Location de matériel : décision du 8 février 2024 Cour d’appel de Lyon RG n° 20/03137

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Location de matériel : décision du 8 février 2024 Cour d’appel de Lyon RG n° 20/03137
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8 février 2024
Cour d’appel de Lyon
RG n°
20/03137

N° RG 20/03137 – N° Portalis DBVX-V-B7E-M76K

Décision du Tribunal de Commerce de SAINT-ETIENNE du 10 mars 2020

RG : 2019j00433

S.A.S. LOCAM

C/

S.A.R.L. LES ECURIES DES TROIS ECOLES

S.A.R.L. GPS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 08 Février 2024

APPELANTE :

S.A.S. LOCAM au capital de 11 520 000 €, immatriculée au RCS de SAINT ETIENNE sous le numéro B 310 880 315, agissant poursuites et diligences par son dirigeant domicilié ès qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Michel TROMBETTA de la SELARL LEXI, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

INTIMEES :

S.A.R.L. LES ECURIES DES TROIS ECOLES immatriculée au RCS de Lorient sous le n° 794730093, agissant poursuites et diligences de son représentant légal

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentée par Me Stéphane ANDREO, avocat au barreau de LYON, toque : 2194, postulant et par Me Audrey ALLAIN, avocat au barreau de VERSAILLES

S.A.R.L. GPS

[Adresse 1]

[Localité 5]

défaillante

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 05 Février 2021

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 06 Décembre 2023

Date de mise à disposition : 08 Février 2024

Audience présidée par Viviane LE GALL, magistrate rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière.

Composition de la Cour lors du délibéré :

– Patricia GONZALEZ, présidente

– Aurore JULLIEN, conseillère

– Viviane LE GALL, conseillère

Arrêt par défaut rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 11 septembre 2017, la SARL Les Ecuries des Trois Ecoles a conclu avec la SAS Location Automobiles Matériels (Locam) un contrat de location portant sur du matériel informatique commandé auprès de la SARL GPS, moyennant le règlement de 21 loyers trimestriels de 540 euros HT (648 euros TTC) s’échelonnant jusqu’au 30 septembre 2022. Un procès-verbal de réception a été signé le 12 septembre 2017.

Par courriers recommandés du 12 mars 2018, la société Les Ecuries des Trois Ecoles a indiqué à la société Locam et à la société GPS exercer son droit de rétractation.

Par courrier recommandé délivré le 26 décembre 2018, la société Locam a mis en demeure la société Les Ecuries des Trois Ecoles de régler les échéances impayées sous peine de déchéance et de l’exigibilité de toutes sommes dues au titre du contrat.

Aucune solution amiable n’ayant été trouvé, par acte du 25 janvier 2019, la société Locam a assigné la société Les Ecuries des Trois Ecoles devant le tribunal de commerce de Saint-Etienne afin d’obtenir la somme principale de 12.830,40 euros.

Par acte du 18 mars 2019, la société Les Ecuries des Trois Ecoles a assigné dans la cause la société GPS. L’affaire a été jointe à la précédente par jugement du 23 avril 2019.

Par jugement réputé contradictoire du 10 mars 2020, le tribunal de commerce de Saint-Etienne a :

– dit recevables et bien fondées les demandes de la société Les Ecuries des Trois Ecoles,

– dit que les dispositions de l’article L. 221-3 du code de la consommation sont applicables aux contrats objets du litige,

– constaté que les contrats litigieux ont été conclus entre professionnels,

– dit que les contrats litigieux ont été conclus hors établissement au sens de l’article L. 221-1-2° a) du code de la consommation,

– dit que les contrats litigieux n’entrent pas dans le champ d’activité principale de la société Les Ecuries des Trois Ecoles,

– dit que la société Les Ecuries des Trois Ecoles remplit la condition visée à l’article L. 221-3 du code de la consommation relative à l’emploi d’un nombre de salariés égal ou inférieur à cinq,

– prononcé la nullité des contrats liant d’une part la société Les Ecuries des Trois Ecoles à la société GPS et d’autre part liant la société Les Ecuries des Trois Ecoles à la société Locam,

– débouté la société Locam de toutes ses demandes,

– condamné la société Locam à rembourser la somme de 1.494,78 euros à la société Les Ecuries des Trois Ecoles au titre des loyers indûment perçus,

– débouté la société Les Ecuries des Trois Ecoles de sa demande de dommages-intérêts,

– condamné la société Locam à verser à la société Les Ecuries des Trois Ecoles la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– dit que les dépens sont à la charge de la société Locam,

– dit qu’il n’y a pas lieu à exécution provisoire du jugement,

– débouté la société Les Ecuries des Trois Ecoles du surplus de ses demandes à l’encontre de la société Locam.

La société Locam a interjeté appel par acte du 19 juin 2020.

La société Locam a signifié ses premières conclusions à la société GPS le 7 octobre 2020. Par dernières conclusions notifiées par voie dématérialisée le 7 janvier 2021 reprenant les mêmes prétentions et moyens, fondées sur les articles 1103 et suivants, 1231-2 et 1128 et suivants du code civil, les articles L. 221-2 4° et L. 222-1 du code de la consommation et les articles 311-2 et 511-21 du code monétaire et financier, la société Locam demande à la cour de :

– dire bien fondé son appel,

– réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

– condamner la société Les Ecuries des Trois Ecoles à lui régler la somme principale de 12.830,40 euros, avec intérêts au taux légal et autres accessoires de droit à compter de la mise en demeure du 26 décembre 2018,

– débouter la société Les Ecuries des Trois Ecoles de toutes ses demandes,

– la condamner à lui régler une indemnité de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société Les Ecuries des Trois Ecoles en tous les dépens d’instance et d’appel.

La société Les écuries des trois écoles a signifié ses premières conclusions à la société GPS le 27 novembre 2020. Par dernières conclusions notifiées par voie dématérialisée le 3 février 2021 reprenant les mêmes prétentions et moyens, fondées sur les articles 1103, 1104, 1133, 1178, 1217, 1224 et 1227 du code civil et les dispositions du code de la consommation, la société Les Ecuries des Trois Ecoles demande à la cour de :

– la juger recevable et bien fondée en ses demandes,

– confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qui concernant le rejet de sa demande de dommages-intérêts,

et statuant de nouveau,

– condamner solidairement la société GPS et la société Locam à lui verser la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi,

– débouter la société Locam de ses demandes, fins et conclusions,

à titre subsidiaire,

– prononcer la résolution du contrat qu’elle a souscrit avec la société GPS et pour inexécution des obligations contractuelles de la société GPS,

– juger que les contrats qu’elle a signés le 11 septembre 2017 avec la société GPS et avec la société Locam sont interdépendants,

– prononcer en conséquence la caducité du contrat de financement la liant à la société Locam,

– condamner la société Locam à lui rembourser les sommes indûment versées soit la somme de 1.494,78 euros,

– condamner solidairement la société GPS et la société Locam à lui verser la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi,

à titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire, la juridiction de céans devait faire droit aux demandes de la société Locam,

– condamner la société GPS à la garantir de toutes les sommes qu’elle serait condamnée à verser à la société Locam, ainsi que le remboursement des sommes versées,

– juger que la société GPS a fait montre de mauvaise foi et d’un manque de loyauté,

– juger que la société GPS a manqué à son obligation d’information,

– juger que la société Locam a fait montre de man’uvres déloyales,

– condamner solidairement la société GPS et la société Locam à lui verser la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi,

en conséquence,

– condamner solidairement la société GPS et la société Locam à verser la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société Locam aux entiers dépens d’instance et d’appel.

La société GPS, à qui la déclaration d’appel a été signifiée par acte du 28 juillet 2020 suivant procès-verbal de recherches infructueuses, n’a pas constitué avocat.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 5 février 2021, les débats étant fixés à l’audience du 6 décembre 2023.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l’application des dispositions du code de la consommation

La société Locam fait valoir que le contrat de location constitue une opération connexe aux opérations de banque et se trouve donc exclu du champ d’application des dispositions du code de la consommation dont la société Les écuries des trois écoles demande l’application.

La société Les écuries des trois écoles réplique que :

– elle est bien fondée à se prévaloir des dispositions du code de la consommation en ce que le contrat conclu n’entre pas dans le champ de son activité principale et qu’elle emploie moins de cinq salariés ; elle précise qu’elle a été démarchée, il n’y a eu aucune démarche active de sa part ;

– la société GPS a manqué à son obligation d’information concernant l’étendue de l’engagement souscrit et notamment le lien tripartite avec le financement par location, et les droits du client le matière de délai de rétractation ; le contrat est donc nul et de nul effet ;

– le contrat conclu avec la société Locam est un contrat de location et non un crédit-bail, il ne s’agit pas d’un service financier mais d’une location de matériel, de sorte que les dispositions du code de la consommation sont applicables ;

– à titre subsidiaire, il conviendra de prononcer la résolution du contrat en raison de l’inexécution contractuelle par la société GPS ; les contrats sont indivisibles, de sorte que la résiliation du contrat de maintenance en raison des manquements du prestataire entraîne la caducité par voie de conséquence du contrat de location ;

– en conséquence, elle est bien fondée à solliciter le remboursement des loyers indûment versés représentant la somme totale de 1.494,78 euros ;

– à titre subsidiaire, elle est fondée à solliciter la garantie de la société GPS.

Sur ce,

Selon l’article L. 221-2, 4°, du code de la consommation, sont exclus du champ d’application du présent chapitre les contrats portant sur les services financiers.

C’est par de justes motifs que la cour adopte, que le tribunal a écarté le moyen de la société Locam tiré de l’exclusion des services financiers du champ d’application des dispositions du code de la consommation invoquées par la société Les écuries des trois écoles.

Y ajoutant, il convient d’observer que, si le code de la consommation n’apporte pas de définition précise de ce qui doit être considéré comme étant un contrat portant sur un service financier, la directive 2011/83/UE du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs, transposée en droit interne par la loi n°2014-344 du 17 mars 2014, indique toutefois, à l’article 2, 12), qu’il faut entendre par «service financier», tout service ayant trait à la banque, au crédit, à l’assurance, aux pensions individuelles, aux investissements ou aux paiements.

Or, aux termes du contrat de location en cause, la société Locam acquiert le bien auprès du fournisseur et se trouve donc en être propriétaire ; à l’issue du contrat, le locataire dispose pour seule option de restituer le bien au bailleur ou de renouveler la location. Aucune option ne lui permet d’acquérir le bien ou de s’en voir transférer la propriété à l’issue du contrat.

Il en résulte que le contrat de location ne constitue aucunement une opération de crédit au sens du code monétaire et financier, ni un service financier au sens du code de la consommation, mais une simple location de matériel.

Le fait que l’article L. 311-2, 6°, du code monétaire et financier permette à des établissements de crédit d’effectuer des opérations connexes à leur activité, parmi lesquelles la location simple de biens mobiliers pour les établissements habilités à effectuer des opérations de crédit-bail, ne signifie pas pour autant que les dispositions du code de la consommation relatives aux contrats conclus hors établissement ne s’appliquent pas lorsqu’un tel contrat est conclu dans ces conditions.

En effet, l’article L. 311-2 se borne à définir, de façon exhaustive, les ‘opérations connexes’ que les établissements de crédit sont autorisés à réaliser sans bénéficier du monopole bancaire. Il ne s’en déduit pas que l’établissement de crédit peut s’affranchir des règles qui peuvent par ailleurs s’appliquer au titre du code de la consommation.

De même, les dispositions du code monétaire et financier relatives au démarchage bancaire ou financier ne permettent pas de soustraire le contrat de location aux dispositions du code de la consommation, dès lors que l’article L. 341-2, 7°, du code monétaire et financier exclut expressément des règles du démarchage bancaire et financier, les contrats de financement de location aux personnes physiques ou morales.

Les dispositions du code de la consommation relatives aux contrats conclus hors établissement peuvent donc être invoquées par la société Les écuries des trois écoles et le jugement sera confirmé sur ce point.

L’article L. 221-3 dispose que ‘les dispositions des sections 2, 3 et 6 du présent chapitre applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l’objet de ces contrats n’entre pas dans le champ de l’activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq’.

La société Locam ne conteste pas que ces conditions sont remplies en l’espèce et, en tout état de cause, la société Les écuries des trois écoles justifie que le contrat a été conclu dans ses propres locaux professionnels, qu’elle employait moins de cinq salariés et qu’elle a une activité de poney club, pensions, centre équestre, de sorte que la location du matériel informatique n’entrait pas dans le champ de son activité principale.

Comme l’a donc exactement retenu le tribunal, par des motifs que la cour adopte, les dispositions des articles L. 221-5 et L. 221-8 et suivants du code de la consommation s’appliquent et l’absence des informations relatives au droit de rétractation comme celle du formulaire de rétractation entraîne la nullité des contrats conclus avec la société GPS et la société Locam le 11 septembre 2017. Le jugement sera donc confirmé à ce titre. La condamnation de la société Locam au remboursement des loyers versés par la société Les écuries des trois écoles, conséquence de l’annulation prononcée, est également confirmée.

Sur la demande de dommages-intérêts

La société Les écuries fait valoir que la société Locam a fait preuve d’acharnement et de mauvaise foi contre elle alors qu’elle est une petite structure et que le stress et le temps investi pour faire face à la procédure lui ont occasionné un préjudice.

La société Locam réplique que la société Les écuries ne démontre pas l’intention malveillante dans l’engagement de la procédure de recouvrement d’une créance contractuelle, ni la réalité du préjudice allégué.

Sur ce,

La société Les écuries des trois écoles, qui fait valoir qu’elle ne pouvait se permettre financièrement de faire l’acquisition de matériels sans lien avec son activité, totalement inutiles, ne peut imputer à ses cocontractants son choix d’avoir souscrit les contrats litigieux, d’autant que ceux-ci sont annulés.

Les fautes alléguées ne sont pas établies, de sorte que le jugement sera également confirmé en ce qu’il rejette la demande de dommages-intérêts formée par la société Les écuries des trois écoles.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

La société Locam succombant à l’instance, elle sera condamnée aux dépens d’appel.

En application de l’article 700 du code de procédure civile, la demande de la société Locam à ce titre est rejetée et celle-ci est condamnée à payer à la société Les écuries des trois écoles la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la société Location Automobiles Matériels – LOCAM aux dépens d’appel ;

Condamne la société Location Automobiles Matériels – LOCAM à payer à la société Les écuries des trois écoles la somme de mille euros (1.000 euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

 


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