Your cart is currently empty!
29 mars 2023
Cour d’appel de Nîmes
RG n°
21/02964
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 21/02964 – N° Portalis DBVH-V-B7F-IEJ2
AV
TRIBUNAL DE COMMERCE DE NIMES
03 juin 2021 RG :2019J269
S.A.R.L. SUD ESPACE TP
C/
S.A.R.L. ISAP-GCSP
Grosse délivrée
le 29 MARS 2023
à Me Nicolas JONQUET Me Caroline FAVRE DE THIERRENS
COUR D’APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
4ème chambre commerciale
ARRÊT DU 29 MARS 2023
Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de NIMES en date du 03 Juin 2021, N°2019J269
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Madame Agnès VAREILLES, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre
Madame Claire OUGIER, Conseillère
Madame Agnès VAREILLES, Conseillère
GREFFIER :
Madame Isabelle DELOR, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l’audience publique du 09 Mars 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 29 Mars 2023.
Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.
APPELANTE :
La société SUD ESPACE TP, SARL inscrite au RCS de Castres sous le numéro B 450 118 963, siret 450 118 963 00013, code APE 4663 Z,
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentée par Me Nicolas JONQUET de la SCP SVA, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉE :
S.A.R.L. ISAP-GCSP, immatriculée au RCS sous le n° B 433 257 250, agissant en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège,
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Caroline FAVRE DE THIERRENS de la SELARL FAVRE DE THIERRENS BARNOUIN VRIGNAUD MAZARS DRIMARACCI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 23 Février 2023
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre, le 29 Mars 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Vu les appels interjetés les 29 juillet et 6 août 2021 par la SARL Sud Espace TP à l’encontre du jugement prononcé le 3 juin 2021 et rectifié le 21 juillet 2021 par le tribunal de commerce de Nîmes, dans l’instance n°2021J236,
Vu la jonction des procédures n° RG 21/02964 et 21/03059, ordonnée le 16 septembre 2021, l’instance se poursuivant désormais sous le seul et unique numéro 21/02964,
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 23 décembre 2021 par l’appelante et le bordereau de pièces qui y est annexé,
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 28 septembre 2021 par la SARL ISAP GCSP, intimée, et le bordereau de pièces qui y est annexé,
Vu l’ordonnance du 23 janvier 2023 de clôture de la procédure à effet différé au 23 février 2023,
Suivant acte sous signature privée du 11 septembre 2017, la société ISAP GCSP a pris en location auprès de la société SARL Sud Espace TP une pelle sur chenilles de marque Hitachi.
A la demande du client, l’engin a été livré le 22 septembre 2017. Le 18 octobre 2017, un transporteur mandaté par le loueur est venu récupérer la pelle à chenilles sur le lieu du chantier de travaux.
Le loueur a émis le 31 octobre 2017 une facture n°21405155 d’un montant de 5 688,76 euros correspondant à la location de la pelle. Un acompte de 1 432 euros avait été préalablement réglé par le locataire.
Le loueur a émis le 14 novembre 2017 une seconde facture n°21106199 d’un montant de 6 152,06 euros correspondant à des frais de réparation de la pelle louée.
Une lettre recommandée de mise en demeure de payer la somme de 11 840,82 euros a été adressée le 12 décembre 2018 au locataire par le loueur.
A la requête du loueur, le président du tribunal de commerce de Montpellier a rendu le 11 janvier 2019 une ordonnance portant injonction au locataire de régler la somme de 11 840,82 euros à titre principal et la somme de 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Le 7 février 2019, le locataire a réglé la somme de 4 256,76 euros correspondant au solde de la facture de loyers.
Par courrier daté du 20 février 2019 et expédié le 22 février 2019, le locataire a formé opposition à l’ordonnance portant injonction de payer qui lui a été signifiée le 1er février 2019.
Par jugement du 10 mai 2019, le tribunal de commerce de Montpellier s’est déclaré incompétent pour connaître de l’affaire et a ordonné son renvoi devant le tribunal de commerce de Nîmes.
Par jugement du 3 juin 2021, rectifié le 21 juillet 2021, le tribunal de commerce de Nîmes a :
-Dit et jugé recevable tant sur le fond que sur la forme l’opposition à ordonnance portant injonction de payer effectuée par la SARL ISAP-GCSP suivant courrier recommandé avec avis de réception du 20 février 2019;
-Réformé en toutes ses dispositions l’ordonnance d’injonction de payer du 11 janvier 2019;
-Débouté la SARL Sud Espace TP de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions formulées à l’endroit de la SARL ISAP-GCSP;
-Condamné la SARL Sud Espace TP à payer à la SARL ISAP-GCSP 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;
-Rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions contraires;
-Condamné la SARL Sud Espace TP aux dépens de l’instance, liquidés et taxés à la somme de 89,45 euros, en ce non compris le coût de la citation introductive d’instance, le coût de la signification de la décision, ainsi que tous les autres frais et accessoires.
Les 29 juillet et 6 août 2021, la société SARL SUD ESPACE TP a interjeté appel de cette décision aux fins de la voir réformer en toutes ses dispositions.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique, l’appelante demande à la cour, au visa des articles 1103 et suivants du code civil, de :
-Réformer le jugement prononcé par le tribunal de commerce de Nîmes en toutes ses dispositions,
-Condamner l’intimée à lui payer la somme de 6 152,06 euros, outre intérêts au taux contractuel de 3% à compter de la mise en demeure du 12 décembre 2018
-Condamner, en outre, l’intimée à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
Au soutien de ses prétentions, l’appelante fait valoir qu’il ne saurait être fait grief au transporteur de ne pas avoir établi de bon de retour contradictoire, puisque celui-ci est uniquement chargé du transport. Le loueur ne pouvait pas non plus faire signer un état de retour, la société locataire n’étant pas présente sur le site du Carrefour Market où était située la pelle louée, avant d’être récupérée par le transporteur le 18 octobre 2017. L’état contradictoire n’est pas obligatoire lorsque le locataire est absent, l’article 12 des conditions générales du contrat prévoyant que, dans ce cas, l’état retour est réputé accepté par le locataire.
L’appelante reproche au tribunal d’avoir retenu qu’il n’existait pas de preuve, ni de constat contradictoire, puisque dès la réception du matériel, l’information a immédiatement été portée à la connaissance du locataire.
Elle soutient que les dégradations constatées, lors de la restitution du matériel, ne figuraient absolument pas sur l’état du bon de départ. Les horaires précisés sur le bon de transport sont incompatibles avec l’utilisation de la pelle par une entreprise tierce. En outre, les dégradations subies par la pelle ne peuvent être que la conséquence d’une utilisation en mode travail.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique, l’intimée forme appel incident et demande à la cour, au visa des articles 1103, 1709 et suivants du code civil, de :
-Dire et juger irrecevable l’appel interjeté par la société SARL Sud Espace TP tant sur la forme que sur le fond
-Confirmer le jugement querellé en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a réduit l’allocation allouée à la société SARL ISAP GCSP sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance;
-Faire droit à l’appel incident de la concluante portant exclusivement sur le montant de la somme allouée au titre de l’article 700 du code de procédure civile
En conséquence et statuant à nouveau,
-Dire et juger recevable tant sur le fond que sur la forme l’opposition à ordonnance portant injonction de payer effectuée, suivant courrier recommandé avec avis de réception n° 1 A 153 077 82122 du 20 février 2019
-Réformer en toutes ses dispositions l’ordonnance en injonction de payer du 11 janvier 2019 rendue par le Monsieur le Président du tribunal de commerce de Montpellier
-Débouter la société SARL Sud Espace TP de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions formulées à l’endroit de la société SARL ISAP GCSP en cause d’appel
-Condamner la société SARL Sud Espace TP à porter et à payer à la société SARL ISAP GCSP la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de l’instance au titre de la procédure de première instance
-Condamner la société SARL Sud Espace TP à porter et à payer à la société SARL ISAP GCSP la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens au titre de la présente procédure d’appel.
L’intimée réplique que les dégradations sont arrivées sans sa faute. Le transport de la chose louée reste sous la responsabilité de celui qui l’exécute. Le transporteur engage sa responsabilité lors du chargement et du déchargement de la machine.
L’intimée expose qu’elle n’est pas signataire de l’état de départ et de retour de la marchandise louée. Le transporteur a signé à la fois le bon de transport et l’état de départ. De plus, les travaux de réparation qui ont fait l’objet de la facturation litigieuse ne correspondent pas aux dégradations figurant dans l’état de retour de la marchandise louée. La date de la facture est postérieure de près d’un mois de la location de la pelle. Il n’est pas exclu que la pelle ait pu être à nouveau louée par une entreprise tierce. La preuve que les réparations soient dues à des dégradations apparues pendant la location de la machine n’est pas rapportée. Les photographies versées au débat ne démontrent pas que l’appareil loué ne serait plus fonctionnel et que les rayures situées sur la masse de la machine soient susceptibles d’être apparues, au moment du retour de la marchandise.
L’intimée soutient qu’elle a utilisé la pelle dans les règles de l’art et que le transporteur est à l’origine des dommages subis par la pelle. Le loueur n’a pas adressé ses réserves au transporteur en contravention avec l’article 6 des conditions générales interprofessionnelles de location de matériel d’entreprise. Il n’a pas non plus mis en oeuvre de constat contradictoire des dégâts occasionnés sur la pelle, en contravention avec l’article 12. L’envoi d’un mail communiquant des clichés photographiques pris par le loueur ne peut être qualifié de constat contradictoire. Les rayures préexistaient au départ de la marchandise.
MOTIFS
1) Sur la recevabilité de l’appel
Le preneur soulève l’irrecevabilité ‘tant sur la forme que sur le fond’ de l’appel interjeté par le bailleur mais ne développe aucun moyen, à l’appui de la fin de non-recevoir excipée qu’il convient de rejeter.
2) Sur la recevabilité de l’opposition à l’ordonnance d’injonction de payer
L’ordonnance portant injonction de payer a été signifiée le 1er février 2019 au preneur qui a formé opposition par courrier recommandé expédié le 22 février 2019, soit dans le délai d’un mois prévu par l’article 1416 du code de procédure civile.
Le jugement déféré sera, par conséquent, confirmé en ce qu’il a déclaré l’opposition recevable en la forme.
3) Sur la demande en paiement de la facture de réparation
Aux termes de l’article 1732 du code civil, le preneur répond des dégradations ou des pertes qui arrivent pendant sa jouissance, à moins qu’il ne prouve qu’elles ont eu lieu sans sa faute.
En l’espèce, il résulte du bon de retour et de la lettre de voiture que la pelle à chenilles a été récupérée sur le lieu du chantier par une entreprise de transport le 18 octobre 2017 à 8 heures 30, qu’elle a été chargée à 9 heures 30 et qu’elle est arrivée à 14 heures au siège social du loueur.
Par courriel du même jour à 18 heures 15, le loueur a indiqué au preneur que la pelle venait de lui être livrée et qu’il y avait de la casse sur la machine qu’il allait devoir remettre en état. Ont été jointes à ce message des photographies montrant des traces de rayure.
L’état de départ de la machine en location fait état de rayures latérales sur la carrosserie, à l’avant droit de l’engin de chantier ; l’état de retour mentionne que le rétroviseur gauche est fondu, que des rayures sont présentes sur la masse arrière, à gauche et à droite, que la serrure du capot GO est pétée ainsi que le pot d’échappement.
Les parties s’accordent pour reconnaître que l’état de retour n’a pas été signé par le preneur qui n’était pas présent lors de l’arrivée du transporteur sur le chantier de travaux en vue de l’enlèvement du véhicule.
Le preneur conteste également avoir signé l’état de départ du 22 septembre 2017. La signature qui figure dans la case réservée au locataire est identique à celle qui figure dans les conditions générales à l’emplacement réservé au locataire mais également à celle qui figure dans la lettre de voiture dans la case réservée au conducteur.
Il résulte de la comparaison avec le rapport hebdomadaire de chantier que sur cette même lettre de voiture, figure bien la signature du responsable de travaux du loueur dans la case destinée au remettant. Il en découle que ce n’est pas le responsable de travaux qui a signé à la place du conducteur.
Il s’en suit qu’il n’est pas démontré que le preneur ait signé l’état de départ.
Conformément aux dispositions de l’article 1731 du code civil, en l’absence d’état des lieux, le preneur est présumé avoir reçu la chose louée en bon état de réparations locatives et il doit la rendre telle, sauf la preuve contraire.
Le preneur invoque à son profit l’application des conditions générales interprofessionnelles de location de matériel d’entreprise qui n’ont valeur contractuelle que si elles ont été expressément mentionnées dans le contrat de location.
En l’espèce, les conditions générales du contrat conclu le 11 septembre 2017 précisent en leur article 1 qu’elles ont été établies à partir des conditions générales interprofessionnelles de location de matériel d’entreprise. Pour autant, le contrat signé ne renvoie pas expressément aux conditions générales interprofessionnelles de location de matériel d’entreprise dont les stipulations non reproduites ne sont pas opposables au loueur.
Le preneur se réfère, dans ses écritures, aux conditions générales du contrat de sorte qu’il ne conteste pas en avoir pris connaissance et les avoir acceptées. L’article 12 des dites conditions générales stipule qu’en l’absence du locataire au moment de la restitution, l’état retour est réputé accepté par celui-ci. En revanche, les conditions générales du contrat ne reprennent pas l’article 12 des conditions générales interprofessionnelles de location de matériel d’entreprise qui prévoit qu’en cas de dommages au matériel loué, le loueur invite le locataire à procéder à un constat amiable et contradictoire dans un délai de cinq jours.
Il s’en suit que le preneur est présumé accepter le constat des dégradations figurant dans l’état de retour de la pelle à chenilles en location.
Les dégradations ont été dénoncées par le loueur, le jour même de la restitution du matériel, de sorte que le preneur n’établit pas qu’elles soient imputables à un autre locataire. De même, le loueur ne rapporte pas la preuve de leur commission pendant la durée du transport.
Dès lors, en application de l’article 1732 du code civil, le preneur doit répondre des dégradations qui sont arrivées pendant sa jouissance, faute de preuve qu’elles aient eu lieu sans sa faute.
La facture du 14 novembre 2017 fait état du remplacement de la tige vérin du godet et du joint du vérin du godet alors que ces pièces ne sont pas visées dans l’état de retour de la pelle et que les photographies versées au débat ne permettent pas d’établir qu’elles aient été endommagées pendant la durée du contrat de location.
Par conséquence, il sera déduit la somme de 3 827,63 euros hors taxes, soit de 4 593,16 euros TTC du montant de 6 152,06 euros TTC de la facture du 14 novembre 2017. Ainsi, le preneur sera condamné à payer au loueur la somme de 1 558, 90 euros au titre des réparations locatives.
S’agissant d’une condamnation à caractère indemnitaire, elle emportera intérêts au taux légal à compter de la présente décision, conformément aux dispositions de l’article 1231-7 du code civil.
4) Sur les frais du procès
Le preneur qui succombe sera condamné aux dépens de première instance et d’appel.
L’équité commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en faveur du loueur et de lui allouer une indemnité de 2 000 euros, à ce titre.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Infirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu’il a déclaré recevable l’opposition à injonction de payer
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Condamne la SARL ISAP GCSP à payer à la SARL Sud Espace TP la somme de 1 558, 90 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision
Déboute la SARL Sud Espace TP du surplus de ses prétentions
Y ajoutant,
Condamne la SARL ISAP GCSP aux entiers dépens de première instance et d’appel,
Condamne la SARL ISAP GCSP à payer à la SARL Sud Espace TP une indemnité de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Arrêt signé par la présidente et par la greffiere.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,