Location de matériel : 14 mars 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/05336

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Location de matériel : 14 mars 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/05336
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14 mars 2023
Cour d’appel de Rennes
RG n°
20/05336

3ème Chambre Commerciale

ARRÊT N° 107

N° RG 20/05336 – N° Portalis DBVL-V-B7E-RBIY

Société GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE MANER BIHAN

C/

S.E.L.A.R.L. EP & ASSOCIES

S.A.S. DAVID – [F] ET ASSOCIES

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me PELOIS

Me HAREL

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 14 MARS 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,

Assesseur : Madame Fabienne CLEMENT, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère, rapporteur

GREFFIER :

Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats, et Madame Lydie CHEVREL, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l’audience publique du 29 Novembre 2022

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 14 Mars 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTE :

Société GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE MANER BIHAN, groupement foncier agricole, au capital social de 45 000 euros, immatriculé au RCS de LORIENT sous le numéro 316 779 651, pris en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentée par Me Jean-claude GOURVES de la SELARL CABINET GOURVES, D’ABOVILLE ET ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de QUIMPER

Représentée par Me Sylvie PELOIS de la SELARL AB LITIS / PÉLOIS & AMOYEL-VICQUELIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉES :

S.E.L.A.R.L. EP & ASSOCIES, prise en la personne de Maître [C] [H], ès qualités de liquidateur judiciaire de [T] S.A., immatriculée au RCS de QUIMPER sous le numéro 376 080 487, désignée à cette fonction par jugement du Tribunal de Commerce de Rennes du 4 avril 2018

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Sébastien HAREL de la SELARL CVS, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Jean-pierre FARGES du LLP GIBSON, DUNN & CRUTCHER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me Pierre-Emmanuel FENDER, avocat au barreau de PARIS

S.A.S. DAVID – [F] ET ASSOCIES, prise en la personne de Maître [R] [F], ès qualités de liquidateur judiciaire de [T] S.A., immatriculée au RCS de QUIMPER sous le numéro 376 080 487, désignée à cette fonction par jugement du Tribunal de Commerce de Rennes du 4 avril 2018

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Sébastien HAREL de la SELARL CVS, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Jean-pierre FARGES du LLP GIBSON, DUNN & CRUTCHER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, Me Pierre-Emmanuel FENDER, avocat au barreau de PARIS

Le groupe [T] était un acteur majeur de la fabrication et la distribution de viande de volailles en France et à l’international.

Le GFA de Maner-Bihan (le GFA), dont la famille [T] détient l’ensemble des parts sociales, assurait l’élevage de poulets de chair sur son site de [Localité 3].

Le 1er janvier 2005, la SNC [T], reprise en 2013 par la SA [T], et le GFA ont conclu un contrat de production de poulets.

Le Groupement Foncier Agricole de Maner-Bihan et la SA [T] étaient dirigés par la même personne, M. [D] [T].

La SA [T] a fait l’objet d’une procédure de redressement judiciaire le 1er juin 2012 et des plans de redressement judiciaires, aux termes desquels la famille [T] a perdu le contrôle du groupe [T], ont été arrêtés par jugement du 29 novembre 2013.

Par jugement du 04 avril 2018, a été prononcée la liquidation judiciaire de la SA [T] et ont été désignés liquidateurs judiciaires la SAS DAVID [F] et la SELARL EP et ASSOCIES;

Après que la famille [T] ait perdu le contrôle de la SA [T], il aurait été découvert par les nouveaux dirigeants que la SA [T] avait supporté la charge de nombreux frais de fonctionnement du GFA de [Adresse 4], tandis que des avances lui auraient été versées; malgré le caractère réglementé de ces conventions, celles-ci n’auraient pas été autorisées.

Des démarches amiables visant à assurer le remboursement de ces sommes par le GFA, notamment par une dation en paiement de son matériel d’exploitation, ont été entreprises mais n’ont pu aboutir.

Par acte du 14 mai 2019, la SAS DAVID [F] et ASSOCIES et la SELARL EP ET ASSOCIES, ès-qualités de liquidateurs judiciaires de la SA [T] ont assigné le GFA en paiement de la somme de 548.611,64 euros avec intérêts courant à compter du 27 décembre 2016.

Par jugement du 16 septembre 2020, le tribunal de commerce de Lorient a:

– jugé prescrites les demandes en paiement se rapportant à la période antérieure au 12 juillet 2013,

– condamné le GFA à payer à la liquidation judiciaire de la SA [T]:

– la somme de 171.379,05 euros au titre des charges et frais de fonctionnement divers,

– celle de 27.904,99 euros au titre du compte fournisseur débiteur,

– celle de 8.623,83 euros au titre de la mise à disposition de M. [V],

– dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 27 décembre 2016,

– condamné le GFA au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté les parties du surplus de leurs demandes,

– condamné le GFA aux dépens,

– ordonné l’exécution provisoire.

Appelant de ce jugement le GFA de Maner-Bihan, par conclusions du 23 juin 2021, a demandé que la Cour:

– confirme le jugement rendu le 16 septembre 2020 par le tribunal Judiciaire de LORIENT en ce que cette décision juge prescrites les demandes en paiement se rapportant à la période antérieure au 12 juillet 2013,

– Y additant juge prescrites l’ensemble des demandes présentées par les mandataires judiciaires de la société [T] SA , quel qu’en soit le fondement : demande en paiement, demande d’indemnisation d’un préjudice prétendu sur le fondement de l’article 1134 ancien du code civil, ou demandes en remboursement sur le fondement de la gestion d’affaires.

– confirme le jugement rendu le 16 septembre 2020 par le tribunal Judiciaire de LORIENT en ce qu’il a jugé que les mandataires du Groupe [T] ne faisaient pas la preuve de l’existence d’une reconnaissance de dette de la part du GFA.

– confirme le jugement rendu le 16 septembre 2020 par le Tribunal Judiciaire de LORIENT en ce qu’il a débouté les mandataires judiciaires du Groupe [T] de leurs demandes indemnitaires relativement aux charges salariales et indemnités de licenciement engagées par lui au profit de MM. [Z] et [J].

– infnirme ce jugement pour le surplus,

– juge que les parties ont volontairement et contradictoirement pris la décision en Avril-Mai 2013 de nover leurs relations contractuelles et de substituer de nouvelles obligations au contrat initial daté du 1er janvier 2005

– juge que les mandataires du Groupe [T] sont irrecevables à présenter des réclamations de quelconque nature sur le fondement de ce contrat initial du 1er janvier 2005 devenu caduc.

– juge que, en tout état de cause, les dispositions de ce contrat du 1er janvier 2005 ne permettent pas le succès des prétentions des mandataires judiciaires du GROUPE [T].

– les débouter en conséquence de toutes leurs demandes fins et conclusions.

– subsidiairement, juge que la Société [T] SA a engagé sa responsabilité contractuelle à l’égard du GFA de MANER-BIHAN en n’assumant pas ou en mettant un terme unilatéralement et fautivement aux obligations à sa charge à compter des mois d’avril-mai 2013,

– juge que le préjudice occasionné au GFA de MANER-BIHAN par la faute de la société [T] SA a pour mesure le montant exact des sommes réclamées par les mandataires de la société [T] SA.ou à tout le moins le montant exact des condamnations qui pourraient être mises à la charge du GFA de MANER-BIHAN ,

– ordonne la compensation entre les créances et dettes respectives des parties. – condamne en tout état de cause les mandataires de la société SA à payer la somme de 15 000.00 € au GFA de MANER-BIHAN sur le fondement des dispositions de l’article 700 CPC.

– les condamne aux entiers dépens.

Par conclusions du 14 novembre 2022, la SELARL EP ET ASSOCIES et la SAS DAVID [F], en leurs qualités de liquidateurs judiciaires de la SA [T], ont demandé que la Cour:

– confirme le jugement rendu le 16 septembre 2020 par le Tribunal judiciaire de Lorient en ce qu’il a :

o Jugé le GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE MANER-BIHAN tenu de rembourser à [T] S.A. les frais supportés au titre de l’exploitation du site de [Adresse 4], en application des termes du contrat de production conclu le 1 er janvier 2005 avec [T] S.A. ; et

o Débouté le GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE MANER-BIHAN de ses demandes

– infirme le jugement rendu le 16 septembre 2020 par le Tribunal judiciaire de Lorient pour le surplus ;

Et, statuant à nouveau :

A titre liminaire :

– dise que le point de départ de la prescription de l’action en paiement de [T] S.A. à l’encontre du GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE MANER-BIHAN doit être fixé au 22 janvier 2014, date à laquelle [T] S.A. a véritablement pu connaître l’existence de ses droits de créance ;

– dise que le GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE MANER-BIHAN a reconnu sa dette à l’égard de [T] S.A. et que cette reconnaissance de dette a emporté interruption de la prescription de l’action en paiement de [T] S.A. dès le 26 mai 2014 ;

– dise non prescrit le droit d’action de [T] S.A. au titre de l’intégralité des créances détenues à l’encontre du GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE MANER-BIHAN, en ce compris celles dont l’exigibilité est antérieure au 12 juillet 2013 ;

À titre principal :

– dise que l’inexécution par le GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE MANER-BIHAN de ses obligations aux termes du contrat de production du 1 er janvier 2005 avec [T] S.A., et notamment de son obligation de remboursement et d’exécution de bonne foi du contrat du 1 er janvier 2005, a causé à [T] S.A. un préjudice à hauteur de l’intégralité des frais supportés au titre de l’exploitation du site de [Adresse 4], soit un montant total de 318.789,44 euros ;

– dise que l’inexécution par le GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE MANER-BIHAN de son obligation de bonne foi du contrat du 1 er janvier 2005 a causé à [T] S.A. un préjudice à hauteur des rémunérations et indemnités transactionnelles versées à Messieurs [Z] et [J], soit la somme totale de 229.822,20 euros ;

À titre subsidiaire, si la Cour d’appel considérait le contrat du 1 er janvier 2005 caduc :

– dise que [T] S.A. a assuré la gestion des affaires du GROUPEMENT

FONCIER AGRICOLE DE [Adresse 4] au sens des articles 1372 et suivants (anciens) du Code civil et doit ainsi recevoir remboursement de toutes les dépenses effectuées au bénéfice du GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE MANER-BIHAN ;

– condamne le GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE MANER-BIHAN à verser à la SAS DAVID-[F] et la SELARL EP & ASSOCIES ès qualités, les sommes suivantes :

o 318.789,44 euros au titre des frais supportés par [T] S.A. dans le cadre de l’exploitation du site de [Adresse 4], avec intérêts courant à compter du 27 décembre 2016 ;

o 229.822,20 euros au titre des rémunérations et indemnités transactionnelles versées à Messieurs [Z] et [J], avec intérêts courant à compter

du 27 décembre 2016 ;

En tout état de cause :

– condamne le GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE MANER-BIHAN à verser à la SAS DAVID-[F] et la SELARL EP & ASSOCIES ès qualités la somme de 25.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– condamne le GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE MANER-BIHAN aux dépens.

Durant le cours de son délibéré, la Cour a demandé aux parties:

– une note explicitant les rapports de droit entre la SNC [T] et la SA [T], accompagnée des KBIS des deux sociétés,

– l’éventuel jugement de péremption de la procédure suivie devant le TGI de Lorient suite à l’opposition à l’ordonnance d’injonction de payer et à défaut, toutes observations sur l’interruption de la prescription résultant de la signification de l’ordonnance d’injonction de payer du 26 septembre 2014.

Le 04 Janvier 2023, le GFA a adressé une note en délibéré.

Le 04 janvier 2023, la liquidation judiciaire de la SA [T] a adressé une note en délibéré.

Par note du 11 janvier 2023, la Cour a demandé aux parties de lui adresser une note sur le point de savoir dans quelle mesure elle peut statuer sur des demandes déjà évoquées lors d’une instance simplement suspendues.

Le 23 janvier 2023, la liquidation judiciaire de la SA [T] a adressé une note.

Le 25 janvier 2023, le GFA a adressé une note.

MOTIFS DE LA DECISION:

Sur la prescription:

L’acte introductif d’instance est daté du 14 mai 2019.

Toutefois, par assignation du 12 juillet 2018, la liquidation judiciaire de la SA [T] avait saisi le juge des référés d’une demande visant à voir condamner le GFA au paiement d’une provision de 548.611,64 euros.

Le juge des référés a dit n’y avoir lieu à référés mais l’assignation devant lui tendait aux mêmes fins que celle du 14 mai 2019 et dès lors, par application des dispositions de l’article 2241 du code de procédure civile, l’assignation du 12 juillet 2018 a interrompu le délai de prescription.

Au demeurant, cette interruption par l’assignation en référés n’est pas contestée par le GFA.

Celui-ci oppose la prescription de toute créance antérieure au 12 juillet 2013, en vertu des dispositions de l’article 2224 du code civil.

Toutefois, par ordonnance du 04 septembre 2014, il a été enjoint au GFA de payer à la SA [T] la somme de 283.747,17 euros au titre de diverses factures.

Cette ordonnnance a été signifiée le 26 septembre 2014 suivant au GFA qui y a fait opposition.

Les deux parties ont demandé le retrait du rôle de l’affaire sans jamais demander que soit constatée la péremption de l’instance.

L’instance étant dès lors simplement suspendue, la signification du 26 septembre 2014 , qui avait valablement interrompu la prescription, conserve tous ses effets, et la liquidation judiciaire de la SA [T] peut dès lors demander paiement de toutes créances postérieures au 26 septembre 2009.

Les factures les plus anciennes dont il est demandé le paiement sont des factures de décembre 2010, et s’en déduit que l’action de la liquidation judiciaire est recevable pour le tout.

Ensuite, il existe à l’évidence une listipendance entre l’action faisant suite à l’opposition à l’injonction de payer et le litige dont la Cour est saisie.

La Cour étant la juridiction de dégré supérieur, aucune exception ne peut être soulevée devant elle de ce chef et il lui revient, par application des dispositions de l’article 102 du code de procédure civile, de statuer sur le litige.

Le litige:

A titre liminaire, la Cour dit qu’il ne peut être tiré aucune conséquence des projets d’actes versés aux débats.

Ces projets s’inscrivaient dans le cadre de négociations visant à trouver une solution au litige et à ce titre, pouvaient contenir des renonciations de part et d’autre, visant à établir un compromis.

Les projets n’ayant pas été signés, ils ne peuvent désormais valoir expression du consentement de l’une ou l’autre des parties à reconnaître les faits juridiques y étant exprimés.

Le GFA de Maner-Bihan et la SNC [T] ELEVAGE (qui a fait l’objet d’une fusion-absorption par la SA [T] société absorbante, à effet au 21 novembre 2013) sont des entités juridiques qui ont été dirigées par la même personne physique.

Elles ont été liées par un contrat de production de volailles ‘contrat pour la production à façon de poulets de chair’ daté du 1er janvier 2005, conclu pour six bandes et renouvelable par tacite reconduction.

Les factures dont les liquidateurs judiciaires de la SA [T] ès-qualités demandent le paiement sont relatives à des frais de fonctionnement du GFA: honoraires, travaux sur les bâtiments (réparations, raccordement), fourniture d’énergie, frais de vétérinaire, frais de ramassage de volailles, qui ont été pris en charge par la SNC [T] alors qu’ils constituaient des charges du GFA.

Sont aussi réclamés les salaires, charges sociales et autres coûts salariaux d’employés de la SNC [T] mis à la disposition du GFA.

Les liquidateurs judiciaires soutiennent que l’avance de ces charges a été faite en application du contrat de 2005 qui prévoit que ‘dans le cas où le producteur ne remplirait pas entièrement ses engagements, pour quelques cause que ce soit et à tout moment, [T] ELEVAGE SNC pourra se substituer à lui, en totalité ou en partie, pour assurer le maintien du cheptel dans des conditions optimales d’élevage sur place ou dans tout autre lieu aux frais du producteur’.

Le GFA Maner-Bihan ne conteste pas avoir bénéficié de la majeure partie des prestations ou marchandises figurant sur les factures.

En dehors de la prescription, la thèse avancée par le GFA pour contester les demandes formées contre lui est que la SNC [T] aurait décidé ‘d’exploiter en direct l’élevage de [Adresse 4]’ car cette exploitation était conforme à ses intérêts.

Il invoque une novation des relations contractuelles entre le GFA et la SNC [T].

Cette analyse n’est confirmée par aucun écrit, et aucun des projets envisagés (bail ou cession) n’a été mené à son terme.

Surtout, s’il est établi que la SNC [T] a payé des charges normalement supportées par le GFA, il n’est pas prétendu qu’elle se soit, sur la même période, abstenue de verser au GFA le paiement du prix des poulets.

Or, une ‘exploitation en directe’ aurait nécessairement conduit la SNC [T] à ne plus payer quelque somme que ce soit au GFA.

Ensuite, le 21 mai 2014, la SA [T] a adressé au GFA de Maner-Bihan un courrier contenant diverses factures et l’informant que le solde comptable en faveur de la SA [T] était de 443.301,16 euros.

Le 26 mai 2014, le GFA, sans faire expressément référence à ce courrier ni reprendre un quelconque chiffre a lui-même adressé un courrier à la SA [T], l’informant que son assemblée générale du 19 février précédent avait décidé de ‘prendre toutes les dispositions afin de solder ses comptes avec la société [T]’ et rechercher activement des acquéreurs pour ses actifs; le GFA terminait son courrier en demandant des délais de paiement.

S’il ne peut valoir reconnaissance d’un montant de dette, ce courrier, par sa concommitance avec celui lui ayant été adressé le 21 mai, est tout de même un commencement de preuve par écrit de l’existence d’une créance de la SA [T] à l’encontre du GFA, suffisamment importante pour que celui-ci ne puisse la payer sans délai de paiement et se doive d’envisager la vente d’actifs pour la solder.

Les factures de marchandises et prestations de services:

Seules seront envisagées les factures correspondant à des marchandises et des prestations dont le GFA conteste devoir le remboursement pour d’autres moyens que ceux tirés de la prescription ou de l’exploitation directe, puisqu’il a été répondu plus haut sur ces deux moyens.

1) La facture du 31 décembre 2013 d’un montant de 35.863,71 euros intitulée ‘refacturation sur les installations d’élevage’:

Il s’agit:

– de deux factures de remise aux normes de l’installation électrique avant contrôle: 9.722,04 euros et 5.325,85 euros,

– de la facture du raccordement en eau et en gaz d’un bâtiment: 20.332 euros.

Le GFA prétend que la SNC [T] ne peut en obtenir le remboursement sur le fondement du contrat de production de volailles de 2005 puisqu’il ne s’agit pas de dépenses destinées à maintenir le cheptel dans des conditions optimales d’élevage.

Une telle argumentation ne peut être suivie, la rénovation d’une installation électrique et la rénovation de raccordement s’inscrivant précisément dans le cadre de dépenses à engager pour maintenir des conditions optimales d’élevage, s’agissant d’élevages hors sols où les volailles, soumises à des conditions sanitaires très strices, sont enfermées dans des bâtiments éclairés artificiellement,

La facture est due.

2 ) La facture datée du 31 janvier 2014 d’un montant de 27.771,29 euros:

Cette facture concerne:

– une refacturation pour frais d’élevage de décembre 2014 dont le GFA admet qu’elle concerne en fait le mois de décembre 2013 (l’exploitation du GFA a cessé fin décembre 2013),

– une somme de 23.920 euros correspondant à l’achat d’un bâtiment et aux frais de sa réimplantation; ce bâtiment situé sur un autre site, a été racheté à l’un des associés du GFA pour être réimplanté sur le site d’exploitation du GFA en mai 2013, soit sept mois avant la cession d’activité; le GFA soutient que cette dépense était inutile;

Pour autant, le bâtiment est implanté sur le terrain du GFA et l’achat du bâtiment pour le réimplanter sur le site n’était pas un acte entrant dans l’objet social de la SNC [T]; conformément aux dispositions de l’article 554 du code civil, le propriétaire du terrain, soit le GFA, est tenu au remboursement du bâtiment.

La facture est due.

3) La facture à échéance du 30 janvier 2014 pour 80.979,24 euros:

Sont contestés:

– 35,95 euros correspondant à une erreur,

– une facture de location de matériel de 12.558 euros: il peut être relevé que cette facture est à l’ordre de la SNC [T] et n’évoque pas le site du GFA, lequel n’apparaît sur aucune mention de la facture.

Seront donc déduits de cette facture les montants contestés et la facture est retenue comme due à hauteur de la somme de 68.385,29 euros.

Les frais salariaux:

1) M. [O]:

Le 1ER septembre 2010 a été conclu entre la SA [T] et le GFA un contrat de mise à disposition d’un salarié, M. [O], sur la base de deux journées de sept heures, à la fin de chaque bande d’élevage et de sept gardes de week-end par an, l’établissement d’accueil (le GFA) s’engageant à rembourser à l’établissement d’origine (la SA [T]), les frais salariaux y afférent.

Le fait que ces frais aient été facturés semestriellement ou annuellement plutôt que mensuellement comme prévu à la convention n’enlève rien à leur exigibilité.

Il est dû pour M. [O] trois factures du 1er septembre 2011, 20 décembre 2011 et 31 décembre 2013 pour un montant total de 22.982,57 euros.

Ces frais sont rattachés dans les conclusions de l’intimée à la somme demandée au titre de l’exploitation du site de [Adresse 4] pour 318.789,44 euros.

2) Messieurs [J] et [Z]:

Messieurs [J] et [Z] étaient employés par le GFA jusqu’en avril 2013, date à laquelle ils ont été rattachés à la société [T], en signant de nouveaux contrats de travail, sans cesser de travailler sur le site de l’élevage du GFA, leurs contrats de travail mentionnant explicitement qu’ils y sont affectés.

Pour autant, la société [T] ne justifie pas pour quels motifs elle les a conservés à son service sans activité après la cessation de l’activité du GFA à la fin de mois de décembre 2013.

Elle invoque dans ses lettres de licenciement les avoir conservés à son service au motif qu’elle envisageait une location ou un achat du site, mais il s’agit d’un choix qui lui est personnel et le GFA ne peut être tenu de lui rembourser les sommes exposées de janvier 2014 à Février 2015, date de leur licenciement, non plus que les sommes ayant ensuite été versées à ces salariés à titre transactionnel.

Sont donc dus uniquement les frais salariaux exposés de mai à décembre 2013 inclus, lesquels ne sont pas demandés, la pièce numéro 4 de l’intimée faisant uniquement référence à des frais salariaux exposés à compter de janvier 2014.

Dès lors, la demande émise à ce titre est rejetée et le jugement déféré est confirmé de ce chef.

En conséquence de ce qui précède, le GFA Maner Bihan est condamné à payer à la liquidation judiciaire de la SA [T] la somme de 318.789,44 euros dont à déduire les sommes de 35,95 et 12.558 euros, soit un montant de 306.195,49 euros, qui portera intérêts au taux légal à compter du 27 décembre 2016, ainsi que le demandent les intimés, visant la mise en demeure adressée à cette date.

Sur les frais irrépétibles et les dépens:

Le GFA Maner – Bihan, qui succombe majoritairement dans son recours, supportera la charge des dépens d’appel et paiera à la société [T], représentée par ses liquidateurs judiciaires, la somme de 15.000 euros au titre de ses frais irrépétibles d’appel.

PAR CES MOTIFS:

La Cour,

Confirme le jugement déféré en ce qu’il a rejeté la demande en paiement relative aux frais engagés pour Messieurs [J] et [Z] à hauteur de la somme de 229.822,20 euros, en ce qu’il a statué sur les frais irrépétibles et les dépens de première instance.

Infirme le jugement déféré pour le solde.

Statuant à nouveau:

Rejette l’exception tirée de la prescription partielle de la demande.

Condamne le GFA de Maner-Bihan à payer à la SA [T] représentée par ses liquidateurs judiciaires DAVID [F] et associés et EP & Associés la somme de 306.195,49 euros, qui portera intérêts au taux légal à compter du 27 décembre 2016, date de la mise en demeure.

Rejette le surplus des demandes.

Condamne le GFA de Maner-Bihan aux dépens d’appel.

Condamne le GFA de Maner-Bihan à payer la somme de 15.000 euros de frais irrépétibles d’appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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