Your cart is currently empty!
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 11
ARRÊT DU 07 Mai 2015 après prorogation
(n° , 4 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : S 13/10369
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 04 Septembre 2013 par le Conseil de Prud’hommes de CRETEIL – RG n° 12/02424
APPELANTE
Société NOUVELLE SOCIETE D’ASCENSEURS (NSA)
[Adresse 3]
représentée par Me Jean-Pascal JOUTEUX, avocat au barreau de POITIERS
INTIME ET APPELANT INCIDENT
Monsieur [R] [J]
[Adresse 2]
comparant en personne, assisté de Me Jean-toussaint GIACOMO, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 317
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 13 Février 2015, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Marie-Luce CAVROIS, Présidente de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Marie-Luce CAVROIS, Présidente
Madame Evelyne GIL, Conseillère
Madame Isabelle DOUILLET, Conseillère
Qui en ont délibéré
Greffier : Melle Flora CAIA, lors des débats
ARRET :
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Madame Marie-Luce CAVROIS, Présidente et par Mademoiselle Flora CAIA, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
M. [R] [J] a été engagé le 21 avril 1980 par la société SCMA pour exercer les fonctions de monteur ascenseur par contrat à durée indéterminée et à temps plein.
La société SCMA a fusionné avec la Nouvelle société d’ascenseurs ci après NSA, à effet du 1er décembre 2010 ;
M. [J] percevait une rémunération mensuelle de 3.320 €.
La NSA exploite une activité de construction et d’installation de matériel d’ascenseur, elle emploie plus de 10 salariés.
La convention collective applicable est celle des industries métallurgiques de Paris.
Par courrier du 18 septembre 2012, M. [J] a été licencié pour cause réelle et sérieuse et a reçu les indemnités légales.
Sur saisine de M. [J], le conseil de prud’hommes de Créteil a rendu le 4 septembre 2013 un jugement qui a :
– condamné la Nouvelle Société d’Ascenseurs à verser à M. [R] [J] :
– 20.000 € à titre de dommages et intérêts
– 1.000 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– mis les éventuels dépens et frais d’exécution à la charge de la société.
Suite aux appels formés par l’employeur et le salarié, l’affaire est venue devant la cour à l’audience du 13 février 2015.
A cette date, les conseils de chacune des parties ont soutenu oralement leurs conclusions visées par le greffier.
Aux termes de ses conclusions M.[J] demande à la cour de :
– dire son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse
– condamner la société NSA à lui payer :
– 120.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
– 2.500 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile.
– Condamner la société NSA aux entiers dépens ;
– Assortir les condamnations de l’exécution provisoire et de l’intérêt au taux légal.
La Société NSA demande à la cour de :
– réformer le jugement du 4 septembre 2013 ;
– débouter M. [J] de ses demandes ;
– le condamner à lui payer la somme de 2.000 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile et la condamner aux dépens.
SUR CE LA COUR
Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il est renvoyé, par application de l’article 455 du Code de procédure civile, à leurs dernières conclusions déposées à l’audience.
Sur le licenciement
Suite au contrôle opéré au moyen d’un éthylotest par la société NSA à l’encontre de deux de ses salariés M. [Q] et M. [J] sur leur lieu de travail, ces deux salariés ont été licenciés, chacun par une lettre du 18 septembre 2012, ainsi libellée :
« Malgré les explications que vous nous avez fournies, nous avons décidé de vous licencier pour les raisons suivantes :
Votre comportement a justifié un avertissement en date du 1er août 2012 pour ne pas avoir respecté délibérément les règles de sécurité attachées à votre fonction, au risque de mettre en danger les utilisateurs des ascenseurs et vous-même.
Cet avertissement vous a été remis en mains propres le 1er août 2012, sur le site du [Adresse 1], où vous effectuiez une opération de maintenance sur l’ascenseur.
Lors de cette remise, votre comportement était celui d’une personne sous l’emprise d’un état alcoolique.
Le contrôle que vous avez fait en présence de Monsieur [Z], délégué du personnel, s’est révélé positif, fait que vous avez reconnu.
Votre travail a immédiatement été interrompu.
De par votre attitude, vous avez exposé les utilisateurs de l’ascenseur à de graves dangers, dès lors que la sûreté de votre travail sur la machinerie ne pouvait être garantie.
Vous avez aussi exposé votre personne à des risques considérables, puisque vous travaillez la plupart du temps en hauteur.
Le danger que vous avez créé est d’autant moins admissible qu’un avertissement vous a été infligé pour des faits constatés en juillet 2012.
Malheureusement, votre comportement, votre non-professionnalisme et le non respect à l’égard des procédures de la société ne sont donc plus tolérables et acceptables. Vous assistez régulièrement à des réunions sur la sécurité auxquelles vous êtes convoqué par l’entreprise et au cours desquelles nous rappelons systématiquement les règles élémentaires et incontournables de sécurité afin d’éviter toute mises en danger des personnes, mais malgré cela, vous avez agi de manière très dangereuse, pour vous mais également pour vos collègues ou les usagers de cet ascenseur.
Bien que les faits soient graves, nous avons décidé de vous licencier pour cause réelle et sérieuse. »
Par courrier RAR expédié le 27 septembre 2012, M. [J] a contesté formellement le motif invoqué. Il a fait valoir que la société avait cherché à le piéger en le contrôlant après le déjeuner ; que le contrôle s’est déroulé en présence d’un représentant du personnel qu’il ne connaît pas, il a réfuté avoir manqué à une quelconque prescription de son contrat de travail, ni à celles du PPSPS. Aucun règlement intérieur prévoyant une telle interdiction ne lui ayant jamais été remis ni même exposé.
Il a ajouté que depuis des semaines la société multipliait les pressions pour obtenir son départ ; qu’alors « que je suis MONTEUR vous nous cantonnez, depuis le mois d’avril à un poste d’OUVRIER DE MAINTENANCE. Sans outil, nous sommes réduits à faire de la surveillance et du nettoyage de surcroît sans véhicule. Il n’y a rien d’exceptionnel en pleine canicule après avoir arpenté le 17ème à être en sueur et à présenter un certain état de fatigue.
Je dénonce ce licenciement ‘ qui dissimule à mon sens un licenciement économique déguisé – et vous informe de mon intention de saisir le Conseil de Prud’hommes. »
Il ajoute avoir travaillé 30 ans pour la même société et ne pas avoir eu de reproches de la part de son employeur et souligne qu’il n’ aucun local à sa disposition pour poser ses outils ou se changer.
En l’espèce, la société NSA fonde le licenciement sur la dangerosité du salarié qui se serait trouvé en état d’ébriété sur le lieu de son travail. Si le contrôle de l’éthylotest était positif et si le mode de preuve utilisé, à savoir l’éthylotest, n’est pas illicite, il n’en demeure pas moins que l’état de dangerosité n’est nullement établi, observation faite de ce que la société n’indique pas quel était le taux d’alcoolémie, ne caractérise nullement l’état d’ébriété présenté par les salariés et ne produit aucun élément sur l’éventuelle danger qu’auraient présenté les salariés.
De même force est de constater que la société ne produit aucun élément permettant de caractériser le non professionnalisme qu’elle invoque à l’encontre du salarié ; en effet l’avertissement du 1er août 2012, porte sur des faits distincts qui ont déjà été sanctionnés et ne suffisent pas à établir le non professionnalisme d’un salarié ayant trente deux ans d’ancienneté.
Aussi c’est à juste titre que le conseil de prud’hommes a relevé que compte tenu de l’ancienneté, la sanction devait être adaptée à la situation et au degré de nuisance qui n’est pas démontré.
Il en résulte que le licenciement de M. [J] n’est pas fondé sur une cause réelle et sérieuse.
Au vu de l’ancienneté de M. [J] et du fait qu’il n’a pas retrouvé de travail, il y a lieu de lui accorder la somme de 110.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement est donc infirmé sur le montant des dommages et intérêts.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
La société NSA succombant en la cause, elle est condamnée aux entiers dépens, sa demande formée au titre des frais irrépétibles est rejetée et il est fait droit à la demande de M. [J] sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile dans la limite de 2.000 €.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Confirme le jugement du conseil de prud’hommes de Créteil du 4 septembre 2013, en ce qu’il a estimé non fondé le licenciement de M. [R] [J], a condamné la société NSA à payer la somme de 1.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile et a mis les éventuels dépens de première instance à sa charge.
L’infirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau :
Dit que le licenciement de M. [R] [J] ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse ;
Condamne la société NSA à payer à M. [R] [J] :
– la somme de 110.000 € de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt ;
– la somme de 2.000 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile.
Rejette toute autre demande.
Condamne la société NSA aux entiers dépens.
Le Greffier,La Présidente,