Location de matériel : décision du 7 septembre 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 22/00122
Location de matériel : décision du 7 septembre 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 22/00122
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7 septembre 2023
Cour d’appel de Versailles
RG n°
22/00122

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 56B

12e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 07 SEPTEMBRE 2023

N° RG 22/00122 – N° Portalis DBV3-V-B7G-U535

AFFAIRE :

S.A.R.L. CSD MCG

C/

S.A.R.L. NICOTRANS TP

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 Décembre 2021 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES

N° Chambre : 1

N° RG : 2020F00525

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Alain BOLLE

Me Valérie SCHMIERER-LEBRUN

TC VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEPT SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

S.A.R.L. CSD MCG

RCS Pontoise n° 509 246 617

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Alain BOLLE, avocat au barreau du VAL D’OISE, vestiaire : 203

APPELANTE

****************

S.A.R.L. NICOTRANS TP

RCS Versailles n° 449 204 247

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Valérie SCHMIERER-LEBRUN, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 164

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 23 Mai 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur François THOMAS, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur François THOMAS, Président,

Monsieur Patrice DUSAUSOY, Magistrat honoraire,

Madame Bérangère MEURANT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : M. Hugo BELLANCOURT,

EXPOSE DU LITIGE

La société CSD MCG est une société de surveillance privée, qui propose notamment des services de gardes statiques, de rondes de surveillance et de sécurité, de télésurveillance.

La société Nicotrans TP est une société de transport routier de marchandises.

La société CSD MCG déclare avoir mis du matériel de surveillance à la disposition de la société Nicotrans TP, qui indique pour sa part avoir contracté avec la société Vigilance Corp.

La société CSD MCG indique avoir en 2018 émis 3 devis de location de matériel de télésurveillance et d’intervention auprès de la société Nicotrans TP (le 2ème devis remplaçant le 1er) ; le 21 décembre 2018, elle aurait émis un 4ème devis pour la location d’un détecteur de mouvement.

La société CSD MCG a ensuite émis plus de 20 factures du 31 janvier 2019 au 29 février 2020, restées impayées.

Le 25 août 2020, la société CSD MCG a introduit une requête aux fins d’injonction de payer devant le président du tribunal de commerce de Versailles, en vue d’obtenir le paiement des sommes en cause ; par ordonnance n°2020/01151 du 1er septembre 2020, la société Nicotrans TP a été enjointe de payer au demandeur la société CSD MCG, en deniers ou quittances, Ies sommes de :

– 15.750 € en principal, en sus les intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 2020,

– 1.040 € au titre des frais de recouvrement,

outre les dépens dont frais de greffe de 35,21 €.

Cette ordonnance a été signifiée par dépôt à l’étude le 9 septembre 2020 à la société Nicotrans TP qui, par courrier reçu le 30 septembre 2020 au tribunal de commerce de Versailles, a formé opposition à cette ordonnance d’injonction de payer.

Par jugement du 15 décembre 2021, le tribunal de commerce de Versailles a :

– dit la société Nicotrans TP recevable en son opposition à l’ordonnance portant injonction de payer n°2020/001151 du 1er septembre 2020,

– dit qu’en application de l’article 1420 du code de procédure civile, le jugement se substitue à l’ordonnance susvisée,

– débouté la société CSD MCG de l’ensemble de ses demandes,

– débouté la société Nicotrans TP de sa demande reconventionnelle,

– condamné la société CSD MCG à payer à la société Nicotrans TP la somme de 1.500 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société CSD MCG aux dépens, dont les frais de greffe s’élèvent à la somme de 139.75 €.

Par déclaration du 7 janvier 2022, la société CSD MCG a interjeté appel du jugement.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 29 juillet 2022, la société CSD MCG demande à la cour de :

– infirmer le jugement entrepris,

– condamner la société Nicotrans TP à payer à la société CSD MCG la somme de 14.700 € au titre des factures impayées,

– condamner la société Nicotrans TP à payer à la société CSD MCG la somme de 960 € au titre des frais de recouvrement,

– ordonner l’exécution provisoire,

– condamner la société Nicotrans TP à payer à la société CSD MCG la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société Nicotrans TP aux entiers dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 24 février 2023, la sociétés Nicotrans TP demande à la cour de :

– à titre principal, déclarer nulle et de nul effet la déclaration d’appel tenant au fait de l’absence des mentions exigées par la loi, tant au titre des dispositions de l’article 901 et 3ème alinéa, que des articles 54 et 57 du code de procédure civile, et ce à peine de nullité,

– à titre infiniment subsidiaire sur le fond, confirmer en toutes ses dispositions le jugement critiqué,

Et y ajoutant,

– Condamner la société CSD MCG à payer la somme de 4.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 9 mars 2023.

Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit à l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

Sur la nullité de la déclaration d’appel

La société Nicotrans TP fait état des irrégularités de fond affectant la déclaration d’appel de la société CSD MCG, de nature à entraîner sa nullité.

Elle relève que son adresse telle que figurant sur la dite déclaration d’appel est erronée, de sorte qu’elle n’en a jamais été destinataire. Elle ajoute que la déclaration d’appel qui lui a été signifiée contenait également une adresse erronée de l’intimée, et ne précisait pas l’organe représentant le demandeur. Elle indique que l’absence d’indication de son adresse lui a fait grief, dans la mesure où elle n’a pas été informée de l’appel.

Elle relève que la déclaration d’appel ne comporte aucun des chefs du jugement expressément critiqués, alors que seul l’acte d’appel entraine dévolution des chefs critiqués de la décision, de sorte que la déclaration d’appel doit être déclarée nulle et de nul effet.

La société CSD MCG soutient que la déclaration d’appel contient bien, contrairement aux dires de la société Nicotrans TP, l’indication du siège social de l’appelante.

S’agissant de l’adresse de l’intimée, elle indique qu’il s’agit d’une erreur de l’huissier, mais que l’acte de signification de la déclaration d’appel contenait la bonne adresse de l’intimée qui s’est constituée, ce qui révèle qu’elle avait connaissance de la déclaration d’appel.

Elle avance que, contrairement aux dires de l’intimée, les chefs du jugement expressément critiqués sont bien mentionnés en 1ère page de la déclaration d’appel, de sorte que celle-ci ne peut être frappée de nullité.

*****

L’article 901 du code de procédure civile prévoit que

‘La déclaration d’appel est faite par acte, comportant le cas échéant une annexe, contenant, outre les mentions prescrites par les 2° et 3° de l’article 54 et par le cinquième alinéa de l’article 57, et à peine de nullité : …

4° Les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité, sauf si l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible’.

L’article 54 du même code indique que

‘La demande initiale est formée par assignation ou par requête remise ou adressée au greffe de la juridiction. La requête peut être formée conjointement par les parties.

A peine de nullité, la demande initiale mentionne : …

3° … b) Pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l’organe qui les représente légalement ;’.

Enfin, l’article 57 du même code précise que la requête qui saisit la juridiction ‘contient, outre les mentions énoncées à l’article 54, également à peine de nullité : …

– lorsqu’elle est formée par une seule partie, l’indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée ou s’il s’agit d’une personne morale, de sa dénomination et de son siège social ;’…

Si la déclaration d’appel de la société CSD MCG contient, s’agissant de la société Nicotrans TP, une adresse erronée, soit le ‘[Adresse 2]’, alors que son adresse est ‘[Adresse 3]’, il s’agit là d’une erreur matérielle qui n’a pas fait grief à l’intimée puisque la déclaration d’appel lui a bien été signifiée le 29 mars 2022 à son adresse exacte à [Localité 4], que cette signification porte bien mention de son adresse exacte.

Par ailleurs, l’erreur figurant sur la déclaration d’appel quant à l’adresse de la société Nicotrans TP ne l’a pas gênée pour exercer ces droits, puisqu’elle s’est constituée le 17 janvier 2022 dans le cadre de l’instance initiée par la déclaration d’appel du 7 janvier 2022, ce qui établit qu’elle avait bien connaissance de la déclaration d’appel et n’a subi aucun grief de ce chef.

Il sera également précisé que la déclaration d’appel querellée porte bien mention de l’adresse de la société CSD MCG, en précisant que l’appel est interjeté au nom de cette société.

Cette déclaration d’appel vise expressément les chefs de jugement critiqués, soit en ce qu’il a débouté la société CSD MCG de l’ensemble de ses demandes, lesquelles tendaient à la condamnation de la société Nicotrans TP à lui payer la somme de 15.750 € au titre des factures impayées, celles de 1.040 € au titre des frais de recouvrement et de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’à voir ordonner l’exécution provisoire.

Il en ressort que cette déclaration d’appel précise expressément qu’il est interjeté appel du jugement en ce qu’il a débouté la société CSD MCG de ses demandes, et n’est donc pas nulle au vu de l’article 901, 4°, du code de procédure civile.

Néanmoins, le jugement est définitif en ce qu’il a condamné la société CSD MCG au paiement des frais irrépétibles et dépens de 1ère instance, ces points n’étant pas visés par la déclaration d’appel.

Sur la demande de la société CSD MCG

La société CSD MCG relève que le jugement a retenu un défaut de preuve de validité des devis, d’installation du matériel et de sa qualité à agir.

S’agissant de la validité des devis, elle indique que la société Nicotrans TP ne conteste pas avoir reçu un devis de la société CSD MCG, et a été informée de la nature de la prestation et de son prix. Elle ajoute que la société Nicotrans TP reconnaît que le matériel a été installé et conservé, ce qui révèle l’acceptation implicite du devis. Elle avance que la signature du devis pour cette prestation n’était pas obligatoire, que la société Nicotrans TP ne peut lui opposer l’existence d’un conflit à l’égard d’un tiers, et que le dysfonctionnement du matériel dénoncé par la société Nicotrans TP révèle l’existence d’une relation contractuelle.

Elle souligne que le constat d’un dysfonctionnement du matériel a été dressé plus d’un an après son installation, laquelle ne peut être contestée, une attestation étant produite sur ce point.

Elle précise que le matériel a été installé par un de ses techniciens, et qu’elle a émis 26 factures de location.

La société Nicotrans TP expose qu’après avoir contracté, sur la base d’un devis du 2 juillet 2015 avec la société Vigilance Corp aux fins d’installation d’un système de vidéo surveillance pour une période de 48 mois, elle a reçu le 31 mai 2016 un courrier de cette société l’avisant que son contrat était transféré à la société Le Protector Sécurité Privée, puis le 10 juin 2016 un courrier du gérant de la société (M. [T]) l’informant de l’annulation du transfert du contrat. Elle ajoute avoir appelé en vain ce gérant pour solliciter son intervention, le matériel dysfonctionnant totalement. Elle déclare s’être étonnée par courrier du 17 janvier 2018 de la réception de factures alors que l’alarme et la télésurveillance ne fonctionnaient plus, et avoir indiqué le 23 janvier 2018 qu’elle entendait mettre fin à la collaboration avec la société Le Protector, du fait de l’inexécution de ses obligations. Elle indique avoir alors découvert qu’elle ne serait pas cliente de la société Vigilance Corp, et que le matériel installé sur son terrain appartenait à la société CSD MCG, laquelle a cru devoir continuer à la facturer. Elle avance que cette société a essayé de reprendre à son compte le matériel installé pour son collaborateur indélicat sous la dénomination de la société Vigilance Corp, avec laquelle elle avait contracté. Elle sollicite la confirmation du jugement ayant retenu que des devis non signés ne démontraient pas l’existence d’une relation contractuelle, et dénonce l’attestation du collaborateur de l’intimée comme étant de complaisance. Elle souligne l’absence de devis signé et accepté, de bordereau de livraison ou d’installation, de procès-verbal de réception ou de bon d’intervention, et fait état de sa bonne foi.

*****

Sont nécessaires à la validité d’un contrat le consentement des parties, leur capacité de contracter, un contenu licite et certain.

La société CSD MCG fonde sa demande sur la transmission à la société Nicotrans TP de plusieurs devis, mais ne conteste pas que ceux-ci ne lui ont pas été retournés signés par la société Nicotrans TP.

Il est à rappeler qu’un devis non accepté est insuffisant pour concrétiser l’accord des parties sur l’existence d’une convention.

La société CSD MCG ne produit pas non plus de bon de livraison ou d’installation du matériel au sein des locaux de la société Nicotrans TP, ni de procès-verbal de réception ou de bon d’intervention.

Si la société CSD MCG souligne que dans ses conclusions de 1ère instance la société Nicotrans TP a reconnu l’installation du matériel dans ses locaux, la société Nicotrans TP soutient s’être engagée par devis du 2 juillet 2015 pour l’installation d’un système de vidéo surveillance avec la société Vigilance Corp, et verse le devis correspondant, signé et portant la mention ‘bon pour accord’ et le cachet humide de la société Nicotrans TP.

La société Nicotrans TP produit également un courrier du 31 mai 2016 signé par le gérant de la société Vigilance Corp, M. [T], faisant état de la reprise du contrat par la société Le Protector Sécurité privée à compter du 1er juillet 2016, ainsi qu’un courrier du 10 juin 2016 du même auteur revenant sur les termes de son précédent courrier.

Ces pièces ne démontrent pas l’existence d’un contrat liant les sociétés CSD MCG et Nicotrans TP, ou l’installation du matériel de la société CSD MCG dans les locaux de la société Nicotrans TP, laquelle s’était engagée au vu du devis accepté du 2 juillet 2015 avec la société Vigilance Corp.

Les courriels internes à la société CSD MCG, faisant état de l’installation de matériel de surveillance sur le dépôt de la société Nicotrans TP, ne sauraient établir de manière certaine l’existence d’un contrat entre les deux sociétés, ce d’autant qu’il est fait référence dans ces courriels à du matériel qui avait été précédemment vendu, ce qui induit qu’il l’avait été par une autre société que la société CSD MCG.

De même, l’attestation d’un employé de la société CSD MCG indiquant avoir effectué ‘des installations de matériels chez la société Nicotrans’ n’est pas suffisante à établir la preuve de cette installation, au vu du lien de subordination existant entre cet employé et la société CSD MCG.

Si l’appelante souligne que la société Nicotrans TP n’a engagé aucune action entre la 1ère facture du 31 janvier 2019 et le constat d’huissier du 13 mars 2020 dressé à la demande de la société Nicotrans TP pour établir le dysfonctionnement du système de vidéo surveillance, la cour observe que la société CSD MCG ne justifie pas de l’envoi de ces factures à la société Nicotrans TP.

En conséquence, il apparaît que c’est par une juste analyse que le jugement, après avoir indiqué que la société CSD MCG ne justifiait pas de devis acceptés par la société Nicotrans TP ou d’un procès-verbal d’installation, ou qu’elle était à l’origine du matériel installé ou venait aux droits de la société Vigilance Corp, l’a déboutée de sa demande.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les autres demandes

Succombant en son appel, la société CSD MCG sera condamnée au paiement des dépens devant la cour d’appel, ainsi qu’au versement à la société Nicotrans TP de la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La présente décision n’étant pas susceptible de recours suspensif d’exécution, la demande d’exécution provisoire est sans objet.

PAR CES MOTIFS

Statuant dans les limites de l’appel, par arrêt contradictoire,

Rejette la demande de nullité de la déclaration d’appel,

Confirme le jugement,

y ajoutant,

déboute les parties de leurs autres demandes,

Condamne la société CSD MCG au paiement des dépens d’appel, ainsi qu’au versement de la somme de 2.000 € à la société Nicotrans TP au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur François THOMAS, Président et par M. BELLANCOURT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

 


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