposées pour troubles du voisinage. Ils arguent d’ailleurs ce procès-verbal, daté du 17 novembre 2005, de faux, comme n’ayant pas été signé par M.[V] contrairement à la mention qui y figure à cet égard.
L’acte authentique du 9 décembre 2005 désigne le bien immobilier objet de la vente comme ‘une maison d’habitation élevée d’un étage sur rez-de-chaussée (…) avec terrain attenant, le tout d’une superficie de 281m² à détacher d’un plus grand corps (en gras dans le texte), ce dernier figurant au cadastre de la manière suivante : section BE n°[Cadastre 3] [Adresse 6] d’une contenance de 6Ares30centiares.’
Au paragraphe suivant ‘Document d’arpentage’ il est indiqué
‘Les parties déclarent que le présent acte a du être établi d’urgence avant l’obtention du document d’arpentage numéroté, actuellement en cours d’établissement, par les soins du cabinet GEO TECH, géomètre-expert à [Localité 10], sur la base duquel il aurait dû être procédé pour la désignation de la parcelle vendue.
Les omissions relatives à cette désignation seront réparées, préalablement à la réquisition de la formalité conformément au §4 de l’article 34 du décret n°55-22 du 4 janvier 1955 modifié par le décret n° 59-89 du 7 janvier 1959.
Les parties consentent à cet effet mandat à Mme [F] [I], clerc aux formalités, demeurant à [Localité 4] (Gard) [Adresse 1], à l’effet de faire dresser par le notaire soussigné ou ses successeurs tous ac(t)es complémentaires des présentes en vue de leur publication au bureau des hypothèques d'[Localité 4]. Le mandat ainsi conféré réciproquement est irrévocable et cette irrévocabilité est d’ailleurs expressément stipulée par les parties soussignées.’.
A cet acte authentique a été annexé le 16 décembre 2005 un acte complémentaire aux termes duquel ‘la parcelle située à [Localité 4] (Gard) lieudit [Adresse 6] cadastrée à la section BE sous le numéro [Cadastre 3] pour une contenance cadastrale de 6 ares 30 centiares est divisée en deux nouvelles parcelles situées même commune et lieudit, cadastrées savoir – section BE numéro [Cadastre 7] pour une contenance cadastrale de 2 ares 81 centiares faisant l’objet de l’acte de vente du 9 décembre 2005
– section BE numéro [Cadastre 8] pour une contenance cadastrale de 3 ares 49 centiares restant la propriété de la SARL FONCIER CÔTÉ SUD
ainsi qu’il résulte d’un document d’arpentage établi par le cabinet GEO TECH géomètre expert à [Localité 10] le 17 novembre 2005, sous le numéro 6063V visé par le service du cadastre d'[Localité 4] le 13 décembre 2005. (…). Une expédition de cet acte sera publiée au bureau des hypothèques avec la vente du 9 décembre 2005 qu’il complète en ce qui concerne la désignation de l’immeuble vendu, sous le même certificat de collationnement, dans les conditions et délais prévus par les dispositions légales et réglementaires, aux frais du nouveau propriétaire’.
Même s’il n’a pas été signé ni paraphé par M.et Mme [V], cet acte complémentaire réalisé en leur nom par un mandataire dont la signature y figure, s’est incorporé à l’acte de vente et ils sont réputés en avoir eu connaissance à la date de sa signature soit le 9 décembre 2005.
Leur action en nullité pour dol initiée le 12 juillet 2019 était donc prescrite et le jugement sera confirmé sur ce point.
Même à supposer comme les appelants le soutiennent qu’ils n’ont eu connaissance de ce document d’arpentage qu’en 2017 à l’occasion du dépôt de leur plainte pour troubles anormaux de voisinage, le délai de 5 ans depuis la conclusions de la vente était expiré et leur action prescrite de la même manière.
Au surplus, même si la signature du mandataire ( Mme [I] ) figure au document d’arpentage à la date du 17 novembre 2005 antérieure à l’acte du 9 décembre 2005 lui conférant mandat, la signature ‘[V]’ y figure également, fût-ce dans un cadre inapproprié, et surtout il ne résulte de ce document d’arpentage aucune modification de surface de la parcelle vendue (281m² à détacher de la parcelle cadastrée section BE n°[Cadastre 3]/ 2 ares 81 centiares cadastrés section BE n° [Cadastre 7]).
Egalement, comme le soutiennent les intimées, si le point de départ de la prescription était constituée par la date de fin de la construction du mur séparatif entre les deux parcelles litigieuses [Cadastre 7] et [Cadastre 8], le délai de prescription était également expiré en 2017, cette construction ayant été achevée en 2009.
Les actions des appelants en résiliation de la vente et en estimation de la perte de valeur de leur bien immobilier doivent donc également être déclarées prescrites et le jugement sera encore confirmé sur ce point.
*demande tendant à voir la FONCIER CÔTÉ SUD condamnée à verser aux appelants une somme de 108 000€uros au titre d’une « perte de chance de ne pas contracter » fondée sur le dol.
Selon les articles 563 et 564 du code de procédure civile, pour justifier en appel les prétentions qu’elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves. A peine d’irrecevabilité relevée d’office, elles ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.
Si les demandes initiales en première instance des appelants étaient déjà fondées sur un dol allégué, elles se limitaient à l’égard de la société FONCIER CÔTÉ SUD à la restitution du prix de vente consécutive à la résiliation ou la nullité de cette vente.
La demande de dommages et intérêts pour ‘perte de chance de ne pas contracter’ est donc nouvelle en cause d’appel, même sur le même fondement, et doit être déclarée irrecevable comme le demandent les intimées.
Réciproquement, la demande des sociétés intimées tendant à voir ‘constater en outre que les époux [V] ne justifient pas de la publication de leur assignation auprès du service chargé de la publicité foncière de la situation des immeubles’ est elle-même irrecevable comme n’ayant pas été présentée in limine litis devant les premiers juges, s’agissant d’une demande d’annulation de l’acte introductif d’instance.
*demande d’indemnisation pour perte de valeur de l’immeuble
Les appelants soutiennent que les troubles du voisinage qu’ils subissent de la part des locataires de la SCI MAZALEX sont tels qu’ils justifient l’évaluation de la perte de valeur de leur immeuble préalable à la condamnation de la SARL FONCIER CÔTÉ SUD à les indemniser de ce chef de préjudice.
Ils imputent à cette société la responsabilité de ces troubles qui leur aurait dissimulé l’existence du permis de construire ensuite transféré à la SCI MAZALEX laquelle n’en aurait pas respecté la mention relative en particulier à la réalisation de deux abris couverts destinés à relier les constructions nouvelles au bâtiment déjà existant devenu leur propriété.
Ils ne contestent pas toutefois que la construction éventuellement non conforme au permis de construire initial a été terminée en 2009 de sorte que leur action en responsabilité à l’égard de l’une ou l’autre des sociétés intimées est encore prescrite.
Le jugement sera encore confirmé sur ce point tant sur l’irrecevabilité de cette action que sur le rejet de la demande d’expertise judiciaire à ce titre.
*demande d’indemnisation pour troubles anormaux de voisinage
A l’appui de leur demande dirigée contre la SCI MAZALEX, propriétaire de la parcelle [Cadastre 8] les appelants produisent un procès-verbal de constat d’huissier réalisé le 8 novembre 2017 décrivant seulement la configuration de la limite séparative des deux parcelles [Cadastre 7] et [Cadastre 8] soit un mur de clôture de 22 centimètres d’épaisseur et 2,03 mètres de hauteur, édifié à 1 mètre de la façade nord de leur maison, et 3,14 mètres de la façade sud de la maison édifiée sur la parcelle voisine, ainsi que la présence d’une dalle de béton d’environ 20 centimètres d’épaisseur sur cette parcelle.
Ils produisent également les copies de deux mains-courantes déposées les 25 avril et 15 juillet 2017 pour troubles de voisinage (bruits nocturnes et odeurs de fumées, insultes) et d’un procès-verbal de dépôt de plainte en date du 8 avril 2019 réitérant ces doléances, ainsi que diverses photographies non datées.
Pour déclarer leur action sur ce fondement prescrite, le premier juge a considéré que la 1ère manifestation des troubles de voisinage se situait à la date de l’achèvement des travaux jugés non conformes soit au 1er décembre 2009. Toutefois de tels troubles étant par nature continus, et contrairement à ce que prétend la SCI MAZALEX leur action sur ce fondement n’était pas prescrite.
M.et Mme [V] produisent également à l’appui de leurs prétentions le rapport de l’expertise ordonnée en référé concluant le 7 janvier 2019 ‘la SARL FONCIERE COTE SUD (sic) ayant une activité de marchand de biens est considérée comme un professionnel de l’immobilier. En déposant ce PCVD ( permis de construire valant division) et en le transférant par la suite à la SCI MAZALEX elle n’a pas garanti à ses acquéreurs (époux [V] et SCI MAZALEX) l’utilisation paisible des biens vendus. La SCI MAZALEX aurait dû redéposer un permis de construire à partir du moment où le permis initial ne pouvait plus être réalisé conformément’.
Mais ces considérations générales de l’expert ne reposant sur aucune constatation matérielle relative à leur consistance, les éléments produits sont insuffisants pour démontrer le caractère anormal, compte-tenu de la configuration des lieux, des troubles de voisinage dénoncés, éventuellement imputables à la SCI MAZALEX en qualité de bailleur et M.et Mme [V] seront en conséquence déboutés de leurs demandes d’indemnisation pour préjudice de jouissance et préjudice moral à ce titre.
*demande d’indemnisation pour perte de valeur du fait des troubles anormaux de voisinage
En conséquence de l’absence de preuve suffisante du caractère anormal des troubles allégués, l’action formée subsidiairement par les appelants à l’égard des SARL FONCIER CÔTÉ SUD et SCI MAZALEX doit également être rejetée de même que la demande d’expertise subsidiaire et le jugement encore confirmé sur ce point.
*demande de retrait de la cuisine des locataires de la SCI MAZALEX sous astreinte
En conséquence du défaut de qualité à agir des appelants à l’encontre de cette société cette demande est également irrecevable et le jugement sera encore confirmé sur ce point.
*autres demandes
M.et Mme [V] qui succombent devront supporter les dépens de l’entière instance.
L’équité ne commande toutefois pas qu’il soit fait ici application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.
Les SARL FONCIER COTE SUD et SCI MAZALEX seront en conséquence déboutées de leur demande à ce titre.
PAR CES MOTIFS
la cour,
Déclare irrecevable en cause d’appel la demande de M.[Y] [V] et Mme [B] [H] épouse [V] tendant à voir la FONCIER CÔTÉ SUD condamnée à verser aux appelants une somme de 108 000 € au titre d’une prétendue « perte de chance de ne pas contracter » fondée sur le dol.
Confirme en toutes ses dispositions le jugement n°21/00234 du tribunal judiciaire d’Alès en date du 9 décembre 2021
Y ajoutant
Condamne M.[Y] [V] et Mme [B] [H] épouse [V] aux dépens de l’entière instance.
Dit n’y avoir lieu à application en cause d’appel des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Arrêt signé par la présidente et par la greffière.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,