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13 février 2024
Cour d’appel de Lyon
RG n°
22/08601
N° RG 22/08601 – N° Portalis DBVX-V-B7G-OV2H
décision du Tribunal de Commerce de LYON du 27 octobre 2022
2020j00367
Société PHARMACIE DELAPERRIERE
C/
S.A. BNP PARIBAS LEASE GROUP
SOCIETE COMMERCIALE DE TELECOMMUNICATION (EXERCANT SOUS LA MARQUE CLOUD ECO)
COUR D’APPEL DE LYON
3ème chambre A
ORDONNANCE DU CONSEILLER
DE LA MISE EN ETAT DU 13 Février 2024
APPELANTE :
Société PHARMACIE DELAPERRIERE au capital de 50.000 euros, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LYON sous le numéro 820 524 403, représentée par son Gérant en exercice domicilié es qualité audit siège
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Richard BENON de la SELEURL RB AVOCAT, avocat au barreau de LYON, toque : 1748 substitué et plaidant par Me FAVRE-ROCHEX, avocat au barreau de LYON
INTIMEE :
S.A. BNP PARIBAS LEASE GROUP au capital de 285.079.248 €, immatriculée au RCS de NANTERRE sous le n° B 632 017 513, représentée par le Président de son Conseil d’administration en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Frédéric ALLEAUME de la SCP AXIOJURIS LEXIENS, avocat au barreau de LYON, toque : 673
PARTIE INTERVENANTE FORCEE :
SOCIETE COMMERCIALE DE TELECOMMUNICATION (EXERCANT
SOUS LA MARQUE CLOUD ECO) au capital de 7.500.000 €, immatriculée au R.C.S. de BOBIGNY sous le numéro B 412 391 104,
prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par Me Julien MARGOTTON de la SELARL PRIMA AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : T.1287 substitué et plaidant par Me BOCENO, avocat au barreau de LYON
Audience tenue par Patricia GONZALEZ, Présidente chargée de la mise en état de la 3ème chambre A de la cour d’appel de Lyon, assistée de Clémence RUILLAT, Greffière,
Les conseils des parties entendus ou appelés à notre audience du 30 Janvier 2024, ceux-ci ayant eu connaissance de la date du délibéré au 13 Février 2024 ;
Signée par Patricia GONZALEZ, Présidente chargée de la mise en état de la 3ème chambre A de la cour d’appel de Lyon, assistée de Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE : contradictoire
* * * * *
EXPOSE DU LITIGE
Le 3 novembre 2017, la société SCT a conclu avec la société Pharmacie Delaperriere des contrats de fourniture de lignes téléphoniques fixes et accès à internet, un abonnement pour une ligne téléphonique mobile, et de location de matériel de téléphonie mobile et fixe.
La société SCT a ensuite cédé le contrat de location de matériels à la société BNP Paribas Lease Group (ci-après BNP Paribas).
En mars 2018, la Pharmacie Depaperriere a résilié par anticipation les contrats en invoquant des manquements de la société SCT.
Deux instances ont été introduites :
– une instance à l’initiative de la société SCT devant le tribunal de commerce de Bobigny aux fins d’obtenir la résolution des contrats aux torts exclusifs du client et paiement de ses factures et frais de résiliation. La cour d’appel de Paris par arrêt du 18 novembre 2022 a, infirmant le jugement hormis sur le paiement de mensualités échues impayées au titre du contrat de téléphonie mobile, prononcé la résiliation du contrat de téléphonie fixe et d’accès à internet aux torts de la société SCT,
– une instance à l’initiative de la banque devant le tribunal de commerce de Lyon pour paiement des sommes dues en exécution du contrat de location de matériels.
Par jugement du 27 octobre 2022, le tribunal de commerce de Lyon a :
– condamné la société Pharmacie Delaperriere à payer à la société BNP Paribas la somme de 9.208,62 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 juin 2019,
– débouté la société Pharmacie Delaperriere de l’ensemble de ses prétentions à l’encontre de la BNP Paribas,
– condamné la société Pharmacie Delaperriere à payer à la société BNP Paribas la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens.
La société Pharmacie Delaperriere a formé appel par déclaration d’appel du 21 décembre 2022.
Se prévalant de l’interdépendance des contrats, elle a appelé en intervention forcée la société SCT Telecom.
Par conclusions du12 juin 2023, la BNP Paribas a saisi le conseiller de la mise en état d’un incident et lui demande par dernières conclusions d’incident du 25 septembre 2023 :
Vu les articles 907 et 789 du Code civil,
– prononcer l’irrecevabilité du moyen de défense tiré de l’interdépendance du contrat conclu entre la société SCT et la société Pharmacie Delaperriere et le contrat conclu entre cette dernière et la concluante,
– débouter la société Pharmacie Delaperriere et la société SCT de l’intégralité de leurs demandes, fins et prétentions contraires.
Elle fait valoir que :
– le conseiller de la mise en état a compétence pour trancher la fin de non recevoir qu’elle soulève, ce que les juges du fond rappellent constamment,
– la Cour de cassation, par deux avis des 3 juin 2021 et 11 octobre 2022 a apporté des précisions sur les compétences respectives du conseiller de la mise en état pour statuer sur les fins de non recevoir mais celles tirées de l’autorité de la chose jugée ne relèvent pas de l’appel au fond de l’affaire,
– le contrat de prestations de service est résilié de sorte que la Pharmacie Delaperriere soutient l’interdépendance des contrats, entre contrat de location et contrat de fourniture de services, aux fins de caducité du contrat de location pour échapper au paiement de sa dette mais le tribunal de commerce de Bobigny a rejeté cette thèse et la cour d’appel de Paris a confirmé cette position,
– l’appelante entend ainsi exercer une voie de recours sur une décision devenue définitive alors que le point litigieux a été tranché et ne peut à nouveau être débattu,
– le tribunal de commerce n’a pas tranché la question de l’autorité de la chose jugée puisqu’il a rendu son jugement avant la cour d’appel de Paris ; la fin de non recevoir, si elle était accueillie, n’aurait pas pour conséquence de remettre en cause ce qui a été jugé au fond par le premier juge, lequel n’a pas retenu l’interdépendance,
– l’autorité de la chose jugée relève de la procédure d’appel puisque l’effet dévolutif n’est pas en cause, et elle concerne un arrêt de la cour d’appel de Paris,
– l’autorité de la chose jugée s’étend à tout ce qui est virtuellement compris dans le dispositif, et donc implicitement tranché, et en l’espèce, le tribunal de commerce de Bobigny a fait sienne l’analyse de la société SCT sur l’indépendance des contrats, et retenu qu’aucune cession de créance n’était intervenue sur les contrats de téléphonie mobile ou fixe.
La société Pharmacie Delaperriere demande au conseiller de la mise en état, par dernières conclusions d’incident du 12 septembre 2023 :
– à titre principal, déclarer irrecevable la fin de non recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée présentée devant le conseiller de la mise en état,
– à titre subsidiaire, la rejeter,
– en tout état de cause, condamner la BNP Paribas à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la présente procédure d’incident.
Elle fait valoir que :
– la fin de non recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée ne relève pas des pouvoirs du conseiller de la mise en état ; elle suppose de statuer sur ce qui est soumis à la cour d’appel, ce qui tend à délimiter l’objet du litige en appel ; il s’agit donc d’une fin de non recevoir relevant de l’appel,
– subsidiairement, la décision de la cour d’appel de Paris n’est pas revêtue de l’autorité de la chose jugée sur l’absence d’interdépendance des contrats puisque ceci n’a pas été tranché dans le dispositif, et la question de l’interdépendance contractuelle n’a pas été soumise à la juridiction parisienne puisqu’ il n’a pas été question devant les juridictions parisiennes de l’interdépendance des contrats de prestations et de location financière,
– la jurisprudence considère désormais que l’autorité de la chose jugée n’est pas attachée aux motifs, fussent-ils décisoires.
La société Commerciale de Télécommunication demande au conseiller de la mise en état par conclusions du 30 novembre 2023 de :
Vu les articles 1222, 554, 555 du Code de procédure civile
– se déclarer parfaitement compétent pour juger des fins de non-recevoir tirées de l’autorité de la chose jugée et soulevées par la société SCT Telecom,
– dire irrecevable l’assignation en intervention forcée qui lui a été délivrée par la Pharmacie Delaperriere,
– dire irrecevables les demandes de la Pharmacie Delaperriere au titre de la chose jugée,
– débouter la Pharmacie Delaperriere de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
– en tout état de cause, la condamner au paiement de la somme de 3.000 euros par application de l’article 700 Code de procédure civile et aux entiers dépens.
Elle fait valoir que :
– le conseiller de la mise en état est seul compétent en application de l’article 915 du code de procédure civile pour déclarer les actes de procédure irrecevables en application de l’article 930-1 du code de procédure civile, et l’appelante ne verse aucune jurisprudence remettant en cause ce principe de l’article 915,
– l’appelante ne se prévaut que de la jurisprudence et de la doctrine sur les demandes nouvelles en appel mais toutes les fins de non recevoir ne relèvent pas du seul juge du fond, ce qui serait dénaturer l’article 914 du code de procédure civile,
– l’assignation en intervention forcée est irrecevable, en l’absence d’évolution du litige depuis la première instance, l’arrêt de la cour d’appel de Paris n’est pas une circonstance de droit nouvelle modifiant les données juridiques du litige,
– la cour d’appel de Paris a déjà statué sur le litige l’opposant à la Pharmacie Delaperriere ; cette dernière ne peut demander à la présente cour de se prononcer sur l’interdépendance des contrats, et de la à la garantir en cas de condamnation ; les jurisprudences adverses sont inopérantes.
SUR CE :
Il résulte des dispositions combinées des articles 907 et 789 du code civil dans leur version applicable à la cause que le conseiller de la mise en état a compétence pour se prononcer sur les fins de non recevoir.
Toutefois, la Cour de cassation a estimé que :
– le conseiller de la mise en état ne peut connaître ni des fins de non-recevoir qui ont été tranchées par le juge de la mise en état, ou par le tribunal, ni de celles qui, bien que n’ayant pas été tranchées en première instance, auraient pour conséquence, si elles étaient accueillies, de remettre en cause ce qui a été jugé au fond par le premier juge ; la cour statuant au fond ayant seule le pouvoir de réformer la décision rendue par le premier juge,
– la Cour d’appel est compétente pour statuer sur des fins de non-recevoir relevant de l’appel, celles touchant à la procédure d’appel étant de la compétence du conseiller de la mise en état.
En l’espèce, la BNP Paribas, bien que n’employant pas la terminologie adéquate dans le dispositif de ses conclusions d’incident, se prévaut de la fin de non recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée à l’encontre d’une prétention de l’appelante découlant de l’interdépendance des contrats qu’elle allègue.
Toutefois, si la fin de non recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée n’a pas été examinée en première instance, n’ayant pas été soulevée par la Banque alors que la décision de la cour d’appel de Paris n’était pas encore rendu, il est incontestable que son examen est de nature à remettre en cause ce qui a été jugé en première instance, alors qu’il résulte des termes mêmes du jugement que la Pharmacie Delaperriere a été déboutée de sa demande au titre d’une interdépendance des contrats.
Il en découle que le conseiller de la mise en état n’a pas pouvoir pour statuer sur cette fin de non recevoir qui relève de l’appel et non de la procédure d’appel.
S’agissant de la recevabilité de l’intervention forcée, il appartient au seul juge du fond le soin de constater souverainement les faits pouvant constituer l’évolution du litige et il n’appartient pas non plus au conseiller de la mise en état d’en connaître.
Les dépens de l’incident sont à la charge de la société BNP Paribas.
Il est équitable à ce stade de la procédure de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Par ordonnance susceptible de déféré dans un délai de 15 jours à compter de son prononcé,
Disons que le conseiller de la mise en état n’a pas pouvoir pour trancher la fin de non recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée ni pour se prononcer sur la recevabilité de l’appel provoqué au regard de l’article 555 du code de procédure civile.
Condamnons la BNP Paribas aux dépens de l’incident.
Disons n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE CHARGEE DE LA MISE EN ETAT