Your cart is currently empty!
21 mars 2023
Cour d’appel de Grenoble
RG n°
21/02098
N° RG 21/02098 – N° Portalis DBVM-V-B7F-K3SE
N° Minute :
C1
Copie exécutoire délivrée
le :
à
Me [R] [C]
la SCP LEGALP
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
2ÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU MARDI 21 MARS 2023
Appel d’un Jugement (N° R.G. 19/00196) rendu par le Tribunal judiciaire de GAP en date du 19 avril 2021, suivant déclaration d’appel du 05 Mai 2021
APPELANT :
M. [R] [F]
né le 18 Février 1962 à LA TRONCHE (38700)
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 1]
représenté par Me Eric ARDITTI, avocat au barreau de HAUTES-ALPES
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2023/001591 du 24/02/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de GRENOBLE)
INTIMÉ :
M. [G] [I]
né le 30 Juin 1974 à GAP (05000)
de nationalité Française
[Adresse 6]
[Localité 2]
représenté par Me Frédéric VOLPATO de la SCP LEGALP, avocat au barreau de HAUTES-ALPES
COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Emmanuèle Cardona, présidente,
M. Laurent Grava, conseiller,
Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère
DÉBATS :
A l’audience publique du 17 Janvier 2023, Laurent Grava, conseiller, qui a fait son rapport, assisté de Caroline Bertolo, greffière, en présence de Catherine Silvan, greffière stagiaire, a entendu seul les avocats en leurs conclusions, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile.
Il en a rendu compte à la Cour dans son délibéré et l’arrêt a été rendu à l’audience de ce jour.
EXPOSÉ DU LITIGE :
M. [I] [G] exerce une activité de construction et de montage de bâtiments, structures métalliques, location de matériel de travaux publics ou agricoles et de levage (nacelles, grues ou chariot élévateurs).
Le 16 octobre 2014, M. [I] a établi pour le compte de Madame [F] [N] un devis relatif au montage d’un bâtiment agricole pour un montant total de 84 000 euros. Ce devis a été accepté par cette dernière le 20 octobre 2014.
Le 14 février 2015, M. [I] a, à ce titre, établi une première facture d’acompte pour un montant total de 27 720 euros dont la somme de 4 000 euros lui a été payée par chèque.
M. [I], qui indique avoir installé sur le chantier [F] trois nacelles et une grue automotrice, précise avoir été contraint de stopper le chantier en raison de problèmes de santé l’ayant conduit à une hospitalisation de dix-sept jours en soins intensifs.
À son retour d’hospitalisation, M. [I] indique que M. [F] [R] se serait opposé au règlement du solde de la première facture d’acompte compte tenu du retard généré par l’hospitalisation, que M. [F] aurait refusé qu’il achève son travail pour l’avoir lui-même entre-temps terminé en utilisant le matériel de chantier laissé sur place dont il refusait par ailleurs la restitution.
M. [I] soutient que M. [F] l’aurait, sous la menace d’une arme, contraint de rédiger de manière antidatée deux documents attestant de la vente au 2 avril 2015 à son profit des deux treuils et de la nacelle [S] moyennant la somme de 33 000 euros qu’il aurait prétendument payée en espèces.
Il aurait procédé identiquement concernant la vente au 20 avril 2015 de la grue et de deux nacelles [S] moyennant la somme totale de 84 000 euros qu’il aurait là encore prétendument payée en espèces.
Soutenant la nullité de ces ventes consenties sous la menace pour lesquelles il n’a par ailleurs perçu aucune somme en retour, par courriers du 30 novembre puis du 5 décembre 2018, M. [I] a mis M. [F] en demeure de lui restituer ces six appareils de chantier.
Par courrier en réponse du 6 décembre 2018, M. [F] a indiqué être propriétaire de ces six appareils de chantier pour les lui avoir achetés en avril 2015.
Dans ce contexte, M. [I] a, suivant acte en date du 1er mars 2019 fait assigner M. [F] devant le tribunal de Gap.
Par jugement contradictoire en date du 19 avril 2021, le tribunal judiciaire de Gap a :
– prononcé l’annulation pour vice du consentement des ventes de matériels de chantier intervenues au 2 avril 2015 et au 20 avril 2015 entre M. [I] [G] et M. [F] [R] ;
– condamné en conséquence M. [F] [R] à restituer, au domicile de M. [I] [G], les biens y étant mentionnés, à savoir les deux treuils d’une tonne avec rails, les trois nacelles [S] et la grue mobile [S] ;
– assorti cette condamnation d’une astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard à compter de l’expiration du délai d’un mois suivant la signification de la présente décision ;
– condamné M. [F] [R] à payer à M. [I] [G] la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral consécutivement subi ;
– débouté M. [I] [G] de sa demande en réparation formulée au titre du préjudice économique ;
– débouté M. [I] [G] de sa demande en paiement de la somme de 23 720 euros au titre du solde de la facture d’acompte du 14 février 2015 ;
– débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires ;
– condamné M. [F] [R] à payer à M. [I] [G] la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné M. [F] [R] aux entiers dépens en ce compris le coût du procès-verbal d’huissier ayant été dressé par Me [Y] [B] le 6 décembre 2019 ;
– accordé à Me Christophe Guy, avocat, le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;
– dit n’y avoir lieu là exécution provisoire de la présente décision.
Par déclaration en date du 5 mai 2021, M. [R] [F] a interjeté appel de la décision.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 13 janvier 2022, M. [R] [F] demande à la cour de :
A titre principal sur la nullité du contrat de vente du 2 et 20 avril 2015,
Vu les articles 1111 et 1112 du code civil en vigueur en 2015 ;
Vu l’arrêt Cass. 3e civ., 13 janv. 1999, n° 96-18.309 ;
– dire et juger que les contrats du 2 avril 2015 et 20 avril 2015 n’ont pas été signés sous la contrainte de violence ;
En conséquence,
– réformer le jugement et débouter M. [I] de sa demande de voir déclarer nul les contrats du 2 avril 2015 et 20 avril 2015 pour vice du consentement ;
A titre infiniment subsidiaire sur la nullité du contrat,
Si la cour arrivait à croire que le contrat a été signé par la contrainte de violence,
– ordonner la nullité de la vente avec restitution du matériel mais sans les deux treuils ;
– ordonner la restitution du prix de vente du matériel à M. [F] [R] ;
Sur la demande de dommages et intérêts de M. [I],
Vu la condamnation à des dommages-intérêts pour préjudice moral pour violence ;
Vu l’absence de violence démontrée ;
– en conséquence réformer le jugement et débouter M. [I] de sa demande de réparation au titre du préjudice moral ;
Vu l’appel incident et la demande de dommages-intérêts à hauteur de 30 000 euros pour préjudice moral et préjudice économique ;
– débouter M. [I] de sa demande de dommages-intérêts à hauteur de 30 000 euros pour préjudice moral et préjudice économique ;
Sur la demande de revendication du matériel,
– constater que M. [I] ne justifie pas de la qualité de propriétaire du matériel revendiqué par des factures d’achat ;
En conséquence,
– réformer le jugement et dire n’y avoir lieu à restitution dudit matériel ;
Sur la demande de paiement de la facture du 14/02/2015,
Vu la facture du 14/02/2015 entre Mme [A] divorcée [F] et M. [I] ;
Vu la demande en paiement de la somme de 23720 euros de M. [I] au titre du solde de la facture du 14/02/2015 ;
– constater que le seul cocontractant de M. [I] est Mme [A] divorcée [F] au titre de la facture du 14/02/2015 ;
– constater que Mme [A] divorcée [F] à régler l’intégralité de la facture ;
En conséquence,
– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. [I] du paiement par M. [F] [R] du solde de la facture du 14/02/2015 ;
Sur la demande de dommages-intérêts de M. [F] pour procédure abusive,
Vu l’article 1240 du code civil ;
– condamner M. [I] à payer la somme de 5 000 euros pour procédure abusive ;
Vu la condamnation de M. [F] au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 ;
– réformer le jugement et débouter M. [I] de sa demande d’article 700 en 1re instance ;
– condamner M. [I] [G] à payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Il expose les éléments principaux suivants au soutien de ses écritures :
– il rappelle les faits et la procédure ;
– les factures produites par M. [I] démontrent clairement qu’il n’est pas propriétaire du matériel puisque les factures sont établies au nom d’un GAEC Terre Droite et non au nom de M. [I] ;
– le GAEC et M. [I] sont deux personnes distinctes ;
– l’attestation de M. [V] ne détaille en rien les prétendues pressions morales et psychologiques ;
– M. [F] produit les photographies du baptême de sa fille, baptême pour lequel M. [I] était le parrain ;
– M. [F] produit une attestation de M. [E] qui affirme avoir été présent le jour où M. [F] a remis les fonds de la vente des contrats du 2 avril et 20 avril 2015 ;
– ce témoin ne relate aucune violence mais surtout il affirme que le règlement a bien été versé ;
– la valeur des biens revendiqués est excessive ;
– si la violence était retenue, la nullité de la vente devra être ordonnée avec restitution du matériel mais sans les deux treuils qui n’ont jamais été livrés par M. [I] ;
– la restitution du prix de vente du matériel devra également être ordonnée.
Par conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 9 novembre 2021, M. [G] [I] demande à la cour de :
– confirmer le jugement rendu le 19 avril 2021 en ce qu’il a :
« – prononcé l’annulation pour vice du consentement des ventes de matériels de chantier intervenues au 2 avril 2015 et au 20 avril 2015 entre M. [I] [G] et M. [F] [R] ;
– condamné en conséquence M. [F] [R] à restituer, au domicile de M. [I] [G], les biens y étant mentionnés, à savoir les deux treuils d’une tonne avec rails, les trois nacelles [S] et la grue mobile [S] ;
– assorti cette condamnation d’une astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard à compter de l’expiration du délai d’un mois suivant la signification de la présente décision ;
– condamné M. [F] [R] à payer à M. [I] [G] la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné M. [F] [R] aux entiers dépens en ce compris le coût du procès-verbal d’huissier ayant été dressé par Me [Y] [B] le 6 décembre 2019 » ;
– réformer le jugement rendu le 19 avril 2021 en ce qu’il a :
« – débouté M. [I] [G] de sa demande en réparation formulée au titre du préjudice économique ;
– débouté M. [I] [G] de sa demande en paiement de la somme de 23 720 euros au titre du solde de la facture d’acompte du 14 février 2015 » ;
Statuant à nouveau, il est demandé à la cour de :
– condamner M. [F] d’avoir à payer à M. [I] une somme de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts en raison du préjudice moral et économique subis ;
– condamner M. [F] d’avoir à payer à M. [I] une somme de 23 720 euros au titre du solde de sa facture ;
En tout état,
– condamner M. [R] [F] à payer une somme de 5 000 euros en cause d’appel au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance d’appel.
Il expose les éléments principaux suivants au soutien de ses écritures :
– il rappelle les faits et la procédure ;
– il exerce sous l’enseigne ELAN, une activité de construction et montage de bâtiment, structures métalliques, ferronnerie, location de matériel de travaux publics ou agricoles et de levage (nacelles, grues ou chariots élévateurs), gardiennage de bateaux et caravanes, achat et vente de matériaux ;
– le 2 avril 2015, M. [F] a d’abord obligé M. [I] à rédiger sous la menace d’une arme deux documents datés du même jour ;
– en le tenant en joue, M. [F] n’a eu aucune difficulté pour extorquer de M. [I], nettement diminué et affaibli, la signature des actes qui le dépossédaient de plusieurs engins de chantier qui lui étaient pourtant indispensables pour la continuité de soin activité professionnelle ;
– il ajoute qu’il souffre d’épilepsie ;
– M. [F] argue de ce que M. [I] ne serait pas propriétaire du matériel, se fondant sur les factures établies au nom du GAEC Terre Droite ;
– comme le tribunal, la cour observera en réalité que toutes les factures portent également le nom de M. [I] de sorte que l’argument adverse est inopérant ;
– M. [V] a produit un témoignage du 17 juin 2016 ;
– le caractère belliqueux de M. [F] est connu dans la région.
La clôture de l’instruction est intervenue le 21 septembre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
À titre liminaire :
Il convient de rappeler qu’en application de l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions des parties.
Par prétention, il faut entendre une demande en justice tendant à ce qu’il soit tranché un point litigieux.
Par voie de conséquence, les expressions telles que « juger », « dire et juger », « déclarer », « dégager » ou « constater » ne constituent pas de véritables prétentions, mais en réalité des moyens qui ont leur place dans le corps des écritures, plus précisément dans la partie consacrée à l’examen des griefs formulés contre la décision entreprise et dans la discussion des prétentions et moyens, mais pas dans le dispositif même des conclusions.
En conséquence, il n’y a pas lieu de statuer sur celles-ci.
Sur les demandes au fond :
En l’espèce, les principaux éléments pris en compte par le premier juge pour statuer sur la nullité de la vente pour vice du consentement, sur la demande de dommages-intérêts, sur la demande en paiement du solde et sur le préjudice moral sont les suivants :
– les articles 1108, 1109, 1111 et 1117 anciens du code civil (devenus 1128, 1130, 1140 et 1178) trouvent à s’appliquer ;
– il y a violence lorsqu’elle est de nature à faire impression sur une personne raisonnable, et qu’elle peut lui inspirer la crainte d ‘exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent ;
– la violence est la pression exercée sur le contractant pour le contraindre à conclure un contrat ;
– le consentement est par conséquent vicié car dépourvu de toute liberté ;
– la violence peut être physique ou morale ;
– pour être source de nullité relative, elle doit revêtir deux caractères, elle doit tout d’abord être illégitime et doit avoir été déterminante pour vicier le consentement de la victime, son caractère déterminant s’appréciant eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné ;
– la nullité ne peut être sollicitée que par le cocontractant victime dans un délai de cinq ans à compter du jour où la violence a cessé ;
– dans l’hypothèse où la nullité du contrat serait à ce titre retenue, chaque contractant doit restituer les biens ou sommes reçues en vertu de ce contrat, l’annulation d’un contrat de vente entraînant les restitutions réciproques par les parties de la chose et du prix, étant précisé que seul le vendeur qui a reçu le prix est tenu de le restituer ;
– chaque partie doit prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ;
– en l’espèce, il est fait état de la menace d’une arme pour déterminer M. [I] à rédiger de manière antidatée deux documents attestant de la vente au 2 avril 2015 au profit de M. [F] de deux treuils et d’une nacelle [S] et de la vente au 21 avril 2015 d’une grue et de deux nacelles [S] ;
– il ressort des contrats passés entre les parties que M. [I] a tout d’abord vendu le 2 avril 2015 à M. [F] « deux treuils d’une tonne avec rails » pour un montant de 3 000 euros qui aurait été acquitté en espèces le même jour ;
– il lui a aussi vendu « une nacelle [S] HA 1 6DXTP n° de série 6906665898 » pour un montant de 30 000 euros qui aurait également été acquitté en espèces le même jour ;
– M. [I] a vendu au 20 avril 2015 à M. [F] « une grue mobile [S] et deux nacelles [S] » pour un montant de 84 000 euros qui aurait là encore été acquitté en espèces le 21 avril 2015 ;
– au soutien de sa demande en nullité, M. [I] produit une attestation de M. [V] établie le 17 juin 2016 dans les formes de l’article 202 du code de procédure civile aux termes de laquelle il atteste avoir personnellement constaté que durant les mois de mars à juillet 2015, M. [F] a utilisé des pressions morales et psychologiques sur M. [I] et a fini par obtenir de sa part un document disant que les machines lui appartenaient moyennant un paiement en espèces qui n’a jamais été effectué, que M. [F] a obtenu ces machines sans avoir effectué le moindre règlement et a continué à harceler M. [I] (alors que ce dernier était hospitalisé), concluant qu’à sa connaissance les machines sont bien la propriété de M. [I] ;
– ce comportement violent de M. [F] est corroboré par l’attestation en date du 14 octobre 2020 également établie dans les formes de l’article 202 du code de procédure civile par M. [X], selon lequel tout est sujet à discussion avec M. [F], chaque désaccord donne lieu à des menaces physiques, M. [X] attestant avoir personnellement fait à de nombreuses reprises l’objet de la part de ce dernier de jets de pierres et de menaces de mort réitérées devant témoins ;
– M. [I] produit également le récépissé de la plainte qu’il a déposée auprès de la Gendarmerie aux termes de laquelle il soutient avoir été victime le 9 novembre 2018 de la part de M. [F] de violences avec ITT conformément au certificat médical joint ;
– au vu de l’ensemble de ces éléments concordants et des circonstances dans lesquelles le consentement a été donné, il sera retenu que M. [F] a exercé sur la personne de M. [I], qui sortait de surcroît d’hospitalisation (17 jours en soins intensifs) une contrainte, des pressions illégitimes et déterminantes afin de le contraindre à conclure lesdits contrats de vente au 2 et 20 avril 2015 ;
– ce constat est clairement corroboré par le fait que M. [F] ne justifie pas du paiement de la somme totale de 117 000 euros qu’il est censé avoir à ce titre payée en espèces ;
– de même, M. [F] ne réfute pas expressément la version ainsi soutenue par M. [I] concernant les conditions de signature des documents de vente litigieux pour se contenter de contester l’absence de qualité de propriétaire de ce dernier et la valeur des biens litigieux ;
– c’est par ailleurs de manière paradoxale que M. [F] soutient l’absence de qualité de propriétaire de M. [I] tout en avançant que ce dernier serait toujours en possession d’une partie des biens meubles litigieux ;
– c’est à tort que M. [F] soutient que M. [I] serait toujours en possession d’une partie des biens litigieux ;
– s’il est vrai que le PV d’inventaire réalisé par huissier a inventorié au 14 décembre 2015 la présence de quatre des matériels revendiqués (une nacelle [S] HA 16DXTP n° de série 6906665 898, une nacelle [S] HA16DXTP n° de série 8906935155, une nacelle automotrice Pinguely série CD10717 ciseaux H15SX et une grue automotrice Pinguely TTR220 flèche de 18 m immatriculée 3 83 6VV02), il s’en déduit que M. [I] n’a jamais eu l’intention de vendre ces matériels et que les actes de ventes litigieux d’avril 2015 sont forcément antidatés ;
– M. [F] ne peut davantage valablement arguer du fait que M. [I] serait toujours en possession d’une partie des biens litigieux dans la mesure où :
* dans son courrier du 6 décembre 2018, M. [F] clame ouvertement sa qualité de propriétaire des biens litigieux en indiquant que « ce matériel n’appartient plus depuis avril 2015 à M. [I] car il me l’a vendu » ;
* le dernier constat d’huissier dressé à la demande M. [I] le 6 décembre 2019 à partir de la voie publique mentionne notamment la présence, sur la parcelle ZB[Cadastre 3] située sur la commune de [Localité 5] où M. [F] exploite un hangar, d’une grue autoportée de couleur rouge dont le bras élévateur est partiellement recouvert d’une bâche noire (sur cet engin, on peut lire les inscriptions « TTR 220 » et une « capacité de levage de 20 tonnes », les photographies étant jointes audit constat, et d’une nacelle de couleur jaune dont les photographies sont également jointes au constat ;
– les factures d’achat des matériels ont été établies en partie au nom du GAEC de Terre Droite (dont M. [I] est le gérant) et de M. [I], ce dernier étant d’ailleurs domicilié à l’adresse postale « Terre droite » ;
– l’attestation de M. [W] en date du 16 décembre 2019 précise que ce dernier déclare avoir, dans le cadre de son activité de maintenance industrielle, vu, entretenu et dépanné sur les chantiers de M. [I] les matériels de type nacelle et grue de levage sur camion, à savoir deux nacelles type automotrice à bras extensible, une nacelle type ciseau et plate-forme, ainsi qu’une grue de levage sur camion, toutes de la marque Pinguely/[S] ;
– de plus, s’il s’avérait que M. [I] n’était pas propriétaire des biens litigieux, situation au demeurant non démontrée, il appartiendrait alors au véritable propriétaire d’engager une action en revendication à son encontre ;
– l’ensemble de ces éléments permet de conclure que les contrats de vente au 2 et 20 avril 2015 doivent être annulés en raison d’un vice du consentement ;
– M. [F] sera en conséquence condamné à restituer au domicile de M. [I] les biens y étant mentionnés, à savoir les deux treuils d’une tonne avec rails, les trois nacelles [S] et la grue mobile [S] ;
– M. [I] n’a pas reçu le prix de vente, il ne sera pas tenu de le restituer ;
– compte tenu de l’inertie et de la résistance de M. [F], il y a lieu de prononcer une condamnation sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai d’un mois suivant la signification de la décision à intervenir (article L. 131-1 du code des procédures civiles d’exécution) ;
– en cas de dol ou de violence, des dommages et intérêts-peuvent être accordés à la partie qui en est victime ;
– la violence constitue un délit civil ;
– la responsabilité extracontractuelle de son auteur est toujours susceptible d’être recherchée ;
– dans la mesure où la violence a été commise antérieurement à la formation du contrat, la victime ne peut agir que sur le fondement de la responsabilité délictuelle ;
– M. [I] a subi des violences de la part de M. [F] afin de le forcer à contracter ;
– il sera équitablement indemnisé du préjudice moral en découlant à hauteur de la somme de 5 000 euros ;
– le préjudice économique lié à la privation depuis 2015 de l’usage de ces matériels, et aux difficultés rencontrées pour assumer les chantiers pour lesquels il devait intervenir, n’est pas justifié par M. [I] ;
– il sera en conséquence débouté de sa demande indemnitaire à ce titre ;
– il ressort des pièces du dossier que le devis ayant été établi par M. [I] le 16 octobre 2014 l’a exclusivement été envers Madame [F] [N] laquelle l’a par ailleurs accepté le 20 octobre 2014, étant précisé que les époux [F] sont divorcés depuis le 3 octobre 2013 ;
– si M. [I] invoque la « théorie de l’apparence », il ne justifie toutefois pas du fait que M. [F] ait lui-même sollicité le montage d’un bâtiment agricole sur le terrain de son ex-épouse, qu’il soit intervenu dans les pourparlers ou lors de la conclusion du contrat de prestations de services ;
– il ne justifie pas davantage de l’accomplissement de ce chantier à hauteur de la facture d’acompte du 14 février 2015, ni du fait que M. [F] l’aurait empêché de terminer le chantier ;
– M. [I] sera donc débouté de sa demande en paiement formulée à l’encontre de M. [F] ;
– il ne peut être retenu que M. [I] ait agi de manière dilatoire ou abusive, ni qu’ il ait abusé de son droit légitime d’agir en justice ou même agi avec une légèreté blâmable.
S’agissant donc de la nullité de la vente pour vice du consentement, de la demande de dommages-intérêts, de la demande en paiement du solde et du préjudice moral, en l’absence de nouveaux moyens et de nouvelles preuves présentés par les parties, c’est par des motifs pertinents au vu des justificatifs qui lui étaient soumis, que le tribunal s’est livré à une exacte analyse des faits et à une juste application des règles de droit.
La cour, adoptant cette motivation, confirmera le jugement entrepris.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
M. [R] [F], dont l’appel est rejeté, supportera les dépens d’appel, ceux de première instance étant confirmés.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. [G] [I] les frais engagés pour la défense de ses intérêts en cause d’appel. M. [R] [F] sera condamné à lui payer la somme complémentaire de 2 500 euros (deux mille cinq cents euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi :
Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;
Y ajoutant,
Condamne M. [R] [F] à payer à M. [G] [I] la somme complémentaire de 2 500 euros (deux mille cinq cents euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;
Condamne M. [R] [F] aux dépens.
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Mme Emmanuèle Cardona, présidente de la deuxième chambre civile et par la greffière,Caroline Bertolo, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE