L’illustrateur assimilé au journaliste

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L’illustrateur assimilé au journaliste
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Application de plusieurs conventions collectives

Dans cette affaire, un éditeur de presse a commis une maladresse juridique en soumettant volontairement un pigiste illustrateur à la Convention collective des journalistes. La société faisait application de la convention collective des employés des éditeurs de la presse magazine, de la convention collective des cadres des éditeurs de la presse magazine et, pour les salariés qui en dépendent, de la convention collective des journalistes, dont l’accord du 7 novembre 2008 relatif aux journalistes rémunérés à la pige.

Erreur indifférente sur les bulletins de paie

L’éditeur a fait valoir sans succès que l’illustratrice embauchée à la pige pour concevoir des illustrations d’une rubrique de l’un de ses magazines,  ne pouvait prétendre à l’application des dispositions de la convention collective des journalistes, peu important la mention erronée de cette convention sur les bulletins de salaire de l’illustratrice puisque : i)  les activités exercées ne lui permettaient pas de prétendre à la qualification de journaliste professionnel, le statut de journaliste nécessitant de prouver l’existence d’activités intellectuelles d’informations liées à l’actualité alors que la salariée ne rédige aucun texte ne fait exclusivement que des illustrations d’oeuvres de fiction sans rapport avec l’information du public sur l’actualité ; ii) elle n’était pas titulaire d’une carte de presse, qu’elle n’avait jamais sollicitée auprès de la commission de la carte d’identité des journalistes professionnels et que l’employeur aurait dû lui réclamer au-delà de 3 mois de collaboration si elle bénéficiait de ce statut.

Statut de journaliste professionnel

Les journalistes professionnels, y compris ceux rémunérés à la pige, bénéficient d’un statut partiellement dérogatoire au droit commun, prévu par les articles L7111-1 à L7114-1 du code du travail et par la convention collective nationale de travail des journalistes étendue, et donc appliqué de manière obligatoire, par toutes les entreprises occupant des journalistes professionnels.

Un accord collectif étendu et relatif aux journalistes professionnels rémunérés à la pige du 7 novembre 2008, précise les règles d’application aux intéressés de la convention collective des journalistes du 1er  novembre 1976 et du code du travail, dans certains domaines, dont la prime d’ancienneté.

L’article L7111-3 du code du travail pose qu’est journaliste professionnel, toute personne qui a pour activité principale, régulière et rétribuée, l’exercice de sa profession dans une ou plusieurs entreprises de presse, publications quotidiennes et périodiques ou agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources. Sont assimilées aux journalistes professionnels, les collaborateurs directs de la rédaction, rédacteur-traducteur, sténographe-rédacteur, rédacteur-réviseur, reporteurs- dessinateur, reporteurs-photographe, à l’exclusion des agents de publicité et de tous ceux qui n’apportent, à un titre quelconque, qu’une collaboration occasionnelle (article L 7111-4 du code du travail).

En conséquence, si toute convention par laquelle une entreprise s’assure, quel que soit le mode ou le montant de la rémunération attribuée et quelle que soit la qualification donnée à la convention par les parties, le concours d’un journaliste professionnel, est présumée être un contrat de travail, en revanche tout contrat de travail conclu par une société de presse ne donne pas au salarié le statut de journaliste professionnel de sorte qu’aucune présomption de la qualification de journaliste professionnel résultant du statut de salarié d’une entreprise de presse, ne bénéficie à tous les salariés.

La détention de la carte de journaliste n’est en elle-même pas déterminante pour établir l’existence du statut de journaliste de sorte que le défaut de détention de celle-ci n’exclut pas le salarié d’un statut de journaliste professionnel.

Soumission volontaire à la Convention collective des journalistes

Si l’employeur qui est lié par une convention ou un accord collectif doit l’appliquer à tous les salariés de la société, en revanche lorsque un salarié réclame le bénéfice d’une convention collective particulière, dont le champ d’application est réservé à certaines catégories de salariés pour les soumettre à un régime spécial quelle que soit l’entreprise qui les emploie, comme en l’espèce la convention collective des journalistes réservées aux journalistes professionnels, il doit démontrer :

– soit qu’il rentre dans son champ d’application, et que donc sur la base des textes susvisés il remplit les conditions posées cumulativement en démontrant i) qu’il a pour activité principale, régulière et rétribuée le journalisme, ou une profession assimilée, ii) exerce cette profession dans une ou plusieurs entreprises de presse, publications quotidiennes et périodiques ou agences de presse, iii) en tire le principal de ses ressources, peu important leur modicité.

-soit que l’employeur a entendu l’en faire bénéficier par un engagement unilatéral.

A ce titre, la mention d’une convention collective sur les bulletins de salaire d’un salarié pose une présomption simple d’application volontaire de celle-ci au bénéficie du salarié qui peut être combattue par tout moyen par l’une des parties.

En l’espèce se prévalant d’une simple erreur matérielle l’employeur se contentait d’affirmer que la salariée illustratrice n’entrait pas dans le champ d’application de la convention collective des journalistes professionnels. Or, cela n’a pas suffi à exclure une application volontaire de la convention collective. D’autant plus que l’employeur a l’obligation de porter à la connaissance du salarié la convention collective applicable, de surcroît lorsqu’il en applique plusieurs.

En l’espèce, la salariée remplissait 2 des 3 conditions posées pour se voir reconnaître la qualité de journaliste professionnel : elle travaillait pour un éditeur, entreprise de presse, de manière régulière et permanente depuis plus de 10 ans et a collaboré à chaque numéro de son magazine mensuel ; elle tirait l’essentiel de ses ressources de cette activité (entre 8 000 et 11 1000 euros annuels).

Application de la prime d’ancienneté

L’éditeur a également été condamné à l’illustratrice, un rappel de prime d’ancienneté, dans les limites de la prescription et sur le fondement de l’article 23 de la convention collective nationale de travail des journalistes. Cet article 23 prévoit que les barèmes minima des traitements se trouvent majorés d’une prime d’ancienneté calculée en fonction de l’ancienneté dans la profession en qualité de journaliste professionnel et d’ancienneté dans l’entreprise en qualité de journaliste professionnel.  Les barèmes de salaire expriment des minima sans discrimination d’âge, de sexe ou de nationalité ; en raison de la disparité des catégories d’entreprises de presse, le salaire minimum national et le tarif minimum de la pige sont fixés pour chaque forme de presse. A ce titre, les  partenaires sociaux ont signé le 7 novembre 2008, un accord concernant les journalistes professionnels rémunérés à la pige, entré en vigueur au mois de janvier 2009, étendu par arrêté du 11 octobre 2010, qui a pour objet de mettre en place des règles harmonisées d’application des droits pour les pigistes dans certains domaines notamment concernant la prime d’ancienneté.

L’accord prévoit ainsi que pour les journalistes permanents, la prime d’ancienneté est constituée de deux éléments: une prime liée à l’ancienneté dans l’entreprise, une autre liée à l’ancienneté dans la branche et qu’au regard de la difficulté de calculer le temps de présence en entreprise des journalistes pigistes, il convient de créer une prime d’ancienneté unique, aux taux rehaussés par rapport aux dispositions conventionnelles de droit commun, qui est due en fonction de la durée de détention effective de la carte de presse.

En l’absence de carte professionnelle, l’illustratrice a bénéficié de l’article 23 de la convention collective lui offrant le bénéfice d’une prime d’ancienneté à partir de 5 ans d’ancienneté dans la profession (prime d’ancienneté de 10 % des piges perçues).

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