Licenciement économique : 19 janvier 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 20/03728

·

·

Licenciement économique : 19 janvier 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 20/03728
Ce point juridique est utile ?

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-5

ARRÊT AU FOND

DU 19 JANVIER 2023

N° 2023/29

MS

Rôle N° RG 20/03728 – N° Portalis DBVB-V-B7E-BFXO4

[C] [Z]

C/

S.E.L.A.R.L. [D] & ASSOCIES

S.A. SEMIACS

Copie exécutoire délivrée

le : 19/01/23

à :

– Me Nathalie BEHAIS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

– Me Virginie POULET-CALMET, avocat au barreau de NICE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NICE en date du 30 Janvier 2020 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 18/00882.

APPELANT

Monsieur [C] [Z], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Nathalie BEHAIS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,

Et Me Doriane LALANDE, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS substitué par Me Joseph MAGNAN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

INTIMEES

S.E.L.A.R.L. [D] & ASSOCIES, ès qualités de comissaire à l’exécution du plan de la SA SEMIACS, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Virginie POULET-CALMET, avocat au barreau de NICE

S.A. SEMIACS, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Virginie POULET-CALMET, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 08 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre

Monsieur Antoine LEPERCHEY, Conseiller

Madame Gaëlle MARTIN, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Karen VANNUCCI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Janvier 2023.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Janvier 2023.

Signé par Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre et Mme Karen VANNUCCI, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE’

La S.A SEMIACS est une société d’économie mixte intercommunale pour l’amélioration de la circulation et du stationnement, gérée et administrée par les villes de [Localité 5] et de [Localité 4].

Monsieur [Z] a été engagé par la société SEMIACS, le 1er décembre 2000 en qualité de chef comptable pour un salaire de 18.500 Francs.

Par avenant du 29 octobre 2014, il a été promu aux fonctions de Directeur comptable et financier, statut cadre supérieur, membre du comité de direction.

Son salaire était calculé sur la base du coefficient de base 440, coefficient réel 540, de la convention collective nationale des transports publics de voyageurs

Par jugement rendu le 9 mai 2016, le tribunal de commerce a ouvert une procédure de sauvegarde de l’entreprise, puis le 20 décembre 2017, un plan de continuation a été adopté et Maître [S] [D] désigné en qualité de commissaire à l’exécution du plan.

M. [Z] a été licencié pour motif économique le 9 août 2018, il a accepté le bénéfice d’un contrat de sécurisation professionnelle. Salarié protégé, le licenciement de M. [Z] avait été autorisé par l’inspection du travail.

Le 11 octobre 2018, M. [Z] a saisi la juridiction prud’homale, pour voir constater que la société SEMIACS a violé le principe d’égalité de traitement des salariés et voir juger qu’en sa qualité de cadre supérieur, membre du comité de direction, il aurait dû bénéficier du coefficient 600 comme les autres membres du comité de direction.

Il sollicitait un rappel de salaire à partir de l’année 2015 et, de manière subséquente, un rappel d’indemnités de rupture recalculées en fonction de ce coefficient réévalué outre le versement de dommages et intérêts pour le préjudice subi en raison de l’absence de proposition de reclassement conforme : 5 466 €. Cette dernière demande n’est plus formée en cause d’appel.

Par jugement rendu le 30 janvier 2020, le conseil de prud’hommes de Nice l’a débouté de ses demandes et l’a condamné au paiement d’une somme de 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

M. [Z] a interjeté appel de cette décision dans des délais et formes qui ne sont pas critiqués.

PRÉTENTIONS ET MOYENS’

Par conclusions notifiées par voie électronique le’24 février 2021, M. [C] [Z] demande à la cour d’infirmer le jugement, statuant à nouveau :

– dire et juger que le coefficient 600 sera attribué au poste de Directeur comptable et financier qu’occupait le salarié à compter de son entrée en fonction, fixer son salaire à la somme de 5 466 euros bruts mensuels, et condamner la société SEMIACS à lui payer les sommes suivantes :

– rappel d’indemnité de licenciement 13 070.25 euros,

– rappel d’indemnité compensatrice de préavis : 277,56 euros,

– rappel d’indemnité compensatrice de congés payés afférents : 27,75 euros,

– rappels de salaire d’août 2015 à août 2018 : 24 844,73 euros,

– rappel d’indemnité compensatrice de congés payés afférents : 2 484,73 euros,

– rappel d’indemnité compensatrice de congés payés : 906,68 euros.

Il sollicite :

– la délivrance de ses documents de fin de contrat conformes sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir,

– la délivrance de ses bulletins de paie modifiés d’août 2015 à août 2018 sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir,

– la condamnation de la Société SEMIACS à payer la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens, de dire l’arrêt à intervenir opposable à Maître [S] [D], ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir. »

Sur sa demande tendant à se voir attribuer une meilleure classification professionnelle, le salarié rappelle que l’employeur est tenu d’assurer une égalité de traitement entre tous les salariés placés dans une situation identique selon le principe « à travail égal, salaire égal », qu’alors qu’il occupait le poste de directeur comptable et financier, membre du comité de direction, statut cadre supérieur, à la suite de son licenciement, il s’est aperçu que les autres membres du comité de direction, Messieurs [W] et [V] bénéficiaient d’un coefficient supérieur au sien.

Il soutient que ceux-ci se trouvaient dans une situation identique à la sienne au regard :

– de l’ancienneté et de l’expérience acquise,

– du niveau de responsabilité,

– de la charge de travail,

– des connaissances professionnelles.

et que, dans ces conditions, la différence de coefficient applicable ne se justifie pas.

S’agissant du critère de l’ancienneté, il fait valoir que les salariés avaient tous une ancienneté significative au sein de l’entreprise, qu’il participait au comité de direction depuis 2004 comme ses collègues et que tous les trois avaient des responsabilités importantes et comparables en termes de prérogatives.

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription que lui oppose l’employeur, M. [C] [Z] répond que contrairement à ce qu’allègue l’employeur, il n’a jamais eu pour mission de superviser les paies comme le montre son contrat de travail et son avenant qu’il n’avait pas accès aux montants des rémunérations de manière individualisée, que la société SEMIACS oppose la prescription en la justifiant par le relevé des frais généraux auquel il n’avait accès, que dans le relevé des frais généraux, il n’y a pas le détail des rémunérations ; que la demande n’est pas prescrite.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 13 octobre 2022, la société Semiacs, et Maître [S] [D] ès qualités de commissaire à l’exécution du plan de ladite société demandent à la cour d’infirmer le jugement et déclarer les demandes de M. [Z] relatives à une prétendue inégalité de traitement prescrites et donc irrecevables

Pour le surplus’il est demandé de confirmer le jugement rendu, de débouter M. [Z] de toutes ses demandes et de le condamner au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Sur la prescription, il est soutenu que M. [Z] a toujours eu une parfaite connaissance, du fait de ses responsabilités impliquant la supervision de la paie et les règlements des salaires, de la rémunération versée aux autres cadres de l’entreprise d’où il suit que les demandes sont irrecevables comme prescrites.

Surabondamment sur le caractère injustifié des demandes de rappels de salaires fondées sur une prétendue discrimination pour justifier ses demandes, il est soutenu que les trois salariés n’étaient pas dans situation identique qu’il s’agisse de leur niveau de responsabilités, de leur charge de travail, de leurs connaissances professionnelles ou de leur ancienneté.

MOTIFS

M. [Z], dont le contrat de travail a été rompu le 9 août 2018 a saisi la juridiction prud’homale, le 11 octobre 2018, pour voir constater que la société SEMIACS a violé le principe d’égalité de traitement des salariés et voir juger qu’en sa qualité de cadre supérieur, membre du comité de direction, il aurait dû bénéficier du coefficient 600 comme les autres membres du comité de direction, [H] [W] et [H] [V].

1-Sur la recevabilité de la demande au regard de la prescription

Selon l’article L 3245-1 du code du travail’: «’L’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.’»

En cas de rupture du contrat de travail, c’est toujours la date à laquelle le salarié a eu connaissance ou aurait dû avoir connaissance du manquement de son employeur qui fixe le point de départ du délai de trois ans dont il dispose pour engager son action. En revanche c’est la date de rupture de son contrat de travail qui détermine rétroactivement quelles sont créances salariales sur lesquelles cette action peut porter,’c’est-à-dire uniquement celles nées au cours des 3 années précédant la rupture.

En l’espèce, s’agissant d’une action fondée sur l’inégalité de traitement la demande en paiement d’une créance de salaire obéit, en application de l’article L.3245-1 du code du travail à un délai de prescription de 3 ans soc., 23 juin 2021, pourvoi n°18-24.810 (B) Soc.,30 juin 2021, pourvoi n°20- 12.960 (B).

En l’espèce, la SEMIACS ayant licencié le salarié par courrier du 9 août 2018, les demandes en paiement des salaires à compter du 9 août 2015 sont recevables. Le jugement sera confirmé par substitution des motifs en ses dispositions relatives à la prescription.

2- Sur l’inégalité de traitement et les demandes subséquentes en paiement d’un rappel de salaire

Il est demandé de reconnaître l’existence d’une inégalité de traitement, entre M. [Z] et deux autres salariés cadres, d’attribuer le coefficient 600 au poste de directeur comptable et financier et de fixer le salaire à la somme de 5 466 euros bruts mensuels.

Le principe de l’égalité de traitement implique en matière de rémunération pour un travail de même nature, de traiter de façon identique les travailleurs placés dans une même situation au regard de l’avantage en cause. L’employeur peut ainsi démontrer que les salariés ne sont pas placés dans une même situation.

En application du principe d’égalité de traitement, si des mesures peuvent être réservées à certains salariés, c’est à la condition que tous ceux placés dans une situation identique, au regard de l’avantage en cause aient la possibilité d’en bénéficier, à moins que la différence de traitement soit justifiée par des raisons objectives et pertinentes et que les règles déterminant les conditions d’éligibilité à la mesure soient préalablement définies et contrôlables

En l’espèce, il est démontré par la société SEMIACS, sans contradiction opérante de la part de M. [Z], qu’il existait des raisons objectives et pertinentes à la différence de traitement entre M. [Z] et Messieurs [V] et [W], en ce que :

– M. [H] [V] occupait des fonctions de directeur juridique et responsable des ressources humaines travaillait dans l’entreprise depuis le 14/08/1991, soit une ancienneté de 27 ans quand M. [Z] n’avait été embauché qu’en septembre 2000 et n’avait intégré le comité de direction qu’en octobre 2014, soit une ancienneté à ces responsabilités d’à peine trois ans et demi,

– M. [H] [W] était chargé d’étudier les différentes commandes sur un plan technique, de s’assurer de la faisabilité technique des projets en garantissant la modernité et de la compétitivité des process et moyens de production développés (par rapport à la concurrence), étudier les améliorations et les adaptations des différents parcs (19 parkings, outre le stationnement en voierie), superviser les équipes d’exploitation ; il avait été engagé dans l’entreprise en novembre 1996, soit une ancienneté à ses fonctions d’encadrement de près de 20 ans au moment de son départ de l’entreprise.

M. [Z] ne participait au Codir que depuis 2014, sa participation à des réunions du comité de direction avant cette date n’est que très ponctuelle.

En conséquence, la demande de M. [Z] en reconnaissance d’une inégalité de traitement, attribution du coefficient 600 et fixation de son salaire à la somme de 5 466 euros bruts mensuels à compter de 2015 est sans fondement

L’appelant sera débouté de ses demandes par confirmation du jugement.

3-Sur les frais du procès

En application des dispositions des articles 696 et 700 du code de procédure civile, M. [Z] la société SEMIACS sera condamnée aux dépens ainsi qu’au paiement d’une indemnité de 1.800 euros.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe, en matière prud’homale,

Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour,

Y ajoutant,

Condamne M. [Z] aux dépens de la procédure d’appel,

Condamne M. [Z] à payer à la société SEMIACS une somme de 1.800 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute M. [Z] de sa demande d’indemnité de procédure en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Dit n’y avoir lieu d’ordonner l’exécution provisoire de la présente décision.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x