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AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Wilson France, société à responsabilité limitée dont le siège social est Zone industrielle Petite Montagne Sud, …, en cassation d’un arrêt rendu le 10 juin 1993 par la cour d’appel d’Orléans (Chambre sociale), au profit de M. Geoffroy Z… de l’Ecluse, demeurant …, défendeur à la cassation ;
M. Z… de l’Ecluse a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;
LA COUR, en l’audience publique du 3 décembre 1997, où étaient présents : M. Monboisse, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Lanquetin, conseiller rapporteur, Mme Lemoine-Jeanjean, conseiller, MM. Richard de la Tour, Besson, conseillers référendaires, M. Chauvy, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Lanquetin, conseiller, les observations de la SCP Defrenois et Levis, avocat de la société Wilson France, de la SCP Nicolay et de Lanouvelle, avocat de M. Z… de l’Ecluse, les conclusions de M. Chauvy, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique du pourvoi de la société Wilson :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Orléans, 10 juin 1993), que M. Z… de l’Ecluse a été engagé, le 1er avril 1982, comme VRP multicartes par la société Wilson France, dans un secteur qu’il exploitait conjointement avec un beau-frère, M. Y…, avec partage égal des commissions ; que les relations de travail des deux représentants ont été interrompues en septembre 1991, à la suite de la réduction par l’employeur du secteur géographique ; qu’estimant la rupture imputable à la société et abusive, les deux représentants ont engagé une action prud’homale, M. Z… à Orléans et M. X… dans le ressort de la cour d’appel de Versailles, les deux instances ayant donné lieu à un premier arrêt statuant sur les circonstances de la rupture et ordonnant une expertise pour en évaluer les conséquences financières et à un second arrêt après expertise ; que les deux arrêts ont donné lieu à pourvois, ceux concernant M. X… ayant été jugés par la cour d’appel par arrêt du 25 juin 1997 ;
Attendu que la société Wilson reproche à l’arrêt de l’avoir déclarée redevable d’une indemnité de clientèle, d’avoir alloué à M. Z… de l’Ecluse une provision de 250 000 francs et désigné un expert avec mission de s’interroger sur le montant de l’apport de clientèle allégué, alors, selon le moyen, d’une part, que le bénéfice de l’indemnité de clientèle suppose que le représentant fasse la preuve de l’importance, en nombre et en valeur, d’un apport personnel de clientèle fidélisée et stabilisée susceptible de renouveler ses commandes ; que cette preuve ne saurait être déduite ni de la seule augmentation du chiffre d’affaires ou de commissionnements, ni d’une récompense attribuée au VRP, ni d’une offre d’indemnité effectuée dans le cadre de pourparlers n’ayant pas abouti ;
qu’ainsi, en se déterminant comme elle l’a fait, sans relever aucun élément objectif de nature à établir précisément l’existence d’un apport personnel de clientèle de la part du salarié, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article L. 751-9 du Code du travail ; et alors, d’autre part, qu’une mesure d’instruction ne saurait être ordonnée pour suppléer la carence d’une partie dans l’administration de la preuve qui lui incombe ;
qu’ainsi, en ordonnant une mesure d’instruction, à l’effet notamment d’établir l’apport de clientèle allégué par le représentant qui avait la charge de la preuve, la cour d’appel a violé l’article 146 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, d’abord, que la cour d’appel, après avoir relevé que la société Wilson avait elle-même offert de réparer le préjudice lié à la perte de la clientèle dans le secteur d’activité retiré au représentant, a fait ressortir que l’augmentation des commissions, certes acquises conjointement par les deux VRP, entre 1982 et 1990, était due aux mérites communs des salariés récompensés en 1990 par la coupe des meilleurs vendeurs ; qu’elle a pu en déduire l’existence d’un apport personnel de clientèle, ouvrant droit à indemnisation au profit de M. Z… de l’Ecluse ;
Attendu ensuite que la cour d’appel, qui n’a constaté aucune carence dans l’administration de la preuve, a souverainement apprécié l’opportunité d’une mesure d’instruction ; que le moyen ne peut donc être accueilli ;