Location de matériel : décision du 7 décembre 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/09735

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Location de matériel : décision du 7 décembre 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/09735
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7 décembre 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
22/09735

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 10

ARRET DU 07 DECEMBRE 2023

(n° , 1 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/09735 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGXF7

Décision déférée à la Cour : Jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes de BOBIGNY le 27 mars 2019 sous le RG n° 17/03011 ; infirmé partiellement par un arrêt de la chambre 6/5de la Cour d’appel de PARIS rendu le 04 Février 2021 sous le RG n° 19/04450 lui-même partiellement cassé par la Cour de cassation dans son arrêt n° 942 F-D rendu le 21 septembre 2022, ayant renvoyé la cause et les parties devant la Cour d’appel de PARIS autrement composée.

APPELANT

Monsieur [B] [O]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Audrey HINOUX, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

INTIMEE

SAS GROUPE TSF prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés

en cette qualité au siège social sis

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Sarra JOUGLA, avocat au barreau de PARIS, toque : A0200

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 27 Septembre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Gwenaelle LEDOIGT, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Gwenaelle LEDOIGT, Présidente de la chambre

Madame Carine SONNOIS, Présidente de la chambre

Madame Véronique BOST, Conseillère de la chambre

Greffier : lors des débats : Mme Sonia BERKANE

ARRET :

– contradictoire

– mis à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Gwenaelle LEDOIGT, Présidente et par Sonia BERKANE, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE :

M. [B] [O] a été engagé par la société Groupe TSF, suivant contrat de travail à durée indéterminée en date du 7 mai 2001, en qualité de chef comptable.

La société groupe TSF est spécialisée dans la location de matériel technique pour le cinéma, la télévision et la publicité.

Le 1er mars 2006, M. [B] [O] a été promu directeur comptable groupe.

Dans le dernier état des relations contractuelles régies par la convention collective des entreprises techniques au service de la création et de l’événement du 21 février 2008, le salarié percevait une rémunération mensuelle brute fixe de 8 500 euros. La moyenne sur les 12 derniers mois de salaire s’établissait à 9 876 euros.

M. [B] [O] a présenté des arrêts de travail ne relevant pas du régime des risques professionnels du 10 février au 21 mars 2017, puis, à nouveau, à compter du 22 mars 2017 jusqu’au 14 avril 2017.

Par courrier recommandé du 2 mai 2017, lui notifiant sa mise à pied à titre conservatoire, le salarié a été convoqué à un entretien préalable fixé au 16 mai 2017.

Le 14 juin 2017, M. [B] [O] s’est vu notifier un licenciement pour faute grave.

Le 22 septembre 2017, M. [B] [O] a saisi le conseil de prud’hommes de Bobigny pour contester son licenciement et solliciter un rappel d’heures supplémentaires et d’indemnités au titre de la contrepartie obligatoire en repos ainsi que des dommages-intérêts pour préjudice moral.

Par jugement du 27 mars 2019, le conseil de prud’hommes de Bobigny, section Encadrement a statué comme suit :

– dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse

– condamne la SA Groupe TSF à verser à M. [B] [O] les sommes suivantes :

* 29 625 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis

* 2 962,50 euros au titre des congés payés afférents

* 60 895,83 euros au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement

* 120 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

* 9 750 euros au titre des dommages-intérêts pour préjudice moral

* 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

– dit que ces montants porteront intérêts au taux légal pour les créances salariales à compter du 4 octobre 2017, date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation et d’orientation, pour les créances indemnitaires à compter du prononcé du jugement

– ordonne la remise des documents de fin de contrat conforme

– ordonne le remboursement par l’employeur à Pôle emploi des allocations-chômage versées aux salariés licenciés dans la limite de deux mois

– déboute M. [B] [O] du surplus de ses demandes

– déboute la société Groupe TSF de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile

– rappelle que la présente décision est assortie de l’exécution provisoire de droit conformément à l’article R. 1454-28 du code du travail

– condamne la partie défenderesse aux entiers dépens.

Par déclaration du 3 avril 2019, la société Groupe TSF a relevé appel du jugement de première instance.

Par un arrêt du 4 février 2021, la cour d’appel de Paris, a statué ainsi :

– confirme le jugement sauf sur le montant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, des dommages-intérêts pour préjudice moral distinct et de l’indemnité allouée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

– statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :

– prononce la nullité de la convention annuelle de forfait jours,

– condamne la société Groupe TSF à verser à M. [B] [O] les sommes de :

* 130 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

* 3 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral distinct

* 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

– déboute la société Groupe TSF de sa demande présentée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

– condamne la société Groupe TSF aux dépens.

Sur le pourvoi principal de la société Groupe TSF et le pourvoi incident de M. [B] [O], la Cour de cassation, par arrêt du 21 septembre 2022, a cassé l’arrêt de la cour d’appel de Paris seulement en ce qu’il a débouté M. [B] [O] de ses demandes en paiement de sommes à titre de rappel d’heures supplémentaires de congés payés afférents et au titre des contreparties obligatoires en repos pour dépassement du contingent annuel d’heures supplémentaires pour les années 2014, 2015 et 2016.

La Cour de cassation reproche au juge d’appel d’avoir fait peser la charge de la preuve des heures supplémentaires sur le seul salarié alors qu’il résultait des constatations des juges d’appel d’une part, que le salarié présentait des éléments suffisamment précis pour permettre à l’employeur de répondre, d’autre part, que ce dernier ne produisait aucun élément de contrôle de la durée du travail.

Vu les dernières conclusions remises et notifiées le 13 septembre 2023, aux termes desquelles M. [B] [O] demande à la cour d’appel de :

– réformer le jugement du conseil de prud’hommes de Bobigny du 27 mars 2019 en ce qu’il a débouté Monsieur [B] [O] du surplus de ses demandes et plus généralement en toutes les dispositions lui faisant grief

En conséquence de la nullité de sa convention de forfait en jours, il est demandé à la cour, statuant à nouveau de :

– condamner la société Groupe TSF au paiement d’un rappel d’heures supplémentaires de

135 935,63 euros brut

– condamner la société Groupe TSF à payer à Monsieur [B] [O] la somme de 13 593,56 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de congés payés afférente au rappel d’heures supplémentaires

– condamner la société Groupe TSF à payer à Monsieur [B] [O] les indemnités suivantes correspondant à la contrepartie obligatoire en repos sur les heures supplémentaires :

* 9 170 euros pour l’année 2014

* 31 886,93 euros pour l’année 2015

* 29 035,73 euros pour l’année 2016

– fixer la moyenne de salaire à 13 799,16 euros

– condamner la société Groupe TSF à payer à Monsieur [B] [O] un reliquat de l’indemnité conventionnelle de licenciement revalorisée d’un montant de 34 312,58 euros

– condamner la société Groupe TSF à payer à Monsieur [B] [O] un reliquat de l’indemnité compensatrice de préavis revalorisée d’un montant de 12 772,48 euros

– condamner la société Groupe TSF à payer à Monsieur [B] [O] 1 277,25 euros au titre des congés payés afférents au reliquat de l’indemnité compensatrice de préavis

– condamner la société Groupe TSF à payer à Monsieur [B] [O] 27 600 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect des congés

– condamner la société Groupe TSF à payer à Monsieur [B] [O] 6 174,15 euros au titre des jours supplémentaires travaillés au-delà de la durée annuelle prévue par la convention de forfait jours

En tout état de cause,

– débouter la société de toutes ses demandes

– ordonner les intérêts au taux légal et la capitalisation des intérêts à échoir

– condamner la société Groupe TSF à payer à Monsieur [B] [O] la somme de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

– condamner la société Groupe TSF aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions remises et notifiées le 25 septembre 2023, aux termes desquelles la société Groupe TSF demande à la cour d’appel de :

In limine litis,

– écarter la demande portant sur les dommages et intérêts pour non-respect du repos du salarié durant ses congés

– écarter la demande sur le paiement des jours travaillés au-delà de la durée annuelle de la convention de forfait annuelle en jours

Sur le fond,

A titre principal,

– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Bobigny en date du 27 mars 2019 en ce qu’il a débouté M. [O] de ses demandes au titre des heures supplémentaires et congés payés y afférents et des indemnités correspondant à la contrepartie obligatoire en repos pour les années 2014 à 2016

En conséquence statuant à nouveau,

– débouter M. [O] de toutes ses demandes, fins et conclusions

A titre subsidiaire,

– débouter Monsieur [O] de ses demandes indemnitaires excessives et les ramener à plus juste proportion, soit 15 653,10 euros au titre d’un rappel de salaire pour heures supplémentaire, outre les congés afférents

A titre reconventionnel,

– condamner M. [O] à payer à la société Groupe TSF la somme de 12 916 euros brut au titre des jours de repos pris indûment en application d’une convention forfait jours nulle

– condamner M. [O] à verser à la société Groupe TSF la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Conclusions auxquelles la cour se réfère expressément pour un plus ample exposé des faits de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties.

L’instruction a été clôturée le 26 septembre 2023.

MOTIFS DE LA DECISION :

1/ Sur la recevabilité des nouvelles demandes indemnitaires du salarié pour non-respect des congés et pour les jours supplémentaires travaillés au-delà du forfait

La société Groupe TSF demande à ce que les prétentions du salarié en termes de dommages-intérêts pour non-respect des congés soit dites irrecevables sur le fondement de l’article 564 du code de procédure civile car nouvelle en cause d’appel. Elle relève, également, que la cour d’appel de Paris a prononcé la nullité de la convention annuelle de forfait en jours et que ces dispositions n’ont pas été cassées. La décision est, donc, irrévocable de ce chef et M. [B] [O] ne peut valablement réclamer une indemnité pour les supposés jours supplémentaires travaillés au-delà du forfait.

La cour retient que la demande de dommages-intérêts pour non-respect des congés, qui est nouvelle en cause d’appel et qui n’est pas l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire d’une précédente prétention du salarié doit être dite irrecevable. Il en sera de même de sa demande indemnitaire au titre des jours accomplis au-delà du forfait puisque la convention de forfait en jours a été annulée par la décision de la cour d’appel de Paris qui n’est plus discutée sur ce point.

2/ Sur la demande de rappel d’heures supplémentaires et de contreparties obligatoires en repos

Selon l’article L. 3174-1 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci.

M. [B] [O] fait valoir que compte tenu de son poste de Directeur Comptable Groupe et alors qu’il disposait d’une équipe réduite, il devait travailler tard le soir, ainsi que les week-end et durant ses congés (pièce 29). Il précise qu’il débutait sa journée de travail à 10h00 pour la terminer à 20h00, ce qui entraînait un dépassement de l’horaire légal de 35 heures hebdomadaires. Le salarié indique que c’est sur cette base qu’il a réalisé un tableau reprenant ses horaires de travail pour la période non prescrite (pièce 111) mais qu’il lui arrivait, assez fréquemment, de travailler au-delà de 20h00 comme en témoigne les courriels qu’il produits (pièces 29, 64, 65, 66, 67, 86, 87, 88, 89, 90, 91, 92, 93). Le salarié verse, également, aux débats des échanges de sms qui démontrent qu’il lui arrivait de commencer à travailler dès 8h30 (pièces 69-11, 81-1, 81-4) et tard dans la soirée (pièces 69, 69-1, 69-2, 69-3, 69-9, 69-10, 69-12, 70, 71, 73,74, 75, 76, 81-, 81-3, 81-5, 81-6, 82, 83). Enfin, M. [B] [O] communique des attestations qui témoignent de son amplitude horaire de travail et de son investissement dans ses fonctions.

M. [N] [E], Directeur du département Cinéboutique fait état des horaires tardifs qu’effectuait le salarié, et ce de façon récurrente :

“Au long de toutes ces années passées chez TSF, j’ai régulièrement vu Mr [O] travailler dans son bureau alors que je quittais moi-même la société à des heures très tardives” (pièce 25)

Madame [W] [J], intérimaire, confirme également que : “Mr [O] restait souvent tard le soir surtout quand il y avait un surcroît de travail notamment à l’arrivée des clôtures de comptes mensuelles ou annuelles, il mangeait souvent rapidement pour accomplir ses tâches, il était aussi présent pour la validation des inventaires de mon service afin de répondre aux demandes des commissaires aux comptes.” (pièce 26). Six autres attestations font, également, état de plages horaires dépassant significativement les 7 heures par jour en raison de la charge de travail dense qui pesait sur M. [B] [O] (pièces n°21, 22, 23, 24, 27, 28).

Le salarié explique qu’il a, également, tenu compte dans ses tableaux des réunions du CODIR auxquelles il a assisté tous les lundis de l’année 2017 et qui ne lui ont pas permis de prendre sa pause méridienne. Il précise que la 23ème journée de chaque mois, la préparation des déclarations de TVA le contraignait à terminer sa journée vers 21h/21h30. Entre le 25ème jour et le 31ème jour de chaque mois, le reporting mensuel, l’amenait également à quitter son travail entre 20h30 et 21h30.

En conséquence, il revendique un rappel de salaire d’un montant total de 135 935,63 euros, dont il a déduit les 26 jours de RTT accordés, au titre des heures supplémentaires pour la période non couverte par la prescription de 2014 à 2017, outre 13 593,56 euros au titre des congés payés afférents.

Le salarié qui prétend avoir effectué 378,75 heures supplémentaires en 2014, soit 148,75 heures au-delà du contingent annuel de 230 heures prévues par la convention collective applicable, revendique une somme de 8 336,36 euros [148,75 x (8 500/151,67)] au titre de la contrepartie obligatoire en repos pour cette année.

Pour l’année 2015, où il affirme avoir effectué 747,25 heures supplémentaires, dont 517,25 au-delà du contingent annuel, il réclame une somme de 28 988,10 euros [517,25 x (8 500/151,67)].

Enfin, au titre de l’année 2016, où il soutient avoir accompli 701 heures supplémentaires, dont 471 au-delà du contingent annuel, il sollicite une somme de 26 396,12 euros [471 x (8 500/151,67)].

L’employeur observe que les demandes du salarié ont varié entre la première instance, la cour d’appel et la cour d’appel de renvoi, ce qui démontre que ses prétentions ne sont pas étayées par la production d’éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour lui permettre d’y répondre. Il constate, également, que les tableaux récapitulatifs des horaires produits par le salarié mentionnent un horaire constant de 10 heures par jour, qui ne peut correspondre à la réalité de son activité et qui suffit à démontrer que ces documents ont été établis a posteriori et pour les besoins de l’instance. D’ailleurs, les tableaux soumis aux différents juges qui se sont penchés sur cette question ont varié et présentent des discordances flagrantes que l’employeur pointe dans ses écritures.

La société Groupe TSF conteste l’affirmation du salarié selon laquelle il commençait sa journée de travail à 10h00 et elle verse aux débats de nombreux témoignages de ses collègues qui affirment qu’il avait l’habitude d’arriver au bureau entre 11h00 et 11h30 ce qui pouvait poser des problèmes d’organisation de son service (pièces C3, C33, C34, C35, C36). Cette prise de fonction tardive explique en grande partie que l’heure de départ de l’entreprise du salarié se trouvait décalée après 20h00. L’employeur relève que les attestations que M. [B] [O] produit au soutien de sa demande d’heures supplémentaires sont très imprécises sur ses horaires et, notamment, ceux de sa prise de fonction. Enfin, la société Groupe TSF indique que, contrairement, à ses allégations le salarié ne justifie pas avoir eu à travailler durant ses week-ends et ses congés à la demande de l’employeur.

L’employeur demande donc qu’il soit jugé que le salarié ne justifie pas de la réalisation d’heures supplémentaires ou, à tout le moins, que leur nombre soit réduit à deux heures supplémentaires par semaine, ce qui représente un montant total de rappel de salaire de 15 653,10 euros bruts, outre les congés payés afférents.

Mais, la cour observe que les éléments versés aux débats par l’employeur ne permettent pas d’établir de manière objective et fiable le nombre d’heures de travail effectuées par le salarié alors, qu’y compris dans le cadre d’une convention de forfait en jours, il lui appartenait de vérifier la charge effective de travail de M. [B] [O]. En cet état, il sera considéré que la société Groupe TSF ne remplit pas la charge de la preuve qui lui revient, le salarié ayant de son côté apporté à la cour des éléments suffisamment précis pour permettre d’y répondre. Le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu’il a débouté M. [B] [O] de sa demande de rappel de salaires et congés payés afférents au titre des heures supplémentaires ainsi que de ses demandes au titre de la contrepartie obligatoire en repos.

Eu égard aux erreurs pointées par l’employeur sur les tableaux de rappel d’heures supplémentaires établis par le salarié, il sera arbitré que M. [B] [O] a effectué 252,50 heures supplémentaires en 2014, pour un montant total de rappel de salaires de 19 082,55 euros.

En 2015, le montant total d’heures supplémentaires sera arbitré à 498 heures, pour un montant total de rappel de salaires de 38 001,63 euros.

En 2016, le montant total d’heures supplémentaires sera arbitré à 467,33 heures, pour un montant total de rappel de salaires de 35 549,77 euros.

En 2017, le montant total d’heures supplémentaires sera arbitré à 62,33 heures, pour un montant total de rappel de salaires de 4 791,65 euros.

Soit un montant total de rappel de salaires de 97 425,60 euros, outre, 9 742, 56 euros au titre des congés payés afférents.

S’agissant de la contrepartie obligatoire en repos, le contingent annuel de 230 heures supplémentaire a été dépassé de 22,50 heures en 2014, ce qui donne droit au salarié à une somme de 1 260,96 euros [22,50 x (8 500/151,67)]. Pour l’année 2015, il lui sera alloué une somme de 15 019,45 euros [(498-230) x (8 500/151,67)]. Enfin, pour l’année 2016, il lui sera alloué une somme de 13 300,62 euros [(467,33-230) x (8 500/151,67)]. Soit un total de 29 581,03 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos.

3/ Sur les incidences du rappel d’heures supplémentaires sur le montant de l’indemnité conventionnelle et de l’indemnité compensatrice de préavis

Le rappel d’heures supplémentaires accordé au salarié ayant une incidence sur le salaire de référence servant de base de calcul à l’indemnité conventionnelle de licenciement et l’indemnité compensatrice de préavis, celui-ci sera évalué à 11 121,16 euros bruts mensuel.

En conséquence, le salarié pouvait légitimement prétendre à une somme de 33 363,48 euros, correspondant à trois mois de salaire, à titre d’indemnité compensatrice de préavis.

M. [B] [O] ayant perçu une somme de 29 625 euros à ce titre, il lui reste dû une somme de 3 738,48 euros, outre 373,85 euros au titre des congés payés afférents.

A titre d’indemnité de licenciement, M. [B] [O] aurait dû bénéficier d’une somme de

68 580,49 euros[(3/10ème x 11 121,16 x 10) + (5/10ème x 11 121,16 x 6) + (5/10ème x 11 121,16 x 4/12)]. Or, il n’a perçu qu’une somme de 60 895,83 euros. L’employeur sera condamné à lui verser le solde de 7 684,66 euros.

4/ Sur la demande de condamnation de M. [B] [O] au remboursement des jours de RTT

La convention de forfait en jours ayant été définitivement jugé nulle, l’employeur réclame le remboursement des jours de RTT accordés au salarié, qui sont devenus indus, pour un montant total de 12 916 euros, dont il justifie le calcul ( pièces C 37, B 11, B 12).

Le salarié objecte qu’il a déduit le montant correspondant aux jours octroyés de ses demandes de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires. Cependant, la cour n’ayant pas procédé à ces mêmes déductions dans ses calculs des rappels de salaires au titre des heures supplémentaires, il sera fait droit à la demande de condamnation de la société intimée.

5/ Sur les autres demandes

Les sommes allouées à titre salarial produiront intérêts au taux légal à compter du 14 décembre 2017, date du bureau de conciliation, la date de la réception par l’employeur de sa convocation à ce dernier n’étant pas connue de la cour.

Il sera ordonné la capitalisation des intérêts dus pour une année entière.

La société Groupe TSF supportera les dépens de première instance, d’appel et de renvoi de cassation et sera condamné à payer une somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

La Cour, statuant sur renvoi de cassation, publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Statuant dans la limite de sa saisine,

Déclare irrecevables les demandes indemnitaires du salarié pour non-respect des congés et pour les jours supplémentaires travaillés au-delà du forfait en jours,

Infirme le jugement entrepris en ce qu’il a débouté le salarié de sa demande de rappel d’heures supplémentaires, de congés payés afférents, de contrepartie obligatoire en repos, et sur les montants alloués à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement, d’indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Condamne la société Groupe TSF à verser à M. [B] [O] les sommes de :

– 97 425,60 euros à titre de rappel de salaires pour heures supplémentaires

– 9 742,56 euros au titre des congés payés afférents

– 29 581,03 euros à titre d’indemnité pour impossibilité de bénéficier de la contrepartie obligatoire en repos

– 3 738,48 euros à titre de reliquat d’indemnité compensatrice de préavis

– 373,85 euros au titre des congés payés afférents

– 7 684,66 euros à titre de reliquat d’indemnité conventionnelle de licenciement

– 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Dit que les sommes allouées à titre salarial produiront intérêts au taux légal à compter du 14 décembre 2017,

Ordonne la capitalisation des intérêts pourvu qu’ils soient dus pour une année entière,

Condamne M. [B] [O] à verser à la société Groupe TSF la somme de 12 916 euros brut au titre des jours de repos pris indûment en application d’une convention forfait jours nulle,

Déboute la société Groupe TSF de sa demande présentée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et du surplus de ses demandes,

Déboute M. [B] [O] du surplus de ses demandes,

Condamne la société Groupe TSF aux dépens de renvoi de cassation.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

 


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