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N° RG 21/02986 – N° Portalis DBVM-V-B7F-K6ND
C3
N° Minute :
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
la SELAS FOLLET RIVOIRE
la SELARL LEXWAY AVOCATS
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU MARDI 13 JUIN 2023
Appel d’un Jugement (N° R.G. 20/02362)
rendu par le Tribunal judiciaire de Grenoble
en date du 31 mai 2021
suivant déclaration d’appel du 05 juillet 2021
APPELANTE :
S.A.R.L. AVENIR AMENAGEMENT prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 9]
[Localité 10]
représentée par Me Renaud FOLLET de la SELAS FOLLET RIVOIRE, avocat au barreau de VALENCE
INTIMÉE :
LA DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES poursuites et diligences du Directeur Régional des Finances Publiques, qui élit domicile en ses bureaux sis à [Localité 2]
[Adresse 12].
[Adresse 12]
[Localité 2].
représentée par Me Philippe LAURENT de la SELARL LEXWAY AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE
COMPOSITION DE LA COUR: LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ
Mme Catherine Clerc, présidente,
Mme Joëlle Blatry, conseiller,
Mme Véronique Lamoine, conseiller,
Assistées lors des débats de Anne Burel, greffier
DÉBATS :
A l’audience publique du 2 mai 2023, madame Clerc a été entendue en son rapport.
Les avocats ont été entendus en leurs observations.
Et l’affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l’arrêt a été rendu.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
La société Avenir Aménagement dont l’objet social est «’réalisation d’opérations immobilières, lotissement, marchand de biens, promotion immobilière’» (ci-après désignée «’la Société’» ) a acquis selon acte notarié du 9 juillet 2012, une parcelle de terrain cadastrée A [Cadastre 1] sur la commune de [Localité 11] (Drôme) d’une contenance de 38 500m² moyennant le prix de 1.450.000€.
L’acte de vente précisait en page 15 que la Société sollicitait le bénéfice de l’article 1115 du code général des impôts et déclarait à cet effet (notamment) «’s’engager à revendre le bien acquis dans le délai maximum de cinq ans à ce jour (‘)’»’, ce qui induisait en conséquence une revente avant le 9 juillet 2017.
La Société a divisé cette parcelle en 69 lots cadastrés C[Cadastre 3] à C [Cadastre 6] par le document d’arpentage n°1590 Z’; la parcelle C [Cadastre 5] a été divisée en deux parcelles, C [Cadastre 7] et C [Cadastre 8] par le document d’arpentage n°1602 N.
Seules 24 nouvelles parcelles ont été revendues avant le 9 juillet 2017, soit 17 528m² sur 38 500m².
Par courrier du 19 septembre 2018, l’administration des finances publiques (ci-après désignée «’l’Administration’») a prononcé en conséquence la déchéance partielle du régime de faveur institué par l’article 1115 du code général des impôts et a liquidé au prorata les droits dus, soit 34.556€ outre intérêts de retard pour 9.238€.
Par courrier du 5 décembre 2018, l’Administration a réduit les droits dus à 33.675€ et les intérêts de retard à 9.002€ après justification de la vente dans le délai imparti d’une autre parcelle (C [Cadastre 4]).
Le 16 septembre 2019, l’Administration a mis en recouvrement les droits et intérêts de retard ainsi calculés et adressé à la Société une mise en demeure de payer la somme de 42.677€.
La Société a déposé le 16 décembre 2019 une réclamation contentieuse qui a été rejetée le 23 décembre 2019.
Suivant acte extrajudiciaire du 24 février 2020, la Société a assigné l’Administration devant le tribunal judiciaire de Grenoble pour obtenir la décharge totale des impositions suite à la déchéance du régime de faveur en se prévalant d’un cas de force majeure l’ayant mise dans l’impossibilité de revendre dans le délai de cinq ans, les parcelles issues de la division de la parcelle A [Cadastre 1] initialement acquise.
Par jugement contradictoire du 31 mai 2021, ce tribunal a’:
constaté le bien fondé des rehaussements entrepris par l’Administration,
débouté en conséquence, la Société de sa demande de maintien du régime de faveur de l’article 1115 du code général des impôts et d’exonération des droits dus pour défaut de revente de la parcelle A [Cadastre 1] dans le délai de cinq ans,
dit n’y avoir lieu au prononcé de l’article 700 du code de procédure civile,
condamné la Société aux entiers dépens,
rappelé que l’exécution provisoire est de droit.
Par déclaration du 5 juillet 2021, la Société a relevé appel.
Dans ses uniques conclusions déposées le 8 novembre 2021, la Société demande à la cour d’infirmer le jugement déféré et statuant à nouveau, de’:
dire recevable et bien fondée son assignation,
dire la décision de rejet du «’30 juillet 2018’» de la Direction Générale des Finances Publiques illégale,
prononcer par conséquent la décharge totale des impositions suite à la déchéance du régime de faveur, à savoir :
frais d’assiette et de recouvrement : 578 €,
taxe additionnelle aux droits d’enregistrement ou à la taxe de publicité foncière,
taxe communale : 9.236 €,
taxe de publicité foncière – taux normal droits : période .juillet 2012 : 23.861 €,
prononcer corrélativement la décharge des intérêts de retard et majorations appliquées, à savoir la somme de 9.002€,
condamner en dernier lieu l’État à lui payer la somme de 2.000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir que’:
elle s’est trouvée dans l’impossibilité de revendre l’intégralité des autres parcelles dans le délai de cinq ans en raison d’un cas de force majeure,
ainsi, 27 lots n’ont pas pu être vendus car les zones d’accès à ces parcelles (trapèze d’accès) n’ont pas été réalisées à une hauteur permettant de respecter la rehausse de 60cm des constructions prescrite par le plan de prévention des risques naturels prévisibles (PPRN) en raison du caractère potentiellement inondable de la zone, de telle sorte que les permis de construire afférents à ces lots sont rejetés par l’autorité administrative d’urbanisme, le plancher des constructions n’étant pas conforme au PPRN,
16 autres lots qui ont fait l’objet d’un refus de permis de construire, n’ont pas pu être vendus en raison d’une inconstructibilité du fait des problématiques de recul et d’alignement au faîtage’; en effet, la construction de maisons mitoyennes était rendue impossible du fait de l’interdiction posée par le PPRN de prévoir une pente d’accès aux garages supérieure à 15’%, ce qui impliquait de repousser de plusieurs mètres d’implantation du garage en raison de la configuration de certains trapèzes d’accès aux parcelles, et donc de dépasser les limites des parcelles,
elle se trouve dans l’impossibilité de déposer des permis de construire car il lui est interdit de commercialiser au regard de la plainte pénale déposée par la Mairie pour violation des règles d’urbanisme,
le critère d’imprévisibilité est acquis dès lors que la commune avait réceptionné sans réserve les trapèzes d’accès et avait délivré les certificats de conformité des travaux,
le critère d’irrésistibilité des désordres est acquis, en ce qu’elle n’en a eu connaissance que tardivement à l’occasion de la réception des premiers refus de délivrance des autorisations de construire,
seuls les lots 8 et 9 sont de nature à justifier la perte du régime de faveur car leur vente n’est pas intervenue dans le délai de cinq ans pour des raisons étrangères aux malfaçons caractérisant la force majeure.
Par uniques conclusions déposées le 8 décembre 2021sur le fondement des articles 1115 du code général des impôts, 1148 du code civil, l’Administration demande à la cour de’:
déclarer l’appel de la Société recevable mais non fondé,
juger bien fondés les rehaussements entrepris,
en conséquence
confirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions,
condamner la Société à lui payer la somme de 2.000€ [comprendre au titre de l’article 700 du code de procédure civile] ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.
Elle réplique que’:
la Société ne peut invoquer une quelconque force majeure en l’absence de caractère d’imprévisibilité, ainsi, elle connaissait la prescription de rehaussement et avait stipulé contractuellement avec les tiers constructeurs l’obligation de respecter cette prescription,
le caractère d’irrésistibilité ne peut pas non plus être retenu, en ce qu’elle avait pris l’engagement de revendre et non de construire’; donc elle pouvait revendre les lots prétendument inconstructibles sous une autre forme que des terrains allotis sauf à subir une perte financière qui lui est inopposable,
l’inconstructibilité des lots résultant par ailleurs de la mauvaise intervention des tiers qu’elle a missionnés, elle ne peut pas non plus exciper du caractère d’extériorité, les constructeurs ayant été missionnés par ses soins.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 21 mars 2023.
MOTIFS
Est constitutif d’un cas de force majeure tout événement extérieur, imprévisible et irrésistible.
C’est en vain que la Société réitère en appel sa demande tendant à être exonérée des droits dus pour défaut de revente dans le délai de cinq ans prescrit par l’article 1115 du code général des impôts en soutenant avoir empêchée de revendre par l’effet d’un cas de force majeure.
Les moyens soutenus en appel par les parties ne font que réitérer, sans justification complémentaire utile, ceux dont le premier juge a connu et auxquels il a répondu par des motifs pertinents et exacts que la cour adopte, sans qu’il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d’une discussion se situant au niveau d’une simple argumentation.
En effet, le premier juge a très exactement écarté, par de justes et pertinents motifs adoptés par la cour, l’existence de la force majeure alléguée en retenant que
le caractère d’imprévisibilité du caractère inconstructible des parcelles invendues n’était pas acquis en relevant que la Société était une professionnelle de l’immobilier et qu’à ce titre elle avait toute latitude pour se renseigner auprès des services techniques de la mairie sur la conformité de sa parcelle aux règles d’urbanisme, indépendamment de la délivrance du certificat d’urbanisme qui renseigne uniquement sur la constructibilité du terrain,
le caractère irrésistible de l’impossibilité de revendre n’était pas non plus établi, la Société ayant pris l’engagement de revendre et non de construire, et ne démontrant pas s’être trouvée dans une totale impossibilité de revendre les terrains autre qu’étant allotis.
Il convient seulement de souligner et d’ajouter que sont sans emport la référence effectuée par la Société aux procédures civiles initiées à l’encontre des constructeurs et autres intervenants à l’opération de construction auxquels elle impute les non-conformités des ouvrages dont elle indique qu’elles sont à l’origine de l’impossibilité de céder les immeubles dans le délai prescrit par l’article 1115 du code général des impôts, de même que ses développements destinés à illustrer les désordres et non-conformités sur lesquelles elle se fonde pour exciper d’une force majeure.
En effet, ces non-conformités ne peuvent pas «’témoigner des caractères irrésistibles et insurmontable de l’impossibilité de vendre les biens dans le délai imparti au regard soit du refus des autorisations de construire y afférentes, soit de l’impossibilité concrète d’obtenir de telles autorisations’» étant rappelé, que l’obligation faite à la Société était de revendre dans les cinq ans «’le bien acquis’» à savoir «’un terrain à bâtir nu’» d’une surface de 3 ha 85ca., et non pas de revendre ledit terrain une fois construit, ou avec un engagement de construire.
En tout état de cause, la Société n’ayant pas fait usage de la faculté prévue en page 15 de l’acte de vente dans la partie «’déclaration fiscale impôt sur la mutation’» à la suite du paragraphe relatif à l’application de l’article 1115 du code général des impôts aux termes de laquelle’: «’étant précisé que l’acquéreur d’un bien qui a pris l’engagement de revendre peut y substituer, avant son échéance, un engagement de construire tel que prévu au II du A de l’article 1594-0G du code général des impôts. Cet engagement prend effet à compter de la date à laquelle il est souscrit auprès de l’administration et vaut accomplissement de l’engagement de revendre (…)’», toute référence à des désordres de construction ou d’impossibilité d’obtenir des permis de construire n’est pas de nature à légitimer par le recours à la force majeure le défaut de revente dans le délai de cinq ans des parcelles concernées.
Sans plus ample discussion, le jugement déféré est donc confirmé en ce qu’il a débouté la Société de sa prétention tendant au maintien du régime de faveur de l’article 1115 du code précité et corrélativement à l’exonération des droits dus pour défaut de revente dans les cinq ans de la parcelle acquise.
Enfin, il est relevé que la décision du «’30 juillet 2018 de la Direction Générale des Finances Publiques’» que la Société entend voir juger «’illégale’» n’est pas au nombre des pièces communiquées par les parties. De plus, au soutien de cette demande, la Société ne présente aucun fait, comme le lui impose l’article 9 du code de procédure civile, et ne vise aucune pièce dans ses conclusions comme le prescrit l’article 954 du code de procédure civile. Dès lors, la cour n’est pas en mesure de statuer sur ce point.
Sur les mesures accessoires
Succombant dans son recours, la Société est condamnée aux dépens d’appel et conserve la charge de ses frais irrépétibles exposés devant la cour’; elle est condamnée à verser à l’Administration une indemnité de procédure pour l’instance d’appel.
Le jugement est par ailleurs confirmé en ses dispositions relatives aux mesures accessoires.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement déféré,
Ajoutant,
Condamne la société Avenir Aménagement à verser à hauteur d’appel à la Direction générale des finances publiques la somme de 1.500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Dit n’y avoir lieu de statuer sur la demande de la société Avenir Aménagement tendant à «’dire la décision de rejet du 30 juillet 2018 de la Direction Générale des Finances
Publiques illégale’»,
Déboute la société Avenir Aménagement de sa réclamation de frais irrépétibles présentée en appel,
Condamne la société Avenir Aménagement aux dépens d’appel.
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
Signé par madame Clerc, président, et par madame Burel, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT